Yves EVEILLARD, Renaud BEUCHER, Julien GAGNEBIEN, Anne-Claire HOUZE, Samuel LE GAOUYAT , Cédric LE GUEN, Pascal MONIOT, Michaël PASTOL, Michel PONCELET, Alain SAINT-JALMES , Jacques SALAÜN ENSEIGNER ET APPRENDRE DANS LA COMPLEXITE Coordonné par Michel BUTTIFANT IA.IPR d’EPS (Académie de Rennes) et Yves EVEILLARD faisant fonction d’ IA.IPR d’EPS (Académie de Rennes) 1 Sommaire Préambule : De l’intégration à l’inclusion. Yves Eveillard Introduction : Une école inclusive. Yves Eveillard Cadre conceptuel : La formation d’un être éclairé, physiquement et socialement éduqué. Yves Eveillard L’enseignement du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Yves Eveillard Lexique. Yves Eveillard Différentes illustrations du processus enseigner / apprendre Compétence propre : réaliser une performance motrice maximale mesurable à une échéance donnée APSA support : multibond Renaud Beucher, Julien Gagnebien Compétence propre : réaliser une performance motrice maximale mesurable à une échéance donnée APSA support : natation Michel Poncelet Compétence propre : réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique APSA support : acrosport Pascal Moniot, Alain Saint-Jalmes Compétence propre : réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique APSA support : danse Jacques Salaün Compétence propre : réaliser une prestation corporelle à visée artistique ou acrobatique APSA support : gymnastique sportive Michaël Pastol Compétence propre : conduire et maîtriser un affrontement individuel ou collectif APSA support : volley-ball Samuel Le Gaouyat, Yves Eveillard Compétence propre : conduire et maîtriser un affrontement individuel ou collectif APSA support : lutte Anne-Claire Houzé, Cédric Le Guen 2 3 PREAMBULE De l’intégration à l’inclusion [Les encadrés permettent de faire ressortir des points importants de votre texte ou d’ajouter des informations pour référence (par exemple, un planning). Ils sont généralement placés à gauche, à droite, en haut ou en bas de la page. Vous pouvez les faire glisser vers n’importe quel emplacement de votre choix. Lorsque vous êtes prêt à ajouter votre contenu, cliquez ici et commencez à taper.] L a vertu intégrative du système, la pensée égalitaire, la volonté de faire réussir tous les élèves…..qui se retrouvent dans les déclarations d’intention des différentes lois d’orientation ont toujours poussé les différents partenaires du système éducatif à placer l’élève au centre de leurs préoccupations. C’est cette idée qui semble animer en permanence les décideurs. « L’enfant au cœur du système éducatif, enfin ! » écrit Michel Ménard, député socialiste, dans Ouest France du 13 mars 2013 au sujet de la refondation de l’école. Malgré toutes ces bonnes intentions il semble bien que l’école soit en panne d’intégration. 1. L’école, malgré de nombreuses bonnes volontés, peine à amener tous les élèves au « même niveau ». L es mesures des résultats scolaires mettent en avant les difficultés vécues par un grand nombre d’élèves et soulignent une grande hétérogénéité de la répartition des performances des élèves sur l’ensemble du territoire national. Au-delà de l’illettrisme et de la sortie du système scolaire sans véritable qualification, les enquêtes européennes (enquêtes PISA, PIRLS) sont en effet édifiantes au sujet des difficultés éprouvées par les élèves français. Deux analyses de leurs résultats scolaires sont particulièrement significatives : Au niveau de leurs performances : - Les élèves français sont moins performants que les autres élèves en Europe. La France se situe au 16èmerang sur 20. - Le groupe faible est surreprésenté : 35% contre 25% au niveau européen - Le groupe fort est sous représenté : 17% contre 25% Au niveau de leurs compétences : les élèves français savent restituer des connaissances, trouver des informations directement accessibles, produire des écrits courts. Ils ne savent pas mobiliser ces ressources pour traiter des situations complexes. Même les résultats aux examens peuvent être trompeurs et il faut tempérer l’ardeur mise par certaines académies ou certains établissements à s’enorgueillir de leurs résultats. En effectuant une analyse qualitative des Xavier Roegiers résultats on repère qu’au-delà de la réussite ou de l’échec aux examens, 2010. L’école et l’école produit des faux forts qui apprennent par bachotage des contenus l’évaluation inertes accompagnés des contextes de leur restitution ainsi que des faux faibles qui ne se retrouvent pas dans le système d’apprentissage et d’évaluation auquel ils sont soumis . 4 La tentation est forte pour la société de chercher des coupables à ces dysfonctionnements. Les accusations se reportent tout naturellement sur l’enseignement qui est déclaré insuffisant au primaire, voire impossible en collège, et sur les élèves qui ne sont plus motivés et qui subissent trop d’influences extérieures. C’est pour ces raisons que renaissent certaines solutions. Qu’il s’agisse d’un retour en arrière pour faire apprendre des fondamentaux par des méthodes qui ont fait leurs preuves (exemple de la méthode syllabique) ou de l’instauration d’une rigueur salvatrice (la blouse pour tous, l’autorité du maître, la présence policière…), de la restauration des filières (suppression du collège unique) quand ce n’est pas du rappel des bienfaits de l’enfermement (internats). C’est cependant un fait, l’école, et plus particulièrement le collège, éprouve une grande difficulté à prendre en compte tous les élèves, ce qui permet à certains analystes d’invoquer l’incompétence des enseignants ou la nullité des élèves pour expliquer une baisse de niveau généralisée. 2. Le déficit d’intégration scolaire déborde du cadre de l’école A lors que l’école peine à faire apprendre la totalité des élèves, se développent des phénomènes d’absentéisme et de décrochage qui trouvent sans aucun doute leurs origines dans l’échec scolaire et qu’il faut relier au développement du communautarisme, de l’intégrisme religieux et de la délinquance. P.Blanchard Ne faudrait-il pas voir dans cette difficulté scolaire à faire apprendre l’exacerbation d’une difficulté sociétale à accepter la diversité, la N.Bancel, S.Lemaire différence. S’il est vrai que sous couvert d’égalitarisme la République 2005. La fracture a développé dans son système éducatif une incapacité à penser les coloniale différences au sein d’une population scolaire, elle éprouve la même difficulté à considérer le citoyen en A.Van Zanten tant qu’individu à part entière, à s’affranchir d’un passé colonial et 2001. L’école de la à envisager la diversité socio culturelle ou la diversité régionale. périphérie Au-delà de l’absence de prise en compte de ces différences culturelles, la conception même des programmes impose un temps B.Charlot d’apprentissage contraint, identique pour tous, phénomène renforcé par l’utilisation de manuels avec lesquels ils sont confondus. On peut même 1999. Le rapport au s’accorder à penser que le système d’évaluation qui accompagne savoir en milieu l’enseignement de ces programmes vise à sécuriser l’enseignant en cherchant populaire à retrouver « objectivement » ce qui a été dit ou fait à leur sujet. Il serait en effet beaucoup plus risqué pour le charisme du maître de tenter d’inférer des qualités à une réponse d’élève. Cette façon de procéder donne de fait une priorité absolue à l’acte d’enseignement sur l’acte d’apprentissage. La question est sans doute encore beaucoup plus complexe puisque l’on peut se demander si le système ne se nourrit pas de l’échec de certains pour justifier la valeur de son propre fonctionnement en se dédouanant de ses insuffisances sur ses propres utilisateurs. En effet, puisque certains réussissent, puisque tout est fait pour faire réussir tout le monde, la faute incombe forcément aux utilisateurs du système qui ne se donnent pas les moyens d’exploiter la chance qui leur est offerte de pouvoir réussir. La réflexion sur l’école tourne en rond, on s’évertue à vouloir donner plus à ceux qui peuvent le moins et les enseignants se tuent à la tâche dans la gestion de classes de moins en moins gérables puisque de plus en plus multiples. La prise en considération du rythme d’apprentissage n’étant pas combinée à la définition de ce qui s’apprend et concomitamment à la façon d’apprendre, rien ne changera jamais sinon un peu moins de fatigue pour les uns et un 5 allongement du temps de présence pour les autres, sans transformer la qualité et la nature du processus enseigner/apprendre. Dans le même ordre d’idée, la modification des rythmes scolaires s’attaque à juste titre à une nécessaire réorganisation du temps de la présence des élèves à l’école, mais ne touche pas à la réorganisation didactique de la journée de classe et évince de ce fait le questionnement sur le sens. De plus, et il faudra être vigilant à cet égard, elle peut médicaliser l’apprentissage (l’appel à la chronobiologie comporte ce risque) et placer l’attention de l’élève à l’acte d’enseignement comme principale source de l’apprentissage, ce qui conduirait à renvoyer ainsi ipso facto à une certaine conception de l’apprentissage peu adaptée aux enjeux de notre époque. Enfin, de façon générale, il semble évident que la succession des réformes ou des prescriptions qui accompagnent chaque nouvelle élection ou prise de fonction contribue à plonger le corps enseignant dans une posture attentiste qui encourage inexorablement la reproduction des pratiques. 3. Le système éducatif éprouve de grosses difficultés à faire face aux besoins d’une société qui évolue sans cesse J ean François Bouthors, écrivain, émet un avis à propos des examens qu’il est semble-t-il pertinent de relever : « Dans la vie professionnelle à laquelle les candidats se destinent, à plus ou moins longue échéance, leur aptitude à sélectionner des connaissances valides, à les stocker, à les organiser de manière à pouvoir les utiliser sera précieuse, tout comme celle de solliciter les compétences d’autrui. On peut donc se demander si la forme actuelle des examens correspond bien aux nécessités de la vie réelle. Nous sommes encore trop tributaires d’un modèle d’appréciation des aptitudes centré sur la capacité de mémorisation du savoir. » « …dans ces conditions ne nous étonnons pas de constater que notre pays est non seulement en retard en terme de créativité, mais très souvent méfiant et rétif à l’égard de ceux qui innovent.» Tout ce qui est dit ici n’est pas nouveau, Montaigne (1533-1592) distinguait déjà la tête bien faite de la tête bien pleine. « Savoir par cœur n’est pas savoir » disait-il, voulant faire « apprendre à penser » à l’enfant. Bien que dans la mouvance des réformes le vent souffle vers la tête bien faite, dans les faits les programmes sont encore majoritairement organisés en hiérarchie de savoirs à faire apprendre. Il en va de même des conceptions des parents et des élèves qui sont encore malgré tout construites à partir de hiérarchies et de quantités de savoirs. La lecture du témoignage de la maman de Mathieu* est édifiante pour comprendre la relation des acteurs de l’école à l’apprentissage. Nous y percevons tout ce qui fait actuellement obstacle à la réussite scolaire et non pas seulement à « surmonter la peur des maths » comme le titre l’article du journal : la conception cumulative des apprentissages, la confusion entre ressources et démarches, entre produit et processus, la conception de l’enseignant distributeur d’informations, la finalité applicative donnée à la connaissance, le caractère vérificateur de l’évaluation et l’importance de la maîtrise de la langue dans la réussite scolaire. *Témoignage de la maman d’un élève éprouvant des difficultés en mathématiques (Ouest France du 22/01/2011) « En 6ème les résultats de Mathieu ont flanché en maths et plus particulièrement en géométrie. Nous avons rencontré son professeur et essayé de faire le point pour comprendre ce qui se passait. Il avait accumulé pas mal de lacunes notamment en CE2. Nous nous 6 sommes rendu compte que des bases importantes de l’apprentissage lui faisaient défaut en maths comme les tables de multiplication….. Nous avons constaté qu’il comprend ce que le professeur lui explique, mais qu’il a des difficultés à l’appliquer lors des contrôles. Lorsqu’on lui demande de restituer une définition par exemple c’est souvent confus. Il a du mal à retranscrire ce qu’il a appris. Ces différents propos nous amènent à penser que le système éducatif se sclérose à partir de deux grandes difficultés : - D’une part, à l’impossibilité pour l’école d’atteindre les moteurs de l’action chez les élèves (les connaissances opératoires) s’ajoute manifestement son incapacité à développer et à repérer leur aptitude à mener des opérations mentales (voir tableau dans le lexique) sur et dans l’action et à s’investir dans une intelligence collective. Alors que dans le monde de la recherche la pensée créatrice est fondamentale et que la sauvegarde de l’environnement dépend fortement de la capacité de chacun à mener une activité réflexive sur le sens de la vie (Albert Schweitzer en parlait déjà en 1913), il se crée évidemment un décalage important entre les attentes et les nécessités sociales et la formation des élèves, décalage qui ne demande qu’à s’accroître avec ceux qui ne disposent pas d’une aide extérieure qui stimule leur créativité et leur activité réflexive. - D’autre part, l’école peine à s’emparer d’une activité didactique qui ne s’attache pas uniquement à produire des contenus d’apprentissage dans le seul domaine Coordonné par des savoirs disciplinaires mais qui en produit également dans le domaine de C.Volant la pensée réflexive sur/dans l’action et de l’engagement dans l’action. Dans les divers documents produits par le GAIPAR (groupe académique 2009. Construire des d’innovation pédagogique de l’académie de Rennes) ces trois composantes connaissances en EPS apparaissent sous l’appellation : Réalisation Pensée Investissement. Il y a donc de ce fait urgence pour les disciplines à confronter l’élève à des situations de production qui les sollicitent simultanément. - Nous ajouterons en aparté que la construction et la mobilisation de connaissances liées à l’Investissement dans des situations dont la complexité impose un traitement personnalisé devraient favoriser la structuration d’une personne socialement adaptée au système auquel elle appartient et ouverte à l’évolution de ce système (adaptativité). Elles donnent une solution concrète à l’enseignement d’une morale laïque. 4. Il existe pourtant une tentative méritoire pour enrayer l’échec : un socle commun à l’ensemble de la population scolaire D onner à l’école comme objectif obligatoire l’accès de tous les élèves à un socle commun de connaissances, de compétences et de culture constitue sans aucun doute une des solutions pour combler son déficit d’intégration. Encore faut-il, pour éviter les pièges dénoncés ci-dessus, que le socle: soit conçu comme une propédeutique à l’évolution du R.F.Gauthier futur adulte et non comme un viatique à utiliser pour survivre dans la vie. Tout ceci demande à l’enseignant de s’intéresser au M.Le Gouvello développement des potentialités d’action des élèves et non à l’amoncellement de mémorisations disparates ou de procédures 2009. L’instauration d’un socle spécifiques. commun de connaissances et de vise la formation d’un être ouvert aux changements compétences systémiques, à l’incertitude et à la diversité des contextes auxquels il se confronte. efface la hiérarchisation des disciplines au profit de leur E.Morin complémentarité, offre la possibilité de multiples mises en relation de connaissances 1999. Relier les connaissances 7 s’inscrive dans une réelle perspective curriculaire seule véritable solution à l’abandon du redoublement On perçoit bien que l’application du concept de socle commun à l’ensemble d’une population scolaire oblige à envisager les apprentissages sous un angle nouveau. Elle offre l’occasion de sortir de cette logique d’apprentissage par accumulation qui se réfère à un élève qui apprend pour conserver en mémoire le traitement qu’il fait des informations qui lui ont été délivrées. Cependant : Elle nécessite de s’inscrire dans un cadre théorique en adéquation avec un enseignement finalisé par la structuration d’une conduite scolaire adaptative, c'est- à-dire qui vise le développement d’un potentiel de traitement de situation transférable d’un contexte disciplinaire à l’autre. Elle donne au concept de situation une place prépondérante et oblige les disciplines à penser les contextes auxquels elles confrontent les élèves pour que ceux-ci puissent mobiliser des processus spécifiques dans des contextes à fort degré de similitude. Elle impose à l’enseignant un traitement des contenus disciplinaires qui l’oblige à expliciter les connaissances opératoires que l’élève doit construire pour produire des actions adaptées. Elle demande à l’enseignant de concevoir son enseignement à partir de la compétence attendue à l’issue du cycle d’apprentissage. Les savoirs disciplinaires deviennent alors des ressources pour le traitement de situations d’expression de cette compétence, à des niveaux de complexité plus ou moins importants. 5. Il est donc urgent de changer de point de vue sur l’apprentissage scolaire L e corps enseignant subit avec courage et souvent avec douleur les effets de l’hétérogénéité de la population scolaire. Tout en manifestant la volonté d’évoluer dans le sens de la tête bien faite, il exprime ainsi plusieurs contradictions qui lui paraissent le plus souvent insurmontables : avoir une influence sur l’apprentissage de tous les élèves alors que le nombre d’élèves par classe ne cesse de croître intéresser l’ensemble de la classe alors que les centres d’intérêts sont multiples faire progresser tout le monde alors que les compétences sont extrêmement différentes Pour tenter d’aplanir ces contradictions l’école s’est essayée à différents modèles d’intégration après s’être appuyée sur un modèle de N.Mons la séparation des élèves suite à un tronc commun court. Elle a ainsi Les nouvelles politiques envisagé l’intégration individualisée qui s’appuie sur l’aide éducatives individualisée, l’intégration à la carte qui regroupe les élèves par niveaux ou par choix, l’intégration uniforme pour tous avec son incessant recours aux redoublements. Les différents éléments diagnostiques que nous avons énumérés précédemment nous autorisent à mettre en cause une école qui persisterait à s’engluer dans une visée intégrative et à s’efforcer d’amener tous les élèves au même niveau de « savoir ». Pour parvenir à éviter les faiblesses de la démarche intégrative l’école doit changer sa façon de concevoir ce qui s’apprend en son sein ainsi que la manière dont les élèves apprennent. Ce changement ne se fera pas sur simple injonction. Il ne pourra s’initier que par une politique volontariste de formation visant le déplacement des préoccupations des enseignants dans deux directions : a) La focalisation sur l’élève qui apprend en situation 8 Pour provoquer des acquisitions durables et mobilisables par un être socialement éduqué pour agir dans le XXIème siècle, il convient d’inverser les priorités et de mettre le savoir scolaire au service du développement de l’adaptativité, de l’éducabilité et de la créativité. C’est l’obligation impérieuse faite au système pour aider chaque citoyen à affronter un avenir changeant et à être acteur de l’évolution de son groupe social d’appartenance. Montrer comment cela est possible, c’est l’objet de notre travail d’innovation pédagogique. S’il faut changer de point de vue, il faut changer le paradigme (annexe 1 : schéma du changement de paradigme) dans lequel s’inscrit la réflexion didactique et pédagogique. Edgar Morin nous incite à juste titre à aller dans cette voix et à substituer à un paradigme qui impose de connaître par disjonction et réduction un paradigme qui impose de connaître par distinction et conjonction. Ce qui signifie redéfinir ce qui s’apprend à l’école et en conséquence repenser la manière de provoquer les apprentissages. Il faut arrêter de faire tourner en rond les réformes en réutilisant sans arrêt les mêmes conceptions dans un cadre conceptuel qui ne leur correspond pas. Il en va ainsi du malheureux concept de compétence qui demeure inopérant parce que bien trop souvent employé dans une définition déjà utilisée dans un autre contexte d’enseignement (en Pédagogie Par Objectifs : « l’aptitude à réaliser une action dans des conditions observables, selon des exigences »). C’est pourtant un concept particulièrement heuristique, à condition de l’employer dans un sens qui suggère la conjonction efficiente et personnalisée de multiples paramètres. En réalité, la notion d’enseignement par compétences succède à deux courants pédagogiques : - La pédagogie par objectifs qui a permis de centrer l’apprentissage sur l’essentiel : l’activité de l’apprenant (processus / produit). Malheureusement, ses dérives ont conduit à un découpage des apprentissages. - La pédagogie de maîtrise qui a permis de mettre l’accent sur le fait que tout le monde peut tout apprendre pourvu qu’on lui en donne le temps. Une approche qui vise la construction de compétences devrait donc pouvoir réunir ces deux courants fondateurs et donner à l’enseignant des solutions pour éviter de tomber dans le piège de la disjonction et se centrer sur la personne et son engagement global dans le traitement de situations. (voir le tableau des types d’enseignement dans le lexique) Il est manifeste que le concept de compétence renvoie à la tête bien faite (utiliser à bon escient ses ressources pour traiter des situations), encore faut-il savoir éviter le mirage de la performance pour s’attacher à la recherche de l’efficience. Encore faut-il parvenir à s’appuyer sur des modèles qui singularisent la perception (la phénoménologie de Merleau-Ponty, les théories de l’énaction de Francisco.Varela, le cerveau émulateur d’Alain Berthoz, les théories écologiques), s’écarter d’un modèle focalisé sur les P.Jonnaert entrées (modèle de l’ordinateur qui traite des informations) et oublier la dualité corps esprit au profit d’une conception incarnée de la connaissance. 2002. Compétences et socio constructivisme Pour l’enseignant tout repose sur une transformation radicale du regard porté sur l’élève qui apprend et qui E.Morin agit. Il lui faut en effet parvenir à développer la capacité à inférer 2005. Introduction à la la présence de processus sous-jacents aux actions et à les pensée complexe identifier pour comprendre ce qui se joue à chaque seconde pour chaque élève. Il lui faut également pouvoir prendre en compte la singularité de ce qui se joue pour chaque élève dans un contexte commun à tout un groupe classe. Dans cette perspective, l’enseignant doit 9
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