Description:«Trouvez-vous que mes enfants et moi sommes faits pour planter des choux à Coppet sans rien faire de nos esprits ni de nos âmes ?». La colère de la célèbre baronne n’a d’égale que son désespoir face aux circonstances tragiques qui entourent la publication de De l’Allemagne. En septembre 1810, l’œuvre, jugée suspecte par la police de Napoléon, est supprimée et mise au pilon. Son auteure, déjà interdite de séjour à moins de quarante lieues de la capitale, est expulsée de France et bannie de tous les territoires sous domination française, hormis Coppet et Genève. L’illustre châtelaine devient du jour au lendemain une pestiférée qu’il est dangereux de fréquenter. Ses plus fidèles amis en feront l’amère expérience. Coppet, qui avait été pour elle un havre sous la Révolution, Coppet, dont elle avait fait le plus important think tank de la pensée européenne, est désormais une prison où elle se morfond, malgré la présence de ses enfants et celle de John Rocca, son nouvel et jeune amant. Abattue, mais non point vaincue, l’irréductible adversaire de Napoléon riposte en complotant sa fuite en Angleterre. En attendant les passeports, qui tardent à venir, elle entame Dix années d’exil. Ces mémoires, inachevées, ne seront publiées qu’en 1821, soit six ans après sa mort. Elles comprennent deux parties. La première, ébauchée à Coppet en 1811, couvre la période 1800-1804. L’auteure y dénonce le despotisme naissant de Bonaparte et les persécutions dont elle fut la victime. Dans la deuxième, rédigée à Stockholm vers la fin de 1812, Madame de Staël saute six années de sa vie pour relater «à chaud» son extraordinaire évasion de Coppet le 23 mai 1812. Accompagnée de sa fille Albertine et de deux serviteurs, l’intrépide femme de lettres est rejointe en route par ses fils Auguste et Albert, leur tuteur, Auguste Schlegel, ainsi que Rocca. Les ports de la Manche leur étant fermés, ils sont obligés d’effectuer un immense détour qui les force à traverser toute l’Europe en guerre et les entraîne, via l’Autriche, la Bohème, la Moravie et la Pologne, jusqu’à Kiev, Moscou et Saint-Pétersbourg. C’est ironiquement en Russie, où survit le servage, qu’elle recouvre la liberté. Là n’est pas le moindre paradoxe de ce pays qui la fascine par son immensité, sa piété, ses coutumes orientales et son fervent patriotisme. Son récit s’interrompt brusquement en septembre 1812, alors qu’elle et les siens s’apprêtent à rejoindre la Suède, d’où ils gagneront Londres en juin 1813.