Description:Ce volume contient deux textes essentiels d’Artaud qui sont l’aboutissement et la conclusion de tout ce qu’il a écrit à propos du spectacle.
Le Théâtre et son double, publié en 1938 dans la collection « Métamorphoses », est le manifeste qui a inspiré les expériences les plus modernes du théâtre contemporain. Autour de ce livre s’est constituée une légende qui est pleinement justifiée. Le style et la pensée d’Artaud y sont portés à leur plus haut point d’intensité pour un procès décisif : celui du théâtre occidental. Le théâtre doit rompre avec « la dictature exclusive de la parole », c’est-à-dire du texte, du dialogue et donc des descriptions psychologiques et morales qui en font la substance, pour devenir un « langage de signes » où geste, mouvement, bruit, musique, mise en scène concourent à une véritable opération magique. Artaud jette les bases de toute une « physique » du théâtre tel qu’il le conçoit.
On s’aperçoit finalement, en lisant Le Théâtre et son double, que ce débat mené par Artaud à propos du théâtre pendant des années recouvre un débat plus profond : celui de la culture, dans ses rapports avec la vie. Il ne sert qu’à dénoncer le malaise de la civilisation : « une rupture entre les choses et les paroles, les idées, les signes qui en sont la représentation ».
Les Cenci sont publiés ici pour la première fois. La pièce écrite et mise en scène par Artaud, qui y tenait le rôle principal, a été jouée en 1935. La sombre histoire du comte Cenci aux prises avec les démons qui le poussent irrésistiblement à l’inceste et au meurtre, était bien faite pour « ramener à la scène le vieil esprit des héros qui guerroient au-dedans d’eux-mêmes ». Par l’âpre beauté du dialogue, autant que par la construction dramatique, dense et serrée comme un théorème, par le souci de la mise en scène dont chaque indication apparaît ici aussi importante que le texte, Les Cenci sont l’illustration de ce « spectacle intégral » dont Le Théâtre et son double contient la définition.