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Université de Montréal Ni fable ni estoire. Les fictions mitoyennes et la troisième voie du fabliau PDF

443 Pages·2017·4.93 MB·French
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Université de Montréal Ni fable ni estoire. Les fictions mitoyennes et la troisième voie du fabliau par Isabelle Delage-Béland Département des littératures de langue française Faculté des arts et des sciences Thèse présentée à la Faculté des études supérieures et postdoctorales en vue de l’obtention du grade de Doctorat (Ph. D.) en Littératures de langue française Août 2017 © Isabelle Delage-Béland, 2017 RÉSUMÉ Les médiévistes soulignent régulièrement les problèmes typologiques dont souffre le fabliau (Adrian Tudor, 2003). Souvent impuissante à repenser la définition formulée par Joseph Bédier (« contes à rire en vers », 1893) et alléguant que les auteurs et les copistes médiévaux ne discernent pas les étiquettes génériques, la critique n’a que très rarement interrogé le sens du nom (fablel) que s’est donné ce genre pratiqué, pour l’essentiel, au cours du XIIIe siècle. Si ces œuvres narratives brèves qui privilégient généralement un cadre contemporain et qui ne modulent pas le merveilleux comme le font les romans arthuriens ont parfois été lues comme des documents « historiques », le lien étymologique que la désignation fablel entretient avec le terme latin fabula (qui s’oppose à historia comme le discours mensonger à la parole de vérité) met plutôt le lecteur sur la piste de la fiction. Un examen qui tient compte du vocabulaire générique, des commentaires métatextuels et des recueils manuscrits ayant préservé les récits fait apparaître que les fabliaux revendiquent leur appartenance au domaine de la fabula en s’appliquant toutefois à se distinguer des autres formes de fiction. Leur singularité tient principalement à la troisième voie dans laquelle ils se situent : en marge des vérités absolues comme de la pure affabulation, ils offrent une réflexion sur la valeur de vérité des textes de fiction. La question de la fiction infiltre à la fois les arts poétiques médiolatins et les œuvres en langue vernaculaire, lesquelles cherchent à se singulariser par rapport à la langue latine. Le survol de manifestations des genres romanesque, hagiographique, épique et historiographique met au jour une volonté constante d’assurer la légitimité de la fiction (chapitre I). Les analyses lexicologique et sémantique font valoir la spécificité du fabliau, l’emploi de fablel témoignant d’un effort de réinvestissement sémantique de fable, vocable associé au mensonge dans la langue littéraire (chapitre II). L’usage de l’octosyllabe à rimes plates, connu comme le médium de l’écriture de fiction depuis le XIIe siècle, traduit un sentiment d’usure à l’égard des fictions déjà pratiquées, ainsi appelées à se renouveler (chapitre III). Ce désir de trouver à la fiction de nouvelles voies se précise dès lors que l’on s’intéresse à la teneur des enseignements prodigués par les fabliaux qui, multipliant les décalages, dépeignent un monde aux valeurs mouvantes et repoussent tant les traditions courtoise et arthurienne que les vérités absolues que transmet la Bible (chapitre IV), des conclusions que conforte et enrichit l’étude des recueils (chapitre V). Il s’agit enfin de circonscrire la nature de la fiction ambiguë privilégiée dans les fabliaux. L’analyse fait ressortir une prédilection pour la semblance qui, liée à la vérité, trace les contours d’une définition médiévale de la vraisemblance rappelant la catégorie de l’argumentum, laquelle renvoie à un entre-deux dans les arts poétiques latins et qui, à la différence de celles de la fabula (fable) et de l’historia (estoire), n’a pas légué d’équivalent à la langue vernaculaire (chapitre VI). Mots-clés : argumentum, fabliau, fabula, fiction, historia, poétique immanente, réalisme, recueil, vérité, vraisemblance ! iii ABSTRACT Medievalists frequently emphasize the typological challenges that afflict the fabliau (Adrian Tudor, 2003). Often ineffectual in rethinking the definition proffered by Joseph Bédier (“tales written in verse to laugh at”, 1893), they contend that medieval authors and scribes do not distinguish generic labels. Criticism has only rarely queried the meaning of the word fable (fablel) that has been given to this accepted genre employed throughout the 13th century. If these brief narratives were sometimes read as “historic” documents as they generally favor a contemporary frame and do not convey the marvelous as do the Arthurian romances, the etymological link that the designation fablel maintains with the Latin term fabula (that contests historia as false speech to the word of truth) points the reader on the path to fiction. A perusal that takes into account the generic vocabulary, the metatextual commentaries and the manuscript collections that have preserved the narratives, reveals that the fabliaux claim to belong to the domain of the fabula while distinguishing themselves from other forms of fiction. Their singularity stems principally from the “third way” in which they are situated. On the fringe of absolute truth as well as pure fabrication, they offer a reflection on the truth-value of fictional texts. The question of fiction permeates both the Latin medieval poetic arts as well as works in the vernacular that seek to be singularized in relation to the Latin language. The overview of instances of romance, as well as of epic and hagiographical genres reveals a continual desire to guarantee the legitimacy of fiction (chapter I). Examination of the lexicological and semantic highlights the specificity of the fabliau. More precisely, the use of fable testifies to an effort of semantic reinvestment of fable, a term associated with dishonesty in literature (chapter II). The use of octosyllabic couplets, accepted as the medium of literary fiction since the 12th century, lends a sentiment of usury regarding already practiced fictions that are also called to be renewed (chapter III). This desire to find new avenues in fiction becomes more apparent when one is drawn into the pedagogical content of the fabliaux that depicts a world of changing values and rejects both the courtly and Arthurian traditions and the absolute truths transmitted by the Bible (chapter IV), the conclusions that reinforce and enrich the examination of the manuscript collections (chapter V). In the end it is a question of identifying the nature of the ambivalent fiction (the “third way”) in the fabliaux. The analysis underscores a penchant for the semblance which, linked with the truth, traces the contours of a medieval definition of the vraisemblance recalling the category of the argumentum that refers to an in between in the Latin poetic arts and that, unlike those of the fabula (fable) and the historia (estoire), has not bequeathed an equivalent to the vernacular (chapter VI). Key words : argumentum, fabliau, fabula, fiction, historia, immanent poetics, realism, manuscript collection, truth, vraisemblance ! iv TABLE DES MATIÈRES RÉSUMÉ iii ABSTRACT iv TABLE DES MATIÈRES v REMERCIEMENTS vii INTRODUCTION – LES FICTIONS TRIOMPHANTES 1 Remonter le fil des fictions. De l’autofiction au fablel 3 Le fabliau, un genre en voie de réhabilitation 6 Les enseignements du fabliau, du texte au recueil 23 CHAPITRE I – LA TENTATION DE LA FABULA. LA QUESTION DE LA FICTION AU MOYEN ÂGE 33 De la théorie latine à la pratique vernaculaire 39 Poétique des genres et infiltrations de la fiction 55 Questions de réception : la fiction dans les livres 84 CHAPITRE II – « DES FABLES FAIT ON LES FABLIAUS ». ANALYSES LEXICOLOGIQUE ET SÉMANTIQUE : DE LA FABULA AU FABLIAU 103 Relativiser la mouvance : analyse quantitative et stabilité lexicologique 109 Revendiquer la fiction 132 Produire et recevoir un fabliau 148 CHAPITRE III – LE VERS SUR LA LANGUE. FORMES DE LA FICTION ET POSSIBILITÉS NARRATIVES DANS LES FABLIAUX (MÉTRIQUE, BRIÈVETÉ ET TEMPORALITÉ) 163 Rimer dans la « langue commune » 169 Rimer et fabloier : le vers au service d’une autre fiction 187 Le couplet d’octosyllabes au temps du fabliau 197 CHAPITRE IV – LA VÉRITÉ EST AILLEURS. FABLIAU, MORALE ET FICTION DE VÉRITÉ 223 « Par cest fablel… » : mouvance, matérialité et morale « accidentelle » 230 L’habit ne fait pas le moine : la valeur du décalage et du déplacement 242 Une quête de vérité problématique 251 ! v CHAPITRE V – DU BON USAGE DES FABLIAUX. L’ESPACE DU RECUEIL ET LES INTERPRÉTATIONS DE LA FICTION 279 La lecture en contexte et par contraste 287 Les fabliaux à travers le prisme de la moralité 297 Usures et reconfigurations de la fiction 303 CHAPITRE VI – L’APPARENCE DE VÉRITÉ. ENJEUX DE LA VRAISEMBLANCE DANS LES FABLIAUX 321 Un « réalisme » sous tension 332 Le semblant, de la figure à la fiction 346 Fabrication de la vraisemblance 358 CONCLUSION 373 INDEX DES AUTEURS 393 INDEX DES ŒUVRES 395 BIBLIOGRAPHIE 401 ANNEXES ix ! vi REMERCIEMENTS Ma gratitude va d’abord au Professeur Francis Gingras, un homme d’une rare érudition et d’une rigueur exemplaire qui n’a cessé, au fil des ans, de m’inspirer et de nourrir mes réflexions. En m’offrant le privilège de le côtoyer, cette aventure doctorale m’a surtout appris que le travail intellectuel, aussi exigeant soit-il, n’est pas incompatible avec l’humanité. Le soutien fidèle et l’enthousiasme sans égal de ce grand esprit me permettent de conserver un souvenir agréable des mois de rédaction, pourtant réputés pour leur aridité. Le monde universitaire m’a particulièrement choyée en mettant sur ma route la Professeure Isabelle Arseneau, sans qui je n’aurais jamais entendu l’appel de la médiévistique. Il ne fait aucun doute que la loyauté, la confiance et l’amitié qu’elle me témoigne depuis notre rencontre ont facilité la réalisation de cette thèse de doctorat. Je souhaite remercier les membres de mon jury, Madame la Professeure Mireille Séguy et Messieurs les Professeurs Jacques Cardinal, Ugo Dionne et Gabriele Giannini, d’avoir lu mon travail avec sensibilité et de l’avoir commenté avec générosité. Ma reconnaissance va aussi au groupe formé autour du projet de recherche Lire en contexte à l’époque prémoderne. Enquête sur les manuscrits de fabliaux dont les fruits ont grandement enrichi cette thèse. Que soient remerciés les Professeurs (Olivier Collet, Gabriele Giannini, Francis Gingras et Richard Trachsler) et les collègues doctorants (Beatrice Barbieri, Ariane Bottex- Ferragne, Serena Lunardi, Gaëlle Morend-Jacquet, Olaf Posmyk et Julien Stout) qui, depuis Genève, Zurich, Göttingen et Montréal, ont veillé à ce que cette enquête trouve un dénouement digne de l’objet auquel elle s’intéressait. Je salue les étudiants à qui j’ai eu la chance d’enseigner et qui ont rompu de belle façon la solitude des longues heures d’écriture. Le soutien du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada ainsi que l’appui du Département des littératures de langue française et du Centre d’études médiévales de l’Université de Montréal m’ont procuré une précieuse tranquillité d’esprit. Enfin, la présence rassurante de mes proches a donné tout son sens à ce projet. Je remercie mes parents, Guylaine et Laurent, à qui je dédie cette thèse, mon frère Guillaume et ma belle-sœur Élie d’avoir montré une patience sans limite et de m’avoir encouragée à faire taire mes doutes pour me permettre de mieux avancer. Ma reconnaissance va aussi à Nicole, Maxime, Sébastien et Julie qui complètent un noyau familial m’apportant un soutien indéfectible. Ma gratitude va également aux magnifiques amis qui ont adouci les dernières années. J’ai pu compter sur la sagesse de Bridget, l’affection et la fougue de Gabriel, tout jeune médiéviste qui m’a donné le second souffle dont j’avais besoin, les encouragements de Gabrielle, les rires contagieux et la présence quotidienne (et d’autant plus inestimable) de Michaël, la fidélité inébranlable de Myriam et l’écoute de Rosalie, qui me fait connaître la quiétude d’une longue amitié qui résiste au passage du temps. Je tiens plus particulièrement à remercier Christian, lecteur avisé et interlocuteur essentiel, pour la minutie inégalée et l’humour renversant, et Valérie, en qui ! vii j’ai trouvé une merveilleuse alliée douée de qualités surpassant toutes celles que j’aurais pu espérer. ! viii I NTRODUCTION L ES FICTIONS TRIOMPHANTES

Description:
ses marchandises et de son argent, cent livres en échange d'une nuit 193) et la Vescie au Prestre (« Jakes de Baisiu, sans dotance, / L'a de.
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