ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES D’OUTRE-MER Classe des Sciences Morales et Politiques Mémoires in-8°, Nouvelle Série, Tome 50, fasc. 3, Bruxelles, 1988 Un territorial au pays des sectes politico-religieuses du Bas-Congo pendant les années 1939-1945 PAR J .-M . D o m o nt KONINKLIJKE ACADEMIE VOOR OVERZEESE WETENSCHAPPEN Klasse voor Morele en Politieke Wetenschappen Verhandelingen in-8°, Nieuwe Reeks, Boek 50, afl. 3, Brussel, 1988 ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES D’OUTRE-MER Classe des Sciences Morales et Politiques Mémoires in-8°, Nouvelle Série, Tome 50, fasc. 3, Bruxelles, 1988 Un territorial au pays des sectes politico-religieuses du Bas-Congo pendant les années 1939-1945 PAR J .-M . D o m o n t KONINKLIJKE ACADEMIE VOOR OVERZEESE WETENSCHAPPEN Klasse voor Morele en Politieke Wetenschappen Verhandelingen in-8°, Nieuwe Reeks, Boek 50, afl. 3, Brussel, 1988 Mémoire présenté par M. J. V anderlinden à la séance de la Classe des Sciences Morales et Politiques tenue le 19 mai 1987 Rapporteurs : MM. M. Luw el et J.-L. V ellut Publication décidée par la Classe des Sciences Morales et Politiques en sa séance du 16 juin 1987 Académie Royale Koninklijke Academie des voor Sciences d’Outre-Mer Overzeese Wetenschappen Rue Defacqz 1 boîte 3 Defacqzstraat 1 bus 3 B-1050 Bruxelles B-1050 Brussel Tél. (02) 538.02.11 Tel. (02) 538.02.11 D/1988/0149/11 TABLE DES MATIÈRES En guise de préface, par J. Vanderlinden ................................................. Introduction. — De la Territoriale ............................................................ 11 Extraits les plus significatifs de mes journaux de route (1939-1945) .. 15 Appendice. — Les sectes politico-religieuses ......................................... 109 A la douce mémoire de mon épouse CONGO Nous qui t’avons connu pendant des décennies, Nous qui t’avons aimé d’un amour de raison, Nous souffrons en silence au soir des trahisons, En te voyant meurtri par tant de vilenies. J.M. Domont EN GUISE DE PRÉFACE Lorsqu’en mars 1930, Jean-Marie Domont débarque à Borna, il est géomètre hors cadre du Service des Terres. Rien ne lui permet de croire qu’il s’établit alors, pour les quelque trente ans d’une carrière coloniale normale, en pays kongo, si nous voulons bien admettre que celui-ci s’étend jusqu’aux portes de Léopoldville. Mais, si sa carrière s’accomplit sur le même terrain, elle bifurque néanmoins dès son deuxième terme, puisqu’il est transféré des Terres à la Territoriale et est assigné au chef-lieu du district des Cataractes dont il assume d’abord la comptabilité, puis le secrétariat à partir de son troisième terme. Dans l’intervalle, il a présenté des examens à la section supérieure de VEcole coloniale d’Anvers; il en est sorti premier avec près de 80 % des points. C’est donc dans une carrière administrative qu’il est lancé à la veille de la deuxième guerre mondiale et rien n’indique qu’il doive jamais quitter les bureaux. En juin 1939 cependant, il aborde le terrain de la zone nord du district des Cataractes, l’un des lieux d’implantation de la religion kimbanguiste; il va y passer six ans jusqu’à la fin 1945. C’est à ce moment qu’il tient les carnets de route qui sont à l’origine du texte principal figurant dans le mémoire. Mais Jean-Marie Domont, comme beaucoup d’autres de ses collègues de la Territoriale, a le souci de dépasser le quotidien. Confronté à ce qu’il appelle dans la terminologie péjorative de l’époque des « sectes » (au sens propre de « groupe organisé de personnes qui ont une même doctrine au sein d’une religion »), il entreprend de systématiser ses connaissances à leur sujet, comme d’outres le feront dans le domaine du droit, de l’agriculture, de l’histoire, de la linguistique, etc. Et du coup, ses carnets ne peuvent plus se comprendre que par référence à ses notes plus systématiques. De plus, celles-ci offrent des phénomènes dont elles font l’objet une certaine vision qui est celle de l’administration européenne. Celle-ci s’inscrit à son tour dans une politique dont chacun sait qu’elle n’était guère favorable aux mouvements messianiques, sous la pression notamment des missions catholiques qui y voyaient de redoutables concur rents dans leur entreprise d’évangélisation. 8 J.-M. DOMONT Mais ce que nous fournit Jean-Marie Domont, administrateur modèle aussi bien que modèle d'administrateur, c’est la vision non pas de ceux qui à Léopoldville font la politique religieuse de la Colonie, mais bien celle du petit, de l’obscur, du sans grade qui avait souvent, comme le grognard de VAiglon, le droit d’être fatigué. Car dans la mise en œuvre des principes arrêtés au sommet de la Colonie, l’administrateur Domont est infatigable; les carnets le prouvent. Près de cinquante ans plus tard, alors que l’Eglise a réalisé sans hésitation un virage à 180 degrés qui l’a conduit à respecter, au même titre que d’autres « hérésies » d’autrefois, le kimban guisme ou le mpadisme, la fierté de Jean-Marie Domont demeure la demande des habitants de l’un des villages « réfractaires » de voir s’établir chez eux une école de l’Etat. Mais avant cela, les autorités de la Colonie lui ont montré à quel point il est pour elles un auxiliaire précieux, un agent d’élite. Au lendemain des graves incidents de février 1945, alors qu’il boucle ses malles pour rejoindre Léopoldville, Jean-Marie Domont est chargé de l’administration du territoire de Matadi; chacun est d’avis à la Province et au Gouvernement général que lui seul est susceptible de rétablir un relatif climat de confiance après que le sang eut coulé dans le grand port de la Colonie. Il réalisera cette mission délicate en quinze mois. Il est vrai qu’il avait eu l’occasion de déjà montrer ses aptitudes face aux tensions générées par la situation coloniale un an plus tôt lorsqu’il avait accompagné le comte de Beauffort, inspecteur d’Etat, chargé d’une mission au Kasai après les mutineries de Luluabourg. Ainsi peut-on voir que Jean-Marie Domont a été, de 1939 à 1946, mêlé à quelques-uns des principaux remous qui ont marqué les années 1940 au Congo belge. De chacune des missions qui lui ont été confiées, il s’en est tiré avec honneur et dignité aux yeux de ses supérieurs. C’est dire à suffisance qu’aussi bien ses « carnets » que sa vision des « sectes » peuvent être considérés comme représentatifs de l’état d’esprit qui caractérisait la Territoriale. S’y ajoute, mais de manière plus circons tancielle, le fait que les carnets couvrent une période où l’action adminis trative devait se combiner avec les impératifs de l’effort de guerre. Celui-ci, tout en exigeant davantage des Africains, demandait une activité accrue aux administrateurs; simultanément, les effectifs étaient réduits. Pareille conjonction de facteurs complémentaires ne pouvait également qu’être source de tensions dans une région comme celle du Bas-Congo. C’est donc là un intérêt supplémentaire des « carnets », même si ceux-ci ont été « retravaillés » par l’auteur de manière uniquement à en éliminer tout ce qui lui semblait, à tort ou à raison, trop « trivial ». Ayant eu l’occasion de voir les originaux, je puis attester de la fidélité du texte présenté ici. UN TERRITORIAL AU PAYS DES SECTES 9 Telles sont les raisons qui m’ont encouragé à présenter à la Classe ce Mémoire. Il doit nous permettre de mieux comprendre ce que fut, dans l’esprit de ceux qui en transformèrent les grands principes abstraits en réalités quotidiennes, la colonisation belge. Et aussi, peut-être, de mieux porter sur eux le jugement sans complaisance, mais aussi sans hostilité préconçue, qu’appelle l’histoire. Bruxelles, le 14 mars 1988 J. VANDERLINDEN
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