Homotopy theories of unital algebras and operads Brice Le Grignou To cite this version: Brice Le Grignou. Homotopy theories of unital algebras and operads. General Mathematics [math.GM]. COMUE Université Côte d’Azur (2015 - 2019), 2016. English. NNT: 2016AZUR4058. tel-01375927v2 HAL Id: tel-01375927 https://hal.science/tel-01375927v2 Submitted on 18 Jan 2017 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. Université de Nice Sophia Antipolis École Doctorale de Sciences Fondamentales et Appliquées T H È S E pour obtenir le titre de Docteur en Sciences de l’Université de Nice Sophia Antipolis Discipline : Mathématiques présentée et soutenue par Brice Le Grignou Théories homotopiques des algèbres unitaires et des opérades Thèse dirigée par Bruno Vallette soutenue le 14 septembre 2016 devant le jury composé de Clemens Berger Examinateur Université de Nice Sophia Antipolis Damien Calaque Rapporteur Université de Montpellier Grégory Ginot Examinateur Université Pierre et Marie Curie KathrynHessBellwald Rapporteur EcolePolytechniqueFédéraledeLausanne Ieke Moerdijk Examinateur Université d’Utrecht Bruno Vallette Directeur de thèse Université Paris 13 1 2 Table des matières 1 Introduction 5 1.1 Des espaces aux complexes de chaînes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 1.2 Un peu d’algèbre homotopique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 1.3 Théorie homotopique des algèbres sur une opérade . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 1.4 Résumé de la thèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21 2 Homotopy theory of unital algebras 27 2.1 Preliminaries . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29 2.2 Operads, cooperads, algebras and coalgebras . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 2.3 Enrichment . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 2.4 Bar-cobar adjunctions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45 2.5 Homotopy theory of algebras over an operad . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 48 2.6 Model structures on coalgebras over a cooperad . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 2.7 The universal model structure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56 2.8 Examples . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62 3 Algebraic operads up to homotopy 68 3.1 Complement on operads and cooperads . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69 3.2 Model structure on operads . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 73 3.3 Model structure on curved conilpotent cooperads . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 3.4 Curved conilpotent cooperads as models for homotopy operads . . . . . . . . . . . 81 4 From homotopy operads to infinity-operads 89 4.1 Recollections on colored operads and dendroidal sets . . . . . . . . . . . . . . . . . 92 4.2 Strict unital homotopy colored operads. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 4.3 The dendroidal nerve of strict unital homotopy colored operads . . . . . . . . . . . 112 4.4 The big nerve of dg categories and dg colored operads . . . . . . . . . . . . . . . . 120 Appendices 126 Appendix A . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126 Appendix B . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Appendix C . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130 3 Remerciements Je tiens tout d’abord à remercier mon directeur de thèse, Bruno Vallette qui m’a introduit au monde très riche des opérades avec une énergie communicative. Merci de m’avoir soutenu, formé, de m’avoir orienté dans des directions fructueuses et d’avoir relu maintes fois tous mes écrits ma- thématiques. Je souhaiterais également adresser mes remerciements aux membres de mon jury de thèse : merci à Clemens Berger d’avoir accepté de répondre à mes nombreuses questions sur les opérades et les catégories; merci à Damien Calaque et Kathryn Hess d’avoir accepté de rapporter cette thèsecetété,périodepeupropiceàcegenred’exercice;merciàGrégoryGinotdem’avoirprésenté Bruno et orienté vers le monde de la topologie algébrique; merci enfin à Ieke Moerdijk qui n’a pas hésité à me présenter ses idées sur les ensembles dendroidaux et grâce à qui je vais continuer les Mathématiques à Utrecht. Mesanciensprofesseurssontpourbeaucoupdanslavoiemathématiquequej’aisuivie.Jepense notammentàM.Bozecenterminale,àSaabAbou-JaoudéenprépaetàGabrieleVezzosibeaucoup plus récemment en master. De nombreux mathématiciens m’ont également beaucoup apporté : je pense particulièrement à Joan Millés et au duo formé par Damien Lejay et Mathieu Anel. Merci à tous mes amis parisiens pour tous les bons moments passés lors de mes retours dans la capitale : Corentin, François, Jean-Sébastien, Romain, Vincent et Vu Lan. Ces trois années à Nice ont été riches en rencontres. J’ai été accueilli très chaleureusement dans le bureau 801 par Camilo et Jean-Baptiste en même temps qu’Olivier puis rejoint par Björn. Merci à eux pour toutes ces longues discussions. Les autres chercheurs, doctorants ou chercheurs plus avancés ont instauré une excellente ambiance au sein du Laboratoire Dieudonné : merci à Amine, Arthur, Bienvenu, Carole, Charles, Christophe, Claire, Eduard, Eléonore, David, David, Guillaume,Julie,Julien,Kateryna,Luis,Marcella,Mélisande,Nathalie,Reine,Rinel,Sorin.Merci également aux secrétaires : Manuelle, Isabelle, Angélique et Christine ont toujours parfaitement administré mes ordres de mission qui étaient parfois demandé un peu tardivement. Merci enfin à toute ma famille et à Xiaojiao pour leur soutien constant. 4 Chapitre 1 Introduction 1.1 Des espaces aux complexes de chaînes 1.1.1 Une courte introduction à la topologie algébrique Parmilesnombreusesdisciplinesmathématiques,latopologieestl’étudedelaformedesespaces, de l’agencement des points des espaces : la forme d’une sphère, celle d’un bouquet de cercles, celle d’un tore, celle de la bouteille de Klein, ... Ainsi, la topologie ne se préoccupe pas des exemples d’espacestopologiquesexotiquescommelesensemblesdeCantor,nideladifférenceentreconnexité et connexité par arcs, ni encore des subtilités des espaces vectoriels topologiques si chères aux analystes.Ellen’estpasàproprementparlerl’étudedesespacestopologiquesmaisplutôtl’étudedes formes. Le topologue restreint souvent son étude à une classe particulière d’espaces topologiques, les CW complexes, qui sont fabriqués en recollant successivement des boules Dn de dimension n∈N : (cid:110) (cid:88) (cid:111) Dn := x=(x ,··· ,x )∈Rn| x2 ≤1 , 0 n−1 i le long de leur frontière, la sphère Sn−1 de dimension n−1 : (cid:110) (cid:88) (cid:111) Sn−1 := x=(x ,··· ,x )∈Rn| x2 =1 . 0 n−1 i Plus précisément, un espace topologique X est un CW complexe s’il existe une filtration de sous espaces X ⊂X ⊂···⊂X de X, vérifiant les propriétés suivantes : 0 1 (cid:46) l’espace X est un ensemble de points, c’est à dire un espace topologique discret. 0 (cid:46) l’espace X est obtenu à partir de X par recollement de cellules de dimension n+1. n+1 n Autrement dit il existe un ensemble A de n-sphères Sn de X tel que le carré suivant est n n un poussé-en-avant : (cid:96) Sn (cid:47)(cid:47)X a∈An n (cid:15)(cid:15) (cid:15)(cid:15) (cid:96) Dn+1 (cid:47)(cid:47)X . a∈An n+1 (cid:46) l’espace X est l’union de tous les X : n X =colim (X (cid:44)→X (cid:44)→X (cid:44)→···) . 0 1 2 La topologie algébrique est l’étude de la forme des espaces par des moyens algébriques. Cela consiste à associer des espaces vectoriels, des groupes, ou d’autres objets algébriques à tout espace topologique X afin d’en étudier la forme. Le passage du monde souple et malléable des espaces au monde rigide de l’algèbre se traduit par une identification dans le monde de l’algèbre de deux structurestopologiquesreliésparunedéformationcontinue,c’est-à-diredeuxstructureshomotopes. Définition (Homotopie entre fonctions). Soit f :X →Y et g :X →Y deux fonctions continues entreespacestopologiques.Onditquef etgsonthomotopess’ilexisteunefonctionH :X×[0,1]→ 5 Y telle que H(−,0) = f et H(−,1) = g. Une équivalence forte d’homotopie est un morphisme f :X →Y qui possède un inverse homotopique, c’est-à-dire qu’il existe un morphisme g :Y →X tel que fg est homotope à l’identité de Y et gf est homotope à l’identité de X. Tous nos invariants algébriques vont donc envoyer une équivalence forte d’homotopie sur un isomorphisme de structures algébriques. A ce titre, le théorème de Whitehead nous montre que les groupesd’homotopiesontlesinvariantsalgébriquesdesCWcomplexeslesplusfinsquel’onpuisse obtenir. Définition(Groupesd’homotopie,équivalencefaibled’homotopie). SoitX unespacetopologique. On note π (X) l’ensemble des composantes connexes par arcs de X, c’est-à-dire le quotient de 0 l’ensemble des fonctions du point vers X par la relation d’homotopie. Soit x un point de X. Pour tout entier n ≥ 1, on définit le nième groupe d’homotopie de X relativement à x, noté π (X,x),commelequotientparlarelationd’homotopiedel’ensembledesapplicationsdelasphère n Sn ⊂Rn+1 de dimension n vers X qui envoient le point (1,0,...,0) vers x. Une application entre espaces topologiques f :X →Y qui induit des isomorphismes entre les groupes d’homotopie de X et ceux de Y est appelée une équivalence faible d’homotopie. Théorème(Whitehead). UnefonctionentreCWcomplexesestuneéquivalencefaibled’homotopie si et seulement elle est une équivalence forte d’homotopie. La catégorie des CW complexes est une sous-catégorie pleine des espaces topologiques. Cepen- dant,lorsquel’onmanipulelesCWcomplexes,ilpeutarriverquel’onsortedecettesous-catégorie: parexemple,certainescolimitesdeCWcomplexesnesontpasdesCWcomplexes.Deplus,l’espace topologique des fonctions entre deux CW complexes est rarement un CW complexe. Le théorème suivant,dit«théoremed’approximationCW»,nousmontrequel’onpeutalorstoujoursseramener à un CW complexe. Théorème. PourtoutespacetopologiqueX,ilexisteunCWcomplexeX(cid:48) etuneéquivalencefaible d’homotopie de X(cid:48) vers X. La topologie algébrique étudie les CW complexes à équivalences faibles d’homotopie près. Ce- pendant, ces groupes d’homotopie sont très difficiles à calculer; ainsi, ceux des sphères sont loin d’êtreconnus.Ilconvientdoncdesepenchersurdesinvariantsmoinspuissantsmaisplusfacilement manipulables et calculables. Dans la suite, nous allons décrire de tels invariants : les groupes d’ho- mologie. Avant cela, nous allons d’abord faire un détour par un modèle combinatoire des espaces : les ensembles simpliciaux. 1.1.2 Les ensembles simpliciaux Les ensembles simpliciaux sont des modèles combinatoires des espaces. Un ensemble simplicial estladonnéed’unesuited’ensemblesX ,X ,X ,...etd’applicationsentrecesensemblesquenous 0 1 2 allonsdécrire.Oninterprètel’ensembleX commeunensembledepoints,X commeuneensemble 0 1 de segments, X comme un ensemble de triangles, X comme un ensemble de tétraèdres, etc. Un 2 3 segment possède deux extrémités; nous avons ainsi deux applications de X vers X . De même, 1 0 un triangle a trois faces, ce qui nous donne trois applications de X vers X . Par ailleurs, un point 2 1 peut être considéré comme un segment contracté; cela se traduit par une application de X vers 0 X . Nous avons de la même façon de nombreuses applications entre X et X qui obéissent à la 1 n n+1 même heuristique pour des entiers n plus grands. Voici la définition précise. Définition. La catégorie ∆ est la catégorie dont les objets sont les entiers n ∈ N et dont les morphismeshom (n,m)sontlesfonctionscroissantesde{0,...,n}vers{0,...,m}.Lesensembles ∆ simpliciaux sont les foncteurs contravariants de la catégorie ∆ vers la catégorie des ensembles. Plus simplement, un ensemble simplicial X est une suite d’ensembles (Xn)n∈N munis d’appli- cations «faces» (d : X → X )n et d’applications «dégénérescences» (s : X → X )n i n n−1 i=0 i n n+1 i=0 6 vérifiant les relations suivantes ddiisdjj ==sdjj−−11ddiissiiii<<jj,, d s =Id si i=j ou si i=j+1 , i j dsissj ==ssjdi−s1ssiiii≥>jj.+1 , i j j+1 i Nous avons introduit les ensembles simpliciaux comme des structures combinatoires d’espaces qui seraient façonnés à partir de points, de triangles, de tétraèdres, etc. Quels sont donc les ensembles simpliciaux qui représentent ces briques élémentaires (les «tétraèdres» de dimension n)? Ce sont les ensembles simpliciaux représentables suivants : ∆[n]:=hom (−,n) . ∆ Tout ensemble simplicial est la colimite d’un diagramme ne contenant que les ensembles simpli- ciaux du type ∆[n]. On peut parler d’une manière plus générale d’objet simplicial dans une catégorie de telle sorte que les ensembles simpliciaux sont les objets simpliciaux de la catégorie des ensembles. On peut alors parler d’espaces topologiques simpliciaux, d’espaces vectoriels simpliciaux, d’anneaux simpli- ciaux, etc. Définition (Objet simplicial). Soit C une catégorie. Un objet simplicial de C est un foncteur contravariant de la catégorie ∆ vers C. Lesensemblessimpliciauxsontliésauxespacestopologiquesdelamanièresuivante.Considérons l’espace |∆[n]| défini pour tout entier n∈N par : (cid:40) n (cid:41) (cid:88) |∆[n]|:= x=(x ,...,x )⊂Rn+1| x =1 . 0 n i i=0 La suite (|∆[n]|)n∈N a une structure naturelle d’espace cosimplicial, c’est à-dire qu’il existe un foncteur covariant de la catégorie ∆ vers la catégorie des espaces topologiques dont l’image de l’entiernest|∆[n]|.AunespacetopologiqueX onpeutalorsassocierl’ensemblesimplicialsuivant appelé ensemble simplicial singulier de X : S(X) ={f :|∆[n]|→X continue} . n D’autrepart,àtoutensemblesimplicialX,onpeutassocierleCWcomplexe|X|,appeléréalisation géométrique de X, défini de la manière suivante (cid:97) |X|:= X ×|∆[n]|/∼ n n∈N où, pour tout morphisme φ:n→m de la catégorie ∆, pour tout élément x∈X et tout élément m y ∈|∆[n]| la relation ∼ identifie (φ∗(x),y) et (x,|φ|(y)). Ces deux constructions sont fonctorielles et |−| est adjoint à gauche de S. |−| sSet Top S Onpeutsedemandersilesconstructionsalgébriquesquel’onafaitessurlesespacestopologiques peuvent aussi être calculées sur les ensembles simpliciaux. C’est le cas si l’on se restreint à une classe particulière d’ensembles simpliciaux, les complexes de Kan, qui contient en particulier les ensembles simpliciaux singuliers S(X) des espaces topologiques. On peut ainsi définir de manière combinatoirelesgroupesd’homotopiedescomplexesdeKan,desortequelesgroupesd’homotopie d’un espace topologique X sont exactement ceux de S(X) et que ceux d’un complexe de Kan Y sont exactement ceux de l’espace |Y|. On définit les groupes d’homotopie d’un ensemble simplicial qui n’est pas forcément un complexe de Kan de la façon suivante. 7 Définition(Groupesd’homotopieetéquivalencesfaibles). Lesgroupesd’homotopied’unensemble simplicial X sont les groupes d’homotopie de l’espace |X|. Une équivalence faible d’ensembles simpliciauxestunmorphismef :X →Y quiinduitdesisomorphismesentregroupesd’homotopie, c’est-à-dire tel que la fonction continue |f|:|X|→|Y| est une équivalence faible d’homotopie. Il existe de plus une notion d’homotopie entre deux morphismes d’ensembles simpliciaux f : X →Y et g :X →Y dès que Y est un complexe de Kan. Nous savons que (cid:46) Tout espace topologique X est faiblement équivalent à la réalisation géométrique |Y| d’un ensemble simplicial Y. (cid:46) Tout ensemble simplicial Y est faiblement équivalent à l’ensemble simplicial singulier S(X) d’un CW complexe X. (cid:46) Si Y est un complexe de Kan, toute fonction continue f : |X| → |Y| est homotope à la réalisation géométrique |g| d’un morphisme d’ensembles simpliciaux g :X →Y. (cid:46) Si X est un CW complexe, tout morphisme f : S(X) → S(Y) est homotope à l’image par le foncteur S d’une fonction continue g :X →Y. Il semble donc qu’étudier les espaces à équivalences faibles d’homotopie près revienne à étudier les ensembles simpliciaux à équivalences faibles près. Nous donnerons une véritable substance à cette assertion lorsque nous aborderons les catégories de modèles. 1.1.3 Les complexes de chaînes Soit K un anneau commutatif unitaire. Nous avons vu plus haut que les groupes d’homotopie sont les meilleurs invariants algébriques des espaces que l’on connaisse. Malheureusement, ils sont très difficiles à calculer. D’autres inva- riants, plus simples en pratique, existent : ce sont les groupes d’homologie. Ceux-ci sont en fait issus de la linéarisation des espaces. Soit X un CW complexe et soit Y un ensemble simplicial qui représente X, c’est-à-dire que |Y| est faiblement équivalent à X; par exemple, on peut choisir de prendre Y = S(X). On considère alors, K·Y la K-linéarisation de Y, c’est-à-dire le K-module simplicial tel que pour tout entier n, (K·Y) est le K-module librement engendré par l’ensemble n Y . Les groupes d’homologie de X sont les groupes d’homotopie du K-module simplicial K·Y. La n structure linéaire de K·Y rend le calcul de ces groupes bien plus simple que ceux de Y. Cela tient au fait que les K-modules simpliciaux sont liés aux complexes de chaînes. Définition (Complexesdechaînes). UncomplexedechaînesV =((Vn)n∈Z,d)estladonnéed’une suite de K-modules (Vn)n∈Z ainsi que d’applications d:Vn →Vn−1 telles que la composition d d V −→V −→V n+1 n n−1 est nulle. Pour tout complexe de chaînes V, le nième groupe d’homologie de V est le quotient du noyau de l’application d:V →V par l’image de d:V →V : n n−1 n+1 n H (V):=ker(d:V →V )/Im(d:V →V ) . n n n−1 n+1 n Un morphisme de complexes de chaînes f : V → W est un quasi-isomorphisme s’il induit des isomorphismes entre les groupes d’homologie de V et ceux de W. Théorème (Correspondance de Dold-Kan). Il existe une équivalence de catégories entre la caté- gorie des complexes de chaînes en degrés positifs et la catégorie des K-modules simpliciaux : Complexes de chaînes Γ K-modules simpliciaux. . ≥0 N Deplus,lesgroupesd’homotopied’unK-modulesimplicialsontlesgroupesd’homologieducomplexe de chaînes correspondant. Pour étudier les espaces topologiques, nous leur associons donc des complexes de chaînes dont nous calculons ensuite les groupes d’homologie. Ce sont des invariants moins fins que les groupes d’homotopie des espaces mais plus faciles à calculer. 8 Exemple. Les groupes d’homotopie des sphères sont loin d’être connus. Par contre, leurs groupes d’homologie sont très simples : (cid:40) K si k ∈{0,n} H (Sn)= k 0 sinon. Latopologiealgébriqueest,commeonl’avu,l’étudealgébriquedesespacestopologiquesàéqui- valences faibles d’homotopie près. Une version simplifiée de cette discipline est l’étude des espaces «linéarisés» à équivalences faibles d’homotopie près, c’est-à-dire l’étude des complexes de chaînes à quasi-isomorphismes près. Nousnenousrestreignonspasauxcomplexesdechaînesendegréspositifsquisontdesmodèles algébriques des espaces, mais manipulons les complexes de chaînes en tous degrés pour plusieurs raisons : (cid:46) Cela nous permet d’une part de travailler avec des duaux de complexes de chaînes. Ainsi, si V est un complexe de chaînes, on peut définir son complexe de chaînes dual V∗ par Vn∗ :=homK(V−n,K) . (cid:46) D’autre part, l’endofoncteur de suspension qui envoie le complexe de chaînes V sur le com- plexe sV défini par (cid:40) sV :=V , n n−1 d x:=(−1)|x|d x , sV V est un automorphisme de la catégorie des complexes de chaînes en tous degrés. 1.2 Un peu d’algèbre homotopique Dans la section précédente, nous avons motivé l’étude des espaces topologiques à équivalences faiblesd’homotopieprès,desensemblessimpliciauxàéquivalencesprèsetdescomplexesdechaînes à quasi-isomorphismes près. Dans toutes ces situations, nous avons une catégorie (espaces topolo- giques,ensemblessimpliciaux,complexesdechaînes)etunenotiond’équivalence(équivalencefaible d’homotopie,équivalencefaible,quasi-isomorphisme).Danscettesection,enévoquantdestravaux de Grothendieck, Quillen, Dwyer et Kan, nous décrivons un formalisme qui permet d’étudier de telles situations. 1.2.1 Catégorie homotopique Soit C une catégorie. Soit W une sous catégorie de C qui contient tous les objets et tous les isomorphismes et que nous appelons sous-catégorie des équivalences. Nous avons vu plusieurs exemples de telles situations : (cid:46) La catégorie des espaces topologiques et la sous-catégorie des équivalences faibles. (cid:46) La catégorie des espaces topologiques et la sous-catégorie des équivalences fortes. (cid:46) La catégorie des ensembles simpliciaux et la sous-catégorie des équivalences faibles. (cid:46) La catégorie des complexes de chaînes et la sous-catégorie des quasi-isomorphismes. Définition. La catégorie homotopique de C relativement aux équivalences W est la donnée d’une catégorieHo(C)estd’unfoncteurπ :C→Ho(C)quienvoietouteflèchedeWsurunisomorphisme etquiestuniverselpourcettepropriété:pourtoutfoncteurF deCversunecatégorieDquienvoie les équivalences sur des isomorphismes, il existe un unique foncteur F/W de Ho(C) vers D, tel que le diagramme suivant commute. F (cid:47)(cid:47) C (cid:60)(cid:60)D π (cid:34)(cid:34) F/W Ho(C) 9
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