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Représentations de soi et constructions identitaires en Kabylie PDF

313 Pages·2016·2.62 MB·French
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REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE MINISTERE DE L’ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE UNIVERSITE MOULOUD MAMMERI DE TIZI-OUZOU FACULTE DES LETTRES ET LANGUES DEPARTEMENT DE LANGUE ET CULTURE AMAZIGHES Thèse de doctorat Spécialité : Langue et Culture Amazighes Option : Civilisation (Socio-anthropologie) Présentée par : Karim SALHI Thème Représentations de soi et constructions identitaires en Kabylie Sous la direction du Professeur Mustapha HADDAB Membres du jury : - SALHI Mohammed Brahim, professeur, UMMTO, président - HADDAB Mustapha, professeur, Université d’Alger, rapporteur - REMAOUN Hassan, professeur, Université d’Oran, examinateur - ICHEBOUDENE Larbi, professeur, Université d’Alger, examinateur - HADIBI Mohand Akli, maître de conférences (A), UMMTO, examinateur - RECHAM Ali, maître de conférences (A), UMMTO, examinateur Décembre 2015 Remerciements Toute ma gratitude au professeur Mustapha HADDAB qui a su par ses orientations et ses conseils m’encourager à finaliser ma thèse. A ma femme qui a fait preuve de patience et qui m’a soutenu tout au long de mes efforts. A mes parents qui m’ont permis de persévérer. A toutes celles et tous ceux qui m’ont prêté main forte dans les moments difficiles. A toutes et à tous merci. Table des matières Table des matières Page Introduction 5 Chapitre I : L’identité ou comment se représenter le monde 1. S’éloigner du substantialisme 11 2. Les représentations : un filon pour comprendre les constructions identitaires 14 3. La découverte de l’Autre : l’altérité en question 17 4. L’objet d’étude 22 5. Problématique 27 6. Hypothèses 31 7. Démarche méthodologique 32 Chapitre II : Le terrain : une expérience empathique d’une ethnographie du proche 1. Une ethnographie à côté de chez-soi 37 2. Le « Je » comme témoin 40 3. Le terrain en question 45 4. L’entretien : un face-à-face interactif 56 5. La position du chercheur : une proximité gênante ? 64 6. Enquêter auprès des femmes 67 Chapitre III : Présentation des enquêtés 1. Approcher les futurs enquêtés 74 2. Masquer les noms sans effacer leurs porteurs 76 3. Sur quoi les entretiens ont-ils porté ? 77 4. Profils des enquêtés 79 Chapitre IV : Aux frontières de la Kabylie. La construction sociale d’une région 1. Emergence d’une région 126 2. L’histoire comme enjeu 135 3. Lorgner le passé 140 4. De la région à l’empire 143 5. Démolir le stigmate 147 6. Des frontières construites socialement 154 7. La reconnaissance du dominé 160 8. Le particulier et l’universel 165 Table des matières Chapitre V : Le printemps berbère de 1980 1. Construction de l’événement 171 2. Les germes de 1980 174 3. Au fil de l’événement 178 4. Le séminaire de Yakouren 186 5. Avril 1980 : Un tournant 188 6. Répliques du printemps berbère 194 7. La célébration du 20 avril 198 Chapitre VI : La nation. Quête d’une Algérie où le "Nous" est central 1. La nation : une construction moderne 203 2. "L’âme de la nation c’est tamazight" 211 3. L’Algérie vue de la Kabylie 217 4. Un Etat tout près et loin en même temps 225 Chapitre VII : L’univers des mots 1. Amazighité, tamazight et les autres 240 2. La religion et l’identité 242 3. La Kabylie : une région pas comme les autres 246 4. Une langue à ne pas perdre 253 5. Le village et ses institutions 260 6. "Nous" et les "Autres" 266 7. Le changement ou l’éternelle oscillation entre modernité et tradition 269 8. La femme, la famille et l’honneur 284 Conclusion 292 Bibliographie 299 Introduction Introduction Dans certains débats de société, la notion d’identité est saisie comme une crispation née d’une mauvaise adaptation aux temps modernes, d’un millénarisme regrettant un paradis perdu ou encore d’une forte emprise du groupe qui ne laisse à l’individu qu’une mince marge d’affirmation de sa personne. Dès lors, nous assistons à des réactions stigmatisant des groupes qui réclament la reconnaissance de leurs droits culturels et linguistiques. Ils se voient alors étiquetés de meneurs de combats perdus d’avance car dépassés par la modernisation qui touche les différents aspects de la vie quotidienne. Nous décelons également des crispations rejetant l’"Autre", notamment lorsque celui-ci est "étranger" au territoire sur lequel il vit et, parfois, dans lequel il est né. Ceci se remarque dans les discours qui se réclament de l’autochtonie (Indiens d’Amérique) ou de la "souche" (comme en France). Il s’en suit, des conflits plus ou moins larvés, des échanges verbaux plus ou moins violents. Dans certains conflits, la question identitaire est mise en avant et a eu des conséquences dramatiques. Ce fut le cas dans l’ex Yougoslavie (dans le début des années quatre-vingt-dix) où certains chefs de guerre parlaient même de "purification ethnique" pour chasser une population et lui faire payer sa présence sur un territoire qu’ils considèrent comme appartenant à leur groupe depuis la nuit des temps. L’identité, qui se mélange dans ce cas à un nationalisme étroit, réveille des « forces ataviques du sang et du territoire »1. Depuis au moins une quinzaine d’années, la notion est alors sur-utilisée et se fait entendre ou lire dans différents registres discursifs. Elle est à la fois instrumentalisée par des milieux qui veulent mettre en valeur la pureté d’une culture pour ne pas dire d’une race face au "sauvage", l’immigré, par euphémisme, qui envahit les territoires riches de la planète. C’est le cas par exemple des courants d’extrême droite ou identitaires en Europe où la forte immigration, qui y caractérise de nombreux pays, provoque des crispations nées d’une phobie de l’étranger et notamment du musulman, ces dernières années. La mise en avant de la « blancheur » du vieux continent et de sa chrétienneté exacerbent les débats politiques et alimentent des polémiques médiatiques sur la définition de la nation et plus globalement de l’Europe en tant que civilisation. Ce discours se remarque également sous d’autres formes d’expressions chez les groupes qui ne se reconnaissent pas dans les 1- GELLNER Ernest, Nations et nationalisme, Paris, Payot, 1989, p. 183. 5 Introduction définitions dominantes de la nation ou du monde globalisé. Ces groupes dominés1 sont dans des postures de déstigmatisation et tentent de se faire reconnaître en adoptant des stratégies identitaires qui empruntent aux registres mémoriel et historique - mais aussi en s’inscrivant dans un territoire -, les éléments d’une représentation de soi vécue comme une opération de sauvegarde des valeurs ancestrales. Paradoxalement, ce positionnement tente de requalifier les traits culturels du groupe en les réinventant parfois, du moins en les adaptant aux temps présents, ou pour parler autrement en les inscrivant dans la modernité. Leurs actions ciblent les politiques des gouvernements centraux qui nient leur existence. Elles s’orientent aussi vers une prise en charge des impératifs des changements qui ont vocation d’éroder le legs du passé et d’entamer ainsi la rhétorique de l’ancestralité. La modernité est alors perçue comme une redéfinition de soi. Elle n’est pas vécue comme un reniement qui hypothéquerait l’ajustement aux transformations sociales, politiques et économiques que l’histoire moderne a introduites à toutes les sociétés. Même lorsque ces changements naissent dans la violence et s’opèrent au contact de l’économie capitaliste et de l’expansion coloniale qui a marqué particulièrement les XIXe et XXe siècles. L’Algérie, dans toutes ses parties, subira ce choc et verra ses structures sociales et économiques se fragiliser au point où celles-ci ne se relèveront plus dans beaucoup de régions. C’est le cas de la Kabylie qui se verra manu militari contrainte de s’incliner devant cette modernité aux forceps. En effet, le désenchantement, qui suit la campagne de Randon en 1857 et l’échec de l’insurrection de 1871, plongent la région dans le désarroi. L’implantation de l’école coloniale permet, toutefois, l’émergence d’une élite locale qui emploie son savoir scolaire au service d’une redéfinition de soi. L’image, qui se met en place, rompt progressivement avec les référents tribaux et les groupes de parenté agnatique, pour intégrer une communauté plus large : la Nation et l’universalité. Cette mutation dans la représentation de soi passe d’abord par un positionnement de la Kabylie dans cet univers. L’émergence de la Kabylie en tant que région va ainsi offrir un territoire symbolique à partir duquel le positionnement dans les débats, autour de la nation algérienne entre autres, allait s’opérer. Ce mouvement allait s’appuyer sur l’appropriation de l’histoire de toute l’Afrique du Nord pour rappeler son passé amazigh. Il procède d’une 1- Au sens où ils subissent la culture et la langue légitimées par la force du pouvoir de l’Etat et dans lesquelles ils ne se reconnaissent pas. 6 Introduction démarche de reconstruction des débris culturels et sociaux générés par la violence du choc colonial. Certes, cette reconstruction ne remettra pas ces débris dans leurs places originelles. Elle s’attèlera, néanmoins, à reconfigurer un corps qui prend racine dans la Kabylie mais qui intègre la dimension plus vaste de la nation, de la berbérité et de l’universalité, au sens de l’appropriation de valeurs que la culture du dominant européen a légitimées en tant que patrimoine commun à toute l’humanité. L’épisode du mouvement national impose des silences aux expressions de cette identité en produisant, le mythe unificateur de "L’Algérie une et indivisible" dans un contexte où l’idéologie coloniale travaillait pour l’ancrage d’une "Algérie française". A l’indépendance, la relégation de la question de la diversité, ne fera qu’exacerber le retranchement et la production de schèmes particularisant la Kabylie. Un discours parfois radical se fait remarquer à travers la production artistique, la littérature, le théâtre et les acteurs qui se sont distingués par des initiatives qui empruntent divers canaux : les associations créées dans l’émigration notamment en France. Ainsi, durant le XXe siècle, les discours sur soi sont chargés de thèmes qui contribuent à la construction de représentations au sein des différents groupes sociaux. Ces discours ne s’inféodent pas systématiquement au « mythe kabyle » développé par une partie de la littérature coloniale. Quand bien même son influence peut se déceler ici et là, il convient de nuancer son impact. On attribue, en effet, à ce mythe une influence excessive sur les structures mentales et l’action des militants dits "berbéristes" que ce soient ceux qui ont été des acteurs du mouvement national ou ceux qui ont émergé après l’indépendance. Les détracteurs de l’amazighité de l’Algérie stigmatisent, à travers la militance berbère toute demande de reconnaissance. Ils y voient alors la main du colonialisme, des Pères blancs ou de milieux étrangers cherchant à éroder le capital symbolique d’une nation libérée après des années d’une guerre particulièrement violente. Reprenant Belkacem Ben Sedira1, Charles-Robert Ageron tempère le degré de réception des tentatives de mise en œuvre d’une politique d’assimilation des populations kabyles : « Les Kabyles commençaient d’ailleurs à redouter sincèrement qu’on veuille faire de leurs enfants des petits "Roumis" 1- Originaire de Biskra, il est l’auteur de Cours de langue kabyle. Grammaire et versions publié en 1887. Ce premier manuel d’enseignement d’un parler berbère élaboré par un indigène fit autorité dans les écoles coloniales. Il est le fruit de séjours effectués en Kabylie. 7 Introduction et des soldats français ; "Si cela est vrai, déclaraient-ils, nous n’avons plus qu’à "travailler" une route pour aller nous jeter dans la mer" ».1 Dans les temps présents, et depuis que la question de la diversité culturelle et linguistique est constitutionnalisée, le sens à donner à la notion d’algérianité est encore au stade des tâtonnements. Les tiraillements entre les différents groupes sociaux et politiques, les difficultés d’articulation à la modernité et les positionnements sur des questions sociétales, provoquent des débats dont les termes nous semblent biaisés. Il en est ainsi du débat autour des origines du peuplement de l’Afrique du Nord, des brassages de populations, etc. Au-delà de l’intérêt scientifique que cette question peut susciter, sa manipulation renvoie à des stratégies de légitimation de la présence, dans le présent, sur le sol même de l’Algérie et de l’Afrique du Nord en général. Car c’est de ce présent dont il s’agit lorsque des polémiques sont engagées autour de la légitimité de tel ou tel personnage, des origines des Amazighs, du rôle des Banu Hillal, etc. Par ailleurs, les catégories Arabe/Arabophone, Berbère/Berberophone interpellent également le chercheur en sciences sociales sur leur signification et leur traduction dans le champ de la recherche. Au delà de leur utilité opératoire en sociolinguistique, ces catégories ne restituent pas les dimensions anthropologique et sociologique de larges groupes qu’il ne suffit pas de qualifier en rajoutant un suffixe à la langue qu’il pratique. Ainsi, de nombreux individus sont devenus Berbérophones après s’être enracinés dans un territoire où une des variantes de la langue berbère est dominante. Ceci est vrai même pour des ressortissants de pays arabes du Proche-Orient (Palestine particulièrement) que les vicissitudes de l’histoire ont contraint à se réfugier dans un coin de l’Algérie. Inversement, de nombreux Berbères éloignés de leur territoire d’origine perdent l’usage de leur langue première et adoptent soit l’arabe (pour ceux qui vivent dans des villes algériennes) ou le français pour les descendants des émigrés installés en France. Pourtant, ils rendent visite au village de leurs parents et s’en réclament même. C’est ainsi que parler de l’amazighité ne saurait se réduire à l’usage de la langue. De nombreux traits culturels, l’histoire familiale, les interactions qui mettent en face-à-face les "exilés" et leurs proches restés au pays, montrent qu’en dehors des conduites acquises par les effets de la socialisation dans des espaces différents, les effets de la socialisation familiale se ressentent dans bien des 1- AGERON Charles-Robert, La France en Kabylie, Alger, Belles-Lettres, 2011, p. 27. 8

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Démolir le stigmate. 6. Amazighité, tamazight et les autres. 2 de l'histoire de toute l'Afrique du Nord pour rappeler son passé amazigh. Il procède
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