EXPLORATION SCIENTIFIQUE DE L’ALGÉRIE PENDANT LES ANNÉES 1840, 1841, 1842 ORIGINE ET MIGRATIONS DES PRINCIPALES TRIBUS DE L’ALGÉRIE PAR E. CARETTE CHEF DE BATAILLON DU GÉNIE, MEMBRE ET SECRÉTAIRE DE LA COMMISSION SCIENTIFIQUE D’ALGÉRIE PARIS IMPRIMERIE IMPÉRIALE M DCCC LIII Livre numérisé en mode texte par : Alain Spenatto. 1, rue du Puy Griou. 15000 AURILLAC. [email protected] D’autres livres peuvent être consultés ou téléchargés sur le site : http://www.algerie-ancienne.com Ce site est consacré à l’histoire de l’Algérie. Il propose des livres anciens, (du 14e au 20e siècle), à télécharger gratuitement ou à lire sur place. TRANSCRIPTION DES MOTS ARABES I MODE DE TRANSCRIPTION DES MOTS ARABES EN CARACTÈRES FRANÇAIS ADOPTÉ POUR LA PUBLICATION DES TRAVAUX DE LA COMMISSION SCIENTIFIQUE D’ALGÉRIE. On a cherché à représenter les mots arabes de la manière la plus simple et en même temps la plus conforme à la prononciation usuelle. Il a paru convenable de rejeter les lettres purement conventionnelles, dont l’emploi augmente les diffi- cultés de l’orthographe, sans retracer plus exactement l’expression phonique. Il a été reconnu que, sauf deux exceptions, tous les caractères arabes rencontrent des caractères ou identi- ques ou analogues dans l’alphabet français. On a donc rendu par les lettres françaises simples ceux des carac- tères arabes qui leur sont identiques pour la pronon- ciation, et par les mêmes lettres, accompagnées d’un accent(1), ceux qui leur sont analogues. Les deux lettres qui n’ont, dans notre langue, ni identiques, ni analogues, sont le (cid:969) et le (cid:933) . La _______________ 1 Cet accent est celui qui, désigné en algèbre sous le nom de prime, y est employé comme signe de l’analogie entre les quantités. II TRANSCRIPTION DES MOTS ARABES première est partout remplacée par une apostrophe, accompagnée des voyelles que la prononciation rend nécessaires; la seconde, par la double lettre kh, confor- mément à l’usage. Trois autres caractères, qui n’ont pas, dans la lan- gue française, d’identiques ou d’analogues simples, ont été rendus par des lettres doubles, savoir : le (cid:925) par dj, le (cid:949) par ch, le (cid:1005) par ou. La prononciation arabe se trouve ainsi fidèlement reproduite. Les avantages qu’a paru offrir ce mode de trans- cription sont surtout, 1° De ne point exiger la fonte de caractères nou- veaux, et de pouvoir être ainsi adopté, sans aucune dé- pense, dans tous les établissements typographiques; 2° De fournir un moyen facile de rétablir les mots dans leurs caractères primitifs. Lettres Valeur A, E, I, O L’emploi de ces divers caractères est déterminé par (cid:909) la prononciation et l’accentuation de lettre arabe (cid:911) B (cid:917) T Ces deux lettres sont génralement confondues (cid:921) dans la prononciation (cid:925) Dj (cid:929) H’ Kh (cid:933) (cid:937) D Généralement confondues (cid:939) (cid:941) R (cid:943) Z TRANSCRIPTION DES MOTS ARABES III S, C, Ç L’emploi de ces trois lettres sera réglé de ma- (cid:945) nière à conserver le son sifflant de l’S. (cid:949) Ch (cid:953) S’, C’ , Ç’ Même observation que pour le (cid:957) D’ Ces deux lettres sont confondues par tous les Barbaresques dans la prononciation et dans (cid:965) l’écriture. (cid:961) T’ (cid:969) ’ Apostrophe précédée ou suivie de celle des voyelles dont la prononciation nécessite l’em- ploi. (cid:973) R’ (cid:977) F (cid:981) K’, G, Gu Le g et le gu seront employés dans les mots où (cid:981) l’usage attribue au la prononciation guttu- rale du g ; ex. : Gafs’a, Guêlma. (cid:985) K (cid:989) L (cid:993) M (cid:997) N (cid:1001) H (cid:1005) Ou, Ô (cid:1009) I Ï OBSERVATIONS. 1° Dans les mots qui, étant précédés de l’article, commencent par une lettre solaire, on se conformera à la prononciation en redoublant la lettre initiale. Ain- si on écrira ‘Abd-er-Rah’mân, Nâc’er-ed-Din, et non ‘Abd el-Rah’mân, Nac’er-el-Dîn. 2° Les mots terminés par la lettre (cid:915) , qui ne prend alors que le son de l’a sans aspiration, seront terminés, IV TRANSCRIPTION DES MOTS ARABES dans la transcription française, par la lettre a simple, et non par ah. On écrira donc Miliâna, Blîda, et non pas Milianah, Blîdah. 3° Les consonnes placées à la fin d’une syllabe ne seront jamais suivies de l’e muet. Toutefois il ne faut pas oublier que dans la langue arabe les consonnes se prononcent toutes distinctement, et qu’aucune ne prend le son nasal ni ne s’élide. Ainsi Bibân doit se pronon- cer Bibâne ; Mans’our, Manns’our ; Tôzer se prononce Tôzere ; Kouînin, Kouînine ; Zâr’ez, Zâr’ezz ; Gâbes, Gâbess. RECHERCHES SUR L’ORIGINE ET LES MIGRATIONS DES PRINCIPALES TRIBUS DE L’AFRIQUE SEPTENTRIONALE ET PARTICULIÈREMENT DE L’ALGÉRIE. LIVRE PREMIER. CLASSIFICATION DES PEUPLES D’ORIGINE AFRICAINE. CHAPITRE PREMIER. CLASSIFICATION DES PEUPLES AFRICAINS DANS L’ANTIQUITÉ. HÉRODOTE. Les Libyens, les Auses, les Maxyes. — STRABON. Les Numides, les Maures, les Gétules, les Libo-phéniciens, les auasis, la Libye. — PL INE. Les Sabarbares, les Scelatites, les Masates ; le nom d’Afrique employé dans un sens restreint. POMPONIUS MELA. Le tombeau des rois maures. — PTOLÉMEE. L’Afrique désignée en- core par le nom de Libye, les Nakmousiens, les Maziques. — Le phi- losophe ÉTHICUS. Les Auasitæ, les Maziques, les Quinquegentiani. — J. HONORIUS. Les Quinquegentiani, les Maziques, les Barbares, les Vacuates. — ITINÉRAIRE D’ANTONIN. Les Bacuetes, les Mace- nites. — Résumé du chapitre. Les géographes antérieurs à la conquête romaine, et notamment Scylax et Hérodote, comprenaient sous le nom général de Libyens tous les peuples de la contrée 2 ORIGINE ET MIGRATIONS appelée dans les temps modernes Berberie, et par cor- ruption Barbarie. Contemporains à quelques années près, ils avaient devancé l’un et l’autre d’environ trois siècles la des- truction de Carthage. Scylax, le plus ancien des deux, s’était surtout occu- pé des villes ; Hérodote, laissant les villes de côté, s’était particulièrement attaché à mentionner les peuples. Leurs descriptions s’appliquent presque exclusi- vement à la partie orientale du continent africain, celle qui se trouvait la plus voisine de Carthage; la région occidentale, à l’exception de la côte, parait leur avoir été beaucoup moins connue. Les peuples, les villes et les contrées mentionnés dans ces deux géographes se retrouvent presque tous dans les nomenclatures beaucoup plus riches des écri- vains des siècles suivants. Toutefois Hérodote établit, beaucoup plus nette- ment que ses successeurs, la distinction qui forme un des caractères les plus saillants du nord de l’Afrique entre le Tell et le Sahara, entre les peuples laboureurs et les peuples pasteurs. Depuis l’Égypte jusqu’au lac Triton habitaient les Libyens nomades et pasteurs appelés Auses, et, à partir du lac Triton, les peuples laboureurs et sédentaires ap- pelés Maxyes. Le lac Triton marquait donc la séparation entre les deux régimes si profondément différents de la culture et du parcours. DES PRINCIPALES TRIBUS DE L’ALGÉRIE. 3 Après Hérodote et Scylax vient Strabon, qui écri- vait sur la géographie de l’Afrique dans les premières années de l’ère chrétienne. Il s’était écoulé environ un siècle et demi depuis que Carthage avait été prise et dé- truite par les Romains, dont les conquêtes s’étendaient alors jusqu’à Bougie. A côté des peuples, des contrées et des villes déjà mentionnés par les deux premiers géographes, on voit surgir dans Strabon des noms nouveaux que les inci- dents de l’occupation romaine avaient déjà rendus cé- lèbres les Numides, les Maures, les Gétules apparais- sent pour la première fois. Comme vestige de la domination carthaginoise, il reste le nom des Libo-phéniciens, peuples qui habi- taient la partie de la régence actuelle de Tunis appelée déjà alors, comme elle le fut depuis, Afrique propre- ment dite. Cette contrée confinait à l’est à la Numidie, qui couvrait à peu près la province de Constantine, et celle-ci à la Mauritanie, qui comprenait alors les pro- vinces d’Alger et d’Oran, et l’empire de Maroc. Ces quatre contrées étaient bordées au sud par une ré- gion immense, couverte de montagnes rocheuses et de steppes ardents, parcourus par les pasteurs Gétules. Sur cette vaste arrière-scène, qui s’étendait sans interrup- tion depuis l’Océan Atlantique jusqu’aux syrtes, appa- raissaient quelques lieux habités, épars çà et là sur un fond désert et aride. Ils avaient reçu des Égyptiens le nom d’auasis. C’est en considération de cette contrée, et par ex- 4 ORIGINE ET MIGRATIONS tension, que Strabon compare l’Afrique à la peau d’une panthère, dont les taches représentent les campements épars des Gétules ; car il constate lui-même que la ré- gion voisine du littoral est largement pourvue d’eaux courantes, de terres en culture et de riches cités. Strabon parait encore généraliser le nom de Li- bye, et l’appliquer à tout le pays compris entre l’Égyp- te, l’Éthiopie, la Méditerranée et l’Océan. Toutefois il confesse que de son temps les peuples de la Libye étaient pour la plupart inconnus, parce que des armées y avaient été rarement envoyées, et que ce pays était peu parcouru par les voyageurs. Un demi-siècle environ après Strabon paraissaient deux ouvrages importants, savoir : l’Histoire naturelle de Pline, et l’État du monde, par Pomponius Mela. Dans la partie de ses descriptions géographiques consacrée à l’Afrique, Pline s’attache surtout, aux villes et particuliè- rement à celles qui devaient leur fondation ou leur agran- dissement aux Romains. Quant aux peuples indigènes, si leurs noms, dit-il, et ceux de leurs cités ne peuvent être le plus souvent prononcés que dans leur langue. Néanmoins le grand encyclopédiste se fait conscience d’en mentionner quelques-uns, surtout ceux qui avaient déjà été signalés par ses prédécesseurs. Parmi les villes qu’il désigne comme étant assez peuplées pour former de véritables nations, en figure une qui porte le nom de Sabarbares. C’est la première fois que se rencontre sous la plume des géographes de l’antiquité, ce nom qui devait plus tard occuper une si