Chez le même éditeur Dans la même collection Psychopathologie de l’intersubjectivité, par M. Speranza et N. Georgieff, 2013, 272 pages. Psychopathologie du travail, par C. Dejours et I. Gernet, 2012, 168 pages. Psychopathologie de la scolarité, par N. Catheline. 2012, 3e édition, 432 pages. Psychopathologie en service de pédiatrie, par P. Duverger. 2011, 656 pages. L’attachement : approche théorique, par N. et A. Guédeney. 2010, 3e édition, 256 pages. L’attachement : approche clinique, par N. et A. Guédeney. 2010, 256 pages. Le geste suicidaire, par V. Caillard, F. Chastang. 2010, 376 pages. Psychopathologie de l’adulte, par Q. Debray, B. Granger, F. Azaïs. 2010, 4e édition, 488 pages. La consultation avec l’enfant, par P. Delion. 2010, 280 pages. Enfance et psychopathologie, par D. Marcelli et D. Cohen. 2012, 9e édition, 688 pages. Adolescence et psychopathologie, par D. Marcelli, A. Braconnier. 2008, 7e édition, 720 pages. Psychopathologie du sujet âgé, par G. Ferrey, G. Le Gouès. 2008, 6e édition, 384 pages. Collection Les Âges de la vie Dirigée par Pr Daniel Marcelli Psychopathologie générale des âges de la vie Daniel Marcelli Professeur émérite de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à la faculté de médecine de Poitiers, ancien responsable de pôle au centre hospitalier Henri-Laborit de Poitiers. François Marty Psychologue, psychanalyste, professeur de psychologie clinique et de psychopathologie, université Paris Descartes, Sorbonne Paris Cité. Membre du laboratoire de Psychologie Clinique, Psychopathologie, Psychanalyse (PCPP EA 4056), Membre du Collège International de L’adolescence (CILA), membre de l’Association pour la Formation à la Psychothérapie Psychanalytique de l’Enfant et de l’Adolescent (AFPPEA). Vice-président de l’Institut du Virtuel Seine Ouest (IVSO). Avec la collaboration de : François Ansermet Jean-Yves Chagnon Jean-Marie Danion Christophe Dejours Christophe Demaegdt Jean-Bernard Garré Isabelle Gernet Bénédicte Gohier Bernard Golse Florian Houssier Marie Rose Moro Lisa Ouss François Pommier Jean-Philippe Raynaud Pierre Sullivan Jean-Luc Venisse Michel Vignes Ce logo a pour objet d’alerter le lecteur sur la menace que représente pour l’avenir de l’écrit, tout particulièrement dans le domaine universitaire, le développement massif du « photo-copil- lage ». Cette pratique qui s’est généralisée, notamment dans les établissements d’enseignement, provoque une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilité même pour les auteurs de créer des œuvres nouvelles et de les faire éditer correctement est aujourd’hui menacée. Nous rappelons donc que la reproduction et la vente sans autorisa- tion, ainsi que le recel, sont passibles de poursuites. Les demandes d’autorisation de photocopier doivent être adressées à l’éditeur ou au Centre français d’exploitation du droit de copie : 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris. Tél. 01 44 07 47 70. Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. Toute reproduction ou représentation intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce soit, des pages publiées dans le présent ouvrage, faite sans l’autorisation de l’éditeur est illicite et constitue une contrefaçon. Seules sont autorisées, d’une part, les reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, les courtes citations justifiées par le caractère scientifique ou d’information de l’œuvre dans laquelle elles sont incorporées (art. L. 122-4, L. 122-5 et L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle). © 2015, Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés ISBN : 978-2-294-73419-9 e-ISBN : 978-2-294-73494-6 Elsevier Masson SAS, 62, rue Camille-Desmoulins, 92442 Issy-les-Moulineaux cedex www.elsevier-masson.fr Liste des collaborateurs François Ansermet, psychanalyste, professeur de pédopsychiatrie à l’Uni- versité de Genève, médecin-chef du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent aux hôpitaux universitaires de Genève. Jean-Yves Chagnon, psychologue, psychanalyste, professeur de psychopa- thologie clinique, université Paris 13, Sorbonne Paris Cité. Jean-Marie Danion, professeur de psychiatrie d’adultes, chef du service de psychiatrie I, hôpitaux universitaires de Strasbourg. Christophe Dejours, psychiatre, psychanalyste, professeur titulaire de la chaire de Psychanalyse-Santé-Travail au Conservatoire National des Arts et Métiers. Christophe Demaegdt, docteur en psychologie, membre associé du labora- toire Psychologie Clinique, Psychopathologie, Psychanalyse de l’Université Paris Descartes, membre actif de l’Association Internationale des Spécia- listes en Psychodynamique du Travail, psychologue clinicien, service de Santé Mentale de Charleroi, Bruxelles. Jean-Bernard Garré, professeur des Universités-praticien hospitalier, chef du département de psychiatrie et de psychologie médicale, CHU Angers. Isabelle Gernet, psychologue clinicienne, maître de conférences, Univer- sité Paris Descartes. Bénédicte Gohier, professeur des Universités-praticien hospitalier, départe- ment de psychiatrie et de psychologie médicale, CHU Angers. Bernard Golse, pédopsychiatre-psychanalyste (membre de l’Association psychanalytique de France) ; chef du service de pédopsychiatrie de l’hôpital Necker-Enfants malades (Paris) ; professeur de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à l’Université René Descartes (Paris 5) ; Inserm, U669, Paris, France ; Université Paris-Sud et Université Paris Descartes, UMR-S0669, Paris, France ; LPCP, EA 4056, Université Paris Descartes ; CRPMS, EA 3522, Université Paris Diderot ; membre du Conseil supérieur de l’adoption (CSA) ; ancien président du Conseil national pour l’accès aux origines personnelles (CNAOP) ; membre du Conseil scientifique de la Société française de psy- chiatrie de l’enfant et de l’adolescent et des disciplines alliées (SFPEADA) ; président de l’association Pikler Loczy-France ; président de l’Association pour la formation à la psychothérapie psychanalytique de l’enfant et de l’adolescent (AFPPEA). VI Florian Houssier, psychologue clinicien, psychanalyste, professeur en psychologie clinique et psychopathologie à l’Université Paris-Nord, unité transversale de recherches : psychogenèse et psychopathologie (UTRPP), Villetaneuse, Sorbonne Paris Cité. Marie Rose Moro, professeure de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, Université Paris Descartes, chef de service de la Maison de Solenn, maison des adolescents de Cochin (AP-HP) Paris, directrice de la revue L’Autre, www. revuelautre.com, et chef de file de la clinique transculturelle en France. Lisa Ouss, pédopsychiatre, Docteur en psychologie, PH, Hôpital Necker Enfants malades, service de pédopsychiatrie. François Pommier, professeur de psychopathologie à l’Université Paris Ouest Nanterre-La Défense. Jean-Philippe Raynaud, professeur des Universités-praticien hospitalier, chef de service, CHU de Toulouse, Service universitaire de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (SUPEA). Pierre Sullivan, psychologue, maitre de conférences Paris-Descartes, mem- bre du psychodrame de l’Hôpital de jour du Centre Etienne Marcel, psy- chanalyste SPP. Jean-Luc Venisse, PU, PH, directeur du pôle universitaire d’addictologie et psychiatrie du Centre hospitalier de Nantes ; professeur à l’université de Nantes. Michel Vignes, praticien hospitalier, CHU de Toulouse, Service universi- taire de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent (SUPEA), équipe mobile de psychiatrie de liaison, hôpital des enfants. Psychopathologie contemporaine : problématiques et enjeux Quel est l’avenir de la psychopathologie ? Et d’abord qu’est-ce que la psy- chopathologie ? Classiquement définie comme l’étude des états patholo- giques du fonctionnement psychique, elle comprend également l’étude des aménagements psychiques consécutifs aux diverses étapes de la vie, mais aussi aux multiples conditions externes telles que les maladies graves ou chroniques, les événements négatifs affectant ce psychisme (deuil, trauma- tisme divers, situation sociale difficile, etc.) ou toute contrainte extérieure poussant le fonctionnement psychique dans ses retranchements. La psy- chopathologie est née au début du xxe siècle et son essor est étroitement lié à celui de la psychanalyse largement inspirée par les travaux de son père fondateur S. Freud. Longtemps au terme « psychopathologie » fut associé presque systématiquement le qualificatif « psychanalytique ». Inaugurés par l’étude des symptômes hystériques, les travaux de S. Freud se développèrent principalement dans le champ de ce que lui-même nomma les « névroses », états psychopathologiques qui constituèrent le cœur même de ce modèle explicatif. Certes Freud est allé aussi visiter le champ de ce qu’il a appelé « les névroses narcissiques » plus communément désignées aujourd’hui sous le terme de psychoses, mais ce fut assez rapidement pour constater leur résistance à la psychanalyse malgré les remarquables analyses psycho- pathologiques qu’il en fit. Cette constatation concernant les résistances de la psychose au traitement psychanalytique creusa une première ligne de démarcation entre les névroses d’un côté, longtemps propriété quasi exclu- sive de la psychopathologie psychanalytique et de l’autre, les psychoses, maladies mentales dont le modèle reste celui de la schizophrénie, domaine d’exercice de la psychiatrie où la recherche d’une lésion cérébrale a accaparé d’emblée l’attention des cliniciens. Si dans l’un comme dans l’autre cas on parle de « psychopathologie » on voit bien que le regard ne porte pas tout à fait sur le même objet, l’histoire du sujet et les entraves à son assomp- tion d’un côté, le fonctionnement neuro-cérébral de l’autre. Cette tension entre le psychisme (le mind) et le cerveau (le brain) n’est pas récente. Elle occupe la psychiatrie depuis ses débuts (on retrouve en effet dans l’héritage de Charcot et la neurologie avec Babinski et la psychopathologie psychana- lytique avec Freud), mais elle prend aujourd’hui une acuité nouvelle du fait des techniques les plus récentes d’explorations fonctionnelles du cerveau. X En effet, ces techniques d’exploration non invasive du système nerveux central (SNC), la résonance magnétique nucléaire et les autres procédés qui lui sont apparentés, ont révolutionné les connaissances sur ce SNC non seu- lement pour ce qui concerne sa structure et son anatomie mais plus encore ses fonctions et son fonctionnement. Il est désormais possible d’observer dans l’instant même les caractéristiques de ce fonctionnement et de les comparer à celles d’un autre cerveau ! Dans la foulée de cette révolution technique est apparu un florilège de termes commençants par le préfixe « neuro », pas seulement « neuro-cérébral » bien sûr, mais aussi « neuro- synaptique », « neuro-cognitif », « neuro-développemental », « neuro-fonc- tionnel », etc. L’accumulation de ce préfixe renvoie toujours aux résultats de l’observation de ce fonctionnement grâce aux techniques d’exploration suscitées lesquelles permettent de « le voir », donc d’en avoir une connais- sance « objective ». Si ces observations portent parfois sur l’anatomie et l’architecture cérébrale proprement dite (observations souvent déjà obte- nues par les techniques d’explorations antérieures plus invasives), le plus souvent sont constatées essentiellement des modifications fonctionnelles des diverses aires cérébrales impliquées. La neurochirurgie utilisant la sti- mulation intra-cérébrale pour mieux circonscrire les zones d’intervention a apporté une pierre supplémentaire à l’édifice donnant à penser qu’on pou- vait localiser l’aire cérébrale correspondant à tel ou tel type de pensée ou d’expérience affective. C’est ainsi qu’on en arrive à décrire la zone de l’expé- rience extatique pouvant correspondre à une forme de croyance en dieu… L’idée de Dieu est dans notre cerveau ! Pour autant, quand bien même la sti- mulation de cette zone peut entraîner chez tout un chacun cette expérience extatique, les mots, les images utilisées pour en rendre compte diffèrent d’un sujet à l’autre ! En outre, pour comprendre le sens de cette expérience chez un sujet précis, le plus important n’est peut-être pas tant l’expérience extatique elle-même que les séquences mentales qui la précédent et sont susceptibles d’entraîner sa survenue ! Sans parler des séquences mentales qui la suivent ! À coup sûr, toutes celles-ci sont propres à chaque individu… Si l’on peut donc aisément s’accorder sur l’idée que dans le cerveau existe une possible localisation de l’expérience extatique, la visualisation de cette aire particulière ne dit rien de précis ni sur son contenu représentation- nel ni sur les séquences mentales (ou psychiques) qui l’encadrent. Arrivé à ce point, on comprendra la nécessité de s’accorder sur le sens donné au terme « psychisme », car dans l’expression « psychopathologie » il est cer- tainement plus difficile de s’entendre sur la définition qu’on peut donner à « psycho » que sur celle de « pathologie » ! Osons cette proposition : le psychisme est cette instance non localisable dans le corps destinée à assurer au sujet l’illusion de sa continuité existentielle, ce sentiment très particulier qu’aujourd’hui il est comme hier et que demain il sera comme aujourd’hui. On le perçoit dans cette métaphore, le psychisme est consubstantiel à la X I notion de temps, de temporalité plutôt ; aussi l’instrument par lequel il se révèle est le récit, en particulier la narrativité, l’histoire grâce à laquelle le sujet se raconte à lui-même et aux autres en y trouvant du sens, ce qu’on nomme plus précisément la « réflexivité narrative » qui ouvre le champ de l’intentionnalité. Le psychisme est l’organe du sens donné à la continuité existentielle et un des rôles du psychisme est de produire une narration… Bien sûr le psychisme ne siège ni dans les pieds ni dans le cœur, la rate ou le foie ! Mais si, assurément, il s’enracine dans le cerveau, en aucun cas il n’est réductible à ce seul organe et l’articulation entre le psychique et le cérébral ne va pas de soi ! Insistons une nouvelle fois sur le fait que les techniques d’exploration non invasive auxquelles il a été fait référence ci-dessus ne révèlent le plus souvent que des modifications fonctionnelles. Mais ces constatations habituelles s’accompagnent d’une conviction tou- jours implicite qu’on peut énoncer de façon très simple (simpliste ?) : « un fonctionnement psychique perturbé s’accompagne d’un fonctionnement neuro-cérébral perturbé », le second étant perçu comme la cause du pre- mier. Cette conviction actuellement dominante sous-tend implicitement quelques croyances secondaires : 1) un fonctionnement psychique perturbé ne peut pas s’accompagner d’un fonctionnement cérébral « normal » ; 2) le niveau du « cérébral » est la cause du niveau « psychique » ; 3) l’hypothèse qu’un fonctionnement psychique perturbé pourrait provoquer une pertur- bation fonctionnelle du fonctionnement cérébral n’est quasiment jamais envisagé, voire rigoureusement récusée. Le lecteur trouvera en particulier dans la première partie de cet ouvrage des développements à ces questions fondamentales. Certes la communauté scientifique a trouvé une parade à cette opposi- tion frontale entre le cerveau (brain) et l’esprit (mind), opposition d’ailleurs assez stérile il faut en convenir, en ouvrant deux champs d’investigation ou de compréhension. Le modèle dit « bio-psycho-social » tout d’abord, modèle qui tente de concilier les approches biologiques (et cérébrale), psy- chologique et sociale dans un entre-lac plus descriptif qu’explicatif où la compréhension théorique le cède largement à l’approche purement des- criptive et pragmatique. Il convient toutefois de relever l’intérêt de cette approche globale dans des problématiques telles que les pathologies liées aux conditions environnementales, à divers vécus traumatiques ou encore aux conduites de dépendances. Plusieurs chapitres rendent compte de la richesse heuristique de cette approche globale. Quant au deuxième champ, il porte un nom presque magique « l’épigénèse », soit la prise en compte des intrications entre le patrimoine génétique et héréditaire d’un côté et de l’autre les apports de l’expérience et de l’environnement, en particulier les expériences les plus précoces dès la petite enfance et même la vie fœtale. L’épigénèse examine comment l’un et l’autre retentissent sur l’organisation du fonctionnement cérébral et comment ce dernier est susceptible de se XII transformer en permanence, tout en gardant durablement des traces des expériences passées, non seulement celles du sujet lui-même mais, plus intriguant encore, celles de ses ascendants ! Une telle ouverture concep- tuelle, à certains égards presque révolutionnaire, n’est pas sans soulever des questions complexes. Par exemple si on admet l’idée d’une capacité permanente de réorganisation en fonction des traces successivement dépo- sées, comment le cerveau (et le sujet !) peut-il conserver son sentiment d’ipséité, de « mêmeté », comme dirait P. Ricoeur, ou de sentiment continu d’existence, comme le propose Winnicott ? C’est le défi, parmi d’autres, que chaque sujet rencontre au travers de sa croissance, de son développe- ment et des diverses étapes de la vie dans lesquelles il sera inéluctablement embarqué. Plus spécifiquement dans le domaine du développement de l’enfant, la complexité de la notion d’épigénèse soulève aussi un problème habituellement passé sous silence et qui concerne également les rapports entre psychisme et cerveau. Trop souvent à partir de l’identification des causes provoquant l’apparition d’une conduite pathologique, on en déduit par inférence les causes nécessaires pour l’apparition d’une conduite propre au développement normal. Or ce raisonnement est factice ! Par exemple on ne peut déduire de l’observation des causes responsables de l’apparition d’un trouble du langage chez un adulte (causes de nature souvent neurolo- gique assez facilement identifiables de nos jours), l’ensemble des conditions nécessaire à l’apparition du langage chez un enfant ! Développement et continuité existentielle, marque du psychisme comme on l’a vu, posent eux aussi la question de l’unité ou plutôt de l’unicité du fait psychique : peut-on le découper en strates, étapes, périodes, etc. ? L’éclatement de la psychopathologie, si c’en est un, n’est-il pas de nature à en dénaturer son essence ? Psychiatres d’un côté, psychologues de l’autre, cliniciens de l’adulte ou de l’enfant, voire aujourd’hui du bébé, de l’ado- lescent, du sujet âgé, spécialiste des addictions et de la dépendance, clini- cien des pathologies transculturelles, spécialistes des approches familiales ou groupales, etc. La tendance est incontestablement à ces approches diver- sifiées qui pourraient provoquer l’éclatement et nuire à ce qu’est l’essence même du fait psychique. La continuité, la durée est précisément de qui caractérise la psychanalyse au travers d’un engagement relationnel où la quête d’un sens occupe analyste et analysant même si leur statut n’est évi- demment pas symétrique ! Les recherches et les développements autour des fonctionnements limites ou narcissiques témoignent de l’engagement des psychanalystes contemporains qui, ainsi, ne cessent d’élargir le champ de leurs approches théoriques et cliniques bien au-delà des classiques névroses décrites pas S. Freud. Aussi est-il nécessaire de revisiter la métapsychologie psychanalytique à l’aune de ces développements. Plusieurs chapitres de cet ouvrage en témoignent. En ce sens, la psychopathologie psychanalytique reste une clef de voute à la compréhension disons, plus modestement, à la X III capacité de mieux appréhender les aléas du fonctionnement psychique de l’individu/sujet de ce xxie siècle débutant. Un grand tournant s’est opéré ces dernières années autour de la place et du statut du corps dans les diffé- rentes théorisations psychanalytiques. C’est par exemple le cas avec la pro- position faite par C. Dejours d’une troisième topique (topique du clivage), incluant l’idée d’un inconscient amential qui ne fonctionnerait pas sur le même mode que l’inconscient dynamique. C’est encore le cas avec l’explo- ration des relations existantes entre émotions et représentations, tant le travail d’auto représentation est au cœur de toute dynamique psychique. Penser l’activité humaine s’est longtemps heurté à toutes formes de dua- lisme enfermant le raisonnement dans des dichotomies indépassables. La perspective intégrative, tendant à prendre ce qui fonctionne quelles que soient les théories qui sous-tendent ces avancées crée une illusion consis- tant à considérer que c’est uniquement en amassant les données (fussent- elles positives) que l’on constitue un savoir nouveau. Aujourd’hui, l’enjeu se situe bien au-delà de ce Vade-Mecum du praticien. Il s’agit de mieux percevoir les modalités d’intégration du fonctionnement psychique avec le substrat corporel, leur système de causalité circulaire, sans séparer de façon arbitraire ce qui serait du registre de la biologie d’un côté et de l’esprit de l’autre. Nous ne savons toujours pas si et comment le cerveau produit de la psyché, mais nous avons l’idée que l’intelligence est corporelle, qu’elle s’en- racine dans les perceptions transformées en représentations plus ou moins chargées de sens au cours de l’histoire individuelle et familiale. C’est pour toutes ces raisons que cet ouvrage collectif, dirigé par un psy- chologue et un psychiatre, regroupe des « psys » de diverses origines et orientations, des « psys » d’enfants et d’adultes et se donne pour ambition de les réunir dans une tentative peut-être un peu vaine et illusoire mais certainement nécessaire afin d’ébaucher des réponses à ces questions, de poser les jalons, d’énoncer les problématiques les plus actuelles et les défis scientifiques qui en résultent au risque incontournable de présenter aussi quelques lacunes, oublis ou imperfections ! Notre ambition est de faire que tout « psy » y trouve matière à réflexion, enrichissement de nature à pou- voir nourrir ses liens de connaissance dans cet étonnant métier consistant à mettre son propre psychisme au service de l’autre. Car tout ce qui vient d’être dit n’aurait qu’un intérêt spéculatif si l’objectif principal n’était pas celui du soin, le soin psychique proposé à celui qui en éprouve le besoin ou en formule la demande. C’est pourquoi il nous a paru nécessaire de conclure cet ouvrage par une partie consacrée au soin psychique et à ses particularités sans pour autant entrer dans des précisions propres à chaque mode d’abord. Nous espérons ainsi que tout clinicien mais aussi toute personne ayant un intérêt pour le fait psychique puisse trouver dans cet ouvrage matière à enrichir sa réflexion comme sa pratique… Daniel Marcelli François Marty
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