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Portsmouth PDF

259 Pages·1990·1.41 MB·French
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Akira YOSHIMURA LES DRAPEAUX DE PORTSMOUTH Traduit du japonais par Minoru Fukuyama En collaboration avec Véronique Meilland Éditions Philippe Picquier Titre original : Pohtsumasu no hata © Texte original japonais, 1979 : Akira Yoshimura Originally published in Japan. All rights reserved. © Traduction française et introduction : Minoru Fukuyama, 1990. ISBN : 2-87730-035-8 Commentaire du traducteur On pourrait dire que ce livre, Les drapeaux de Portsmouth, écrit par Akira Yoshimura, est la biographie de Komura Jutaro, diplomate japonais qui joua un rôle essentiel dans la conclusion du « traité de paix de Portsmouth » entre la Russie et le Japon après la guerre russo-japonaise de 1904-1905, mais c’est aussi une œuvre documentaire sur la diplomatie japonaise de cette époque-là en même temps que le récit du drame mondial de la guerre russo-japonaise et du « traité de paix de Portsmouth » qui suivit. Dans ce texte, on apprendra comment les Japonais, à commencer par les dirigeants, s’efforcèrent avec l’aide des militaires de protéger l’intérêt national et la sécurité d’État en observant les mouvements des grandes puissances d’Europe, comment Komura Jutaro, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Japon, et Sergei Yulievich Witte, ambassadeur de Russie, déployèrent leurs talents de diplomates au cours des négociations de la conférence pour la conclusion du traité de paix, comment les grandes puissances d’Europe et les États-Unis, notamment Théodore Roosevelt, le vingt-sixième président des États-Unis, se conduisirent à cette époque et comment le peuple japonais réagit à la conclusion de ce traité. En bref, le roman Les drapeaux de Portsmouth est une œuvre historique qui se réfère fidèlement aux documents officiels et privés non seulement japonais mais aussi étrangers. Comme pour toutes ses autres œuvres documentaires, Akira Yoshimura a visité les endroits en question – ici Portsmouth, port du New Hampshire sur l’océan Atlantique, pour une reproduction fidèle des scènes de la conférence de paix. Il s’est également servi de nombreux témoignages obtenus par des interviews pour décrire la conduite des personnages de ce livre. Comme le romancier le dit dans la postface de son œuvre : « Le traité de paix de Portsmouth est une crête dans la période entre la restauration Meiji et la guerre nippo-américaine dans le Pacifique » ; après la conclusion du traité de paix avec la Russie, les militaires japonais ont étendu leur influence sur la politique du pays et finalement le Japon s’est engagé en 1941 dans la guerre du Pacifique. Immédiatement après la grande victoire de l’armée navale japonaise lors de la bataille de la mer du Japon, Théodore Roosevelt aurait dit à Takahira Kogoro, délégué général du Japon aux États-Unis : « Il s’est passé moins de quarante ans depuis la restauration Meiji, et cependant, la force militaire et l’industrie japonaises ont pris un essor prodigieux. Le Japon est devenu, en outre, un pays redoutable qui jouit d’une civilisation inébranlable. C’est un prodige dans le monde entier. S’il continue à se développer au rythme actuel, d’ici dix ans, il deviendra le plus grand pays industriel du Pacifique. S’appuyant sur la morale militaire fondée sur le Bushido (code d’honneur du samouraï), il deviendra une forte nation militaire qui comptera parmi les plus importantes du monde entier et pourra un jour menacer les États-Unis. » Malheureusement sa prévision se réalisa quarante ans après avec « la guerre du Pacifique » en 1941. Comme on peut s’en souvenir après la Deuxième Guerre mondiale, les Japonais ont reconstruit un pays totalement en ruine introduisant les techniques modernes des pays avancés. Manquant de ressources naturelles, les Japonais importèrent des matières premières et exportèrent des produits. Aujourd’hui, près de quarante ans après la défaite, le Japon est un pays puissant dans le domaine économique sous un régime politique « démocratique ». Il constitue une grande menace pour les pays étrangers à cause des « frictions économiques ». Les deux procédés de développement du Japon, c’est-à-dire celui d’après la restauration Meiji et celui d’après la Deuxième Guerre mondiale, se ressemblent étonnamment. Le premier était un développement industriel qui s’appuyait sur l’augmentation de la force militaire, et dépensait la puissance d’État dans les guerres successives en Chine, afin de réagir contre les grandes puissances étrangères. Le second était l’élargissement de la puissance d’État dans le domaine économique sans aucune consommation de cette puissance dans une guerre. Ce texte qui décrit l’histoire japonaise, il y a quatre-vingts ans, dans un certain sens, nous apprend aussi les méthodes de pensée, la conduite et le caractère des Japonais. En 1981, cette œuvre a été adaptée pour la télévision nationale NHK puis pour la télévision américaine. Le traducteur espère que ce texte sera utile aux étrangers pour comprendre le Japon et les Japonais d’aujourd’hui et de demain. Minora FUKUYAMA, traducteur, membre de la Maison franco-japonaise, le 12 septembre 1988. CHAPITRE PREMIER Dans la deuxième décade du mois de juin 1905 (38e année de l’ère Meiji), commença à Tokyo la saison des pluies. Le 11 juin, il se mit à pleuvoir sans interruption, et les chemins s’embourbèrent. À la moindre éclaircie, le linge était étendu dans toute la ville. Il plut continuellement à torrents pendant cinq jours. Les eaux sales débordèrent des fossés. Dans les bas quartiers surpeuplés, les inondations causèrent une certaine agitation. Les précipitations de cette deuxième décade de juin atteignirent plus du double de celles des autres années et durèrent jusqu’à la fin du mois. Parfois, le vent et la pluie soudain se firent plus violents, le tonnerre retentit, il y eut des éclairs. La pluie rebondissait sur les tuiles des toits et sur les chemins. La foudre tomba un peu partout dans la ville. Puis la saison des pluies prit fin et la chaleur revint. Dans la rue, les passants agitaient un éventail et s’essuyaient avec une serviette. Les mouches se mirent à proliférer rapidement. La nuit, dans les foyers, on brûlait des bâtons d’encens pour éloigner les moustiques. Le 30 juin, de bonne heure, les marchands de drapeaux se rendirent dans les stocks de jouets, concentrés principalement près de Nihonbashi. Là, ils achetèrent des drapeaux japonais et des hampes qu’ils chargèrent sur des pousse- pousse, et passèrent de nouvelles commandes importantes. De nombreux habitants du voisinage se procurèrent eux aussi un drapeau. Un entrefilet dans le journal du matin était la cause de toute cette agitation ; la guerre russo-japonaise avait éclaté en février de l’année précédente (1904). Dès l’ouverture des hostilités, l’armée japonaise ne cessa d’écraser l’armée russe. En janvier 1905, elle avait réussi, après de violents combats à occuper Port Arthur (Lieu-chouen) considéré comme une forteresse imprenable. Après les victoires de Liaoyang et Shaho, elle mit l’armée russe en déroute lors de la grande bataille de Moukden. Dans les journaux, des articles reprenant des informations venues d’Europe et des États-Unis parlaient d’un éventuel rétablissement de la paix entre les deux pays grâce à l’intermédiaire du président américain, Théodore Roosevelt. Or, la Russie, qui avait l’intention de reconquérir les mers ravies par le Japon, envoya, une fois réorganisées, la deuxième et la troisième escadres du Pacifique. Venues du sud de l’Afrique, après une longue traversée, elles s’approchèrent de la zone littorale du Japon. La perspective de ce grand combat naval agita le monde et le débat sur la réconciliation des deux pays s’envola en fumée. Le 27 mai, l’escadre russe affronta donc celle du Japon dans le détroit de Tsushima. La bataille, violente, dura deux jours ; le résultat fut sans précédent : les Japonais remportèrent une victoire totale et la force maritime russe fut complètement anéantie. Au Japon, on publia de nouveau les informations qui circulaient en Europe et aux États-Unis à propos des pourparlers de paix. Le 12 juin, les journaux annoncèrent que le gouvernement japonais avait accepté la proposition du président américain Théodore Roosevelt d’organiser une rencontre en vue d’une réconciliation : le premier ministre Katsura Taro en reçut l’offre par l’intermédiaire de Takahira Kogoro, délégué général japonais en poste aux États-Unis. Au nom du gouvernement japonais il répondit à Roosevelt qu’il enverrait un plénipotentiaire aux États-Unis pour en négocier les conditions. De plus, on apprit que Washington avait été choisi officieusement comme lieu de rencontre. Le peuple japonais lut dans l’édition du matin, le 30 juin, la nouvelle suivante : Monsieur le baron Komura, ambassadeur plénipotentiaire du Japon et ministre des Affaires étrangères et sa suite, ont décidé de partir de Yokohama le 4 juillet par le bateau à voiles américain Cobtick. La succursale de la compagnie maritime américaine de Yokohama a préparé des cabines pour le groupe. Les marchands, alertés par cet article commandèrent donc des drapeaux en grande quantité. On prévoyait que le drapeau national Hinomaru serait hissé à la porte de chaque maison le jour du départ de l’ambassadeur plénipotentiaire Komura Jutaro et qu’une foule viendrait se rassembler certainement drapeau en main, le long de la route empruntée par sa suite. Ainsi, pouvait-on imaginer qu’il fallait prévoir une grande quantité de drapeaux. Ce drapeau national Hinomaru était devenu un objet familier dans la vie des Japonais. Vers la fin du Shogounat, Shimazu Nariakira, souverain de la province de Satsuma, construisit un bateau à voile de type européen, le Shohei-maru et l’offrit au gouvernement shogounal. Il demanda que le drapeau Hinomaru en soit le pavillon afin que le bateau ne soit pas pris pour un bâtiment étranger. Le gouvernement shogounal accepta sa requête et fit du drapeau Hinomaru le pavillon des navires japonais en général. Après la Restauration Meiji, en 1870, le gouvernement fixa le format standard et déclara que le Hinomaru serait dorénavant le drapeau national. Il n’était alors hissé que sur les bâtiments officiels. Mais au moment où la guerre sino-japonaise éclata, en 1894, il devint populaire. Au début de la guerre russo-japonaise, en février 1904, le drapeau national eut sa place dans tous les foyers. Quand les éditions spéciales des journaux annoncèrent les victoires des premiers combats au large d’Incheon (Chemulpo) et Jiu-liancheng, le peuple, terrifié par la Russie, défila la nuit dans les rues, portant drapeaux et lampions et poussant des vivats pour exprimer sa joie. Cette fièvre se répéta à chaque annonce d’une nouvelle victoire. À Tokyo le 10 mai, un de ces rassemblements regroupa près de cent mille manifestants. Vingt personnes furent tuées au cours d’une bousculade. Lors des succès de l’armée japonaise aux batailles de Seikan, de la mer Jaune, de Port Arthur et de Weihaiwei, les gens accrochèrent le Hinomaru à leur porte ainsi que le drapeau militaire du Soleil Levant. Par la suite, il fut quotidiennement hissé à chaque porte le matin et rentré le soir. On vit alors partout dans le pays ce drapeau blanc avec un soleil rouge. Il n’existait pas de magasins spécialisés en drapeaux. Seuls les marchands de poupées s’occupaient de leur fabrication, ils en confectionnaient qu’ils fixaient aux poupées samouraï. Aussi, de nombreux foyers avaient dû acheter un drapeau pour fêter les victoires. On espérait que cela se reproduirait à l’occasion du départ de l’ambassadeur plénipotentiaire Komura, et que la demande en drapeaux serait alors d’une importance sans précédent. En l’espace d’un an et quatre mois, depuis que durait la guerre russo-japonaise, la couleur rouge des vieux drapeaux avait terni et l’on prévoyait que le départ du plénipotentiaire, symbole de la fin de la guerre et de la victoire, serait salué de drapeaux blanc et rouge éclatants. La demande en drapeaux augmenta de jour en jour. C’était la morte saison pour les fabricants de poupée ; ils se consacrèrent à la confection des Hinomaru. Leurs familles participèrent à ce travail et de nombreuses personnes furent employées temporairement. Il y avait ceux qui coupaient les tissus et les ourlaient, ceux qui faisaient cuire le konnyaku (colle pour fixer la teinture) dans une marmite posée sur un foyer à même le plancher, ceux qui le mélangeaient avec la teinture, ceux qui posaient un patron sur le tissu et appliquaient la teinture rouge à l’aide d’un pochoir en écorce de bambou. Tous travaillaient activement. Des sous-traitants apportaient des billes de sciure de bois durcie avec de la colle qui étaient ensuite dorées. Sur les perches de bambou, livrées par pousse- pousse, on peignait de larges bandes noires. À l’origine, les ouvriers du chemin de fer se servaient de ces perches peintes comme instruments de mesure. Puis elles furent utilisées comme porte-drapeaux lors de l’inauguration des voies ferrées. C’est ainsi qu’elles se vulgarisèrent. On laissait s’évaporer l’eau des drapeaux, puis quand les teintures étaient séchées, les marchands venaient les chercher. Les drapeaux Hinomaru, bien alignés sur les séchoirs des fabricants de poupées, flottaient dans la lumière du soleil d’été. Au milieu du mois de décembre 1904 on vit, dans les pays occidentaux se manifester les premiers signes en faveur de la paix. À cette époque, conduite par le général Nogi Maresuke, la troisième armée de terre japonaise se livrait à des attaques répétées contre la forteresse de Port Arthur. Le succès ou l’insuccès de la prise de cette forteresse déciderait de l’issue de la guerre russo-japonaise et serait décisif non seulement pour le sort de l’armée de terre mais également pour celui de la force navale. Lors de la bataille de la mer Jaune et celle au large d’Ulsan qui fit suite au combat près d’Incheon (Chemulpo), les forces navales japonaises réussirent à bloquer dans Port Arthur l’escadre russe, forte de cinq cuirassés dont le Létouisan, deux croiseurs et plus de dix destroyers, contre-torpilleurs et canonnières. Mais le tsar, afin de reprendre le contrôle de la situation, organisa la deuxième escadre du Pacifique, composée principalement de sept cuirassés, qui partit pour les mers orientales. Si cette deuxième escadre russe s’approchait de la zone littorale japonaise, la surveillance de l’entrée de Port Arthur par l’escadre japonaise deviendrait naturellement impossible. Les forces navales russes enfermées dans Port Arthur s’échapperaient en rompant la ligne de blocus et rejoindraient la deuxième escadre. Les Russes disposeraient alors d’une puissante flotte de douze cuirassés. Elle détruirait sans doute la marine japonaise, composée de quatre cuirassés, et couperait la route du ravitaillement entre le Japon et la Chine, isolant ainsi l’armée de terre japonaise. S’en suivrait l’anéantissement complet des troupes japonaises par manque de munitions et de matériel de guerre. Les armées japonaises de terre et de mer souhaitaient vivement s’emparer de Port Arthur et détruire l’escadre russe bloquée dans le port. Chargée de cette mission, la troupe d’élite d’infanterie de la troisième armée lança une attaque générale sur Port Arthur le 19 août.

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