ebook img

Platon: Œuvres complètes. Tome IV, 3e partie: Phèdre PDF

383 Pages·1933·13.638 MB·French
Save to my drive
Quick download
Download
Most books are stored in the elastic cloud where traffic is expensive. For this reason, we have a limit on daily download.

Preview Platon: Œuvres complètes. Tome IV, 3e partie: Phèdre

COLLECTION DES UNIVERSITÉS DE FRANCE publiée sous lepatronage de rASSOClATION GUILLAUME BUDÉ PLATON OEUVRES COMPLÈTES — TOME IV 3« PARTIE PHÈDRE TEXTE ÉTABLI ET TRADUIT m Léon ROBIN Professeur à la Sorbonne. PARIS SOCIÉTÉ D'ÉDITION « LES BELLES LETTRES q5, boulevard raspail ig33 Tous droits réservés. Conformément aux statuts de l'Association Guillaume Budé, ce volume a été soumis à l'approbation de la commission technique, qui a chargé M. Louis Méridier d'en faire la revision et d'en surveiller la correction en collaboration avec M. Léon Robin. http://booksenligne.blogspot.com/ PHÈDRE 844287 NOTICE I LE PHÈDRE Entrele Banquet et le Phèdre la rcla- et te Phèdre l*on est une ^e ce^es <IU' nous sont Ie plus familières: dans tous les deux en effet il est parlé de l'amour et ce sonteux qu'on utilise pour définir la conception que s'en fait Platon. Toutefois, ainsi comprise, la relation n'est peut-être qu'extérieureet superfi- cielle. Sans doute n'est-il pas faux de dire que l'amour est le sujet du Banquet ; mais c'est une question, comme on le verra (section ///), de savoir s'il en' est pareillement du Phèdre. Bien plus, même à propos du premier, on avait pu se demander (Notice p. xcn, n. i)s'il ne s'ycachait pas une autre intention, celle d'opposer, sur ce thème, le point de vue de la Philosophie à celui des Sophistes et des Rhéteurs. Cette intention se dévoile etprend corps dans le second dia- logue, où décidément le problème de l'amour semble bien n'être pour Platon qu'uneoccasiondedirecommentilconçoit la culture et l'enseignement, d'une façon quicontraste vive- ment avec l'idée qu'on s'en faisait dans les écoles de rhéto- rique. Il en résulte d'ailleurs, ainsi qu'on essaiera de le montrer plus tard (Notice, p. cxxxv sqq.), un approfon- dissement et un élargissement de la conception même de l'amour par la nécessité, ouvertement reconnue, d'y intro- duire une théorie de l'àme. Il est possible aussi que, dans le Banquet, cette nécessité fût déjà entrevue, si vraiment la •connaissance de l'âme humaine est, comme je l'ai pensé PHÈDRE ii (p. 92, n. 1 et Notice, p. vu), la condition qui permettrait au même homme d'exceller également dans l'art tragique et l'art comique. En tout cas ce qui, d'après le Phèdre, fait l'infirmité de l'art de la parole, en général et tel qu'il est présentement constitué, c'est justement l'ignorance où il est du rapport de ses moyens d'action avec la nature vraie des âmes humaines. L'authenticité du Phèdre n'a pas plus Authenticité besoin d.être discutée que ceue du Ban, GZ CL3.Z& (iP la composition. (luet\ E,,e fst garantie, d'abord par plusieurs références aristotéliciennes, soit avec le titre seul, soit avec le nom seul de Platon 1, ensuite parla tradition unanime de l'Antiquité. La question délicate, c'est de savoir à quelle époque Platon l'a écrit. Il y adansce dialogueune telle allégresse de vie, une si grande fraîcheur de jeunesse qu'on a pendant longtemps ajouté foi à une allégation rapportée par quelques écrivains anciens d'époque tardive i, que le Phèdre serait le premier ouvrage de Platon, antérieur même, disent certains, à la mort de Socrate et datant de savingt-cinquièmeannéeenviron. Celte opinion, à la vérité, avait rencontré des adversaires ; maisce sont les travaux des Stvlisticiens qui l'ont le plus fortement ébranlée. On ne peut dire cependant qu'ils lui aient porté le coup de grâce et qu'il y ait rien d'entièrement décisif dans les résultats auxquels a conduit la comparaison de la langue du Phèdre avec celle de dialogues que leur parenté stylistique avec les Loisa fait reconnaître eux-mêmes comme 1. Pour le premier cas: Rhet. III 7 fin (à propos de l'emploi ironique de la langue de la poésie). Pour le second: Top. VI 3, i4ob 3 sq. ; Metaph. A 6, 1071 b, 3i-33, 37 sq. A ces textes, les seuls que mentionne Bonitz(Index 598b, 25 sqq.), ilfautsans doute ajouter deux autres passages, qui semblent viser le Phèdre mais où Platon n'est même pas nommé : Phys. VIII 9, 265 b, 32-266 a, 1 et De an. I 2, 4o/i a, 20-25. 2. Diogène Laërce III 38; Hermias, Commentaire du Phèdre p. 9, 14-ï9 Couvreur; Olympiodore(leJeune) ViedePlaton(vol. VI du Platon d'Hermann, p. 192 s. med.), témoignage qui se confond avec celuidelaScholie à 227a(Hermannp. 262), d'aprèslecommen- taire sur le Premier Alcibiade; car la 1 je de Platon est elle-même extraite de ce commentaire (cf. l'éd. de ce commentaire par Creu- zer II, p. xviii n. 2 et p. 2). Cf. Noticep. lix. NOTICE m tardifs: une statistique brutale des particularités verbales risque en effetde méconnaître lesaltérations apportées dans la prose du second discours de Socrate par le seul parti-pris poétique qui le domine d'un bout à l'autre. Encore moins déterminantespour renoncerà voirdanslePhèdreuneœuvre de jeunesse seraient d'ailleurs les raisons tirées des rapports personnels entre Platon et Isocrate : on verra plus tard combien elles sont fragiles (p. clxxii sqq.). Une discussion sur ce point entraînerait donc (ort loin : aussi me conten- terai-je de quelques indications sur la position que me semble avoir le Phèdre dans l'œuvre de Platon. Tout compte fait, la prétendue objectivité sur des matières historiquement si obscures n'est, je crois, qu'une chimère : aux vraisem- blancesqu'on a pu obtenir s'en opposent d'autres, et l'attirail de dates dont chacun étaie sa conviction est un trompe-l'œil. Aussi m'appuierai-je uniquement sur l'analyse interneet sur des considérations relatives au contenu : subjectivité pour subjectivité, celle-ci se reconnaît au moins pour telle. En premier lieu, je crois le Phèdre postérieur au Banquet. Si c'était l'inverse, on comprendrait mal que, dans un dia- loguespécialementconsacréà l'amour,Platoneneûtdépouillé lathéoriededéveloppements qui,sansla modifier,luidonnent cependant toute sa portée. D'autre part, à supposer que Pla- ton eût déjà écrit cet entretien de Socrate avec Phèdre sur l'amour et à propos d'un Érôticos de Lysias, aurait-il pré- senté dans le Banquet comme il l'a fait (177 a sqq.) les plaintes de Phèdre sur la négligence des auteurs à l'égard d'un tel sujet? On pensera bien plutôt que, en donnant ici pour interlocuteur à Socrate Phèdre, et non pas un autre, il s'est souvenu des plaintes dont il s'agit : il y aurait donc là un renvoi implicite au Banquet. Il y en a d'ailleurs d'autres et qui sontplus manifestes : Phèdre est celui des hommesde son temps, exception faite pour Simmias le Thébain, qui a fait se produire le plus de discours(242 ab) et, à ce titre, il mérite d'être appelé « le père de beaux enfants » (261 a)2. 1. On la trouvera dansma Théorieplatoniciennedel'Amour(1908), p. 63-109. ^oi1" UD* excellente mise au point de la question dans A. DièsAutourde Platon, p. a5o-a55. 2. Cf. Banquet, Notice, p. xvn et, ici, p. 27 n. 2. L'interpré- tation quej'aidonnéede xaXXi^ai? n'estqu'unede celles quepropose iv PHÈDRE Enfin nombre de passages du Phèdre ne prennent, je crois, tout leur sens que si on les rapproche du Banquel1. Mais une deuxième question se pose aussitôt : le Phèdre est-il immédiatement consécutif au BanquetP C'est ce que suppose le plan de cette édition de l'œuvre de Platon (vol. I, p. i3), en mettant le Phèdre entre le Banquet et la Républi- que. Mais on a eu soin d'ajouter que la chronologie sur laquelle se fonde ce plan est conjecturale : sur une question aussi controversée que celle de la place du Phèdre la sagesse était donc de prendreun parti moyen et, d'autre part, de ne pas le séparer d'un dialogue dont le sujet est voisin. Il n'en reste pas moins que l'antériorité du Phèdre par rapport à la Républiquen'est nullement hors de question. Mon sentiment personnel est qu'au contraire il lui est postérieur. D'abord il est psychologiquement peu vraisemblable que, aussitôt après le Banquet, Platon ait senti le besoin d'en élargir la doctrine pour tracer une image, inégalement poussée sans doute, de la culture philosophique dans son ensemble et pourl'opposer à la culture rhétorique : un temps de méditation semble nécessaire. Cet intervalle assurément pourrait avoir été vide de tout écrit. Si en revanche il existe un ouvrage sans lequel le Phèdre serait souvent inintelligible, c'est dans l'intervalle qu'il faudra placer celui-là. Or, c'est ce que je voudrais maintenant établir, la République satisfait justement à cette condition et, par conséquent, le livre I étant supposé déjà écrit depuis longtemps, la composition de ce grand dialogue, en un seul ou en plusieurs moments, me parait avoir assez abondamment rempli cet intervallepour donner à l'élargis- sement dont je parlais le temps de se préparer. Ceci se véri- fiera peu à peu par la suite. Dès à présent je dirai que le mythede l'attelage ailé serait difficilement intelligible si la tripartition de l'âme, au livre IV de la République, ne per- mettait de l'interpréter ; admet-on que le mythe a précédé Hermias (323, 17 sq.), mais c—'est celle que développe Plutarque Quaest.platon. II 1, 1000 fsq. Voir en outre, à proposde 228 b la n. 1 de la p. 3. 1. Voirp. ii n. 1 fin ; p. 18 n. 3; p. 19 n. 1 ; p. 22 n. 1 ; p. a3 n. 3; p. a5 n. 1; p. 28n. 3 ; p. 46 n. 3; p. A7 n. 1 ; p. 02 n. 1,2 et 4 ; p- 53 n. 1 fin ; p. 68 ni 1 ; p. 96 n. 1. Cf. aussi Notice p. lxix sq., les notes de p. lxxii, p. civ n. 2, cxxix etc. NOTICE v l'explication? On devra nier alors le caractère denouveauté que, selon moi, Platon a incontestablement attribué à cette explication (cf. p. cxvn sqg.). Surleproblèmede l'immorta- lité del'âme, il y adanslaRépubliquedestémoignagesvisibles d'embarras (cf. p. cxxv) ; ne seraient-ils pas fort étranges après la démonstrationdu Phèdre, puisquecelle-ciest conser- vée par Platon à la fin de sa carrière, quand il achève les Lois(X. 8g4 e-8g5c, 896 ab)? L'eschatologieduPhèdre serait, sur certains points, bien énigmatique sans l'eschatologie similaire du livre X de la République, notamment la combi- naison du choix avec le tirage au sort pour les âmes qui vont commencer une nouvelle existence terrestre (249 b) ; de même, dans la hiérarchie des prédestinations, la place du tyran au neuvième et dernier rang de l'échelle (2^8 e; cf. p. xc). Enfin il ne me parait pas douteux que le « lieu supra-céleste » du Phèdre ne soit rien d'autre qu'un doublet mythique du « lieu intelligible » de la République (VI 5o8 bc, 5og d; VII 517 b), et il n'y a ' d'autre différence, de la République au Phèdre, pour la situation dans laquelle est ce lieu par rapport au ciel astronomique, qu'une plus grande précision et uneaffinité plus marquée avec la psycho-astrolo- gie du Timée et des Lois. C'est qu'en effet le Phèdre présente de remarquables res- semblances avec les dialogues de la dernière période. Je laissedecôté le pointde vue stylistique etje reconnais à quel point ils diffèrent dans la forme littéraire; mais il y a des ressemblances de fond sur lesquelles il est impossible de fermer les yeux. N'est-ce pas tout d'abord un fait significatif que l'aspect, vraimentnouveau en dépitde certainesanticipa- tionsdela République,queprend dans le Phèdreladialectique avec l'importance prépondérante de la méthode de division, soit précisément celui que développent avec prédilection le Sophiste et le Politique, celui sur le sens profond duquel le Philèbe (16 c-e) insiste avec tant de force (cf. p. cliv sqq.) ? En affirmant la supériorité de la dialectique, sous le rapport de l'exactitude, sur tous ceux des autres arts où il y a leplus d'exactitude, ce dernier dialogue précise d'ailleurs, non sans solennité, que la rhétorique est à cet égard complètement 1. Contrairement à ce quej'ai dit par erreurdans la Théorie pla- tonicienne de l'Amour, p. 84- PHÈDRE vi hors de cause (58 a-d). Bien plus, c'est decette méthode même du Phèdre que les Lois (XII 966 a et cf. p. clvii) exi- gent une parfaite possession chez les magistrats du Conseil Nocturne. On aura dans la suite plusieurs occasions particu- lières de rapprocher Phèdre et Philèbe(p. 59n. 1,p. 61 n. 2, p. 87 n. 1). De son côté le Politique éclairera, lui aussi, cer- tains pointsobscurs (p. cxv) : tout ce qui y est dit des carac- tères de l'art(283 c-287 b) développe des indications, encore imprécises, du Phèdre sur le même sujet. Quant au Timée, il est difficile d'en exposerla doctrine sur l'âme sans se réfé- rer constamment au Phèdre, et la réciproque, on le verra, n'est pas moins vraie. Au surplus, quand le Phèdre affirme solennellement (269 e-270 c) qu'il n'y a pas de vraie rhéto- toriquc capable d'agir sur les âmes, non plus que de vraie médecine capable d'agir sur les corps, sans la connaissance de la relation quiunitau Tout l'âme aussi bien que le corps, n'y a-t-il pas là comme une annonce du Timée? Le dialecti- cien philosopbe qui à la rhétorique empirique veut en sub- stituer une autre, telle qu'elle soit un art éducateur fondé sur la science, devradoncpréalablementconnaître la Nature; or cette exigence est celle à laquelle répond le Timée. Enfin nous avons vu tout à l'heure comment le livre X des Lois ne retient qu'une seule preuve de l'immortalité, qui estjus- tement celle du Phèdre. Tant depointsdecontact entrenotre dialogue et ceux de la vieillesse conduisent donc à penser que, postérieur auBanquet età laRépublique, c'est deceux-là d'autre part qu'il estle plus voisin'. Schleiermacher avait cru trouver dans le Phèdre le pro- gramme de toute la philosophie de Platon, programme tracé dans l'enthousiasme d'unejeunesse inspirée; chaquedialogue venait à son tour développerun des points de ce programme. L'invraisemblance psychologique d'une telle conception suf- firait à la condamner. Cependant il n'était pas faux de regarder le Phèdre comme un raccourci de l'ensemble : c'est qu'en effet le dialogueretient beaucoup dupasse, notamment 1. Je dois pourtant renoncer à la 'témérité de mon ancienne conjecture (op. cit., p. ii4-ii8): je n'oserais plus aujourd'hui considérer tout ce qui, dansle Phèdre, s'apparente à la doctrine des derniers dialogues ou, tout au moins, du Timée, comme un rappel sommaire de cequi a été établi dans ceux-ci.

See more

The list of books you might like

Most books are stored in the elastic cloud where traffic is expensive. For this reason, we have a limit on daily download.