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Ovide: Les Métamorphoses. Tome I-III PDF

887 Pages·1966·15.69 MB·French, Latin
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COLLECTION DES UNIVERSITÉS DE FRANCE publiée sous le patronage de T ASSOCIATION GUILLAUME BUDÉ OVIDE LES MÉTAMORPHOSES TOME I (I-V) TEXTE ÉTABLI ET TRADUIT PAR Georges LAFAYE QUATRIÈME TIRAGE PARIS SOCIÉTÉ D’ÉDITION « LES BELLES LETTRES » 95, BOULEVARD RASPAIL 1966 Conformément aux statuts de l'Association Guillaume Budé, ce volume a été soumis à Γapprobation de la com­ mission technique, qui a chargé M . Henri Goelzer d'en faire la révision et d'en surveiller la correction en collabo­ ration avec M . Georges Lafaye. Société d'Edition "Les Belles Lettres" 1966 1er Tirage 1928 INTRODUCTION I A la fin de l’an 8 après J.-C., Date et publication lorsque Ovide sortit de Rome pour de l’ouvrage. prendre le chemin de l’exil, son poème sur les Métamorphoses, quoique n’ayant pas reçu, dans le détail, une forme définitive à son gré, était néanmoins terminé. Quand l’avait-il commencé? Peut-être en l’an 1 avant J.-C./après avoir publié l’Art d’aimer, peut-être même plus tôt, s’il était vrai qu’il a composé certaines parties des Métamorphoses pen­ dant qu’il travaillait à l’Art d’aimer1. On a voulu remon­ ter encore beaucoup plus haut, mais sans preuves décisives1 2. De toutes manières, ce vaste poème en quinze chants suppose, même chez un homme d’une veine aussi facile, un long effort; on peut penser au moins qu’Ovide y a fait entrer des morceaux écrits à diverses époques de sa vie, qu’il avait gardés en réserve dans ses coffres. Il a lui-même instruit la postérité des conditions déplorables ^dans lesquelles son ouvrage vit le jour. 1. C’est ce que soutient Pohlenz, Vie Abfassungszeit von Ovids Metamorphosen, dans 1 ’Hermes, XLVIII (1913), p. 1. Les rappro­ chements qu'il établit sont très justifiés ; cependant il ne s’ensuit pas nécessairement que les passages parallèles soient de la meme époque. 2. D’après Bannier, dans 1 ’Archiv für lalein. Lexikographie XI (1898), p. 251-260, les neuf premiers chants seraient antérieurs à la mort de Virgile (18 avant J.-C.). INTRODUCTION. Lorsqu’il apprit, à Rome, la sentence qui le frappait, il brûla son manuscrit de sa propre main, soit, dit-il, par dépit contre les Muses, causes de sa disgrâce, soit parce que l’œuvre était encore imparfaite, à l’état d’ébauche, .. quod adhuc crescens el rude carmen erat. Mais de son témoignage il résulte aussi que d’autres exemplaires étaient déjà répandus dans Rome à ce moment : Quae quoniam non sunt penitus sublata, sed exstant, Pluribus exemplis scripta fuisse reor. A peine avait-il quitté la capitale qu’il s’inquiétait de savoir ce qu’allaient penser, d’après ces copies, les lecteurs qui ignoraient qu’il n’avait pas mis la dernière main à son œuvre, « his summam... abesse manum ». Elle avait été enlevée de l’enclume en plein travail et le dernier coup de lime lui avait manqué. Ablatum mediis opus est incudibus illud Defuit et scriptis ultima lima meis. A l’ami qu’il chargeait de veiller, en son absence, sur ses Métamorphoses, il écrivait encore qu’il n’avait pas publié son livre lui-même ; on avait comme ravi à son bûcher funèbre ce poème imparfait ; il l’aurait corrigé, s’il l’avait pu1. Et ce n’est pas tout : arrivé à Tomes, Ovide, dès la fin de l’an 9, et encore l’année suivante, revenait sur ce sujet ; s’adressant à Auguste, dans une de ses lettres éplorées, il répétait la même prière ; il iesistait sur les craintes que lui inspirait l’état des copies qui circulaient à Rome depuis son départ*. Il est donc assez naturel de supposer qu’aussitôt établi dans sa résidence barbare et pendant les neuf 1 2 1. Tristes, I, vu, 13, 19, 27. Voyez le texte de I, vu, 35-40, plus bas, page 2. Cf. I, i, 117. Le premier livre des Tristes a été achevé au printemps de l’an 9. 2. Tristes, II, 555; III, 14, 23. INTRODUCTION. Ill années qui précédèrent sa mort il occupa une partie de ses loisirs forcés à revoir, à corriger le poème1 et que des copies plus satisfaisantes rentrèrent à Rome par ses soins ; mais tous les écrits qui portaient son nom, même les plus innocents, étaient toujours tenus à l’écart des bibliothèques publiques* ; il est peu probable qu’un libraire se fût risqué à les mettre en vente. Les exem­ plaires nouveaux, s’il y en eut, circulèrent comme les anciens, isolément et sans garanties, jusqu’à la mort du poète (an 17), avec toutes les chances d’erreur et de confusion que comportait une transmission si irrégu­ lière. Les Métamorphoses, il est vrai, ne sont pas, comme l’Énéide, une œuvre posthume, quoi qu’en dise l’auteur dans une hyperbolique métaphore ; mais la source en a été troublée dès leur apparition et elles n’ont pas eu, après Ovide, leur Varius et leur Tucca ; quand elles vinrent entre les mains de Sénèque le père, qui les cite un des premiers 2 31, le texte, par la force des choses, en était déjà incertain en bien des endroits4. L’empres­ sement même avec lequel les contemporains, comme il arrive d’ordinaire, recherchèrent les vers d’un écri­ vain célèbre, frappé par le pouvoir, n’a pu qu’ajouter encore aux inconvénients de cette publication tumul- 1. Suivant Pohlenz, p. 10-12, c’est alors qu’il y aurait intro­ duit l’histoire d’Actéon (III, 138-252) et les éloges d’Auguste et de Tibère (XV, 822-839). 2. Tristes, III, i, 65; Pontiques, I, i, 5. 3. Témoignage d’admiration d’un autre contemporain, P. Vini- cius (consul en l’an 2), dans Sénèque, Controu., IX, 5 (28), 17 ; cf. X, 4 (33), 25 : ans 37-39. 4. C’est ainsi que les deux Sénèque, citant les Métamorphoses, donnent des variantes qu’on ne retrouve dans aucun de nos manu­ scrits du poème : I, 388 suspensa ; VI, 58 quod lato pauiunt ; XIII, 504 pugnat ; XV, 273 potatus ; 275 tacito ; 276 undis ; 320 quisque ut ; 329 Linceius. De même Quintilien citant I, 502 quaeque latent. Ils ont pu, il est vrai, citer de mémoire, autre cause fréquente d’altération ; mais comment croire que leur mémoire ait été si souvent en défaut? INTRODUCTION. tueuse1. La critique savante ne doit jamais perdre de vue la disgrâce initiale qui a pesé sur la destinée d’un poème ainsi lancé dans le monde. La croyance aux métamorphoses Les modèles1 2 3. était aussi ancienne en Grèce que la mythologie et, depuis Homère, il n’était guère de poètes qui ne s’en fussent inspirés à l’occasion; mais ce ne fut qu’à partir de l’époque alexandrine qu’on eut l’idée de composer des recueils en prose ou en vers qui groupaient, sous un même titre, un grand nombre de fables relatives à des héros changés en bêtes, en plantes ou eu rochers. Le plus ancien semble avoir été celui de Nicandre de Colophon, lequel vivait au ϊΐθ, ou plutôt peut-être au ni® siècle avant notre ère8. Puis était venu le poème de Parthénius de Nicée, grammairien grec qui fut, à Rome, le maître de Cornelius Gallus et de Tibère. D’autres avaient divisé la matière et traité à part une catégorie de métamorphoses : on lisait avec faveur, avant même le temps de Nicandre, une Ornithogonie, recueil en vers où les fables sur les héros changés en oiseaux avaient été rassemblées par un inconnu, sous le nom de Boéo, ancienne prêtresse de Delphes. La Bougonia enseignait comment les abeilles naissaient du cadavre d’un bœuf. Toutes ces histoires merveilleuses de la période hellénistique ont 1. Avant l'exil, ce fut un « opus ablatum mediis incudibus * (Tristes, 1, vu, 29) ; « haec sunt de domini funere rapta sui » (38). La curiosité publique fut-elle plus patiente après l’exil ? 2. Je résumé ici mon mémoire sur Les Métamorphoses d’Ovide et leurs modèles grecs (Bibliothèque de la Faculté des lettres de Paris, XIX), 1 vol., Paris, 1904. Pour le compléter, voir notamment Dietze, Komposition und Quellenbenutzung in Ovids Met., Ham­ bourg, 1905; Zinzow, De Timaei apud Ouidium uestigiis, Greifs­ wald, 1906 ; Castiglioni, Studi inlorno alle fonti e alla composi- zione delle Met. di 0., Pise, 1906 ; Vollgraff, Nikander und Ovid, Groningue, 1909 ; Laudien, Zur mythogr. Quelle der Met. Ovids, Jahresber. d. philol. Vereins zu Berlin, XLI, 1915, p. 129. 3. Opinion de Vollgraff. INTRODUCTION. V eu un très vif attrait pour les poètes latins, prédéces­ seurs ou contemporains d’Ovide, pour Catulle, Calvus, Helvius Cinna, pour l’auteur de la Ciris1 ; et, sans parler de YOrnithogonie d’Aemilius Macer, l’ami d’Ovide^ qu’est-ce que le Chant de Silène, chez Virgile, sinon l’esquisse d’un vaste poème, commençant, comme celui d’Ovide, avec les origines du monde et dans lequel les métamorphoses, si elles ne sont pas le sujet unique, occupent au moins une très large place?1 2 Un compilateur grec, qui a vécu sans doute vers le temps de Marc-Aurèle, Antoninus Liberalis, nous a laissé un sommaire de métamorphoses fabuleuses, précieux pour l’étude des sources d’Ovide. Il est, en somme, assez hasardeux de décider, même avec le secours de Libe­ ralis, quel est, parmi les poètes grecs qui s’étaient consacrés spécialement à ces sortes de légendes, celui qu’Ovide a suivi de préférence. Les présomptions semblent être plutôt en faveur de Nicandre3, si tant est que le poète latin ait pris à ces écrivains autre chose que l’idée principale de l’ouvrage et la forme générale de la composition, qui n’est pas du reste ce qu’on y peut trouver de plus heureux. Il faut aussi attribuer une part aux manuels scolaires, aux répertoires des mytho- graphes qui avaient classé les traditions par séries, comme Liberalis devait le faire plus tard, à leur exemple, quoique leur influence, autant qu’on en peut juger, se soit exercée sur Ovide par une longue pratique, datant de l’enfance, bien plus que par une consultation immédiate et passagère. Mais ce que nous pouvons mieux saisir ce sont les rapports qui unissent les Méta­ morphoses aux poèmes grecs de tout genre, où les 1. Catulle, 66, La boucle de cheveux de Bérénice; Calvus, Io ; Helvius Cinna, Smyrna, chacun d’après Callimaque ou d’autres poètes de son école. 2. Bucoliques, VI, 31-81. Voyez Cartault, Étude sur les Buco­ liques de Virgile (1897), p. 267-287. 3. C’est le point de vue notamment de Vollgrafï, l. c. VI INTRODUCTION. mêmes fables avaient été largement développées, notamment aux chefs-d’œuvre de l’épopée et de la tragédie. Ici nous risquons moins de nous égarer; car on ne peut douter que l’intention et l’originalité d’Ovide aient été précisément, Nicandre ou quelque autre lui ayant fourni le canevas, d’y broder librement des com­ positions étendues, où il pourrait déployer toutes les ressources de son esprit ingénieux. Cependant n’oublions pas qu’à des récits inspirés par Homère, Sophocle ou Euripide il en a enlacé beaucoup d’autres dont les modèles, aujourd’hui perdus pour la plupart, lui ont été fournis par les maîtres de l’école alexandrine ; tout ce qui, dans les Métamorphoses, rappelle la poésie roma­ nesque, l’idylle et l’élégie vient de cette source. L’étude des modèles d’Ovide a au Caractères moins un résultat important; c’est de l’ouvrage. de nous convaincre que beaucoup de défauts qu’on lui a sévèrement reprochés tiennent à son sujet même ou ont été développés en lui par le goût et les habitudes d’esprit de ses contemporains. Le plus évident c’est que son poème manque d’unité1 ; il a essayé d’y remédier en classant toutes ces fables disparates dans un ordre soi-disant chronologique, qui va, comme il le dit1 2, des origines du monde jusqu’à son propre temps, puis en les rattachant les unes aux autres par des liens artificiels. Quintilien3 a bien recom­ mandé de ne pas imiter « cette froide et puérile affec­ tation des écoles, où la recherche de la transition amène toujours quelque trait qu’on applaudit comme un tour d’adresse ; c’est un jeu auquel Ovide se plaît dans les Métamorphoses. » Et le sage Quintilien d’ajouter aussi- 1. Sur la composition voyez surtout H. Peters, Symbola ad Ouidii artem epicam cognoscendam, dissertation de Gœttingue, 1908. 2. I, 3-4. 3. Inst. or. IV, I, 77. INTRODUCTION. VII tôt : « Mais il a la nécessité pour excuse ; car il fallait qu’il donnât l’apparence d’un tout à un assemblage de matériaux très divers. » Les modernes ont blâmé encore l’insistance avec laquelle Ovide raconte les aventures galantes des dieux et des héros ; on est bien obligé cependant d’admettre que les anciens n’en jugeaient pas ainsi, quand on le voit, du fond de son exil, opposer à son Art d’aimer ses Métamorphoses, même dans une lettre adressée à Auguste1. Les amours des personnages de la fable, dont certaines fort brutales, remplissent, étroitement liées à des histoires de métamorphoses, l’admirable chant que Virgile prête à Silène1 2. Ne dirait-on pas qu’il a encore une fois montré la route à Ovide, lorsque, dans les Géorgiques, il a mis en scène une nymphe qui, tout en filant, racontait à ses compagnes « les précau­ tions inutiles de Vulcain, les ruses de Mars et ses doux larcins » et qui énumérait les amours multipliées des dieux depuis le temps du chaos : Aque chao densos diuum numerabat amores3. Pas plus que ses prédécesseurs Ovide n’a songé que la croyance aux dieux et le culte national fussent mis en danger par ces fictions des Grecs ; on ne voit pas que sa complaisance à les développer ait été pour quoi que ce soit dans sa disgrâce. Encore moins peut-on lui prêter une intention satirique. On range quelquefois les Métamorphoses parmi les poèmes épiques4; cepen­ dant cet ouvrage, à ne considérer que l’ensemble, procède moins de l’épopée homérique ou des longues compositions du cycle que de certains poèmes d’Hésiode 1. Tristes, passages cités, page II. 2. Bucoliques, VI, 31-81 : Pasiphaé, Atalante, Scylla, Térée. 3. Géorgiques, IV, 347. 4. Quintilien, Inst, or., X, 1, 88, les appelle Bien heroa, mais il songe plutôt au mètre qu’à la composition et ce pluriel même indique assez qu’il n’y trouve pas l’unité nécessaire ; ce sont des contes épiques assemblés entre eux par un lien quelconque. VIII INTRODUCTION. et de son école, pour lesquels les Alexandrins avaient professé une vive admiration1, notamment des Cata­ logues et des Grandes Êées, histoire des héroïnes aimées par les dieux ; si l’on veut que les Métamorphoses soient une épopée, c’est, en tout cas, une épopée à laquelle ees poèmes didactiques avaient apporté leur tribut; de là chez l’auteur un souci de l’érudition mytholo­ gique que nous comprenons moins bien que ses premiers lecteurs, pour qui il n’y avait point de poésie sans fables. Enfin, quand on a, dans les Métamorphoses, fait la part de la tradition, il reste celle qui revient à Ovide lui-même, la grâce, le charme, la variété des récits, la couleur des descriptions, l’habileté des discours ; là se déploient à l’aise toutes les ressources de son talent aimable et fécond ; on y a partout cette agréable impression que donne l’extrême facilité jointe à beau­ coup d’esprit naturel2. Parlant de ce poème, Quintilien dit encore qu’Ovide s’y abandonne trop souvent à sa fantaisie, qu’il se joue de sa matière, « lasciuire solet3 ». C’est que Quintilien, préoccupé avant tout de ce qui convient, dans les ouvrages du passé, à la formation de l’orateur4, est déconcerté par cette liberté d’allure dans un poème où, comme dans l’épopée véritable, il est question de combats, de tempêtes, de prodiges et de catastrophes diverses, telles que le déluge, l’incendie du monde ou la peste. Or cette lasciaia, où, par endroits, il entre incontestablement de la malice, ressemble beaucoup à ce que nous appelons aujourd’hui de l’hu­ mour; quoique, en principe, elle ait été condamnée < .Couat, Poésie alexandrine (1882), p. 92, 265, 495 ; Riese dam son.édition (1889), p. VII, col. 1. 2. Plessis, La poésie latine (1909), p. 447-451 ; Ripert, Ovide poète de l’amour, des dieux et de l’exil, Paris, 1921, le chapitre IV. 3. Quintilien, Inst, or., IV, 1, 77 et X, 1, 88. A rapprocher de X, 1, 98 ; Sénèque le père, Controu. II, 10, 12 ; Sénèque le philo­ sophe, Nat. quaest., Ill, 2J, 3. 4. De là « laudandus tamen in partibus » X, 1, 88.

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