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Nouvelle époque, actualité de la révolution, du socialisme et du communisme PDF

44 Pages·2017·1.37 MB·French
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www.npa-dr.org Nouvelle époque, actualité de la révolution, du socialisme et du communisme DR n° 43 du 16 mars 2018 1 Nouvelle époque, actualité de la révolution, du socialisme et du communisme Nous vivons dans un monde instable et chaotique. In- Les classes dominantes ont cru triompher dans l’euphorie sécurité sociale, ubérisation du travail, chômage et de la « nouvelle économie », de la boulimie financière et précarité, terrorisme et guerres dites contre le terroris- boursière. me, drames des migrants, effets dramatiques du réchauf- Les puissances impérialistes ont imposé, sous la houlet- fement climatique secrètent l’inquiétude et l’angoisse, la te des États-Unis, un capitalisme de libre concurrence à révolte et la colère. Les esprits sont dominés par la vio- l’échelle de toute la planète. Elles ont ainsi aggravé les lence de la société. Chacun voit sa vie lui échapper, dé- contradictions capitalistes et créé les conditions d’une boussolé, désorienté. nouvelle crise mondiale : socialisation croissante de la Nous vivons un grand bouleversement planétaire dont production, mondialisation se heurtant à la propriété les mécanismes ainsi que les effets semblent échapper privée capitaliste et aux États nationaux, aggravation des à tout contrôle comme dominés par des forces aveugles, inégalités, concentration croissante des richesses entre étranges, mystérieuses. La mythologie du marché, de la quelques mains… concurrence, de la compétitivité, du risque, des spécula- Les premiers symptômes de cette terrible maladie se sont tions financières et boursières nourrissent les élucubra- violemment manifestés lors de la grande crise de 2007- tions complotistes, les mystiques religieuses, nationalis- 2008. Les remèdes capitalistes n’ont fait qu’aggraver le tes avec leurs corollaires le racisme et la xénophobie. mal. Il n’y a pourtant rien de mystérieux dans l’évolution de la La guerre, le drame des migrants, la crise écologique pro- société. Elle est provoquée par la politique des classes ca- duits de cette faillite soulignent l’urgence de mettre les pitalistes et des États qui les servent pour préserver leur classes capitalistes hors d’état de nuire. domination, accroître leur pouvoir, maintenir leurs pro- Nous sommes devant une nouvelle époque à travers la- fits. quelle les idées révolutionnaires reprendront vie à une A travers le chaos du monde s’exprime une des contra- échelle beaucoup plus large, beaucoup plus profonde, où dictions fondamentales du capitalisme qui s’approfondit la maturation des forces de la classe ouvrière comme les avec la mondialisation libérale et impérialiste, la contra- possibilités techniques et culturelles de la société, don- diction entre la socialisation, l’internationalisation crois- neront à la future révolution une dimension et des possi- sante de la production et des échanges et l’appropriation bilités dépassant tout ce que jusqu’alors il a été possible privée des richesses en un nombre de mains de plus en d’imaginer. plus réduit. L’impasse du réformisme, comme l’effondrement de son Jamais la concentration des richesses n’a été aussi grande avatar monstrueux, le stalinisme, a ouvert une nouvelle comme, à l’opposé, jamais les inégalités n’ont été aussi période de cette œuvre émancipatrice. grandes. L’ensemble des évolutions économiques, sociales et poli- Cette situation intenable est d’autant plus choquante et tiques concourent à créer les conditions de l’émergence révoltante que l’humanité a fait des progrès considéra- d’une nouvelle force porteuse d’un projet de transforma- bles dans le domaine des sciences, des connaissances et tion révolutionnaire de la société. des techniques. Mais ces progrès sont soumis aux seuls Cette force se façonne dans les luttes dont naît une nou- besoins du capital, les populations n’en bénéficient que velle conscience de classe à travers la compréhension marginalement alors qu’elles subissent de plein fouet l’of- concrète des antagonismes sociaux, de leur nature. fensive des classes capitalistes pour s’assurer le contrôle Notre programme n’est pas une doctrine toute faite, de toute la société et concentrer entre leurs mains toutes un dogme à l’image duquel nous voudrions façonner le les richesses produites. monde, il est vivant, fruit de la critique de la société de Avec la chute du mur de Berlin puis l’effondrement de classe en vue de formuler les moyens de l’émancipation l’URSS s’est achevée la période ouverte par Octobre humaine. 1917. 2 Notre projet se confond avec la lutte du monde du tra- socialisme et du communisme pourra retrouver sa force vail pour la conquête de ses droits sociaux et politiques, de contestation sociale, à nouveau rassembler, entraîner. pour son émancipation morale, politique et sociale des Débat révolutionnaire soumet à la discussion, à travers rapports d’exploitation pour bâtir une société fondée sur une série de 8 articles rassemblés dans un même docu- la solidarité, la justice et la coopération. Il nie le droit de ment, les axes autour desquels s’organise notre compré- la propriété privée à s’approprier les fruits du travail col- hension des transformations en cours pour en dégager lectif. les éléments d’un programme démocratique et révolu- C’est à travers un large débat que pourront se regrouper tionnaire pour un parti des travailleurs. les forces du mouvement social pour s’organiser en parti politique sur la base d’une « compréhension commune de Yvan Lemaitre la période et des tâches », que tout ce qui vit encore du Sommaire : Page 4 Changer le monde, est-ce possible ? Ou la courbe du développement de la révolution… - Yvan Lemaitre Page 8 De quoi la crise est-elle le nom ? - Daniel Minvielle Page 14 Suraccumulation de capital, la purge financière inévitable et nécessaire. Le krach financier ou l’expropria- tion ? - Daniel Minvielle Page 18 Réchauffement climatique, crise écologique ou l’impérieuse nécessité d’une planification démocratique à l’échelle du monde - Bruno Bajou Page 24 De l’état de guerre permanent à la globalisation de la guerre, une troisième guerre mondiale est-elle pos- sible ? - Galia Trépère, Isabelle Ufferte Page 29 Derrière la financiarisation de l’économie, la révolution technologique prélude à une révolution sociale... - Daniel Minvielle, Laurent Delage, François Minvielle Page 33 Les idéologies réactionnaires des classes dominantes contre les progrès du développement humain, per- manence du combat pour le matérialisme - Bruno Bajou, Monica Casanova Page 38 S’organiser pour la transformation révolutionnaire de la société - Christine Héraud, Daniel Minvielle, Laurent Delage 3 Changer le monde, est-ce possible ? Ou la courbe du développement de la révolution… Yvan Lemaitre Le monde apparaît aujourd’hui sous la forme d’un gi- La propagande officielle des États, les mises en scène gantesque conflit entre les progrès réalisés dans tous orchestrées par les médias tenus par les grands groupes les domaines, les aspirations nouvelles qu’ils suscitent, financiers donnent le tableau d’une agitation désordon- nourrissent, renforcent, et la violence économique, so- née, hystérique, obéissant à des logiques d’affrontements ciale, morale, policière, militaire qui régit les rapports so- personnels comme si l’évolution de la société dépendait ciaux, les rapports entre les classes et les peuples. des dirigeants de ce monde. Elle obéit en fait à des évolu- Cet ordre des choses ou plutôt ce désordre des choses tions et des mécanismes bien plus profonds. semble incontournable, tout au plus serait-il possible L’ensemble de la vie sociale et politique est conditionné d’en diminuer les effets destructeurs, les ravages. par les transformations économiques en œuvre, à la fois Les luttes, les résistances collectives du prolétariat se par les moyens, les méthodes utilisées pour les réaliser et heurtent aux limites des luttes défensives face à une clas- par leurs résultats, leurs conséquences, processus dyna- se dominante qui a l’initiative et tient les commandes. mique, terrain sur lequel les hommes font, plus ou moins consciemment, leur histoire. Les drames et les défaites du passé obscurcissent l’hori- zon, les idées du socialisme et du communisme ont été « Le résultat général auquel j’arrivai et qui, une fois ac- vidées de tout contenu démocratique, libérateur, la pos- quis, servit de fil conducteur à mes études, écrivait Marx sibilité de changer la société apparaît le plus souvent au en 1859 dans la préface de La critique de l’économie poli- mieux comme une utopie, un rêve irréalisable. tique, peut brièvement se formuler ainsi : dans la produc- tion sociale de leur existence, les hommes entrent en des Pourtant, jamais dans toute l’histoire humaine, les possi- rapports déterminés, nécessaires, indépendants de leur bilités de changer le monde n’ont été aussi grandes. L’im- volonté, rapports de production qui correspondent à un passe dans laquelle les classes dominantes engagent la degré de développement déterminé de leurs forces pro- société en sont une démonstration, en négatif, celle de ductives matérielles. L’ensemble de ces rapports de pro- leur incapacité à faire face à l’évolution de la société, au duction constitue la structure économique de la société, progrès créé par le travail humain, à répondre aux aspi- la base concrète sur laquelle s’élève une superstructure rations qu’ils engendrent et qui remettent en cause des juridique et politique et à laquelle correspondent des for- bases de sa domination, la propriété privée et l’État. mes de conscience sociales déterminées. Le mode de pro- Les classes dominantes en ont confusément, de façon ré- duction de la vie matérielle conditionne le processus de vie flexe, conscience en menant une offensive idéologique, social, politique et intellectuel en général. Ce n’est pas la politique, légale et juridique contre les droits démocrati- conscience des hommes qui détermine leur être ; c’est in- ques, pour tenter vainement d’empêcher le mouvement versement leur être social qui détermine leur conscience. qui révèle leur parasitisme et leur archaïsme. À un certain stade de leur développement, les forces pro- Ce qui manque, c’est la conscience des possibilités ob- ductives matérielles de la société entrent en contradiction jectives d’ouvrir une autre voie de développement à la avec les rapports de production existants, ou, ce qui n’en société humaine, le socialisme et le communisme, l’ex- est que l’expression juridique, avec les rapports de pro- pression organisée de cette conscience, un parti, un mou- priété au sein desquels elles s’étaient mues jusqu’alors. vement démocratique et révolutionnaire. De formes de développement des forces productives qu’ils Changer le monde n’est pas une question de volontaris- étaient ces rapports en deviennent des entraves. Alors me moral, d’optimisme ou de pessimisme, de degré de s’ouvre une époque de révolution sociale. Le changement révolte mais de compréhension des transformations en dans la base économique bouleverse plus ou moins ra- cours, des mécanismes qui les engendrent, des voies et pidement toute l’énorme superstructure. Lorsqu’on consi- moyens de l’action collective des hommes pour faire l’his- dère de tels bouleversements, il faut toujours distinguer toire, de la continuité des processus révolutionnaires... entre le bouleversement matériel - qu’on peut constater d’une manière scientifiquement rigoureuse - des condi- Si l’évolution des luttes de classes n’est pas mécanique- tions de production économiques et les formes juridiques, ment calquée sur la marche cyclique du capitalisme, politiques, religieuses, artistiques ou philosophiques, bref, toutes les deux se combinent pour écrire les périodes et les formes idéologiques sous lesquelles les hommes pren- époques de l’histoire. C’est dans cette combinaison que nent conscience de ce conflit et le mènent jusqu’au bout. s’écrit le futur des luttes de classe, que se poursuit la Pas plus qu’on ne juge un individu sur l’idée qu’il se fait de courbe du développement de la révolution... lui-même, on ne saurait juger une telle époque de boule- Evolution économique et sociale, conscience et versement sur sa conscience de soi; il faut, au contraire, lutte de classe.... expliquer cette conscience par les contradictions de la vie 4 matérielle, par le conflit qui existe entre les forces produc- vail aux capitalistes qui achetaient le droit de l’exploiter tives sociales et les rapports de production. pour le prix du salaire. Une formation sociale ne disparaît jamais avant que Cette évolution ne fut en rien pacifique. C’est à travers soient développées toutes les forces productives qu’elle la violence et la barbarie des classes dominantes que le est assez large pour contenir, jamais des rapports de pro- progrès a trouvé un douloureux chemin. Son arène était duction nouveaux et supérieurs ne s’y substituent avant mondiale, et le capitalisme s’est toujours accommodé que les conditions d’existence matérielles de ces rapports de toutes les formes d’exploitation du travail humain, y soient écloses dans le sein même de la vieille société. compris les plus barbares comme l’esclavage, ainsi que C’est pourquoi l’humanité ne se pose jamais que des pro- de toutes les formes de pillage des richesses. blèmes qu’elle peut résoudre, car, à y regarder de plus Le développement capitaliste s’est fait à travers les crises, près, il se trouvera toujours, que le problème lui-même ne les révolutions, les guerres qui rythment les grandes pé- surgit que là où les conditions matérielles pour le résou- riodes de l’histoire, conditionnées quant au fond par ce dre existent déjà ou du moins sont en voie de devenir ». qui détermine la marche générale de la société, l’évolu- Aujourd’hui, de nouvelles forces travaillent la société en tion des techniques. profondeur au point que le sol se dérobe sous les pieds Le capitalisme industriel est né d’une grande révolution des vieux partis et des appareils dont les discours sont technologique qui permit une meilleure maîtrise de dépassés, sans rapport avec la réalité nouvelle. Leur pro- l’énergie, permettant la construction d’usines rassem- pre réalité se transforme à leur insu, emportés qu’ils sont blant des centaines d’ouvriers, la machine à vapeur. dans une dynamique qu’ils ne maîtrisent pas parce qu’ils Une nouvelle classe dominante s’imposait dans la prati- ne peuvent la comprendre, aveuglés par les besoins de que, l’industrie, comme dans le domaine des idées qui justifier ou de camoufler leurs propres erreurs et incom- justifiait son droit et ses prétentions à diriger la société. préhensions, leur duplicité et leurs mensonges. Les idées de cette classe nouvelle affirmaient la propriété Les rapports sociaux fondés sur la propriété privée ca- comme condition du bonheur de l’individu et de la com- pitaliste sont incapables de contenir et de maîtriser le munauté. Le bien, c’est la propriété bourgeoise, le mal, développement des forces productives. Les conditions tout ce qui lui nuit ! d’une nouvelle organisation sociale, « de rapports de pro- Cette pensée moderne au sens où, à l’époque, elle contes- duction nouveaux et supérieurs » existent et bousculent tait les privilèges des vieilles classes féodales et aristocra- tous les vieux rapports sociaux et politiques. tiques, enfanta les Droits de l’homme qui prétendaient Les classes dominantes répondent par une offensive garantir les droits de l’individu dans la collectivité, droits réactionnaire, au sens strict du terme, la volonté de re- qui apparaissaient sous la forme des droits de la propriété venir en arrière face à un avenir qui menace leur pouvoir. privée, c’est-à-dire qui faisaient de la défense des intérêts Elles mènent une offensive en règle contre la classe des des classes privilégiées un principe universel. salariés désarmée parce que leurs organisations, domi- Cela ne s’accomplit pas seulement par une révolution nées par l’esprit de conciliation, anesthésiées, n’ont rien technique mais il fallut une vaste et profonde révolution su anticiper et sont devenues les jouets de la situation politique et sociale qui s’accomplit sur plusieurs siècles et et, en conséquence, de leurs adversaires. Le mouvement connut son apogée dans la révolution française de 1789 ouvrier est sans ressort parce qu’il est dominé politique- à 1793 dont l’onde de choc secoua toute l’Europe et au- ment et moralement par le patronat qui a toutes les car- delà. Ses effets perdurèrent tout au long du XIXème siècle, tes du jeu en main. 1830, 1848, période de bouleversement et d’efferves- Le socialisme et le communisme, enfants de la cence dans tous les domaines de l’activité humaine, bou- leversements sociaux, politiques, intellectuels dont sont révolution industrielle nées les idées formulées par Marx et Engels. L’économie de marché, contrairement à ce qu’affirment « L’idée fondamentale et directrice du Manifeste, à sa- les idéologues bourgeois, n’est ni un choix de société voir que la production économique et la structure sociale ni « naturelle », elle est un rapport entre les classes qui qui en résulte nécessairement forment, à chaque époque s’est forgé à travers les transformations économiques et historique, la base de l’histoire politique et intellectuelle sociales qui ont jalonné l’histoire du capitalisme. Le ca- de cette époque; que par suite (depuis la dissolution de pitalisme industriel est apparu à partir du XVIIIème siècle la propriété commune du sol des temps primitifs), toute quand l’évolution des techniques a permis une concen- l’histoire a été une histoire de luttes de classes, de lut- tration de la production dans des manufactures, puis des tes entre classes exploitées et classes exploitantes, entre usines. Dans le même temps que les détenteurs de ca- classes dominées et classes dominantes, aux différentes pitaux investissaient pour développer la production de étapes de leur développement social ; mais que cette lutte marchandises, ils donnaient naissance, par la ruine des a actuellement atteint une étape où la classe exploitée et petits producteurs, à une nouvelle classe qui ne possédait opprimée (le prolétariat) ne peut plus se libérer de la clas- rien d’autre que sa force de travail. Ce prolétariat n’avait se qui l’exploite et l’opprime (la bourgeoisie), sans libérer d’autre source de revenu que la vente de sa force de tra- en même temps et à tout jamais la société entière de l’ex- 5 ploitation, de l’oppression et des luttes de classes ; cette Les banques fusionnèrent avec le capital industriel, et idée maîtresse appartient uniquement et exclusivement à purent investir massivement dans la production pour Marx » écrivait Engels en 1883 à propos du Manifeste du faire tourner à plein régime la machine à profit. Ce fut la Parti communiste. Leur deuxième grande découverte est naissance du capital financier, qui allait s’emparer des dé- celle de l’origine de la plus-value, la mise à nu du rapport couvertes technologiques pour développer les secteurs d’exploitation. industriels et augmenter le taux de profit. Le développement de la lutte de classes au long du XIXème Ces nouvelles industries se développèrent avec une pro- siècle déboucha sur la Commune de Paris de 1871. Pour ductivité accrue, en appliquant par exemple les métho- la première fois de son histoire, le prolétariat conquit le des de l’organisation scientifique du travail de Taylor qui pouvoir, l’exerça durant 72 jours, réalisant dans les actes consistaient à décomposer le travail en tâches élémen- la forme de sa dictature démocratique, l’Etat-Commune, taires. ébauche des soviets. Ce fut la deuxième révolution industrielle. 1871 est une date charnière. La révolution bourgeoise a L’exploitation du pétrole et la mise au point du moteur épuisé ses forces, les classes dominantes craignent trop à explosion, l’utilisation de l’électricité comme source la classe nouvelle, leurs « fossoyeurs », et composent d’énergie dans l’industrie avec l’invention du moteur avec les vieilles classes aristocratiques ou des grands pro- électrique, la révolution dans la sidérurgie avec l’acier, la priétaires féodaux par ailleurs incapables de s’opposer naissance de l’industrie chimique, l’extension du chemin à l’expansion capitaliste. Dorénavant, il appartiendra au de fer dans le monde entier, la construction du métro prolétariat de débarrasser la société de ces vieilles clas- dans les grandes villes, l’automobile, puis l’avion, boule- ses parasites tout en remettant en cause le capital. versèrent la société. La répétition générale de cette future révolution se dé- L’oligarchie financière concentra entre ses mains des roule en Russie en 1905. masses de capitaux qui s’investissaient autant dans les De la deuxième révolution industrielle à… la projets industriels que dans les prêts aux États. L’exporta- vague révolutionnaire de 1917 tion des capitaux vers les colonies ou d’autres pays devint Cette nouvelle révolution fut en gestation tout au long une activité particulièrement lucrative. de la fin du XIXème siècle et au début du XXème, période à Les trusts, étouffant dans le cadre d’un marché national travers laquelle le capitalisme évolua pour passer à son trop étroit, entrèrent dans une concurrence internatio- stade impérialiste. nale acharnée pour trouver de nouveaux marchés, pour La révolution industrielle avait accéléré les progrès tech- piller les matières premières à travers toute la planète et niques, une mondialisation toujours plus grande, c’est- aussi pour trouver de nouveaux débouchés pour expor- à-dire une division mondiale du travail sans cesse plus ter leurs capitaux. élaborée et avec un réseau toujours plus dense de flux et Les États se lancèrent dans la conquête coloniale. En une d’échanges qui rattachaient chaque partie de l’économie dizaine d’années, le monde se trouva partagé entre les mondiale à la domination des grandes puissances domi- grandes puissances, principalement la France et l’An- nées par l’Angleterre. gleterre, qui se taillèrent d’énormes empires en Afrique Ce développement de l’industrie sans précédent ne trou- et en Asie, constituant des territoires protégés par des vait pas un marché à sa mesure. barrières douanières, véritables chasses gardées pour les En Allemagne, comme aux États-Unis, l’industrie lourde trusts nationaux. marqua un recul après la forte progression des chemins La Première guerre mondiale fut l’aboutissement de cette de fer de la période précédente. Le capital cherchant à folle débauche impérialiste. maintenir son taux de profit se lança alors dans la spécu- La contradiction entre le développement des forces pro- lation effrénée… jusqu’au krach de 1873 entraînant l’ef- ductives, la socialisation et l’internationalisation de la fondrement boursier en Allemagne, ainsi que faillites de production, et les rapports de propriété explosait dans banques et de sociétés de chemin de fer. L’Angleterre, qui une conflagration inouïe détruisant d’immenses riches- était jusqu’alors « l’atelier du monde », fut entraînée dans ses, des millions de vies humaines. la tourmente faute de débouchés pour ses marchandises, du fait de la concurrence de la France et de l’Allemagne. De cette terrible conflagration surgit la vague révolution- naire dont la révolution d’Octobre fut le point culminant. Ce fut le début de la « grande dépression », qui dura pen- dant plus de 20 ans. Lénine écrivait en 1920 : « l’impérialisme est le prélude de la révolution sociale du prolétariat. Cela s’est confirmé Le marasme économique mettait la question sociale au depuis 1917, à l’échelle mondiale ». A travers ce que l’on premier rang des problèmes politiques. Les masses se a appelé la première mondialisation, les conditions maté- faisaient menaçantes. Il fallait réagir, trouver une issue. Cette issue, ce fut l’impérialisme. rielles et aussi sociales et politiques d’une nouvelle révo- lution avaient mûri. Malheureusement, les forces révolu- Durant ces 20 ans, la crise fut un moyen de concentration tionnaires n’étaient pas assez puissantes pour poursuivre formidable de l’industrie comme de la banque. Les trusts jusqu’au bout le travail engagé par la révolution russe, se constituèrent, les banques suivirent le même chemin. liquider les vieilles classes qui réussirent à reprendre la 6 main sur la marche de l’économie mondialisée, vers... La deuxième mondialisation, une nouvelle ré- une nouvelle crise et une nouvelle guerre. volution industrielle Malgré la contre-révolution stalinienne, la ré- « La bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner volution poursuit son œuvre... constamment les instruments de production et donc les rapports de production, c’est-à-dire l’ensemble des rap- La première guerre mondiale n’avait rien réglé, bien au ports sociaux » écrivaient Marx et Engels dans le Manifes- contraire. Après le reflux de la vague révolutionnaire, tou- te du Parti communiste. Sous le fouet de la concurrence tes les tensions sociales et les rivalités inter-impérialistes qui les oppose, les capitalistes sont entraînés dans une furent exacerbées. La jeune nation-continent américaine, course en avant incontrôlée pour conquérir de nouveaux dans l’euphorie de l’issue de la Première guerre mondia- marchés, baisser les coûts… Obligés d’investir, ils cher- le qui avait affaibli ses rivales européennes et dopé son chent à compenser ces dépenses en renforçant l’exploita- économie, se lançait dans une folle et fébrile poussée de tion. Les progrès de productivité sont accompagnés d’une libéralisme qui, en quelques courtes années, se brisa sur stagnation de la consommation, voire d’un recul, d’où les les frontières que les vieilles nations coloniales avaient crises, la marche anarchique et cyclique du capitalisme. hérissées pour protéger leur territoire économique. Cette marche cyclique n’est pas une simple reproduction, L’ivresse spéculative de la jeune bourgeoisie qui voyait le chaque crise et les réponses qui lui sont apportées bou- monde s’ouvrir à elle, la mit KO. Elle entraîna les autres leversent et transforment les rapports de production. Le nations dans une crise mondiale sans précédent. Il n’y eut capitalisme conquiert de nouveaux marchés, développe pas d’autres issues pour les classes dominantes qu’une les rapports d’exploitation, le salariat, étend son mode de nouvelle guerre. production à la planète entière jusqu’à ce que rien ne lui Le prolétariat désarmé par la contre-révolution stalinien- échappe, que chaque parcelle de travail humain participe ne après la faillite de la social-démocratie et brisé par le à ses profits. Il se heurte alors à ses limites, la propriété fascisme ne put empêcher cette marche à l’abîme. privée devient un carcan insupportable face au dévelop- Au lendemain de cette folie guerrière, les USA imposè- pement des techniques, à la révolution numérique. rent leur leadership au monde entier. Il cherche désespérément des remèdes, liquide toutes les Les peuples coloniaux, que les grandes puissances avaient barrières qui s’opposent à la libre circulation des capitaux entraînés dans leur guerre, redressèrent la tête pour trou- et des marchandises, crée un vaste marché financier uni- ver le chemin de leur émancipation nationale contre des fié. Cela a entraîné un développement de la sphère finan- bourgeoisies et des États déconsidérés en bénéficiant de cière sans précédent dans l’histoire. l’existence de l’URSS. La bureaucratie, tout en défendant Mais cette sphère financière n’est pas suspendue en ses propres intérêts, représentait un encouragement et l’air, elle ne parasite pas l’économie capitaliste comme une aide aux luttes de libération nationale. un corps étranger, elle est née de la logique même de Si le prolétariat désarmé par le stalinisme ne put prendre l’économie de marché, elle prend ses racines dans la base la tête de cette nouvelle vague révolutionnaire celle-ci al- même de l’économie capitaliste, dans l’exploitation du lait cependant bouleverser la face du monde alors que travail humain. les USA s’imposaient comme première grande puissance La généralisation de l’économie de marché à l’ensemble sur laquelle reposait le nouvel ordre mondial. La fin des du globe, la mondialisation libérale et impérialiste, sape empires coloniaux ouvrit la porte à la libre concurrence la base même de la domination des classes capitalistes. globalisée. Tournant dans la mondialisation, la révolution Cette période de reconstruction économique et de guer- res coloniales, improprement appelée « Les trente glo- en permanence... rieuses », accoucha d’une nouvelle crise à la fin des an- La folle fuite en avant de l’économie d’endettement géné- nées soixante. ralisé et de spéculation a débouché sur la grande crise de Dès la fin des années 70, sous la houlette des États-Unis 2007-2008. La suraccumulation de capitaux qui ne trou- et de leur alliée la Grande Bretagne, s’ouvre une nouvelle vaient plus de quoi satisfaire leurs appétits insatiables, a phase, celle de l’offensive libérale. Commence la deuxiè- entraîné à travers la ruine de millions de petits propriétai- me mondialisation en réponse à la baisse du taux de pro- res une dépréciation globale de ces capitaux, ruines, failli- fit qui voit le capitalisme s’imposer comme mode de pro- tes, crise financière mondialisée... Le système a tremblé duction international atteignant les limites de la planète. jusque dans ses fondations. Les États ont investi des mil- liards pour colmater les brèches, éviter l’effondrement du La fin de l’URSS, l’effondrement de la bureaucratie sous château de cartes en faisant payer les populations par les le poids de ses propres contradictions, accéléra le pro- politiques d’austérité et en relançant la machine à profits cessus. par une offensive, elle aussi mondialisée, contre les tra- L’euphorie libérale et impérialiste l’emporte durant les vailleurs et les peuples. années Bush, le capitalisme triomphe à l’échelle de la pla- Ce faisant ils préparent le prochain épisode aigu de la nète mais le mythe de « la fin de l’histoire » ne résistera crise chronique du capitalisme libéral et impérialiste. pas longtemps à la réalité du nouvel ordre mondial. 7 « Si rien ne change, nous allons revivre la crise de 2008 » « Le communisme n’est pour nous ni un état qui doit être disait le FMI en octobre 2017 dans son « rapport sur la créé, ni un idéal d’après lequel la réalité devra se régler. stabilité financière ». Pas 2008 mais pire encore, à un ni- Nous appelons communisme le mouvement réel qui abo- veau supérieur. lit l’état actuel. Les conditions de ce mouvement résultent des prémisses actuellement existantes » écrivaient Marx Et la seule chose qui puisse changer quoi que ce soit est et Engels dans L’Idéologie allemande. l’intervention des travailleurs pour contester radicale- ment la politique de l’oligarchie financière et des États en Lutter pour être acteur de ce mouvement, c’est d’abord exigeant que les richesses qu’ils produisent soient répar- et avant tout en prendre conscience, partager cette ties et investies pour répondre aux besoins de la popu- conscience, la démultiplier en l’enrichissant des expé- lation contre les intérêts d’une minorité de parasites en riences des autres par l’échange, la confrontation, la remettant en cause leur pouvoir pour postuler à diriger culture, c’est se dégager des préjugés, de l’emprise mo- la société. rale des classes dominantes, de leurs idéologues, prêtres ou imam. C’est développer une pensée démocratique et Reprenons une partie de la citation de Marx faite plus révolutionnaire, voir dans les luttes et résistances quoti- haut : « Une formation sociale ne disparaît jamais avant diennes le matériel inflammable, l’énergie des transfor- que soient développées toutes les forces productives mations révolutionnaires. qu’elle est assez large pour contenir, jamais des rapports « Les hommes font leur propre histoire, mais ils ne la font de production nouveaux et supérieurs ne s’y substituent pas arbitrairement, dans les conditions choisies par eux, avant que les conditions d’existence matérielles de ces mais dans des conditions directement données et héritées rapports soient écloses dans le sein même de la vieille so- du passé. La tradition de toutes les générations mortes ciété ». Force est de constater que jusqu’alors, le capita- pèse d’un poids très lourd sur le cerveau des vivants. Et lisme pouvait encore développer les forces productives, même quand ils semblent occupés à se transformer, eux et même si le prix à payer par l’humanité a été exorbitant. les choses, à créer quelque chose de tout à fait nouveau, Les échecs du passé, l’impossibilité dans laquelle s’est c’est précisément à ces époques de crise révolutionnaire trouvée la révolution d’aller jusqu’au bout de son œuvre qu’ils évoquent craintivement les esprits du passé, qu’ils renvoient pour l’essentiel à la faiblesse des conditions ob- leur empruntent leurs noms, leurs mots d’ordre, leurs cos- jectives, au conservatisme des rapports d’exploitation. tumes, pour apparaître sur la nouvelle scène de l’histoire Il est probable qu’aujourd’hui le capitalisme ait atteint sous ce déguisement respectable et avec ce langage em- ses limites historiques, en tout cas, il est certain que les prunté. [...] C’est ainsi que le débutant qui apprend une conditions matérielles pour sa transformation révolu- nouvelle langue la retraduit toujours en pensée dans sa tionnaire sont infiniment plus développées qu’il y a un langue maternelle, mais il ne réussit à s’assimiler l’esprit siècle. de cette nouvelle langue et à s’en servir librement que La révolution fait son œuvre à bas bruit, elle n’est pas un lorsqu’il arrive à la manier sans se rappeler sa langue ma- mythe ou une mystique, celui ou celle du grand soir, elle ternelle, et qu’il parvient même à oublier complètement est un processus à l’œuvre au cœur de l’activité sociale, cette dernière. […] La révolution sociale du XIX° siècle ne des évolutions des rapports entre les classes dans leur peut pas tirer sa poésie du passé, mais seulement de l’ave- diversité, leur complexité. Elle est le produit du travail nir. Elle ne peut pas commencer avec elle-même avant quotidien de millions de femmes et d’hommes pour pro- d’avoir liquidé complètement toute superstition à l’égard duire leurs moyens d’existence, pour améliorer leur vie, du passé. Les révolutions antérieures avaient besoin de s’approprier les moyens matériels mais aussi les moyens réminiscences historiques pour se dissimuler à elles-mê- intellectuels, moraux de vivre mieux. Elle est la confron- mes leur propre contenu. La révolution du XIX° siècle doit tation permanente entre ces besoins humains du plus laisser les morts enterrer leurs morts pour réaliser son grand nombre, éveillés et renforcés par les progrès, et la propre objet. Autrefois, la phrase débordait le contenu, volonté des classes dominantes de défendre leurs privilè- maintenant, c’est le contenu qui déborde la phrase ». ges archaïques, une volonté de pouvoir sans limite, une Ces mots de Marx dans Le 18 Brumaire de Louis Bonapar- folie qui menace la planète et met en péril l’Humanité. te résonnent avec particulièrement de force aujourd’hui. De quoi la crise est-elle le nom ? Daniel Minvielle Le mot « crise » revient comme une litanie, parfois pour remontent au risque de déclencher un nouvel effondre- nous annoncer qu’« elle serait finie », que la « repri- ment… Ainsi, la crise serait un mal mystérieux, imprévi- se serait de retour », parfois sous forme d’un nouveau sible, une fatalité contre laquelle il n’y aurait aucun re- craquement, Bourses qui paniquent, taux d’intérêt qui mède, tout au plus des expédients. 8 Pourtant, ce mot recouvre à l’évidence une réalité paten- de la société capitaliste, soumise à ses propres contradic- te, la faillite des classes capitalistes, de l’oligarchie finan- tions et à la lutte des classes. cière, de la propriété privée des moyens de production et En se mondialisant, le capitalisme a poursuivi un pro- d’échange sur laquelle repose le droit que s’octroie une cessus qui caractérise l’économie de marché depuis ses minorité de parasites de s’approprier les richesses pro- origines, sous sa forme marchande et dans son berceau duites par la classe des producteurs. féodal. « La base du mode de production capitaliste est Cette réalité est masquée par un écran de fumée, la constituée par le marché mondial lui-même » écrivait propagande des classes capitalistes pour convaincre les Marx. « Poussée par le besoin de débouchés de plus en classes exploitées que l’économie de marché est le seul plus larges pour ses produits, la bourgeoisie envahit le système moderne et efficace, qu’il n’y en a pas d’autre globe entier. Il lui faut s’implanter partout, mettre tout en possible. exploitation, établir partout des relations ». (Manifeste Mais alors pourquoi les crises, pourquoi cette crise per- du Parti communiste) manente dans laquelle est entrée la société à l’échelle Les transformations des quarante dernières années s’in- mondiale ? Et comment peut-on considérer comme mo- tègrent dans ce processus. La mondialisation est la géné- derne une société dans laquelle l’écart entre les possibili- ralisation à l’échelle mondiale du rapport de classe qui tés matérielles et techniques dont dispose l’humanité et définit le capitalisme, le salariat. le dénuement terrible qui en frappe la majeure partie n’a La propagande patronale voudrait faire croire que le sa- jamais été aussi flagrant ? lariat est un libre contrat entre salariés et patrons. C’est C’est bien de son organisation sociale que l’humanité est masquer qu’il est un rapport social de domination et malade, du système capitaliste. La critique qu’en a faite d’exploitation qui permet aux capitalistes de s’approprier Marx au siècle dernier est plus que jamais d’actualité, le légalement le produit du travail de l’ouvrier dont ils ont triomphe de l’économie de marché est une catastrophe acheté la force de travail en échange d’un salaire. Ce sa- pour l’humanité. laire est inférieur à la valeur créée par ce travail, la valeur La mondialisation, l’aggravation de toutes les ajoutée, que s’approprie le capitaliste. Et c’est le vol lé- contradictions explosives du capitalisme gal de la plus-value, différence entre la valeur ajoutée et le salaire, qui est la source des profits dont se nourrit le L’exacerbation de la concurrence née de la récession se capitalisme. Ce rapport social est le moteur du système transforme en guerre économique, accentue la montée capitaliste, sa raison d’être. Aucun salarié, aucun être hu- des militarismes et l’extension des conflits militaires, main aujourd’hui n’y échappe. poussant des dizaines de milliers de réfugiés à l’exode. La guerre permanente que livrent les capitalistes à la clas- Les capitaux à la recherche de profits faciles se précipi- se ouvrière pour la diminution du coût du travail, autre- tent plus que jamais dans la spéculation et l’économie ment dit l’augmentation de la plus-value, est la meilleure de la dette, préparant un nouvel effondrement financier démonstration de la validité de cette idée fondamentale généralisé. L’exploitation débridée des ressources terres- de Marx, la théorie de la valeur. tres par une économie dont la seule préoccupation est la rentabilité immédiate menace l’humanité d’une catastro- Mais toute la propagande des classes dominantes, étayée phe environnementale. La guerre de classe que mènent, par une armée d’économistes aux ordres, vise au contrai- à l’échelle de la planète, une poignée d’oligarques finan- re à la masquer, à ressasser sous des formes diverses ce ciers et les gouvernements aux ordres se poursuit de plus mensonge historique qui voudrait faire croire que le capi- belle. Elle se traduit par une aggravation sans précédent tal a créé… ce qu’il a volé. des inégalités sociales et accentue, dans le même temps, Qui crée la valeur ? Le capital ou le travail ? la récession chronique qui frappe l’économie mondiale. Marx a donné une réponse à cette question avec la loi La mondialisation, c’est quarante années d’une guerre de la valeur-travail qui est la base, avec la théorie de la de classe acharnée contre les travailleurs et les peuples à plus-value, de la critique marxiste de l’économie capita- travers laquelle les vieux impérialismes (USA, Japon, Alle- liste. Il distingue la valeur d’usage d’une marchandise, magne, Grande Bretagne, France) ont tenté de restaurer son utilité pour le consommateur, et sa valeur d’échange, leurs taux de profits dont l’effondrement s’était traduit ou valeur, qui s’exprime par le prix. Ce qui fait la valeur par la crise mondiale des années 1970. Cette guerre de d’une marchandise, c’est la quantité de travail accumulé classe sans répit a certes permis aux profits et aux divi- dans sa production. A chaque étape de la production, le dendes que se partagent les « 1% » d’exploser, mais elle a travail vivant des salariés apporte une valeur ajoutée aux aussi conduit le capitalisme à une impasse. matériaux, énergies, etc., qui entrent dans la fabrication. La mondialisation de l’exploitation salariée Leur valeur est elle-même définie par la quantité de tra- vail qui a été nécessaire à leur production. Marx l’appelle La mondialisation n’est pas une perversion du capitalisme « travail mort ». Ainsi, la valeur de toute marchandise est ni le résultat de la mise en œuvre délibérée d’un modèle égale à la somme du travail mort et du travail vivant (la néolibéral concocté par certains idéologues de la bour- valeur ajoutée) mis en œuvre au cours de sa production. geoisie. Elle s’inscrit dans la logique même de l’évolution 9 La mystification selon laquelle le capital serait à la source En même temps qu’elles passaient à l’offensive contre de toute nouvelle valeur est ainsi démasquée. Le patron leur propre classe ouvrière, les grandes firmes impéria- ne paie pas à l’ouvrier la valeur de son travail, qui corres- listes entamaient le processus à travers lequel elles al- pond à la valeur ajoutée, mais celle de sa force de travail, laient, en quelques années, étendre l’exploitation sala- la valeur de ce qui est nécessaire à l’entretenir et la re- riale à l’ensemble de l’économie mondiale, imposant la produire. L’accumulation des richesses dont disposent les libéralisation des règles du commerce international qui classes dominantes sous forme d’argent, de produits de supprimait les obstacles à la circulation des capitaux et, luxe, d’actions, de titres de dette, etc., n’est que le pro- dans une moindre mesure, des marchandises. duit de l’accumulation de plus-value extorquée au fil du En implantant des filiales de production dans certains temps à d’innombrables générations d’exploités. pays du tiers monde, les grandes firmes impérialistes se « Le capital, écrivait Marx, est du travail mort, qui ne sont transformées en multinationales. Elles ajoutaient s’anime qu’en suçant tel un vampire du travail vivant, et l’exploitation d’une main d’œuvre très bon marché, inor- qui est d’autant plus vivant qu’il en suce davantage. » (Le ganisée, sans la moindre protection sociale, au pillage Capital) des richesses (pétrole, uranium, minerais en tout genre, Les fondements de la guerre de classe entre patrons et etc.) des pays pauvres, qu’elles poursuivaient de plus salariés sont là, dans la lutte pour le partage de la valeur belle. Quelques grandes multinationales de la chimie et ajoutée entre salaires et plus-value. Salariés et capitalistes de l’agro alimentaire étendaient leur mainmise sur des ne sont pas partenaires dans la production de richesses pays entiers, les transformant en immenses plantations, destinées à satisfaire un prétendu intérêt général, ils ont détruisant ce qui restait de l’agriculture de subsistance des intérêts diamétralement opposés. Le rapport social qui permettait aux populations locales de survivre tant qui les lie est un rapport d’exploitation. Il divise la société bien que mal. en deux classes fondamentalement irréconciliables : la Produire bon marché des marchandises pour l’essentiel classe des bourgeois, de ceux qui possèdent les moyens destinées à être vendues sur les marchés des pays riches de production, la possibilité légale de s’accaparer la plus a permis à ces trusts de dégager de juteux surprofits. Les- value ; la classe des prolétaires, ceux qui n’ont pas d’autre quels attiraient de nouveaux capitaux, générant un em- solution, pour gagner de quoi vivre, que de vendre leur ballement des investissements directs à l’étranger (IDE), force de travail. et dans leur sillage, la constitution de grandes multinatio- nales bancaires. Les multinationales ont mis le monde en coupe S’appuyant sur le développement des nouvelles techno- réglée logies, informatique, réseaux de communication, le pro- La mondialisation libérale et impérialiste a débuté au cessus a profondément changé l’économie mondiale. De début des années 1980 alors que l’économie mondiale, nouveaux flux commerciaux internationaux se sont mis contrôlée par quelques puissances, Grande Bretagne, Al- en place. lemagne, France, Japon, sous l’égide des USA, était plon- De nouvelles puissances économiques ont émergé, les gée dans une crise profonde, l’effondrement des taux de BRICS (Brésil-Russie-Inde-Chine-South Africa). La Chine, profit. La réponse des bourgeoisies a consisté tout d’abord principale destinataire des IDE industriels, est ainsi deve- en une offensive massive contre leurs classes ouvrières nue l’usine du monde, suivie dans une moindre propor- pour reprendre toutes les concessions qu’elles avaient tion par l’Inde. En quelques années, la Chine est sortie été contraintes de leur faire. Reagan aux USA, Thatcher d’un état économique quasi féodal, basé pour l’essentiel en Grande Bretagne lançaient dès 1980 une attaque ex- sur une agriculture très arriérée. Des millions de jeunes trêmement brutale. Mitterrand et l’Union de la gauche paysans pauvres ont quitté leurs campagnes pour se allaient le faire plus en douceur à partir de 1981. Forts transformer en prolétaires dans les usines qui poussaient des illusions que leur arrivée au pouvoir avait suscitées comme des champignons, transformant des villes comme dans la classe ouvrière, de la complicité des confédéra- Shanghai en mégalopoles industrielles et financières. tions syndicales et de la pression d’un chômage de masse qui s’installait, ils ont permis en six ans de faire passer la L’économie mondiale est actuellement dominée par une part des profits dans la valeur ajoutée de 25 % à 35 %, poignée de firmes qui exercent une véritable dictature tandis que la part des salaires diminuait d’autant, passant sur l’ensemble de la production, dans tous les secteurs de 75 % à 65 %. économiques : financier, industriels, miniers, agro-ali- mentaires, distribution, pharmacie, services… Parmi les Le chômage de masse, l’existence de cette « armée de 500 plus importantes, un tiers sont des entreprises finan- réserve du capital » comme l’appelait Marx, a instauré un cières, banques et assurances, suivies par les industries rapport de force extrêmement favorable à la bourgeoisie. pétrolières et les télécommunications. Un des arguments également de sa propagande : c’est au nom de l’emploi que les gouvernements n’ont cessé de Les multinationales contrôlent la recherche et les nouvel- justifier cyniquement leurs offensives contre les salaires, les technologies. Elles imposent leur loi à des milliers de les droits des travailleurs et de redistribuer des milliards petites entreprises sous-traitantes, de travailleurs indé- et des milliards au patronat. pendants, comme à leurs salariés directs. De leurs choix 10

Description:
par les transformations économiques en œuvre, à la fois par les moyens, les . De la deuxième révolution industrielle à… la vague révolutionnaire de Lénine écrivait en 1920 : « l'impérialisme est le prélude . pas arbitrairement, dans les condifions choisies par eux, mais dans de Rome
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