ebook img

Mes plus belges années PDF

160 Pages·2016·1.23 MB·French
Save to my drive
Quick download
Download
Most books are stored in the elastic cloud where traffic is expensive. For this reason, we have a limit on daily download.

Preview Mes plus belges années

Mes plus belges années Mathieu Ortlieb © 2016 Mathieu Ortlieb Tous droits réservés À la mémoire de mon ami Jean-Paul Feuillebois Table des matières Prologue Maintenant ou jamais Gaz à tous les étages Le baptême du feu Résolution Docteur Lulu Dites trente-trois Nono Bluff Baptême Pain chaud Premier opus Escapade Les mardis d’Alexandre Rumeur De profundis Au doigt et à l’œil Buffalo Bill Repérages Miro Quitte ou double Rien ne va plus Boulettes Flash-back Courses en tête Copains comme cochons Ambiance Confidence Renaissance Cavalier seul La méthode Strip-Tease La lettre Manu Militari Association Colette Pied-dans-la-porte C’est le Must Douche froide Un docteur qui assure Souriez ! Antonin P’têt ben qu’oui, p’têt ben qu’non ! Fumer tue ! Cachotterie 600 grammes de hachis Strip-Tease VOUS déshabille Épilogue Filmographie Remerciements Prologue Avachi sur mon canapé, je regarde à l’extérieur les nuages noirs qui défilent. Le ciel, jusqu’alors clément, vient soudainement de s’assombrir. Bref, ce jour-là, l’orage qui pointe son nez ne contribue pas à améliorer mon moral. Le regard bovin, désabusé, je zappe sur ma télécommande rafistolée avec du Scotch, lorsque le miracle a lieu : je tombe par hasard sur un film qui ne ressemble pas à un reportage, un documentaire qui ne ressemble pas à un documentaire, mais davantage à un film qui s’apparente à une fiction… sans en être. Le ton, l’image, le sens de ce que je découvre, je ne l’ai jamais vu, à tel point que, naïvement, je suis sûr que les ondes viennent à l’instant même d’être piratées ! Je me lève, fixe incrédule le petit écran pour éviter d’en perdre une miette, et, dans la crainte de changer de chaîne accidentellement, je pose délicatement la télécommande. Abasourdi, je continue de m’interroger : « À quel moment les responsables de la programmation vont-ils se rendre compte de la supercherie et du piratage de leurs ondes ? Je ne comprends pas… que fait le CSA ? » Mais, contre toute attente, le film se déroule jusqu’à la fin. Je viens de découvrir le portrait singulier d’un sénateur ventripotent. Il n’y a pas eu, comme si souvent dans les documentaires, cette voix off ; cet éternel pis-aller qui « mâche » systématiquement le sens de tout ce que l’on voit à l’image. J’attends impatiemment le générique de fin pour connaître enfin les auteurs de cet OVNI télévisuel. Il n’y en a pas. Tout juste une voix suave et timbrée, celle de Martine Matagne[1], qui dévoile avec humour le nom de l’émission : Strip-Tease, une émission qui VOUS déshabille ! Puis, un poème de Marco Lamensch[2], impertinent et cinglant, se déroule sur l’écran. Il est lu, d’une voix délicate, presque susurrée, par la même Martine Matagne. Comme pour illustrer cet « effeuillage télévisuel » dont je suis l’humble spectateur, une musique interprétée par une fanfare évoque irrévocablement le style de Nino Rota[3]. « Piquant les yeux, lavant la tête Glissant au fond de la baignoire Strip-Tease est une savonnette Et parfois un suppositoire. Alors autant vous avertir Décaper, ce n’est pas polir Informer, ce n’est pas couvrir Strip-Tease, c’est pas du cul, c’est pire ! » « Enfin du sang neuf dans le ronron télévisuel ambiant ! » J’éteins ma télé en me disant que j’ai bien fait de ne pas la bazarder quelques jours auparavant. Je reste là, sonné par ce que je viens de découvrir. Je me fais la promesse de rencontrer les auteurs de cette émission, pour tenter coûte que coûte d’y travailler. J’avoue que les aléas de la vie m’éloignèrent pendant quelques semaines de ce vœu pieu. Maintenant ou jamais Quelques jours plus tard, je reçois un coup de fil d’un ami… Comme il a une légère tendance à larmoyer sur le métier, pour m’éviter de l’écouter gémir trop longtemps sur ses états d’âme, je lui demande s’il a quelque projet. Déçu que je mette un terme au récit de ses souffrances, il me répond qu’il a l’intention de contacter les producteurs d’une nouvelle émission intitulée : Strip-Tease. Il veut leur proposer ses talents de réalisateur. La fameuse émission revient à mon esprit. Je m’accroche à la branche qui m’est tendue : – L’émission Strip-Tease ? C’est dingue ! Je suis tombé dessus l’autre jour. J’ai vu un film sur un sénateur, j’ai trouvé ça incroyable. Tu as les coordonnées de la production ? – Pourquoi, t’as l’intention de les contacter ? Il me dit ça d’un air surpris, comme s’il prenait conscience de n’être pas seul sur le marché. Je lui réponds bêtement : – Ben oui ! À l’autre bout de la ligne, il y a un silence. Je devine que l’ami est agacé par le peu d’attention que j’accorde à ses doléances de réalisateur. Il prend son ton le plus pédagogue : – Franchement, tu te vois faire des films pour eux ? – Oui… Pourquoi ? En vérité, je suis vexé… – Non, je te dis ça parce que… t’es pas vraiment réalisateur ? T’es plutôt acteur, non ? Il est informaticien, et je trouve qu’il a un certain culot de me dire ça. Dans le passé, il a réalisé plusieurs courts-métrages, certes de bonne facture, mais je m’étonne qu’il ose mettre en doute ma légitimité de faire ce métier ! D’un ton connaisseur, il me dit : – Si tu veux mon avis, ce n’est pas évident… Sur la défensive, je riposte : – Qu’est-ce-qui n’est pas évident ? – Ben… réaliser ce genre de documentaire… Mais si tu veux les appeler, tu peux essayer. On ne sait jamais… Grand seigneur, il me donnait sa bénédiction ! Quelques heures plus tard, j’appelle Jean Libon au téléphone, l’un des créateurs de l’émission. Peu de temps avant, j’ai pris soin de me documenter un minimum sur le sujet. L’émission Strip-Tease vient tout juste de faire son apparition en France. Nous sommes en 1994, elle existe déjà en Belgique depuis une dizaine d’années et remporte un franc succès en prime time. Après les présentations d’usage, Jean Libon me demande si j’en connais le concept. – Pas vraiment… mais l’autre jour j’ai vu un sujet sur un sénateur… Ça m’a totalement enthousiasmé ! J’ai la gorge nouée. Je m'inquiète à l’idée d’avoir appelé trop précipitamment sans m’être suffisamment documenté. Jean Libon m’explique le principe du recrutement des réalisateurs, et insiste sur le fait que la « méthode Strip-Tease » est particulière : ils ne jugent pas, lui et son acolyte, Marco Lamensch, les candidats réalisateurs sur leur curriculum vitae ou sur une possible reconnaissance du métier, mais sur du concret : des repérages filmés. – Justement, ça tombe bien ! J’ai actuellement un documentaire en chantier sur les concierges de Paris. Je peux vous montrer quelques images si vous le souhaitez ? En réalité, je n’en ai pas tourné une seule… J’ai uniquement quelques interviews de concierges en audio, et je m’entends l’inviter à visionner des rushs que je n’ai pas encore réalisés ! De toute évidence, ma proposition ne l’emballe pas, mais comme il me tutoie spontanément, cela m’encourage : – Tu sais… Il traîne longuement sur le mot, puis boule le reste de sa phrase : – … on m’a déjà proposé des choses comme ça, diiiis ! Parlant d’un ton modulé et parfois chantant, dont les Belges ont le secret, il agrémente souvent ses phrases par le préfixe « dis » en traînant généreusement dessus. Il ajoute : – Les concierges, les curés, on évite, tu sais… Dis-voir, tu n’as pas autre chose ? Un patron, un homme politique ? Je déglutis avant de répondre : – La concierge que je veux vous présenter est particulièrement intéressante. Elle a de la gouaille, un franc-parler ! Il y a un silence qui me semble interminable. Je surenchéris de peur de perdre la face : – C’est un personnage ! Je prends immédiatement conscience de la faiblesse de mon argument. À l’autre bout de la ligne, je le sens plutôt sceptique, prêt à mettre un terme à notre conversation. Je me répète en boucle intérieurement : « Il faut coûte que coûte que je décroche ce rendez-vous… Il faut coûte que coûte… » En désespoir de cause, j’improvise : – Elle fait des commentaires incroyables sur la vie des locataires de son immeuble… – Comme quoi ? Je n’en ai pas l’ombre d’une idée. À l’autre bout du fil, j’ai l’impression

See more

The list of books you might like

Most books are stored in the elastic cloud where traffic is expensive. For this reason, we have a limit on daily download.