1993 01 MARTHE ROBIN ParuinPsychoscopie (Regards de psychiatres sur des personnages hors du commun), en collaboration avec Daniel DRUESNE, Gérard ROTH, Michel TIRAVY),Édit. Josette Lyon, Paris, p.269-272. BIOGRAPHIE Marthe Robin Née en 1902,Morte en 1982. Catégorie: Religion Nationalité:Française Marthe Robin naît à Cbâteauneuf-de-Galaure, de parents fermiers: elle est la dernière de six enfants. Elle fréquente l’école communale laïque où elle ne parvient pas à passer son certificat d’études. A treize ans, elle arrête l'école pour aider ses parents à la ferme. Jolie brunette, les gens la disent gentille, obéissante, dégourdie, pieuse, hypersensible et aimant danser. A seize ans elle tombe malade et sombre dans une léthargie inexpliquée dont elle ne sortira vraiment que trois ans plus tard, à l'occasion d'une première apparition nocturne de la Vierge.Puis elle suit des pèlerinages et pense entrer au carmel. De caractère ombrageux, elle se fâche avec son père, Joseph, parce qu'il a cessé d'aller à la messe. C'est alors qu'elle décide de s'affirmer et de développer une personnalité trop écrasée par sa famille. Elle va désormais, à la suite de lectures d'auteurs mystiques, se consacrer au Christ. A vingt ans, au décours d’une rechute qui la cloue sur un fauteuil, elle s'impose une conduite inspirée de paroles: «il faut tout donner à Dieu», «il faut que tu sois en état continuel d'holocauste», auxquelles répondent les injonctions contraires du démon. Ainsi commence pour elle, le « voyage immobile» entrepris «dans la nuit de l'esprit ». A vingt-trois ans, elle se dit «inondée par la grâce» puis, après une hémorragie digestive, elle rédige successivement, en1925 et1926, deux consécrations au Christ: actes d'abandon qui représentent une consécration classique chez les mystiques du XIXème siècle, très attirés par le do1orisme. Elle va vivre ainsi tous les vendredis la Passion du Christ et, à partir de 1930, au jeûne permanent et à l'insomnie totale s'ajouteront les stigmates du Christ:aux extrémités, au côté gauche et au front (la couronne d'épines). Désormais s'enfle l'afflux des journalistes, théologiens et croyants, tandis que se déploie son charisme et que s'accomplissent quelques guérisons et conversions. De son divan, Marthe écrit, dicte, converse, fait s'agenouiller les grands de ce monde et l’exhorte à la prière. Les humbles trouvent auprès d'elle le réconfort souhaité. Elle suscite aussi des contre-transferts: on a peur d'elle, on la trouve orgueilleuse. Méfiantes, les autorités religieuses la font examiner par deux médecins et, faute de détecter quelque mystification,le défilé des laïcs et des religieux se poursuit. Dès 1938, on creuse à Châteauneuf les fondations d'un «Foyer de Charité» qui 2 se construit sous l'égide dupère Finet, bras droit de Marthe, ceci en pleine débâcle. D'autres foyers naissent, en France d'abord, puis à l'étranger" (en Colombie, en- Belgique, au Rwanda, au Vietnam, etc.). En 1969, ils sont vingt-sept, puis cinquante-neuf, fin1981. Toujours souffrante, aveugle et paralysée, Marthe contrôle de son divan son archipel d'œuvres sociales, donne des conseils aux gouvernements, aux religieux et recommande même au pape de rester «ferme» et d'énoncer des «vérités fondamentales». Elle meurt dans la nuit du jeudi au vendredi 6 février 1982, seule dans sa petite chambre. Elle est découverte au matin par le père Finet. APPROCHE PSYCHOPATHOLOGIQUE Voici un bref calendrier des ses maux. Dans l'enfance, elle fait des colères. A vingt mois, elle contracte une typhoïde et à seize ans, une encéphalite léthargique, probablement due à la grippe espagnole qui éclate en mai 1918. Elle souffre de céphalées, prostration, photophobie, évanouissements, convulsions atypiques puis, à la suite d’une chute, d'une paralysie des deux jambes et - partielle -, de la main droite, enfin de vomissements fréquents. Consulté, le Dr Assailly, neuropsychiatre, estime que ces troubles n'ont pas de rapport avec la typhoïde mais plutôt avec l'encéphalite. Après sa vision de la Vierge, une amélioration survient mais elle souffre horriblement de la tête, des bras, des reins. En1921, elle doit porter des lunettes, en1922, à vingt ans, une rechute l'oblige à se déplacer en fauteuil. Les auteurs de thèses sur Marthe discutent la part des affections précitées (typhoïde, encéphalite) dans la genèse des troubles ultérieurs, et la part d'hystérie qu'ils décèlent. Mais le véritable débat tourne autour de l’authenticité de l'anorexie totale qui survient après une période où Marthe absorbe quelques cuillerées à café d'eau par jour et suce quelques fruits pour toute pitance. A partir de 1930 surviennent les stigmates qui, bien qu'observés chez d'autres sujets (dans des contextes tant de religiosité que de laïcité), ne cessent d'intriguer, surtout par leur périodicité (tous les mois pour Marthe Robin). Ce souci d'écarter les supercheries, conduit lès autorités religieuses à soumettre Marthe (en 1942) à l'examen de deux spécialistes, les docteurs Dechaume et Ricard, dont le rapport à se montre rassurant. Mais une survie sur plusieurs années de diète totale n'est pas d'observation courante, même chez des hystériques avérées qui dépensent une énergie hors de proportion avec ce qu'elles absorbent. La récupération religieuse de la signification de ces données «miraculeuses» et le choix comme arbitres S' de sujets a priori axés sur la Révélation, obligent ces derniers à être à la fois juge et partie et les empêchent de considérer la signification sociale des maux observés. L'exemple de Marthe démontre la nécessité absolue que quelqu'un accepte ce rôle d'un être d'exception qui, dans d'autres pays, l'Inde par exemple, n'aurait ni les mêmes modalités ni la même portée. C'est ainsi que Jean Guitton, académicien, seul laïque catholique autorisé par le pape à siéger au concile duVatican,rend de nombreuses visites à Marthe. Unentre- tien « non directif» ainsi mené permet à Marthe Robin d'intégrer immédiatement les termes de « dard», de «feu» et de «désagrégation» d'elle-même, qu'on lui a obligeamment soufflés. Cette place à occuper, place de transfert, Marthe l'aperçoit quand le frère Marie-Bernard (auteur d'un livre sur Thérèse de Lisieux, Message nouveau), déclare qu'elle «est une sainte» et la fait entrer dans le tiers ordre 3 franciscain. A partir de ce moment, «sa carrière» mystique tient à la fois de la construction d'un « délire »et du modelage d'une «star». Il est aisé de montrer d'autres mystiques vénérées comme telles. Ici, il y a lieu d'observer une construction ducas à partir de sa signification supposée. Déçue par son père (pour des raisons mystérieuses), Marthe s'affiche vis-à-vis du Christ sur un mode érotomaniaque dont on peut dire qu'il a réussi. La reconnaissance sociale que lui vaut son syndrome, en dépit des moments dépressifs qu'elle traverse (le Jeudi saint ou elle se sent à nouveau abandonnée) et où l'hypotonie le dispute à la violence de sa lutte contre le démon (dont elle sort meurtrie), fonde, en elle, l'espoir de tenir son défi et donc de faire passer son «message», «il ya plus fort que le Malin, et c'est la Vierge Marie». Reste sous-entendu qu'il y a aussi plus fort qu'elle et c'est Jésus. En dépit de sa faiblesse, de son humilité apparente, des ses ruses avec le Malin, Marthe est du côté duplus fort,de celui qui a triomphé de la mort. A ce prix elle retrouve la paix. A la limite de la «normalité», anorexique, insomniaque, visionnaire, (auto?)-mutilée, stigmatisée, sigillée, thaumaturge, Marthe Robin le fut sa vie durant (1902-1981),du fond de son lit, dans l'obscurité totale... Le choix qu'elle fit de vivre chaque semaine la «Passion», du Christ, la mua en un agent publicitaire performant de la Foi et en un promoteur mondial et zélé des Foyers de charité. Nul doute que son procès en béatification introduit.en1987 aboutira. Son cas, singulier, comme celui d'une foule de personnalités-limite dites « mystiques », pose d’abord le problème de l’incompatibilité des discours médicaux et religieux,et ensuite, celui des modalités dutémoignage dit scientifique. BIBLIOGRAPHIE ANTIERJ.-J., Marthe Robin, le voyage immobile, Perrin, 1991. GUITTON J.,Portrait de Marthe Robin,Grasset, 1985. HUERTAS (de), Marthe Robin la stigmatisée, Ed. duCenturion, 1990. MONTAUT T., « Le médecin psychiatre face à la mystique chrétienne; au sujet de La vie de Marthe Robin », Thèse de médecine Nancy,1989. PEYRET R (abbé), Marthe Robin, la croix et la joie, Ed. Peuple Libre, 1981. PEYRET R.(abbé), Prends ma vie Seigneur,la longue messe de Marthe Robin, Ed. Peuple Libre, D.D.B.,1985. 1997 02 SOCIÉTÉFRANÇAISE DEPSYCHIATRIEDEL'ENFANTETDEL'ADOLESCENT JournéesNationales COGNITIONETDÉVELOPPEMENT Strasbourg10&11mai1996. Paruin/ (Neuropsychiatr.Enfance Adolesc).,1997,45,9,pp.518-521. LES BONS MOTS DES ADOLESCENTS (I) (1) Pourquoi les souris n'aiment-elles pas les devinettes: parce qu'elles doivent donner leur langue au chat. PRÉSENTATION Il s'agit d'une première présentation d'un travail en cours portant sur la capacité d'expression orale des adolescents en fonction des symptômes éventuels qu'ils présentent et du type de lien parental qu'ils ont connu. Cent soixante douze adolescents, d'une moyenne d'âge de 13 ans et demie, pour la plupart vus dans un Centre d'Observation ou en Institut de Rééducation, ont été examinés ainsi sur une période de cinq ans selon le même protocole d'examen par le même psychiatre. S'agissant d'un premier rendez-vous avec l'adolescent, ce protocole comprend l'exécution d'un dessin libre puis un entretien au cours duquel il lui est demandé -entre autres- de raconter un rêve, une histoire drôle ou -à défaut- une devinette. Enfin il lui est propose de dire quelle sorte d'aliments il évite habituellement. Par ailleurs, des données sur ses antécédents personnels, la composition familiale et le rang de l'adolescent dans sa fratrie, ainsi que sur sa latéralisation complètent l'enquête. Parmi la liste des symptômes retenus notons le vol (V), la fugue (F), l'énurésie (E), l'encoprésie (E'), l'asthme (A) et les délits sexuels (S), étant entendu que la plupart de ces adolescents sont en péril de déscolarisation. Pour l'instant les résultats semblent indiquer la pertinence de ce genre de protocole qui, en une demi heure d'examen, permet de tester l'assise cognitive et affective d'un sujet et surtout d'orienter le sens de la conduite à tenir. Ce travail comporte une seconde partie à venir ["Les bons mots des adolescents (II)"] où il appert qu'un bon tiers des adolescents verbalisent sous forme de récits de rêves ou d'histoires drôles des situations fortement sexualisées ou simplement allusives à des scènes de violence et de meurtre où ils sont impliqués aux côtés de tourmenteurs, voire d' "envahisseurs"...sans qu'il y ait dans leur histoire, et à aucun moment, rien d'équivalent de signalé. Ce qui semble indiquer qu'à condition de subir une forte suggestion dans ce sens ils seraient prêts à se laisser convaincre de l'historicité des abus sexuels ainsi mis en perspective. Remarque à mettre en relation avec la parution récente du livre d'Edouard Behr, (1) "Une Amérique qui fait peur" (2). Par ailleurs notre second article (II) comporte une étude sur certains cas où il existe une surdétermination certaine des thématiques personnelles abordées par le dessin, les rêves et les récits. 1Auteur:S.STOÏANOFF-NÉNOFF,psychiatreattachéauCPN-Laxou. 2Voiraussinotrenotedelectureparueen1995:EdouardBehr,"UneAmériquequifait peur",LeCoq- Héron(Histoiresdelapsychanalyseauxquatrecoinsdumonde),n°139,pp.76-82. 2 POPULATION OBSERVÉE Cent soixante douze adolescents, d'une moyenne d'âge de 13 ans et demie, pour la plupart de sexe masculin (à l'exception de dix filles), sont vus dans un Centre d'Observation ou en Institut de Rééducation; ils ont été examinés ainsi, sur une période d'exercice de cinq ans, selon le même protocole d'examen par le même psychiatre. Les données recueillies émanent du premier entretien, étant entendu que bon nombre parmi les adolescents examinés ont été revus plusieurs fois (une ou deux fois par an) selon la durée de leur séjour. Le recrutement de la population observée se répartit selon trois modes de prise en charge 1° la sécurité sociale (1/5); 2° le ministère de la justice (2/5); 3° l'éducation nationale (2/5). Des mutations d'un mode de prise en charge vers un autre ont été observés ainsi que des transferts vers (ou à partir de...) l'hôpital psychiatrique. Ainsi se trouvent inclus dans cette population une vingtaine d'adolescents des deux sexes, scolarisés en ville mais pris en charge par ailleurs en internat, dans une petite unité de soins psychiatriques, d'une dizaine de lits. Il est à noter que les résultats de ces adolescents, au moment de leur recensement, ne se distingue guère de ceux des plus perturbés parmi les adolescents non-hospitalisés. PRÉSUPPOSÉS THÉORIQUES Notre protocole d'examen privilégie, en effet, la verbalisation: soit du contenu du dessin, soit celui d'un rêve (R), soit, enfin, du contenu d'une "histoire drôle" (H) ou d'une "devinette" (h). Un bon tiers des adolescents ayant été dans l'incapacité de produire une verbalisation sous une de ces formes, il nous a semblé que les deux tiers restants donnent prise à une hystérisation névrotique, à mettre en relation avec la production de symptômes, tels ceux (les plus fréquents) répertoriés ci-dessus, qu'il s'agisse de manifestations fonctionnelles (asthme (A), l'énurésie (E), l'encoprésie (E'), ou de troubles du comportement à forme de délinquance, tels que les transgressions sexuelles (S), les fugues (F) et les vols (V). L'exclusion alimentaire (N), somme toute assez banale puisque au moins 35% des adolescents la pratiquent, reste indicative d'une possibilité de contester l'ordre alimentaire propose par l'adulte, possibilité non assumée par les autres, soit par excès de conformisme comme chez certains crypto-borderlines, soit par inhibition chez d'autres adolescents. Secondairement nous sommes en mesure de tenir compte de la typologie de la parentalité en relation avec la structuration de la personnalité et le mode de pathologie préférentielle développée. L'hypothèse à vérifier serait ici de savoir si le profil borderline de certains adolescents présente quelque corrélation avec le fait qu'ils soient issus de milieux oùdomine la mono-parentalité (FMP). En ce sens nous avons dû cerner cette dernière, compte tenu de ce que les définitions courantes nous semblent manquer de précision. Nous entendons par monoparentalité (2) le fait que l'adolescent soit élevé exclusivement par un des parents, au sens où c'est l'absence d'une autorité reconnue au parent de l'autre sexe qui serait pathogène (3). Il faut de surcroît que cette situation ait perduré avec une certaine précocité, ce qui nous a conduit à noter comme familles naturelles (FN) des familles où la disparition ou l'indisponibilité d'un des parents s'est produite alors que l'enfant avait déjà l'âge de raison (sept ans). Par ailleurs, les cas de concubinage étant fréquents dans cet échantillon de population, il est difficile se savoir avec certitude si les partenaires déclarés du parent restant ont eu (ou pas) quelque influence sensible sur l'enfant. Un exemple ici mérite d'être introduit. Il s'agit d'une famille où très tôt la mère a 3Cf.leparagraphesur"Letransgénérationnel"dansnotrelivre:Qu'en dira-t-on(UnelectureduLivreXII duSéminairedeJacquesLacan),1996,l'Harmattan,Paris. 3 quitté le domicile conjugal et a perdu ses droits parentaux, laissant son mari seul avec deux enfants. Parmi ces deux enfants, qui ont précosément montré des signes de psychose, un seul se trouve répertorié dans notre corpus. C'est donc le père de ces enfants, particulièrement psycho-rigide au demeurant, qui raconte comment il obtient généralement ce qu'il veut face à l'administration. C'est ainsi que, lors d'une séance de la CDES à laquelle il assistait, puisqu'elle concernait un de ses enfants, il prit la liberté, au terme d'une demi-heure d'écoute attentive des échanges en langue de bois qui se produisaient devant lui, de demander un cendrier. S'étant vu opposer l'interdiction de fumer en ce lieu, ce père a pris la parole, qu'il a gardée, paraît-il, deux bonnes heures, pendant lesquelles il a vilipendé les membres de la commission. A la suite de quoi le psychiatre a conclu en disant: "je comprend pourquoi vos enfants sont psychotiques". Racontée par ce père cette anecdote relève d'une logique éminemment freudienne. L'un répète la vérité sans la comprendre et l'autre l'énonce sans réussir à ycroire. RÉSULTATS: 1° répartition en pourcentage des trois groupes de parentalité: Le tableau (fig. n°1B) ci-contre indique que les familles dites naturelles (FN) représentent près de la moitié des configurations recensées, alors que les familles nonoparentales (FMP) ne concernent que le cinquième des adolescents observés. FIG.1A FIG.1B Les renseignements familiaux manquent dans 8 % des cas. On note que les FMP représentent uncinquième de l'effectif. 2° étude des performances langagières a) corrélation entre la capacités de raconter avec la provenance familiale: LEGENDE(FIG.2): h:devinette H:histoire"drôle" R:rêveraconté N:rejetalimentaire 24%desenfantsnesaventraconterni unehistoire,niunedévinetteniun rêve.Ilsserépartissementà peuprès égalementselonlestypesfamiliaux. Toutefois il est à noter que l'on "rêve" davantage dans les Familles naturelles (FN.). Il est probable que de nos jours la différence entre les ressortissants des différentes types de familles tende à s'effacer. b) corrélation des symptômes et des actings avec les types familiaux SYMPTÔMES Asthme[A],Énurésie[E], TOTAL: Encoprésie[E'] 30cas=17% ACTINGS Fugues [F],Délinquance Sexuelle [S], Vols[V], TOTAL: 39cas=22% Psychothérapie[P]) FIG.3 Lesactingssontplus fréquentsdansles famillesnaturelles(FN) 4 Les symptômes (Asthme et énurésie) sont prévalents dans les familles recomposées (FR). c)corrélationdunombredessymptômesetdesactingsaveclestypesfamiliauxchezlesenfantsenthérapie (P) FIG.4A FIG.4B SYMPTÔMES ACTINGS --------------------------------------------------------------- X=FAMILLENATURELLEY=MONOPARENTALEZ=RECOMPOSÉE L'échantillon montre que les enfants issus de familles monoparentales (FMP) ou de familles recomposées (FR) sont exclus de la thérapie lorsqu'ils présentent des actings, alors que l'offre de thérapie émane de quatre thérapeutes qui ne se sont jamais concertés sur ce point. Pour ce qu'il en est de raconter des "Histoires drôles" (H) les trois groupes familiaux s'équivalent. On note que les ados issus de familles monoparentales (FMP) s'intéressent aux rêves (R) beaucoup plus que les autres, et que ceux des familles naturelles (FN) sont en pointe pour raconter des devinettes (h) et surtout pour censurer l'alimentation (N). Les symptômes proprement dits (A, E, E') semblent trouver un terrain privilégie au sein des familles recomposées (FR), oùl'énurésie (E) est le symptôme le plus fréquent. Les items liés à la délinquance (F,S,V) semblent être l'apanage des familes naturelles (FN), alors que globalement les passages à l'acte sexuels (S) cèdent le pas devant les fugues (F) et les vols (V). COMMENTAIRES A propos de la psychothérapie (P): En général il est noté si l'adolescent a été suivi sur le plan psychologique antérieurement à l'entretien oul'est encore au moment de l'entretien. A propos des exclusions alimentaires (N): il est demandé: "y-a-t-il des choses que tu ne manges pas", en précisant selon les cas les raisons (religieuses, allergiques, diététiques, etc.). Au chapitre du sommeil s'incrivent les rêves (R); il est ainsi demandé: "te souviens-tu d'un de tes rêves?" Si c'est le cas ce rêve sera noté in extenso, au besoin en modérant le tempo durécit. Catégorisation: Il va de soi que les items notés positivement en tant que présents chez tel ou tel adolescent peuvent requérir des enquêtes plus circonstanciées. Ils conduisent à une catégorisation du genre: P/AS/Ng/HR, à lire: adolescent en psychothérapie (P), présentant de l'asthme (A), des troubles des conduites sexuelles (S), des exclusions alimentaires (N) et s'avérant gaucher (g), ayant produit au moins un rêve (R) et une histoire drôle (H). Perspectives d'avenir: ce qui manque à notre protocole c'est l'après-coup (de cinq ou dix ans, voire plus) qui nous permettrait de juger de sa pertinence. Le pari sous-jacent à notre démarche consiste en l'espoir que nous fondons sur les capacités de verbalisation existantes des uns, et leur développement chez ceux qui n'en font pas la preuve, eu égard au pronostic que cela conditionne. Quiconque aujourd'hui, en effet, ne développe pas ces capacités de verbalisation étant menacé à terme d'une rapide marginalisation et d'une privation certaine d'autonomie. 5 RÉSUMÉ: Il s'agit d'un travail explorant la capacité d'expression orale des adolescents en fonction des symptômes éventuels qu'ils présentent et du type de lien parental dont ils sont issus. Cent soixante douze adolescents, d'une moyenne d'âge de 13 ans et demie, pour la plupart vus dans un Centre d'Observation, ont été examinés ainsi sur une période de cinq ans selon le même protocole par le même psychiatre. 24 % s'abstiennent de tout récit. Ce corpus ne permet pas de noter des différences nettes entre les sujets issus de Familles Monoparentales (FMP) et les autres, excepté sous l'angle de la délinquance où ce sont les Familles naturelles (FN) qui sont le plus souvent en cause. On constate que les psycho-thérapeutes écartent systématiquement de l'indication les enfants issus de familles monoparentales. BIBLIOGRAPHIE (1) S. STOÏANOFF-NÉNOFF 1995, Edouard Behr, "Une Amérique qui fait peur", Le Coq-Héron (Histoires de la psychanalyse aux quatre coins dumonde), n°139, pp.76-82. (2) S. STOÏANOFF-NÉNOFF 1996, Qu'en dira-t-on (Une lecture du Livre XII du Séminaire de Jacques Lacan), 1996,l'Harmattan. 2003 03 Commentaire du séminaire 25 (« Le temps pour conclure ») de Jacques Lacan Inédit Introduction Pour introduire au séminaire n°25 de Jacques LACAN, « Le moment pour conclure », rien n’est plus simple. Il suffit de se pencher sur le premier fragment de texte parlé venu et d’en mettre la cohérence à l’épreuve. Je parle de cohérence parce que la présentation officielle qui en a été faite, par le biais de l’écrit qui nous a été distribué, met l’accent sur un certain nombre de revirements de la part de LACAN, et proposés comme tels par l’auteur du texte distribué. Revirements veut dire qu’il s’agirait sur le tard, de la part de LACAN, d’un dévoilement de ses vaticinations, de ses contradictions et pourquoi pas de son gâtisme ultime. Il est bon d’indiquer parfois, que bien qu’appartenant à une école freudo-lacanienne, on n’en est pas pour autant un parti de « godillots ». Alors, comme ça, de l’aveu même de LACAN, la psychanalyse ne serait pas une science ! A quoi bon se donner la peine de le lire, par conséquent, ce Cher LACAN, dès lors que pour ce qu’il en est de la pratique du bavardage, et donc du n’importe quoi, chacun suffit à la peine. Car, après tout, il était comme nous tous, du moins finit-il par l’avouer, il ne trouvait pas mais il cherchait [L25 14.03.78p.1]. A moins que ... 1) L’Inconscient,c’est très exactement l’hypothèse qu’on ne rêve pas seulement quand on dort Voici les quelques lignes, que je choisis au beau milieu de la première page de la première séance de ce séminaire 25 : l’analyseadesconséquences.Elleditquelquechose.Qu’est-cequeçaveutdire« dire » ? « Dire »aquelquechose àfaireavecletemps.L’absencedetempsc’estunechosequ’on rêve ;c’estcequ’onappellel’éternitéetcerêveconsisteàimaginerqu’onseréveille.On passe son temps à rêver, on ne rêve pas seulement quand on dort. /.../ Je voudrais vous faireremarquerquecequ’onappelle« leraisonnable »estunfantasme :c’esttoutàfait manifeste dans le début de la science. La géométrie euclidienne a tous les caractères du fantasme.Lefantasmen’estpasunrêve,c’estuneaspiration. C’est tout pour la citation. Je la puise dans l’édition dactylographiée de ce séminaire, mais je suppose qu’elle est reprise tel quel dans les suivantes. Il va sans dire que je m’implique dans ce choix. Il se trouve, en effet, qu’au début des années 70 il y a eu de ma part immixtion dans la discussion qui a suivi l’exposé d’un certain RITTER, sommité strasbourgeoise. Je dis immixtion parce que mon propos a été reçu comme tel. J’ai dû dire quelque chose dans le genre : « Au temps où nous parlons aujourd’hui, il n’est pas certain qu’il ne s’agisse pas d’une rêverie ». Chose à vérifier dans les Lettres de l’École Freudienne de l’époque qui reprennent ceci textuellement. Et RITTER de rétorquer avec suffisance, à peu près ceci : « Si Stoïanoff est en train de rêver, c’est son problème ». L’immixtion, voyez le rêve de l’Injection faite à Irma, suppose l’intervention de ce qu’on nomme la pulsion invocante, et elle se joue à plusieurs voix. Donc c’est dans l’après-coup de la production de ces voix inattendues, encore que familières, que se produit l’immixtion. Toujours est-il qu’à ce moment une petite voix inattendue c’est fait entendre pour dire : « Stoïanoff dit vrai ». La voix de Jacques LACAN, inhabituelle et donc inattendue dans de telles circonstances. Et voila-t-il pas, quelques lustres après, en 1977, et donc sur l’ Untergang, sur le 2 déclin, la voix de LACAN retentit à nouveau pour susurrer : « L’Inconscient, c’est très exactement l’hypothèse qu’on ne rêve pas seulement quand on dort. ». C’est une petite phrase que j’ai momentanément détournée, mais qui figure dans le passage que je tente de commenter aujourd’hui. L’immixtionest donc un phénomène qui s’apparente à un réveil, à une rupture de la consistance de l’imaginaire, et qui donne lieu à des remaniements après-coup, révélateurs des modes de défense de chacun. Ça peut être la production d’une parole qui a la valeur d’un geste rassurant, comme pour chasser un mouche importune ; parole du style : « Si Stoïanoff est en train de rêver, c’est son problème ». Après ? Après, tout rentre dans l’ordre. A moins que n’intervienne après-coup l’achose, à savoir la voix ... et avec elle une modification subjective. L’achose,c’est ce qui est susceptible d’échapper à l’analyste, de lui sortir d’entre les jambes, ou d’entre le buisson ardent, si vous préférer. Bref, l’analyse se prête à ça, au sens où il est censé ne pas résister à ce type de jaculation. Résister ça consistera, par exemple, à rester déontologique, oupolitiquement correct.... vous voyez le genre. Il reste qu’à suivre la voie du rêve il a risque de tomber dans la magie : Voicice que LACAN articule à ce propos [L25 15.11.77p.2]: Dansl’ordredurêvequisedonnelechampd’userdulangage,ilyaunebavurequiestcequeFreud appelle ce qui est en jeu : le Wunsch. C’est un mot /.../ allemand, et le Wunsch dont il s’agit a pour propriétéqu’onnesaitpassic’estunsouhait,quidetoutefaçonenal’air,unsouhaitadresséàqui ? Dèsqu’onveutledire,onestforcédesupposerqu’ilyauninterlocuteur[supposésavoirautrement : L25 10.01.77 p.5] et, à partir de ce moment là, on est dans la magie. On est forcé de savoir ce qu’on demande ;maisjustementcequidéfinitlademande,c’estqu’onnedemandejamaisqueparcequ’on désire/.../etcequ’ondésireonnelesaitpas. A me mettre à supposer que le rêve veut dire, je ne sais plus ce que je dis. En raison de la bavure dutransfert. 2) la science n’est qu’un fantasme Je vais aller unpeu plus vite à présent. Le passage dit : ‘ce qu’on appelle « le raisonnable » est un fantasme : c’est tout à fait manifeste dans le début de la science’. Ça se lit, ça se décrypte avec... avec quoi ? Avec ce qui suit dans son texte quelques pages plus loin, pardi, et qui dit : ‘la science n’est qu’un fantasme’ [15.11.77 p.6]. Et puisque la psychanalyse n’est pas un fantasme (un fantasme de Freud ou de Lacan, par exemple,) c’est donc bien qu’elle n’est pas une science. Mais à partir de là, comme on ne sait plus où la caser, LACAN suggérera que c’est de la poésie, et qu’au fond c’est un art. Il suggère. Il ne garantit rien. Il ne se met pas à la place du Dieu non menteur de DESCARTES. A vous d’expérimenter si ce qu’il dit a une signification de vérité. L’expérienceanalytique c’est ça : chacun expérimente la chose et en tire ses propres conclusions. A moins qu’il ne préfère se conformer aux rêveries des autres. L’analysevise au réveil. A l’impossible à dire [20.12.77 p.1]. Car « le dire concerne ce qu’on appelle la vérité [L25 10.01.78 p ;4]. Dire le Réel, à savoir l’impossible de dire la vérité, suppose une temporalité autre, que suggère bien le titre de ce séminaire : Le temps pour conclure. Le sujet c’est le temps. Vasteprogramme. L’analystepousse au dire, à l’impossible à dire ; c’est pousser à conclure. Pour cela il équivoque, c’est-à-dire il restitue aux dits de l’analysant leur halo d’incertitude. Mieux : l’équivoque renvoie à l’erreur sur la personne du partenaire. Erreur due à l’interposition de l’écran du voile spéculaire entre le sujet qui parle et celui dont il parle. L’analysetend à restituer au « complexe d’autrui » son aura, bénéfique ou maléfique, afin de tenir à l’encontre d’autrui un discours qui ne serait pas du semblant. Faire semblant de faire l’éloge (ou la satire) d’autrui, alors que c’est son propre narcissisme qu’on alimente. Il paraît que Nietzsche en savait unbout sur ce chapitre.
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