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L'insurrection Sahraouie: de la guerre à l'Etat 1973-2003 PDF

182 Pages·2003·5.384 MB·French
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L'Insurrection sahraouie De la guerre à l'Etat 1973-2003 Déjà parus Dans la collection des Cahiers de L'Ouest Saharien: Volume 1,Etat des lieux et matériaux de recherche, 1998, 203 p. Volume 2, Histoire et sociétés maures, 2000, 269 p. V01ume 3, Fragments, 2002, 224 p. Déjà paru dans la collection des hors séries de L'Ouest saharien: Hors série l, Ali Omar Yara, Genèse politique de la société sahraouie, 2001, 234 p. Ali Omar YARA L'Insurrection sahraouie De la guerre à l'Etat 1973-2003 L'Harmattan L'Harmattan Hongrie L'Harmattan Italia 5-7,ruedel'École-Polyteclmique Hargitau.3 ViaBava,37 75005Paris 1026Budapest 10214Torino FRANCE HONGRIE ITALlE Pagedecouverture: l'artiste G.Yaraexprime danscettecalligraphie l'insurrection sahraouie sous forme de voiles en plusieurs couleurs que portent les femmes maures. (Collection Yara). Mise en page de cette publication A. O. Yara cgL'Harmattan, 2003 ISBN: 2-7475-4656-X L'Insurrection sahraouie Introduction Notre réflexion apour objet lecheminement politique du peuple sahraoui, dans sa quête historique de légitimité. Dans cette perspective, nous avons choisi de partir de la formation sociale tribale, lieu de fermentation de l'insurrection et initiatrice ducombat. Ce, d'autant plus, qu'elle aengendré desmutations identitaires majeures. Cette approche qui relève de la sociologie historique, n'est pas limitée à l'action militaire menée autrefois par des tribus, d'abord contre le colonialisme français et ensuite contre le colonialisme espagnol, mais s'enracine aussi dans la composition structurelle des fractions sahraouies à partir de laquelle un sentiment de l'agir patriotique s'est développé, concrétisé par le Front Polisario. Si certaines analyses reposent sur les chroniques des résolutions juridiques, notamment après 1988, elles ne suffisent pas à rendre compte de la représentation collective d'un peuple en armes, décidé à se libérer du colonialisme espagnol qui s'est installé depuis 1884 sur leur territoire, pour «pêcher» sur les rivages du Rio de Oro. Sur ces bases, notre énoncé s'appuie sur une approche théorique matérialiste. Et d'abord celle d'Emile Durkheim. Toutefois nous ne nous limitons pas à la distinction qu~il opère entre société organique et société mécanique. De même, le regard que nous portons sur la société sahraouie ne se limite pas à l'appareil d'Ibn Khaldûn, c'est-à-dire la progression d'une fraction tribale, vers le commandement politique. Mais, partant de la démarche de ces deux soc i010gues, il importe d' introd uire dans cette réflex ion l' analy se stratégique dont la guerre reste l'assise principale dans la formation, la montée et l'agir d'un peuple qui lutte pour sa libération. Aujourd'hui, le conflit de souveraineté sur le Sahara occidental est polarisé entre le Maroc dynastique et le Front Polisario. Le nationalisme marocain (qui s'efforce de surmonter le clivage Palais-Opposition), a bénéficié d'un appui solide de la IlIe république française, pour maintenir en vie la Dynastie marocaine. Ces faits nous conduisent à évoquer la période du protectorat français, époque fondatrice au cours de laquelle le Maroc d'autrefois a innové à son tour dans la stratégie d'expansion. Ce qui nous incite, trente ans après le déclenchement de l'insurrection sahraouie, à parler d'un Iien causal entre la guerre totale (qui ne relève pas de l'esprit belliqueux attribué aux tribus sahraouies) et l'indépendance totale, que le peuple sahraoui réclame. De laguerre àl'Etat L'exode forcé de la majorité des Sahraouis de 1975 à 1977 vers les Camps de réfugiés a engendré une formation organique de ce peuple qui se réveille pour prendre son destin en main. Sa volonté d'indépendance n'est donc «pas déclinable». L'analyse stratégique montre que cette guerre totale, menée par les Sahraouis, relève de la guerre de mouvement moderne. Leur réussite conduit les théoriciens de la contre-insurrection à réfléchir sur les moyens de défense que doit développer le Maroc pour ne pas s'épuiser dans une guerre d'expansion. Si les Etats-Unis ont été la première puissance à emprunter au savoir faire militaire des Sahraouis contre la livraison d'armes, la France a complété le dispositif contre l'insurrection marocaine par son savoir faire ancestral. Ce qui a permis à la Dynastie d'opter pour l'occupation militaire par d'autres moyens sociaux et d'introduire dans les villes sahraouies une «marée noire» de sujets du royaume, ce qui a produit une sorte de «vietnamisation» du Sahara occidental. Malgré ces obstacles militaro-juridiques qui renforcent le dispositif contre-insurrection, une même opportunité politique de lutte va être offerte aux Partisans sahraouis (des années cinquante) et aux fondateurs du front Polisario (durant les années soixante-dix) dans les villes sahraouies et marocaines. Elle va être saisie par les différentes stratifications sociales dans les territoires occupés (l'Aaïun, Dakhla), ceux de l'ancien protectorat espagnol (Tantan, Tarfaya) et ceux de la région de Tekna Sahraouie (Assa, Zag, Goulimine), surtout dans la conjoncture des années de plomb, à partir de 1979. Ces forces vont permettre aux Partisans sahraouis d'agir autrement sans attendre les résolutions des Nations unies dénuées de toutes crédibilités coercitives. Cette montée en force de la contestation dans les territoires occupés encore sous administration marocaine va-t-elle dépasser le dispositif contre-insurrection pour céder la place à l'action de plus en plus prononcée en faveur de l'indépendance totale que les Sahraouis réclament depuis trente ans? Cette étude du processus insurrectionnel sahraoui tente d'y répondre. Nous nous appuyons en cela sur une articulation entre la formation sociale des fractions et la guerre totale et patriotique qui nous conduit logiquement à évaluer la composition géopolitique du Maghreb occidental. Cette étude s'accompagne de documents historiques et d'appréciations critiques sur des donnes stratégiques relatives à lacause sahraouie. 8 L'Insurrection sahraouie I. La société sahraouie A. Les rapports sociaux sahraouis J.Autrefois, le«frigue» sahraoui Le Sahraoui habitait la tente «khalma» nommée aussi «Kanoun», feu, famille, structure identique à toutes les sociétés nomades, comprenant des matériaux usuels et variés selon l'origine, la coutume, telle la direction de l'ouverture de la tente, généralement vers El guebla, le sud, selon les climats. Ces variations expliquent en partie la commodité de la structure de la tente qui s'adapte au mode de production de vie nomade et se cloisonne avec Ia fIexibilité del' 0rdres 0cia 1.Lap 0sse ssion des tr0upeau x, et essentiellement celle des dromadaires constitue la richesse des nomades, leurs unités de valeurs marchandes, sans pour autant écarter le fait que les semi-nolllades et les sédentaires possèdent aussi des troupeaux de chèvres et de moutons, ainsi que des maisons en dur dans les ksour, et les villes du littoral. La famille, première unité sociale, repose, formellement, sur le système patriarcal formant un groupelllent patrilinéaire, filiation unilinéaire en lignage masculin. Le.frigue, fragment, groupe, nommé Smat chez les Chaamba de Metliti, COlllposé de 6 à 7 tentes, soit 30 personnes, forme une communauté en mouvement toujours mobilisée vers le pâturage. C'est donc une formation sociale initiale, connue aussi sous le terme de Mahchar, entassement, ou Mahssar, arrêt, notamment en Mauritanie chez les Imarats de Trarza, le campement de l'émir et de sa suiteI. Le frigue, au plurielferguan, porte généralement le nom de la fraction ou/et de la sous fraction,frigue des «Ahl ...», 0u d'« 0 uled... », et par foi sie nom d'une per son ne, le Che ikh, exemple,fÎAigue Maatalah, fi'igue Daha. Ces «friques» peuvent comporter une petite «sous-fraction», ou une fraction, Fakhd. Il existait desfrigues souvent mixtes, peuplés par des familles appartenant à des tribus différentes, Par ailleurs, certains frigues restent sur le même pâturage plusieurs années, sans interruption. I Cf PauIDubie, «La vie n1atérielle des A4aures», in, Mélanges ethnologiques, Mémoire de l'IFAN, na XXIII, Dakar, ]953, pp. ]13-252. De Lagu erre àL'Etat La société sahraouie est une société à islam sunnite. Lajustice est rendue par les cadis qui s'appuient sur le Coran et sur la Sunna, mais également sur la «Rissala», recueil de droit de la voie malékite, madh'hab Al Imam Malek; il y a souvent intervention de la Jemaâ dont les décisions n'ont pas un caractère de contrainte judiciaire ou d'obligation. La hiérarchie sociale dans la société sahraouie, similaire à celle des tribus berbéro-arabes sahariennes, tire sa particularité des rapports déterminés par l'étendue des territoires et par un peuplement très faible, d'où la nécessité d'une transformation sociale par un décloisonnement tribal. Le système des castes traité dans la version élémentaire du mode de production asiatique n'a pas sa place dans le désert atlantique, puisque les fractions guerrières et commerçantes s'efforçaient d'abolir ces cloisons qui caractérisaient certainement encore les systèmes segmentaux et de castes. L'islam, avec son mode de production communautaire réfute, dans les pri ncipes, le cIo isonnem ent de l'Un1ma, mais l' organi sation soc iale, berbéro-arabe trouve son salut collectif dans les coutumes que lui dicte le contexte. IIexiste une pratique, notamment chez la confédération Rgueybat, 1 la Meniha (prêt), «coutun1e préislamique» dit-on, qui consiste à confier, à long terme, aux personnes de la même fraction du sang ou d'appartenance, généralement pauvres, un certain nombre de chameaux. Ceux qui les détiennent bénéficient de leur usage, de leur lait et de leur poil en échange des soins qu'ils leur donnent. Cette clause, d'un engagement simplement oral pour «un but charitable», se concrétisait au moment d'un mariage. C'est en soi un pacte d'assistance mutuelle entre fractions, notamment celles des Rgueybat Lgouacem, d'où la confusion dans certaines analyses entre cette pratique et la constatation de Karl Marx à propos du mode de production asiatique, selon laquelle, il n'y a pas de propriété privée mais uniquement possession individuelle. Cet acte de meniha a donc une fonction générative car elle contribue à l'élargissement d'un sentiment et à une représentation collective par voie économique. On ne doute pas que d'autres fractions qui voulaient garder leur origine tribale, tout en acceptant l'adhésion d'autres familles, comme les Izaguiyin, Ouled Delim, par exemple, ont d'autres systèmes similaires 1Cj~C. Cauneille. M. Chearn, Op. Cit. p. 14et 55:V. Manteil, Lacivilisation du chalneau, M. Chearn, n° 1306, 1948 5; Essai sur le chan1eau au Sahara, Centre [FAN, Dakar, 1952, p. 132; J. Richarte, l'v'otessur la 1J1enihaenpays Inaure, M. Cheatn, n° 1112. 10 L'Insurrection sahraouie d'aide mutuelle, pour garder ce maintien des relations sociales. Le walaà, comme dans le système tribal arabe, a su dans le cas sahraoui franchir le pas vers cet élargissement social qui comble la perte en vie humaine des personnes de la fraction en guerre. On ne doute pas non plus, que la majorité des fractions, aient organisé, ou participé, à des actes de «razzi» entre tribus. 2. Les Fractions, générateurs politiques Cette diversité des situations permet de s'interroger sur l'organisation verticale des Sahraouis. La fraction est la génération des «frères)), qui ont un lien généalogique avec le père de toute latribu. Unité intermédiaire entre l'ancêtre commun et sa dernière génération, elle est l'élément clef dans le jeu politique à l'intérieur de latribu, et même de la confédération, surtout si elle est dotée d'un potentiel militaire. En perpétuelle recomposition, elle reste, en conséquence, la plus menacée par la disparition nominale, et symbolique; mais si une fraction devient importante, elle peut acquérir une autonomie politique, et devenir une tribu 1.Si la démarche «structuraliste)) de la fraction peut nous aider à repérer des éléments de structure, elle ne peut pas révéler le processus de son évolution politique qui devient forcément inégale entre ces formations sociales sur une période allant de vingt àtrente ans. C'est pourquoi nous prenons la fraction dans sa mutation historique, pour mieux comprendre non seulement le passage d'une formation sociale à une autre, mais aussi sa position politique au sein de la société sahraouie2. 1Pour Max Weber, la tribu ((n'est qu'un produit artificiel de la conlnlunauté politique, bien qu'il attire aussitôt à lui tout lesynlbole de la communauté du sang. La conscience tribale est dans cecas, conditionnée, d'abord, par ledestin politique conlmun et nonpar l'origine ethnique». Cf' Econon1ie etSociété~ éd. Plan, Paris, 197I,p.422. 2 La fraction est perçue aussi en rapport àson choix d'un espace communautaire nomade dont le pâturage constitue le mobile principal. Comme en témoigne François Beslay, (d'aJnplitude et l'axe des déplaceJnents annuels varient non seulenlent enfonction de lapluie, du pâturage ou nlênle de la conjoncture politique, nlaisaussi delazone nonnalenlent dévolue àchaque.fraction ...Atitre d'exemple, desAheISidi A!laI(Lgouacem), ontpassé I'hiver 1941dans laGaada, aunord de lasaguiet ElHanlrapour descendre l'été delamê/11eannée ausud de I'Azefal àquelque 800 km.» Cf Les Reguibats. De lapaix française au Front Polisario, éd.L'Harmattan, Paris, 1984,p.53. Il

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