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Liberté, partout et toujours PDF

365 Pages·2009·5.103 MB·French
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BIBLIOTHÈQUE CLASSIQUE DE LA LIBERTÉ Collection dirigée par Alain Laurent DANS LA MÊME COLLECTION Benjamin Constant, Commentaire sur l'ouvrage de Filangieri Wilhelm von Humboldt, Essai sur les limites de l'action de l'État Ludwig von Mises, Abrégé de L'Action humaine, traité d'économie Frédéric Bastiat, Sophismes économiques Yves Guyot, La Tyrannie collectiviste Jacques Necker, Réflexions philosophiques sur l'égalité Bruno Leoni, La Liberté et le Droit Thomas Jefferson, Écrits politiques Michael Oakeshott, Morale et politique dans l'Europe moderne Friedrich A. Hayek, Essais de philosophie, de science politique et d'économie Édouard Laboulaye, Le Parti libéral, son programme et son avenir suivi de La Liberté d'enseignement et les projets de lois de M. Jules Ferry Ayn Rand, La Vertu d'égoïsme Friedrich A. Hayek, Nouveaux essais de philosophie, de science politique, d'économie et d'histoire des idées «LIBERTÉ, PARTOUT ET TOUJOURS» La Bibliothèque classique de la Liberté se propose de publier des textes qui, jusqu'à l'orée de la seconde moitié du xxe siècle, ont fait date dans l'histoire de la philosophie politique en appor tant une contribution essentielle à la promotion et l'approfondissement de la liberté individuelle -mais ne sont plus disponibles en librairie ou sont demeurés ignorés du public français. Collection de référence et de combat intellectuels visant entre autres choses à rappeler la réalité et la richesse d'une tradition libérale française, elle accueille aussi des rééditions ou des traductions inédites d'ouvrages d'inspiration conservatrice « éclairée », anarchisante, libertarienne ou issus d'une gauche ouverte aux droits de l'individu. Chaque volume de la collection est précédé d'une préface présentant le texte et son auteur, et s'achève sur une chronologie bio-bibliogra phique de l'auteur et un index sélectif. PIERRE-JOSEPH PROUDHON «LIBERTÉ, PARTOUT ET TOUJOURS» Textes choisis, ordonnés et présentés par Vincent Valentin bibliothèque classique de la les belles lettres Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous les pays. © 2009, Société d'édition Les Belles Lettres, 95, boulevard Raspail, 75006 Paris. ISBN: 978-2-251-39048-2 INTRODUCTION par Vincent Valentin Proudhon est connu pour être le père de l'anarchisme. Avant lui, le mot existe mais son usage n'est pas fixé. Il est le premier, en 1840, à donner à« anarchie» le sens non plus de désordre mais d'ordre social sans gouvernement. De cette date jusqu'à sa mort en 1865, de la monarchie de Juillet au Second Empire, en passant par la révolution de 1848 qui l'a tant mobilisé, Proudhon va développer le programme contenu dans ce terme, dans sa dimension critique, atta quant l'autorité sous toutes ses formes, autant que construc tive, en jetant les bases d'une société sans État. Par la suite, le mouvement anarchiste, toutes tendances confondues, s'ins crira dans son sillage en s'inspirant de ses analyses. Si Max Stirner proposait dès 1845, dans L'Unique et sa propriété, un exposé assez complet de l'anarchisme, son influence était très faible; c'est bien Proudhon que Bakounine et Kropot kine reconnaissaient comme le premier d'entre eux 1 • La marginalisat i on politique et intellectuelle de l'anar chisme pourrait cependant laisser penser que l'œuvre de Proudhon est la trace d'un moment de l'histoire politique terminé, qu'elle exprime sans doute une juste révolte et un bel espoir, mais qu'elle n'a plus rien à nous dire. Ce n'est 1. Cf. notamment J. Maitron, Histoire du mouvement anarchiste en France (1880-1914), Paris, Société universitaire d'édition et de librairie, 1955. 8 << LIBERTÉ, PARTOUT ET TOUJOURS ,, pas le cas : sa pensée demeure indispensable et indémoda ble au moins sur deux points, que sont la critique du pou voir et la recherche de nouveaux moyens d'émancipation qui soient ceux ni du libéralisme, ni du socialisme étatiste. Il ne semble pas que les progrès de la démocratie et de l'État de droit rendent caduques les réflexions sur la nature du pouvoir et les fondements de l'obéissance. Les pages que Proudhon consacre au « principe gouvernemental » n'ont rien perdu de leur force. Il est toujours utile de rappeler que le roi est nu, qu'il nous gouverne parce que nous y consen tons en vertu de représentations de la société discutables et dont il faudrait au moins avoir conscience. Tout cela mérite encore d'être médité et débattu, et suffirait à justi fier de refaire vivre une œuvre largement conçue pour faire tomber les illusions du peuple quant aux vertus de l'action politique. Le message de Proudhon, sur ce terrain, est clair : il ne faut pas attendre l'émancipation et le progrès du suf frage universel et de la démocratie représentative, du gou vernement et de l'action politique en général. Proudhon ne se contente pas de démonter les mécanis mes de la servitude volontaire, il montre aussi la possibi lité d'une autre voie, par laquelle l'individu serait libre et la société juste sans recours à l'État. Il résume cela lui-même par le mot d'ordre Destruam et Aedificabo - détruire et édifier. S'il assume sa réputation de« démolisseur», il met en avant, à la fin de sa vie, le compte des « démonstrations de choses très positives » 2, par lesquelles il pense avoir montré la pos sibilité de l'anarchie. Contre l'État et les abus du capital, il explore une voie révolutionnaire qui épouse le fédéralisme et le mutuellisme. Il présente sans doute ainsi l'expression la plus radicale de la volonté de penser l'ordre social à par tir de la liberté. Son extrême sensibilité à toutes les formes de pouvoir l'empêche d'accepter les parcelles de coercition que d'autres, libéraux ou socialistes, admettent comme néces saires. Sa conviction que la liberté n'est pas seulement une exigence morale mais aussi un principe actif, une solution 2. Théorie de la propriété, Paris, L'Harmattan, 1997, p. 214. INTRODUCTION 9 à la question sociale, lui fait prendre au sérieux l'hypothèse d'une société dans laquelle chacun n'obéirait réellement qu'à soi-même, ce qui ne peut être qu'une société sans État. Simple si on la ramène à la radicalité de son projet, l'œu vre de Proudhon est cependant d'un accès difficile. La variété des thèmes, des intentions (philosophiques, militantes, jour nalistiques), des contextes politiques, l'évolution aussi d'une pensée qui mûrit, tout cela laisse parfois une impression de confusion, d'incohérence. L'unité n'est pas facile à saisir. Aussi, c'est un lieu commun de la critique proudhonienne, même favorable, de noter ses contradictions, l'exemple le plus flagrant devant être l'analyse de la propriété privée, tour à tour rejetée et défendue. On évoque aussi les hésitations à propos du suffrage universel, écarté comme réactionnaire mais parfois admis, notamment lorsque Proudhon se fait élire député en juin 1848. On s'interroge sur sa position quant au droit au travail, accepté comme juste revendication des ouvriers, mais rejeté du fait de ce qu'il sous-tend d'atteinte à la propriété. Étonnant aussi, le recours à la notion d'« État» pour désigner la structure fédérale devant soutenir la société idéale, à la fin d'une vie consacrée à la défense de l'anarchie. Déstabilisante peut-être, la façon dont il mêle apologie de la concurrence et haine du capitalisme. Les exemples abondent. Néanmoins, l'affirmation selon laquelle son œuvre est enta chée d'incohérences, vraie dans les détails, est globalement superficielle. Sa pensée est complexe, évolutive, parfois le vocabulaire change, mais elle ne se trahit pas, elle s'affine. Dans l'ensemble, on préférera parler de richesse plutôt que de contradiction, et se ranger à l'avis d'É. Dolléans, jugeant que, « trop nerveuse pour être jamais incertaine ou flottante, la pensée de Proudhon est en perpétuel mouvement ; mais à travers ses apparentes contradictions, elle suit une direc tion générale, semblable à ces fleuves puissants qui en dépit de leurs méandres s'élancent vers la mer3 ». Cette richesse, qui a produit des interprétations et des disciples très différents, à gauche comme à droite, chez les 3. É. Dolléans, Proudhon, Paris, NRF, Gallimard, 1948, p. 322.

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