NORDCOMPO—PLON L’homosexualité,de—104703CVF Rappelp.1—LHOMOSDERO—20-10-0513:49:43 NORDCOMPO—PLON L’homosexualité,de—104703CVF Rappelp.3—LHOMOSDERO—20-10-0513:49:43 L’homosexualité de Platon à Foucault Anthologie critique NORDCOMPO—PLON L’homosexualité,de—104703CVF Rappelp.4—LHOMOSDERO—20-10-0513:49:43 DÉJA` PARU F. Collin, E. Pisier, E. Varikas, Les Femmes de Platon à Derrida, Plon, 2000. D. Colas, Races et racismes de Platon à Derrida, Plon, 2004. NORDCOMPO—PLON L’homosexualité,de—104703CVF Rappelp.5—LHOMOSDERO—20-10-0513:49:43 DANIEL BORRILLO DOMINIQUE COLAS ´ L’HOMOSEXUALITE DE PLATON ` A FOUCAULT Anthologie critique Plon NORDCOMPO—PLON L’homosexualité,de—104703CVF Rappelp.6—LHOMOSDERO—20-10-0513:49:43 Collection créée sur une idée d’Evelyne Pisier Ouvrage publié avec le concours de Bruno Perreau La version électronique de cet ouvrage est mise à disposition selon les termes de la licence Creative Commons Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale - Partage dans les Mêmes Conditions 4.0 International http://creativecommons.org/licenses/by-nc-sa/4.0/ ©Plon2005 ISBN:2-259-19765-5 NORDCOMPO—PLON L’homosexualité,de—104703CVF Rappelp.7—LHOMOS$100—20-10-0511:13:32 INTRODUCTION Cette anthologie comprend les textes de plus de cinquante auteurs et des extraits de quatre-vingt-dix de leurs ouvrages. Leur statut, leur ton, leur intention, sont très différents. Dépeints par Claude Lévi-Strauss, les Nambikwara de la forêt ama- zonienne sont commandés par un chef polygame dont les jeunes compagnes sont expertes dans des activités généralement masculines, commelachasse,alorsquedejeuneshommestrouvent,sansscandales, leur plaisir dans des rapports homosexuels. Voltaire condamne les homosexuels avec une véhémence rageuse qu’on admire plus quand l’auteur de Candide l’utilise contre l’intolérance1. Et l’on pourrait, du reste, imaginer un esprit voltairien moquant le paradoxe de l’Eglise catholique qui condamne radicalement l’homosexualité alors que cer- tains de ses fidèles soulignent sa structure homosexuelle, comme la psychanalyste Françoise Dolto. Jean-Paul Sartre, qui accepte l’impor- tance accordée par Freud à la sexualité mais récuse la notion d’incons- cient au profit de celle de «mauvaise foi», fait un éloge de l’homosexuel masculin «authentique» aussi bien sous un angle pure- ment conceptuel qu’à travers l’exaltation de la figure de Jean Genet. Dans son livre sur l’auteur du Journal du voleur, Sartre renvoie à Simone de Beauvoir qui a défendu la légitimité du «choix» homo- sexuel féminin : les deux grandes figures de l’existentialisme refusent, en effet, l’idée d’une nature humaine, d’un «en soi» dans lequel les hommes seraient enfermés comme dans un destin. Or cette idée d’une essence ou d’une nature humaine qui serait organisée pour et par l’hé- térosexualité et la reproduction sexuée a été, et reste, un des princi- paux arguments de ceux qui condamnent l’homosexualité comme «contre nature», dans une formule et une idée qu’on trouve chez Aristote, chez Thomas d’Aquin, chez Emmanuel Kant ou dans l’Eglise 1. L’homophobie est l’objet d’un ouvrage publié antérieurement par Daniel Borrillo sous ce titre dans la collection «Que sais-je?», PUF, 2000 et on se reportera à Didier Eribon (dir.), Dictionnaire des cultures gays et lesbiennes, Larousse, 2003. NORDCOMPO—PLON L’homosexualité,de—104703CVF Rappelp.8—LHOMOS$100—20-10-0511:13:32 8 L’HOMOSEXUALITE´ DEPLATONA` FOUCAULT catholique au début du XXIe siècle, arguments qui ont notamment été théorisésparlecardinalRatzinger,futurpapeBenoîtXVI.L’ambiguïté de «nature» joue à plein. En quoi la supposée essence de l’humanité serait-ellesoumiseàdesloisquiseraientprétendumentcellesduvivant biologique? Et qui établit ce que serait censée prescrire cette «natu- re»? Ainsi on peut se demander en quoi la valorisation de la virginité ou le mariage monogame seraient moins «contre nature» que l’homo- sexualité. L’Eglise catholique considère comme «naturels» l’absti- nence ou le mariage hétérosexuel et s’oppose, contrairement à d’autres confessions, à toute acceptation d’une légitimité des couples homo- sexuels1. Cependant Michel Foucault, mettant en doute l’idée d’une coupure radicale entre mondes moderne et antique, montre comment Plutarque introduisait déjà, au IIe siècle après Jésus-Christ, une échelle de valeurs ou` le mariage est supérieur à la relation homosexuelle mas- culine entre un homme mûr et un jeune homme, même si l’auteur des Vies parallèles présente pourtant, et sans le blaˆmer, ce type de relation comme ayant été le fait de Solon, un des pères fondateurs légendaires d’Athènes, ou comme ayant uni Alcibiade et Socrate. Ainsi les représentations de l’homosexualité et la façon dont elle est soit acceptée, soit caricaturée, soit condamnée, forment un ensemble complexeetmobile dontcetteanthologiechercheà donnerlesmoyens de comprendre les logiques, les argumentaires, les transformations. Et il faut immédiatement indiquer que, depuis les Grecs, l’homosexualité masculine n’a pas été traitée de la même façon que l’homosexualité féminine : par exemple aucun philosophe grec ne valorise la relation entre une femme mûre et une jeune fille, et au XIVe siècle, alors que Christine de Pisan présente Sapho comme une philosophe éminente, dontlapenséeestdignedecelledesphilosopheshommes,elleneparle pas de la poétesse de Lesbos comme d’une homosexuelle : ignorance ou stratégie d’écriture? On se heurte à bien des difficultés quand on doit lire des textes sur des groupes depuis très longtemps opprimés, persécutés et dont la seule mention de l’existence pouvait être considé- rée comme un crime2. Par ailleurs, la multiplication d’études savantes sur l’homosexualité est encore trop récente pour que de nombreuses questions d’interprétation historique ne restent pas à analyser. Les noms que l’on vient de mentionner l’indiquent : cet ouvrage se 1. Et pour la même raison elle condamne l’usage du préservatif, pourtant le moyen le plus efficace de prévenir la propagation du sida. 2. L’«occultation»dudésirdesfemmespourdesfemmespeutêtreconsidérée comme une «lesbophobie». Parmi d’autres ouvrages : Ch. Bard (dir.), Un siècle d’antiféminisme, Fayard, 1999. NORDCOMPO—PLON L’homosexualité,de—104703CVF Rappelp.9—LHOMOS$100—20-10-0511:13:32 INTRODUCTION 9 situe dans un espace culturel qui est celui de l’Occident et il inclut des auteursquirelèventdelaphilosophieetd’autresdisciplinesnormatives commeledroit,parexempleDelvin,oulathéologie,telsaintAugustin, ainsi que des sciences sociales : anthropologie – Malinowski, histoire – Foucault, psychiatrie – Krafft-Ebing, psychanalyse – Freud et Méla- nie Klein. Ne pas inclure des écrivains comme Baudelaire, Tennessee Williams, Violette Leduc, Gide ou W.M. Auden ne relève pas d’une volonté de hiérarchiser les auteurs. On a cité l’exemple de la lecture de Jean Genet par Sartre et l’on trouvera aussi dans ce livre des pages d’Hélène Deutsch sur George Sand et de Deleuze et Guattari sur Proust. Mais les textes animés par une rhétorique poétique ou narra- tive, ou qui sont dus à des écrivains dont le statut est d’abord celui de producteurs délibérés de formes plus que directement de concepts ou d’arguments, ne peuvent relever des mêmes méthodes de présentation et d’analyse que ceux écrits par des auteurs comme Freud ou Aristote. LaFilleauxyeuxd’or,LesIllusionsperduesdansleurréférence,partiel- lement cryptée, à l’homosexualité féminine et masculine n’ont pas le même statut que la Métaphysique des mœurs de Kant. Et, de même, MauricedeE.M.Forstern’estpasdumêmetypequeletextedeJeremy Bentham récusant la punition de l’homosexualité à partir d’un raison- nement utilitariste. Il est impossible, certes, d’établir si la thèse de Freud d’une bisexualité de l’être humain a joué dans l’histoire contem- poraine des images de l’homosexualité un rôle plus important que le portrait du baron de Charlus comme un être à l’aˆme féminine qui attend de la virilité chez les jeunes gens1. Mais on ne peut attribuer le même statut aux Trois Essais sur la théorie de la sexualité et à la Recherche du temps perdu, même si la question de la «nature» de l’homme et celle de sa sexualité sont posées par l’un et l’autre dans ce qu’on peut présenter comme une interrogation d’ensemble sur la norme. En tout état de cause une histoire culturelle de l’homosexualité devrait aussi comprendre une réflexion sur le cinéma, le théaˆtre ou la télévision et les arts plastiques, sans compter la littérature clandestine, dont on trouvera du reste ici quelques exemples, notamment des œuvres du XVIIIe siècle français. Mais ce type de textes lui-même n’est nullement homogène : l’œuvre de Sade, parce que son auteur poursuit le projetd’exposer lesprincipes d’unlibertinage radical,d’un athéisme sans autre impératif que «jouis!», n’est pas comparable à celle de l’auteur de My Secret Life, cet éminent victorien qui tint un journal 1. Sur le personnage du baron de Charlus, outre la Recherche, on trouve des indications précieuses dans des lettres de Proust. NORDCOMPO—PLON L’homosexualité,de—104703CVF Rappelp.10—LHOMOS$100—20-10-0511:13:32 10 L’HOMOSEXUALITE´ DEPLATONA` FOUCAULT exposanttoutessesexpériencessexuelles,dontcertainesd’homosexua- lité masculine, et rapportant des témoignages de l’homosexualité fémi- nine ou de la bisexualité, mais selon un principe de catalogage d’une série de pratiques parfois caractérisables comme perverses, auxquelles on peut bien trouver un sens mais qui n’est pas réfléchi par son auteur – à la différence des grandes entreprises de classification descriptive des «perversions» dont le chef-d’œuvre, en quelque sorte, est la Psy- chopathia sexualis de Krafft-Ebing dont on trouvera ici des extraits de la traduction en français de 1895. En même temps il est apparu légi- time de donner dans cette anthologie une place à des textes extraits d’œuvres littéraires quand leurs auteurs étaient en même temps des philosophes,commeDiderotouRousseau.Maisilfautreconnaîtreque les frontières entre les types de discours ne sont pas faciles à tracer et que certains auteurs défient les classements, telle Monique Wittig. Et l’on peut lire Krafft-Ebing comme un chroniqueur de la Vienne fin- de-siècle que Bronislaw Malinowski aurait en quelque sorte prolongé, en y apportant ses fantasmes et ses scrupules chez les Papous et les Trobriandais1. Mais en dépit de ce type d’excursion anthropologique hors d’Europe on comprend aussi que des textes sur la sexualité entre personnes considérées comme du même sexe par des auteurs chinois ou arabes ne trouvent pas leur place dans un ouvrage qui n’a pas l’ambition d’être universel et qui ne pouvait inclure des œuvres qui doivent être replacées dans des contextes discursifs dont l’intelligence nécessite des mises en perspective religieuses, sociales et éthiques sin- gulières : si l’on accepte l’idée que les «genres» (sociaux) ne sont pas identiques aux sexes (biologiques) on doit prendre en compte les différentes modalités de construction de leur écart, de production de leur spécificité, de leur multiplicité. Il n’est du reste pas sûr que même en Occident les auteurs grecs, latins ou médiévaux soient parfaitement intelligibles à des lecteurs modernes. Et le titre même de cette anthologie peut faire débat : le terme homosexualité a été forgé dans l’Europe contemporaine puis- qu’il apparaît sous la plume d’un psychiatre hongrois en 1869 («hété- rosexuel» apparaîtra peu après). Mais tout un vocabulaire désignant les femmes qui aiment les femmes et les hommes qui aiment les hommes existait antérieurement, dont on pourra dégager de ce livre une partie, et il évolue comme apparaissent aussi de nouvelles entitésdénotéespardessignifiantscommetranssexuelsoutransgenres. A travers les mots c’est la réalité même d’une disposition, d’une 1. NicoleClaudeMathieuadéveloppé,àpartird’unecritiquedel’anthropolo- gie, une valorisation militante de l’homosexualité féminine.
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