LES PRIERES DE LA BIBLE... et les nôtres (Westphal Alexandre.) INTRODUCTION PREMIÈREPARTIE Les Prières de la Bible AncienTestament Nouveau Testament DEUXIÈMEPARTIE « Seigneur,enseigne-nous à prier ! » L'invitationà la prière L'attitudedela prière Les modes de la prière La puissance de la prière Les difficultés dela prière Les obstacles à la prière Les grâces de la prière Les perspectives éternelles TABLEDES MATIERES (détaillée) LES PRIERES DELA BIBLE… etlesnôtres Alexandre Westphal DÉDICACE Auprintemps 1861,une jeune femme endeuil débarquait à Maennedorf,bourgade fleurie des bords dulacde Zurich.Là, Dorothée Trudel,qu'onaimait à appeler « Mutterli» (petite mère),avait reçudu Seigneur le donde faire revivre par sa prière l'efficace de la parole : « Venezà moivous tous quiêtes travaillés et chargés et je vous soulagerai.» La jeune femme avait perducoupsur coup quatre fils auberceau,et elle se disposait à éloignerdès sa naissance celuiqu'elle attendait. « Pourquoim'attacher à luipour le perdre ensuite,comme les autres !» Dorothée s'entretint longtemps avecelle,pria,puis, suivant unusage quiluiétait familier et dont Charles Secrétana écrit qu'il était « plus facile de le critiquer que de se soustraire à l'effet de certaines coïncidences »,elle glissa sa mainfluette dans une grande boîte rempli de versets de la Bible :« Voyons,dit-elle,ce que Dieurépondà votre angoisse.» Le billet plié qu'elle retira portait une simple mention :Jér.31 :15-17. « Onentend des cris à Rama,des lamentations, Rachelpleureses enfants et refused'être consolée,carils nesont plus !Ainsi parlel'Éternel :Sèchetes larmes ;carily aura unsalaire pourtes oeuvres..., de l'espérance pourtonavenir; tes enfants reviendront. » Alors Dorothée,plongeant sonregardlimpide dans les yeux de soninterlocutrice,lui dit :« L'enfant vivra.» L'enfant a vécu. Et c'est lui qui dédie aujourd'huià la mémoire de « Mutterli » ce petit livre sur la prière. Puissent les notes quisuivent et dont l'intentionest toute de reconnaissance,aider ceux qui cherchent,à trouver,ceux qui demandent,à recevoir,ceux qui heurtent,à franchir le seuil des « portes éternelles ». Paris,1° juillet 1937. Alex.W. INTRODUCTION Dites-moi pourquoi la lune graviteautour de la terre, pourquoi la fleursetourne vers lesoleil, pourquoi lepoussin court seréfugiersous l'ailedela poule, pourquoi la maindu tout-petit s'accrocheobstinément au jupondesa nourrice, pourquoi leblessésur lechamp de bataille tombeencriant « maman ! et jevous dirai pourquoi l'homme prie. La prière est à l'âmece quelemouvement est au corps,ceque lesouffle est à la poitrine :la manifestationde la vie. Un corps inerte est mort.Une poitrinesans souffleest inanimée.Une âmesans prière est uneâmedétachée des conditions spirituelles deson existence.Limitéeaux circonstances de la terre, ellevégète.C'est unegrandemutilée.On pourrait direaussi que, dans la floraisondes âmes, c'est unefleur qui n'a pas encorenoué. L'humanitéa compris cela, d'instinct;aussi les hommes prient-ils sous tous les cieux, parmi toutes les races.La prière établit entre les religions une parenté et parmi tous les adorateurs unefraternité qu'onaurait tort deméconnaître et que,seul,Dieupeut estimerà sonprix, parce qu'il est lePère célestequi reconnaît la voix de ses enfants quel quesoit leur langage et retrouveson nom mêmeenleurs bégaiements.Les milieux où la prièrea perdu sa flammesont ceux où unecivilisationdéformantea tout fait pour lecerveau,pour la jouissancematérielle, rien pour nourrir la conscience et lecoeur.Mais, là même,la prière n'est pas éteinte : elle couvesous la cendre. Qu'une épreuve,secoussesoudaine,y rouvreles sources profondes de l'âme : la prière jaillit, commela lave duvolcan. Après cela,direque la prière, chez l'homme civilisé, est un restedebarbarie,uneinfériorité morale,c'est fermer les yeux à l'évidence{1}.La véritéest que la prièrevaut ce que vaut la divinitéà laquelle elles’adresse. Lesauvageafricainimploresonfétiche, le briganddes Abruzzes demandeà la Madone de bénirsonpoignard,tellenonnepriesonsaint et leretourne dans sa niche,faceau mur,s'il ne l'a pas exaucée...Prières de la superstition.Leguerrierprie pour la victoire, lefinancierpourson entreprise,le pèrepour le bien-êtreoulesuccès temporel desonfils, le naufragépour lesauvetage... Prière de l'intérêt. Mais Abraham priant pourson neveuingrat,Moïsepriant pour la grâced'Israël, Etiennepriant pourses bourreaux, Moniquepourlesalut d'Augustin,Jeanned'Arcaupieddubûcher, les martyrs huguenots sous la potence,Livingstone pour ses noirs,John Bost pourses malades,Pasteuravant les expériences qui délivreront l'humanité de la rage,AdèleKamm sursonlit desouffrance pour la conversion deses amis et pour la soumissiondesonpropre coeur... Peut-onconcevoirdes actes plus hauts,oùla personnalitésemontreavecautant demaîtrise,dedésintéressement dans l'amour, decohésiondesonêtre moral, d'intrépidité dans l'espérance ? Peut-on concevoiruneattitude parquoi l'hommes'éloigne autant del'animalité? L'hommequi prie, bienloin de sediminuer, sedépasse.Ilmet à sonactivitéla rallonge divine ;il fait entrer Dieudans sa vieet redevient lui-mêmeà l'imagedeDieu. Ainsi,la prière nous apparaît commelegestespontané de l'âme pourchercher lecontact de l'être mystérieux dont elle sesent obscurément dépendre, qui manifestesa puissancedans la splendeurdes mondes et sa présencepar la voix du devoir.Dans la prière « l'hommes'offreà Dieucommela toileau peintre,ou lemarbreausculpteur ». La nature, a-t-ondit,a horreurduvide. Pour l'univers physique,c'est faux,mais pour la nature spirituelle, c'est vrai.L'âmehumainea horreurduvide.Unsilencequi dure l'épouvante.Ilest peu de créatures assezdénaturées pourn'avoirpas soupiréaumoins unefois dans leurvie :« MonDieu,si jepouvais prier !» Tupeux prier. Il est encoretemps de rallumer en toi la flammedel'oraison.Penche-toi surla Bible.Avechumilité, recherchedans ses pages les caractères de la prière. Ecouteprierses héros, et bientôt montera dufonddeton être l'invocationdupsalmiste: « Moncœurdit deta part : « Cherchezma face !» « Jecherche ta face, ô Eternel ! (Ps. 27 :8). {1}Dans son livre :L'homme,cet inconnu,Paris,1936,livreprodigieux parl'abondance des aperçus qu'il donnesur les ressources physiologiques, psychologiques et spirituelles de la nature humaine, ledocteur Carrel,qui nefait pas profession dechristianisme,consacre un bref chapitre(p. 170-176)aux états mystiques,à la prière et aux guérisons miraculeuses.«Ilfaut entendre par prière,dit-il, nonpas la simplerécitationmachinaledeformules, mais une élévationmystique,où la consciences'absorbedans la contemplation du principe immanent et transcendant dumonde.Cet état psychologique n'est pas intellectuel.Ilest incompréhensible des philosophes et des hommes descience et inaccessiblepoureux. Mais ondirait que les simples peuvent sentir Dieuaussi facilement quela chaleur dusoleil,ou la bontéd'unami.» Parlant dela prière d'intercession,il écrit :« Cetype de prière exigecomme condition préalable, lerenoncement à soi-même,c'est-à-direuneformetrès élevée de l'ascèse.Les modestes, les ignorants, les pauvres,sont plus capables de cet abandon que les riches et les intellectuels.Ainsi comprise, la prièredéclancheparfois unphénomèneétrange, lemiracle. « ...A la suitedugrand essorde la science pendant le XIXesiècle...,ilfut généralement admis que nonseulement lemiracle n'existait pas,mais qu'ilnepouvait pas exister... Cetteattitude est encore celledela plupart des physiologistes et des médecins.Cependant, ellen'est pas tenable enfacedes observations que nous possédons aujourd'hui.» Après avoirénuméréquelques-unes deses observations, le docteurCarrelconclut :« Detels faits sont d'unehautesignification.Ils montrent la réalitédecertaines relations,denature encoreinconnue,entre les processus psychologiques et organiques. Ils prouvent l'importance objectivedes activités spirituelles,dont les hygiénistes,les médecins, les éducateurs et les sociologistes n'ont presque jamais songéà s'occuper.Ils nous ouvrent unmonde nouveau.» Ces quelques remarques,venant d'un homme queses travaux et ses découvertes ont mis au premier planparmi les savants de notre époque,suffisent à montrer que la prière, envisagée sous sa formela plus élevéeet analyséedans ses effets pratiques,offre unsujet éminemment actuel, nonseulement à la méditationdetout hommequi croit,mais à la réflexiondetout homme qui pense. PREMIEREPARTIE LESPRIERESDELA BIBLE Les personnages que la Bible va nous présenter dans leurs entretiens avecDieu ne sont pas des personnages ordinaires.L'ordre dans lequel ils apparaissent échappe audéterminisme historique.Dieu, par eux, déploie un plan,quiest celuide sa révélationparmi les hommes.Ce plandonne à leur successiondans le temps et à leur attitude dans la prière une valeur normative pour nous. Comprendre cela,étudier leur manière d'être,faire sonprofit de leurs expériences,c'est déjà être « enseigné de Dieu». ANCIENTESTAMENT Laprière de Caïn. « Caïndit à l'Eternel : « Monchâtiment est tropgrandpour que je puisse le supporter !Voici, tume chasses...Le premier quime rencontrera me tuera !» L'Eternel répondit à Caïnet le marqua d'unsigne, pour qu'aucunde ceux quile rencontreraient ne le frappât.» (Genèse 4 :13-15). N'est-ilpas étrange que la premièreprièrerapportée dans la Bible soit la prière d'unmaudit? Et pourtant, elle est là,sous la formed'un dialogueentreDieu et Caïn,et le désir deCaïnest exaucé. La prière du premier meurtrier est la prièrede la peur. Elle nous révèle unevéritéqui sefait jourtout lelong del'histoireet que le livre d'Esaïerésumeences mots :« Point de paix pour le méchant.» Nous y voyons ensuitel'angoisseoùmet l'isolement moral, la conviction quedésormais le réprouvés'enira, délaisséparleCréateur,vers les hasards infortunés dela vie errante, jusqu'au jouroù d'autres,aussi méchants que lui,letueront. Prièrefranche et farouche, qui nous permet deliredans la nuit d'uneâmeenrupture deDieu. Que nous apprendmaintenant la réponsedivine? Que l'homme de la Chute peut fuirDieu,mais nonlui échapper; qu'il peut sesentirseul,sans être pourcela abandonnépar la Providence. L'enfant prodiguea beautrahirsonpère et s'enaller, cela n'empêchera pas le pèredepenserà lui, de lepleurerquandiltravaillera dans les champs, et desedresserpourinterroger longuement l'horizon. Jecomprends maintenant pourquoi cetteprièreest inscriteauseuildela révélation.Elleest là pour direaucoupable qui gémit sous l'effort d'unecivilisationinauguréeparCaïnet qui porte la marque deson père dans la tracesanglanteque laissechacundeses pas enavant :« Poursi bas que tusois tombé,tu n'es pas sorti du rayon de la protection de Dieu.Qui que tusois,prie !Où quetusois,Dieut'entend.» ANCIENTESTAMENT Laprière d'Abraham. « Abraham se tint enla présence de l'Eternel.Il s'approcha et dit :« Ferais-tu aussipérir le juste avecle méchant ?» (Gen.18 :21 23). La prière d'Abraham est la secondeprièreque nous rencontrions dans la Bible. Modèle d'intercession,cette requêteenfaveur de Lot porteauplus haut point lecachet des mœurs orientales,où ledemandeursaisit inlassablement l'occasiondecequ'ila obtenupouressayer d'obtenir davantage.Mais ontrouvesurtout, dans ce morceausublime,deux des conditions maîtresses detout exaucement : le respect de la justicedeDieu et la confiancedans sa miséricorde.Abraham n'admet pas queDieu puisse perpétrerunacte quelconquequi blesse l'équité, et il le Lui dit hardiment :« Celui qui jugetoutela terre n'exercerait-ilpas la justice? » Ilest convaincu enoutre que les compassions de l'Eternel selaisseront émouvoiren faveur de la villerebelle par la présence en elledequelques hommes debien. « Peut-être s'y trouvera-t- ildix justes ?...» Et l'Eternel lui promet defairegrâceà la ville pour les dix justes,s'Illes y trouve. Ondit quela révélationbiblique est progressive, et jelecrois.Mais jesuis bien obligéde constater quesur certains principes élémentaires, beaucoup de chrétiens duxx° sièclesont moins auclair qu'Abraham. Nenous arrivera-il jamais'de demanderà Dieudes choses qu'Il ne pourrait nous accordersans léser les droits d'autrui ? Necherchons-nous jamais à lefaire complicedenos intérêts égoïstes.,denos antipathies oude nos étroitesses ?Dans nos jugements devant Lui,ne nous arrive-t-iljamais de« fairepérir l'innocent avec lecoupable ? Le« zèledela Maisonde l'Eternel» est,certes, une belle chose,mais pourobtenir l'exaucement du Saint des Saints,ilfaut quecezèles'inspire des scrupules d'Abraham,desa bonté,desa patience,et que dans la prièreilnelaissepas échapper unmot qui puisseléser la justiceoucontrister la miséricordedeDieu. ANCIENTESTAMENT Laprière d'Eliézer. « Eternel,Dieu de mon maître Abraham, fais-moi, je te prie,rencontrer aujourd'hui ce que je désire. (Gen.24 :12). Que cefût Eliezerou non, letexte ne le dit pas ; mais la tâche de l'intendant d'Abraham était à coupsûrdifficile. Partirà l'aventure,atteindreà 800 kilomètres le bourg oùvivaient « les descendants de Térach», découvrirpuis ramenersaine et sauve unejeunefille qui pût convenir aufils desonmaître !Leserviteur n'hésite point.Ilforme unecaravane,franchit des pays étrangers pardes pistes douteuses,arriveaupuits oùles filles du douarauquel appartenait la tribu deNacorviennent puiserleureau.Là,ilimagine unstratagèmequi lui permettra de reconnaître parmi les jeunes bergères celle qui a lemeilleur coeur,puis illève les yeux vers le cieléclatant dusoir:« EternelDieu, mevoici près du puits, montre-toi propice à monmaîtreAbraham !»... Et Dieu lui fit trouver Rébecca,la propre cousine d'Isaac. Pourquoi s'étonnerdesa réussite?Ilavait mis deson côtéles deux conditions du succès, l'effort personnel et la prière :l'obéissance, le courage, l'habileté,actionnant toute la puissance de l'homme ; la requête humble et confiante,assurant l'interventiondel'Eternel. Combiendeserviteurs de Dieuont échoué dans leur missionpouravoirnégligél'unoul'autrede ces deux éléments devictoire! Les uns ont agi mettant leurconfianceen eux-mêmes, priant du bout des lèvres parcequ'aufondils necomptaient quesur leurs capacités. Les autres ont aussitôt demandéà Dieud'agir,et nesesont obligés à nullepeine,attendant tout dumiracle. Si leserviteurd'Abraham avait agi ainsi,jamais Isaacn'eût épousé Rébecca. ANCIENTESTAMENT Laprière de Jacob. « Si Dieuest avec moi,s'il megardedans levoyage que j'ai entrepris, s'ilmedonnedupainà manger et des habits pour mevêtir,et si je retourne en paix à la maisondemon père, alors l'Eternelsera monDieu... Et jete donnerai la dîmedetout cequetumedonneras.» (Gen.28 :20-22). Si...si...si... si.,,que de conditions posées à Dieu,et comme nous sommes loin de la piété d'Abraham gravissant Morija !Abraham croyait ;Jacobcalcule.Donnant,donnant ; et dans cette religiondu prêté rendu,c'est Dieu qui est jugé selonses oeuvres. Esaü, mauvaisetêteet bon coeur, n'a point de ;Dieu ne peut doncrienfaire de lui. Jacoba la foi,Dieupeut donc l'honorerdesonalliance. Mais ilnelui passera rien.Jacobs'enrichira sans doute,il est si habile !mais ilexpiera durement les moyens qu'il,emploiera pour acquérirsa richesse.Déjà lesentiment desonintérêt pousséjusqu'à la ruse l'a brouilléavec sonfrère, séparé deses parents dont ilétait lefavori et jeté, lui si familial,sur l'âpre chemindudésert. Maintenant, c'est Laban qu'ildépouille. Pour la secondefois,ilest obligédes'éloigner,fuyant sononclequi lepoursuit et qui l'aurait exterminésans la protectiondivine. Et il n'est pas au bout deses soucis !...Au lieu deretourner en paix dans la maisondesonpère,ils'enira mourir,ruiné par la famine,sur la terred'exil.Lui-mêmerésumera lebilan desa vieerrante et centenaireendisant auPharaon:« Mes jours ont été courts et mauvais 1.»
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