Les naufragés du soleil, ce sont les Blancs qui dans les années 1975 et 1976 furent rejetés de l’Asie après la chute de Phnom Penh, de Vientiane et de Saigon. Ils vinrent faire naufrage sur les côtes de leur pays d’origine, cette vieille Europe qu’ils avaient oubliée. Ils en étaient partis rêvant de rapines, de femmes, de sang, d’or et de gloire, comme des conquistadores. Ils en revenaient déçus, amers, désespérés, ayant tout perdu
Les trois héros du livre, que lie une amitié parfois hargneuse, se sont chacun identifiés avec une femme, un pays, une ville. Yves Lortais, soldat d’un genre particulier, le plus jeune, se croit promis à un grand destin et va le découvrir au Laos dans les bras de la princesse Tiane. Kaspers, un Asiate, né en Chine, diplomate subtil et pervers que l’on a surnommé le baron diabolique, est lié à Saigon par sa compagne Kien qui choisira contre lui le nouveau Vietnam. Julien Magne, correspondant du Figaro, a rêvé de finir ses jours à l’ombre d’Angkor, près de Kang Rey, la très jeune et très belle copie vivante d’une apsara, d’une déesse.
C’est une grande fresque tragique qu’a entrepris de peindre Jean Lartéguy. Le premier volet – Les naufragés du soleil – est consacré à Magne. Nous le suivons depuis ses Cévennes natales, où il fonde en 1941 un mouvement de résistance, jusque dans ses combats sur la frontière de Chine. Sa force, son courage lui ont valu d’être surnommé « le gaur », le grand bœuf sauvage d’Asie. Devenu correspondant de guerre, ami du général de Lattre, du prince Sihanouk, confident aussi de certains révolutionnaires, il a voulu au cours de l’été 1976 retourner au Cambodge avec un groupe de guérilla pour reprendre aux Khmers rouges celle qu’il avait cru aimer, la danseuse royale. Kang Rey. Il a échoué.
Mis à la retraite par son journal, c’est un vaincu qui rentre dans sa bastide du Rogastrol, en Lozère, où viennent l’assaillir les fantômes de son passé. Mais « le gaur » n’est pas abattu. La rencontre d’une jeune femme, Laure, l’amitié solide du maire de son village, l’odeur de la grande forêt de l’Aigoual vont lui rendre ses forces. Et voici Julien Magne qui, de nouveau, fonce tête baissée dans les pièges de l’amour et de la politique. Où va le mener ce dernier combat… ?