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Les Juifs dans l’URSS et dans la Future Russie PDF

95 Pages·1968·2.268 MB·French
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Les Juifs dans l’URSS et dans la Future Russie 1968 L’ouvrage a été publié en 2000 à l’insu de Soljenitsyne et sans son consentement. Il peut y avoir des déformations dans le texte. Dire la vérité, c’est ne plaire à personne Introduction 1 1. Existe-t-il une question juive ? 4 2. L’origine de l’antisémitisme 7 3. Mais qu’est-ce que l’"antisémitisme" ? 13 4. Oser juger les nations ? 15 5. Les mystères du peuple élu 20 6. Les Juifs dans la Russie tsariste 23 7. Les Protocoles des Sages de Sion et la 26 révolution lénino-juive en Russie 8. Pendant la révolution et immédiatement 35 après 9. En littérature en particulier 44 10. A l’époque de Staline 50 11. Dans les camps 55 12. Les Juifs sont-ils opprimés par rapport 61 aux Russes ? 13. Talent, caractère 66 14. L’amour de la liberté aujourd’hui 68 15. Et il y a un défaut 70 16. A travers leurs yeux – notre auge 75 17. La question russe 77 18. Israël 81 19. Que ferons-nous demain ? 85 20. Comment ne pas faire d’erreur... 90 Une énorme pierre, aux aspérités acérées, insaisissable, que l’on ne peut pas soulever, et pourtant nous n’avons pas d’autre choix. Aujourd’hui, on peut encore l’éviter. Demain, nous pourrons toujours la contourner. Mais je vois déjà comment, après-demain, elle fera son retour et beaucoup de mauvaises choses se produiront si nous n’y réfléchissons pas à l’avance. Je prévois une période heureuse (et controversée, si seulement nous vivons pour la voir !), lorsque nous libérerons nos captifs marginaux de leurs cages. Il y aura des malentendus et des griefs de haut en bas, mais tout cela sera égayé par des larmes de joie, les plus chaudes larmes de l’humanité. Par cet apparent sacrifice, la Russie se purifiera pour la première fois depuis des centaines d’années, et se libérera ainsi pour se développer intérieurement, pour se tourner, pour la première fois, complètement vers elle-même. Mais dès que nous aurons écarté toutes les branches vivantes à la marge et que nous voudrons rester comme un seul tronc, seuls dans notre maison, nous découvrirons que tous les entrelacs nationaux n’ont pas été démêlés : celui concernant les Juifs demeure. C’est alors que ses fils seront étirés au point de sonner, toujours douloureux, toujours tendus. Et la "coexistence", que nous avons proclamé de manière si importante (et trompeuse) au monde entier, nous devrons d’abord la résoudre chez nous. Même écrire sur la question juive, c’est marcher sur le fil du rasoir. Des deux côtés, vous sentez les regards de haine, les reproches, les accusations, et les imprécations. Pour une seule et même phrase, sans la moindre ambiguïté, on entend simultanément - "tu as trahi les Juifs !" d’une oreille, "et tu es avec les antisémites !" de l’autre. Ils insistent, ils interdisent : ce n’est pas permis ! Ce n’est pas acceptable ! C’est dangereux ! Mais pourquoi exactement ? ... Cela me rappelle un autre tabou concernant les camps de concentration et notre demi-siècle vécu – on ne peut pas non plus en discuter. Mais si nous gardons le silence - quand guérirons-nous ? Les choses n’empireront-elles pas ? Je serais heureux de ne pas me torturer avec cette acuité insupportable : elle n’est pas encore arrivée, et aujourd’hui il y a tant d’autres douleurs plus aiguës. Je serais plus tranquille en écrivant sur les branches d’épicéa et les lapins avec l’Etat. C’est mon destin qu’aucune flèche empoisonnée ne puisse s’échapper de ma gorge, chacune devant être prise et retirée. J’ai pris une fois l’engagement de parler de tout ce qui est "interdit" - et il me reste à continuer - avec responsabilité et délibération. Personnellement, la dernière chose dont j’aurais besoin est d’écrire cet ouvrage : non seulement les Juifs ne me dérangent pas, mais ils m’aident toujours, et dans l’Union soviétique d’aujourd’hui ils sont mes soutiens constants, mes alliés, et nombre d’entre eux des amis sincères. Et si j’entreprends malgré tout d’écrire cet ouvrage – dans un esprit de pacification, pour que nos nations se comprennent mieux, pour éviter la confusion et les querelles – je ne 1 cherche qu’à exprimer fidèlement l’opinion du peuple, qui cherche la plume de quelqu’un, et tant qu’elle ne l’a pas trouvée et inspirée, elle demeure un grondement inintelligible. J’ai commencé ce travail il y a trois ans, puis je l’ai longtemps remis à plus tard, parce que d’autres choses beaucoup plus urgentes ne cessaient de se mettre en travers de mon chemin. L’année dernière, en 1967, il m’a semblé particulièrement facile et encourageant d’écrire cet ouvrage, suite à la guerre israélo-arabe de six jours, lorsque, le cœur pur et sans hésitation, mes amis et moi nous sommes montrés entièrement solidaires d’Israël. Mais je n’ai pas eu besoin de le faire à ce moment-là. Mais voici notre violence honteuse et puante contre la Tchécoslovaquie, le viol spirituel de ce qui est peut-être maintenant la nation la plus brillante d’Europe, l’étranglement du jour au lendemain d’un ami de confiance. Ces jours- ci, ce n’est pas le comportement de notre gouvernement qui nous a étonnés – il est comme ça depuis 50 ans et il est incapable de penser et d’agir autrement – c’est le comportement de notre peuple qui nous a étonnés ; et encore une fois pas les viles résolutions d’"approbation" qui ont été extorquées du comité de rédaction de "Novy Mir1", mais la complicité sincère de Russes corrompus et stupéfaits. Des décennies de contre-sélection – en éliminant les meilleurs et en droguant les autres – ont réduit les Russes à un niveau de dégénérescence, de faiblesse d’esprit, et de stupidité morale auquel aucune nation européenne ne s’est jamais abaissée, si bas que sur vingt de nos fidèles citoyens, dix-sept considèrent ce viol comme un acte de noblesse et de justice. Mais les Juifs soviétiques (enfin, à l’exception des dogmatiques les moins scrupuleux du parti) ils comprennent tout ! Ils sont tous pour les Tchécoslovaques. Ils ont donc conservé leur clarté de jugement même dans notre cloaque ! Ou encore : les paysans actuels de Tambov appellent tous sans exception, naturellement et sans y avoir été contraints, les rebelles de 1920-212, les plus courageux et les plus inébranlables de leurs compatriotes dans cette plus grande révolte paysanne russe, des bandits. Ils n’ont pas d’autre mot pour le dire et pas d’autre idée. Et j’ai pensé : pour avoir le droit de porter un jugement sur un autre peuple, il faut pouvoir s’appuyer sur sa propre morale. Mais si votre nation est devenue le jouet inachevé des méchants, le bourreau le plus crédule de notre époque, est-ce à vous de juger les mérites et les démérites des autres nations ? 1 Journal littéraire russe fondé en 1925. 2 La révolte de Tambov (1920-1921) fut l’une des révoltes paysannes les plus importantes et les mieux organisées contre le régime bolchevik durant la guerre civile russe. L’insurrection eut lieu sur le territoire du gouvernement de Tambov, à moins de 500 km de Moscou. Un des principaux chefs de la rébellion fut Alexandre Antonov, un ancien membre du Parti socialiste révolutionnaire, ce qui amena les autorités soviétiques à qualifier le mouvement d’Antonovchtchina et ses partisans d’Antonovtsi. 2 Donc si notre petitesse nous prive de ce droit, nous devons baisser la tête. Et si, pour ce motif, l’œuvre et l’auteur sont tous deux déclarés incompétents, je n’aurai rien à objecter. 3 1. Existe-t-il une question juive ? Peut-être n’y a-t-il pas de "question juive" ? Peut-être que soulever cette question est en soi un malentendu ou un crime ? Il est peut-être humain de dire : non, il n’y a rien de tel qu’une "question juive" ! Posons une question générale : les "questions nationales" existent-elles sur Terre ou non ? Il n’y a guère de désaccord ici. C’est là nous sommes tous étonnés. Au début du XXe siècle, alors que l’Europe se croyait au seuil de la raison universelle, personne n’aurait pu prédire avec quelle force ancestrale éclateraient les sombres sentiments nationaux de tous les peuples du monde justement au cours de ce siècle. Et dans le mouvement de la révolution russe, alors qu’ils semblaient particulièrement passés, presque ridicules, les nœuds se sont refaits, encore plus serrés et prégnants qu’avant. Aujourd’hui, nous ne devons pas supposer la mort imminente de tous les sentiments nationaux, mais leur battement encore long et obstiné. La Belgique, paisible et harmonieuse, est déchirée entre Flamands et Wallons, le Canada, bien nourri, est submergé par le Québec, la Suisse, tranquille, abrite trois types différents de Suisse ; parlerons-nous des franges de l’URSS ? De l’Afrique ? De l’Asie ? Faut-il s’étonner qu’il y ait aussi une "question russe" ? Nous y viendrons dans cet ouvrage. Pourquoi n’y aurait-il pas une question juive ? Tant que les questions nationales existent, nous sommes obligés, chacun dans notre propre coin de la planète, de chercher une solution intelligente (et l’on suppose, temporaire) à toutes les existences nationales. Dès que les prétentions nationales s’apaiseront, dès que les frontières nationales seront balayées (en premier lieu par l’économie), nous nous lancerons avec enthousiasme dans une existence cosmopolite. Nous devons cependant garder à l’esprit un autre point de vue : la multinationalité de l’humanité est sa diversité et sa richesse. Que l’érosion d’une nation, l’aplatissement des niveaux, l’arrondissement des bords est l’appauvrissement de l’humanité, l’entropie de l’esprit. Ne cédons-nous pas au raisonnement industriel sur l’humanité, selon lequel il est plus facile d’organiser la vie planétaire via une uniformité universelle ? Mais c’est aussi plus désagréable à vivre. De cette façon, nous pouvons nous accorder sur l’alignement des caractères individuels. Mais aujourd’hui, ce ne sont pas les cosmopolites qui façonnent la vision du monde de leurs patries, de leurs peuples. La question juive existe du fait même qu’on en parle beaucoup (en sourdine et avec honte), elle est même plus notoire que toute autre question nationale. Selon le recensement de 1959, il y a 2,3 millions de Juifs en Union soviétique, et 1,6 million d’Allemands. Mais la "question allemande" en URSS est en quelque sorte inconnue. Voici deux exemples récents, mondialement connus, qui prouvent à quel point la question juive est tendue. Dans l’un des prétendus "dialogues" entre l’Est et l’Ouest (un dispositif astucieux, où les fonctionnaires ou les novices de l’Est sont mis en face des argumentateurs 4 occidentaux, faisant passer les paroles officielles inarticulées pour leurs convictions spirituelles), l’écrivain slovaque L. Mňačko3 a déclaré au début de 1967 qu’il n’avait jamais été en conflit avec les autorités communistes, à l’exception d’une fois où son permis de conduire lui a été retiré pour une infraction au code de la route. L’opposant français lui a rétorqué avec colère qu’il y avait un cas où Mňačko aurait dû être dans l’opposition : lorsqu’ils ont noyé dans le sang le soulèvement de la Hongrie voisine. Mais non, la suppression de la Hongrie n’a pas troublé la tranquillité d’esprit de Mňačko, ni ne l’a obligé à être plus strident ou impertinent. Quelques mois plus tard, la guerre israélo-arabe éclate. Le gouvernement de Novotný4, faisant preuve de peu de retenue, rend Israël responsable de l’agression et rompt ses relations diplomatiques avec lui. Et alors ? Mňačko, qui a calmement toléré la répression hongroise, un Slovaque, pas un Juif, seulement marié à une Juive, était maintenant si agité et indigné qu’il a quitté sa patrie et est allé vivre en Israël en guise de protestation, déjà même quelque peu redondante. Un deuxième exemple. Le célèbre socialiste français Daniel Meyer5, juif, au moment de la guerre israélo-arabe de juin 1967, a imprimé dans Le Monde qu’il avait : honte d’être socialiste (parce que l’URSS se dit socialiste et soutient les ennemis d’Israël), honte d’être français (à cause de la ligne similaire de De Gaulle), honte d’être humain (pourquoi ?), et pas honte d’être juif ! Soulignons ici que lorsque les socialistes, puis les paysans, ont été détruits en URSS, et que toute l’idée du socialisme a été renversée sens dessus dessous, ce Juif n’a pas eu honte ! Nous partageons tout à fait l’indignation de Mňačko et celle de Meyer, mais nous attirons l’attention du lecteur sur l’extrémité, voire l’excessivité de leurs sentiments dans la longue et même humiliante tolérance qui a précédé. C’est dire à quel point la question juive est brûlante ! Dans les années vingt, combien de nos meilleurs intellectuels ont été fusillées – humanitaires et ingénieurs (presque exclusivement russes) – plusieurs milliers ! Cela n’a pas entaché la réputation de l’URSS, personne dans le monde ne l’a même remarqué. En 1936, les médecins Pletnev et Kazakov6 ont été accusés de meurtre par traitement – cette affaire est passée sous silence et a été rapidement oubliée. Mais lorsqu’en 1953, certains médecins juifs ont été accusés du même crime présumé, cela a immédiatement provoqué une explosion d’indignation internationale et a même déclenché des forces internes, qui ont apparemment mis fin à Staline. Tout ceci est le résultat de la sensibilité et de la susceptibilité supérieures des Juifs à leur problème et de l’empathie générée par leur protestation. Non seulement nous ne reprocherons pas aux Juifs ces sentiments, mais nous les comprendrons parfaitement : mettez-vous à la place 3 Ladislav Mňačko (1919-1994) était un journaliste et écrivain slovaque. 4 Antonín Novotný (1904-1975) est un homme d’État tchécoslovaque. Il est le président de la Tchécoslovaquie communiste de 1957 à 1968. 5 Daniel Raphaël Mayer (1909-1996) est un homme politique et résistant français et Juif, président du Conseil constitutionnel entre 1983 et 1986. 6 Le Procès du bloc des droites et des trotskystes antisoviétiques ou Procès des 21 est un procès politique des Grandes purges staliniennes. Dmitri Pletnyov et Ignaty Kazakov, médecins du Kremlin, y ont été condamnés à mort. 5 d’un peuple qui, depuis l’aube de son existence, a dû se développer sans un territoire propre, toujours parmi des étrangers ! Nous envions même cette qualité juive, nous allons même appeler toutes les nations à faire de même lorsqu’elle les touchera. Mais comment pouvons-nous dire qu’il n’y a pas de question juive ? C’est un problème très réel, très intense et très douloureux. Il suffirait de feuilleter un ou deux livres du Juif chauvin et obstiné Feuchtwanger7 et nous serions enrichis de bien d’autres exemples. Cependant, citer Feuchtwanger et se disputer avec lui pourrait durcir n’importe quelle plume, et cela ruinerait le but et le sens de notre travail. La question juive existe déjà dans le fait que, condamnés à se disperser parmi les autres nations (ou plutôt, ayant choisi de se disperser, ce sur quoi nous nous étalerons plus loin), les Juifs ne se sont pas mélangés à elles, tout comme l’huile ne se mélange pas à l’eau. Pendant tous ces vingt-cinq siècles, ils se sont sentis comme quelque chose de séparé, de distinct – et de supérieur (pour poursuivre l’analogie, l’huile cherche toujours à remonter et à s’étendre comme un film à la surface). La question juive tient au fait que les Juifs observent avec attention leur propre singularité – ce que font également tous ceux qui les entourent. Non seulement la question juive existe, mais elle s’étend continuellement depuis l’Antiquité, éclairée (de côtés opposés) par de nombreux auteurs des temps anciens et modernes. Dans cette longue histoire, je ne prétends à aucune érudition. Je me permettrai d’utiliser les données et les conclusions d’un travail scientifique très sérieux de Solomon Yakovlevich Lurie8, le regretté professeur d’histoire antique de l’université de Petrograd. Son livre s’intitule L’Antisémitisme dans le Monde Antique (éditions "Byloe", Petrograd, 1922) et a été publié à une époque assez heureuse où la censure tsariste avait déjà disparu, et où la censure soviétique ne s’était pas encore arrangée pour supprimer les recherches scientifiques objectives, non directement liées à l’histoire russe et à l’histoire révolutionnaire. 7 Lion Feuchtwanger (1884-1958), était un écrivain juif-allemand. Sa nouvelle Le Juif Süss, parue en 1925, connaîtra un grand succès, sera traduite en une vingtaine de langues et sera adaptée une première fois au cinéma. 8 Solomon Yakovlevich Lurie (nom de famille original Luria ; 1890 - 1964) était un philologue et historien juif- soviétique de l’Antiquité et des sciences. Solomon Lurie appartient à la direction des substantialistes, qui considèrent que l’antisémitisme est une conséquence de certaines propriétés inhérentes au peuple juif. Comme l’écrit l’auteur dans L’Antisémitisme dans le Monde Antique, "il faut évidemment chercher la cause de l’antisémitisme chez les Juifs eux-mêmes", puisque, selon Lurie, il est apparu toujours et partout où les Juifs se sont installés en dehors de la Palestine. Ainsi, l’antisémitisme est fortement associé à l’émergence de la diaspora juive. Les Juifs, contrairement à d’autres peuples, ont conservé leur identité nationale et leurs coutumes nationales. Les Juifs se considéraient comme une nation à part entière, sans État propre, avec un centre religieux en Palestine. En même temps, l’assimilation faisait l’objet d’une désapprobation publique sévère. Une telle position suscitait la haine des peuples parmi lesquels les Juifs vivaient. Même lorsqu’ils occupaient une position sociale élevée, les Juifs continuaient à mettre en avant leur "spécificité" et leur refus d’accepter les valeurs culturelles et les coutumes locales. 6

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