Automne 2010 Contributeurs : Fall / Automne 2010 Daniel Hiebert Michael Haan Les expériences des nouveaux sarah V. Wayland K. bruce newbold arrivants en matière de logement stephen Gaetz emily Paradis et d’itinérance au Canada sylvia novac Monica sarty J. David Hulchanski Valerie Preston Ann Marie Murnaghan robert Murdie Jennifer Logan Jane Wedlock uzo Anucha sandeep Agrawal silvia D’Addario Min Jung Kwak Fran Klodawsky tim Aubry rebecca nemiroff Kathy sherrell Jenny Francis Priya Kissoon Laura simich Damaris rose sylvie Paré Annick Germain Xavier Leloup Hélène bohemier Myriam bérubé tom Carter Jim Gurnett Carolina Gajardo rÉDACteur inVitÉ : Carlos teixeira Avec la participation de : barry Halliday 60 statut juridique, lieu ou autre ? Les expériences des réfugiés en matière d’habitation à Winnipeg et à Vancouver Kathy Sherrell Automne 2010 67 Conditions de logement médiocres des réfugiés africains 3 dans le district régional du Grand Vancouver introduction : immigration, logement et sans-abrisme Jenny Francis Carlos Teixera et Barry Halliday 73 8 un chez-soi incertain : la protection des réfugiés, le Les nouveaux arrivants sur le marché canadien statut d’immigrant illégal et leurs effets sur la stabilité de l’habitation du logement chez les migrants à Vancouver et à toronto Daniel Hiebert Priya Kissoon 17 79 Le surpeuplement résidentiel chez les immigrants La santé mentale des réfugiés et la signification au Canada de « la patrie » Michael Haan Laura Simich 23 85 répondre au besoin en logement des immigrants situation des immigrants récents à Montréal quant et des réfugiés au Canada au logement, dans une perspective métropolitaine comparative : contrastes et convergences Sarah V. Wayland Damaris Rose 30 90 Les liens entre les questions d’établissement, de santé, de logement et de sans-abrisme touchant Filières résidentielles à Montréal : le cas des Haïtiens les immigrants au Canada de rivière-des-Prairies K. Bruce Newbold Sylvie Paré 35 96 Valorisation des connaissances : mobilisation de Les jeunes en milieu HLM : un problème de la recherche sur l’itinérance par le rond-point cohabitation interethnique ? de l’itinérance Annick Germain et Xavier Leloup Stephen Gaetz 100 40 Les HLM : un lieu d’intégration sociale pour itinérance et logement chez les immigrants avec statut, les personnes immigrantes ? les immigrants sans statut et les familles dont les Hélène Bohemier membres sont nés au Canada, à toronto 104 Emily Paradis, Sylvia Novac, Monica Sarty et J. David Hulchanski Au-delà de quatre murs : le quartier sainte-Marie vu 45 par ses résidants immigrants À la recherche de propriétés abordables dans les Myriam Bérubé banlieues : étude de cas d’immigrants dans la région 110 de York Les défis liés à l’accroissement de la diversité dans des Valerie Preston, Ann Marie Murnaghan, Robert Murdie, Jennifer Logan, Jane secteurs de déclin urbain : étude de cas de Winnipeg Wedlock, Uzo Anucha, Sandeep Agrawal, Silvia D’Addario et Min Jung Kwak Tom Carter 50 114 sortir de l’itinérance : comparaison longitudinale entre des personnes et des familles nées à l’étranger trouver un chez-soi : la sécurité du logement et au Canada et les immigrants en Alberta Fran Klodawsky, Tim Aubry et Rebecca Nemiroff Jim Gurnett 54 119 Débuts précaires pour les réfugiés au Canada : en route vers chez soi : travailler avec des immigrants situation de logement et des réfugiés sans-abri Robert Murdie Carolina Gajardo Canadian Issues is published by Thèmes canadiens est publié par Canadian Studies Program Programme des études canadiennes PreSident / PrÉSidente Canadian Issues / Thèmes canadiens is a quarterly publication of the Associa- Minelle Mahtani, University of Toronto tion for Canadian Studies (ACS). It is distributed free of charge to individual outGoinG PreSident / PrÉSident Sortant and institutional members of the ACS. Canadian Issues is a bilingual publica- The Honourable Herbert Marx / L’honorable Herbert Marx tion. All material prepared by the ACS is published in both French and English. French-lanGuaGe Secretary / SecrÉtaire de lanGue FrançaiSe Claude Couture, Campus St-Jean, University of Alberta All other articles are published in the language in which they are written. enGliSh-lanGuaGe Secretary / SecrÉtaire de lanGue anGlaiSe Opinions expressed in articles are those of the authors and do not necessarily Desiree McGraw, Sauvé Foundation reflect the opinion of the ACS. The Association for Canadian Studies is a volun- StudentS’ rePreSentatiVe and treaSurer / tary non-profit organization. It seeks to expand and disseminate knowledge rePrÉSentante deS ÉtudiantS et trÉSorière about Canada through teaching, research and publications. The ACS is a Nehal El-Hadi, University of Toronto BritiSh coluMBia and yukon rePreSentatiVe / scholarly society and a member of the Humanities and Social Science Federa- rePrÉSentante de la coloMBie-Britannique et du yukon tion of Canada. Jean Teillet, Pape Salter Teillet queBec rePreSentatiVe / rePrÉSentant du quÉBec Canadian Issues / Thèmes canadiens est une publication trimestrielle de Caroline Desbiens, Université Laval l’Association d’études canadiennes (AEC). Elle est distribuée gratuitement aux ontario rePreSentatiVe / rePrÉSentant du ontario membres de l’AEC. CITC est une publication bilingue. Tous les textes émanant Irving Abella, York University de l’AEC sont publiés en français et en anglais. Tous les autres textes sont PrairieS and northweSt territorieS rePreSentatiVe / rePrÉSentant deS PrairieS et deS territoireS du nord-oueSt publiés dans la langue d’origine. Les collaborateurs et collaboratrices de Dominique Clément, University of Alberta Thèmes canadiens sont entièrement responsables des idées et opinions expri- atlantic ProVinceS rePreSentatiVe / rePrÉSentante de l’atlantique mées dans leurs articles. L’Association d’études canadiennes est un organisme Maurice Basque Université de Moncton pancanadien à but non lucratif dont l’objet est de promouvoir l’enseignement, executiVe director oF the acS / directeur GÉnÉral de l’aec la recherche est les publications sur le Canada. L’AEC est une société savante Jack Jedwab director oF ProGraMMinG and adMiniStration / et membre de la Fédération canadienne des sciences humaines et sociales. directeur deS ProGraMMeS et adMiniStration James Ondrick Canadian Issues / Thèmes canadiens acknowledges the financial support of director oF PuBlicationS / directrice deS PuBlicationS the Government of Canada through the Canadian Studies Program of the Sarah Kooi Department of Canadian Heritage for this project. director oF reSearch / directeur de recherche Siddharth Bannerjee Canadian Issues / Thèmes canadiens bénéficie de l’appui financier du director oF coMMunicationS/ directrice de coMMunicationS Gouvernement du Canada par le biais du Programme d’études canadiennes Julie Perrone du ministère du Patrimoine canadien pour ce projet. Letters/Courrier Senior Policy-reSearch SPecialiSt – MetroPoliS Project / Comments on this edition of Canadian Issues ? SPecialiSte PrinciPale de la recherche Sur leS PolitiqueS – We want to hear from you. Projet MetroPoliS Write to Canadian Issues—Letters, ACS, 1822A, rue Sherbrooke Ouest, Mona Marshy Montréal (Québec) H3H 1E4. Or e-mail us at <[email protected]> editor-in-chieF / rÉdacteur en cheF Your letters may be edited for length and clarity. Jack Jedwab ManaGinG editor / directeurS À la rÉdaction Des commentaires sur ce numéro ? Sarah Kooi Écrivez-nous à Thèmes canadiens editorial aSSiSant / aSSiStante Éditorial Courrier, AEC, 1822A, rue Sherbrooke Ouest, Montréal (Québec) H3H 1E4. Julie Perrone Ou par courriel au <[email protected]> Vos lettres peuvent être deSiGn / GraPhiSMe modifiées pour des raisons éditoriales. Bang Marketing : 514 849-2264 • 1 888 942-BANG [email protected] adVertiSinG / PuBlicitÉ [email protected] 514 925-3099 acS addreSS / adreSSe aec 1822, rue Sherbrooke Ouest, Montréal (QC) H3H 1E4 514 925-3096 / [email protected] InTroduCTIon : ImmIgraTIon, logemenT eT sans-aBrIsme Carlos Teixera (University of British Columbia-Okanagan) et Barry Halliday (Affaires étrangères et Commerce international Canada) remerCIemenTs Les éditeurs souhaitent remercier l’équipe de Metropolis, en particulier Mona Marshy, pour son aide et ses commentaires utiles à différentes étapes de la rédaction de la présente publication. L’intégration réussie des immigrants et des réfugiés ils ont aussi contribué à la complexité de leurs marchés de dans une nouvelle société se mesure à leur capacité de l’habitation. L’augmentation de la demande de logement combler plusieurs besoins de base, dont l’un des plus doublée d’une pénurie de logements abordables, tant dans importants est un logement abordable, convenable et les marchés de l’achat que de la location, a été l’une des adéquat. Au cours des dernières années, une attention conséquences les plus importantes de ces changements. croissante a été portée sur le rôle du logement dans le Le coût du logement est important, car il détermine processus d’intégration, ce qui a donné lieu à l’examen, dans une large mesure qui peut se permettre quel type d’une part, des liens entre l’accès à un logement abordable de logement (convenable/adéquat) et où au Canada. et les concentrations résidentielles des nouveaux arrivants Même si une proportion importante d’immigrants et de et des minorités et, d’autre part, du succès de l’intégration réfugiés ont ce qui est appelé un accès progressif au et de l’inclusion. Pour les individus comme pour les marché de l’habitation, ce n’est pas le cas pour bon familles, non seulement le type de logement, mais aussi le nombre d’entre eux. Par exemple, pour certains nouveaux quartier où il se trouve, ont une incidence sur les réseaux arrivants, les mesures prises pour répondre à une pénurie sociaux, l’accès à des possibilités d’emploi, la participation de logements abordables comprennent : vivre dans un aux espaces sociaux publics, la nature et la disponibilité logement sur peuplé, chercher un logement social, prendre des services sociaux et le sentiment général de sécurité un logis dans une unité ou un quartier inapproprié, des nouveaux arrivants. En conséquence, les chercheurs et dormir chez des amis (ce qu’on appelle le couch surfing ou les responsables de l’élaboration des politiques cherchent le squat de sofa) et même utiliser les refuges pour sans- à mieux comprendre les relations entre le logement, le abris comme logement de transition de fait. quartier et l’intégration dans la société canadienne. Ce Au-delà du coût, il y a par ailleurs un certain nombre numéro spécial de Thèmes canadiens/Canadian Issues de questions importantes. Une recherche récente a aborde ces relations d’un certain nombre de façons en montré que les nouveaux arrivants peuvent être désavan- explorant les liens entre l’immigration, le logement et le tagés lorsqu’ils cherchent et évaluent un logement, à louer sans-abrisme au Canada. ou à vendre, sur le marché canadien. Il peut s’avérer très L’une des caractéristiques déterminantes de difficile pour les immigrants et les réfugiés récents l’immigration récente au Canada est son hétérogénéité d’amasser et d’utiliser l’information sur les logements culturelle et raciale. Non seulement les pays sources disponibles, en particulier dans les marchés complexes d’immigrants ont changé, mais les immigrants et les ayant un faible taux d’inoccupation. Ces difficultés réfugiés récents viennent aussi de milieux sociaux plus peuvent être amplifiées lorsqu’elles se combinent à des diversifiés. Comme il fallait s’y attendre, ils ont également ressources financières limitées, à la barrière des langues, à des préférences et des besoins distincts en matière de de l’information insuffisante et/ou inexacte fournie par logement. Ceux-ci sont probablement le plus en évidence des amis et la famille, aux pratiques discriminatoires des dans les plus grandes villes du Canada — Montréal, propriétaires, des voisins et d’autres personnes ainsi qu’au Toronto et Vancouver — qui continuent de connaître manque de connaissance de la part des nouveaux arri- d’impressionnants changements démographiques, vants au sujet de leurs droits et de leurs responsabilités à économiques et culturels en raison de l’immigration. Ces titre de locataires. changements ont profondément modifié non seulement la En raison de ces obstacles au logement, mais aussi en composition sociale et culturelle de leurs quartiers, mais raison de la force des réseaux sociaux, nous sommes 3 CArLos teiXerA et bArrY HALLiDAY témoins de tendances de plus en plus diversifiées en professionnel, compétences linguistiques, engagement matière d’établissement chez les nouveaux arrivants au communautaire et civil. Dans ce contexte, deux conclu- pays. Alors que de nombreux nouveaux arrivants se sions communes semblent se dégager des divers articles dispersent dans la ville et la banlieue, certains groupes de ce numéro : (i) parmi tous les nouveaux arrivants au se concentrent dans certains quartiers, dans certaines Canada, les réfugiés connaissent les conditions de communautés et même dans certains immeubles de logement les plus difficiles et (ii) le coût est l’obstacle grande hauteur pour former des enclaves ethniques. le plus important à l’accès au logement, et ce, peu importe Même si à l’origine ces enclaves se trouvaient dans les le lieu. quartiers d’accueil des immigrants près du centre-ville aperçu du numéro — et qu’elles se sont déplacées plus tard pour former de nouvelles enclaves dans les banlieues — nous Dans son article, Hiebert présente une conclusion observons une nouvelle tendance où certains groupes qui ajoute une nuance importante à une bonne partie du s’établissent immédiatement dans les banlieues dès leur discours actuel sur la baisse des revenus et des résultats arrivée au Canada. La complexité de ces tendances en économiques des immigrants. En utilisant des données de matière d’établissement a créé des difficultés pour le l’Enquête longitudinale auprès des immigrants du Canada secteur des services en établissement, ainsi que pour (ELIC), Hiebert montre que malgré des revenus globaux d’autres institutions communautaires, quand vient le plus faibles, une proportion surprenante d’immigrants et temps de répondre aux changements démographiques, de réfugiés sont en mesure d’acheter une maison dans les géo graphiques et aux autres besoins afférents des clients marchés immobiliers les plus chers du Canada, et ce, rela- immigrants et réfugiés. L’émergence d’une nouvelle tivement tôt après leur arrivée. Hiebert propose un tendance d’établissement s’accompagne de besoins et de certain nombre de raisons pour expliquer pourquoi il difficultés uniques en ce qui concerne l’immigration, le pourrait en être ainsi, y compris le transfert de richesse au logement et le sans-abrisme. Canada depuis l’étranger et le rassemblement de plusieurs Ce numéro spécial aborde bon nombre des questions familles en ménages pour mettre en commun tant les soulevées ci-dessus et présente un large portrait des revenus que les risques. Dans son article, Haan porte son expériences et des difficultés en matière de logement des attention sur ce dernier point, un phénomène souvent immigrants et des réfugiés au Canada. Voici certaines des appelé le surpeuplement (crowding). Plus précisément, questions clés abordées dans ce numéro spécial : Haan cherche à mieux comprendre la nature du surpeu- • Q uels sont les obstacles à l’obtention d’un logement plement chez les nouveaux arrivants comparativement à la abordable au Canada ? Quelles stratégies les nouveaux population née au Canada, ainsi qu’en fonction du groupe arrivants utilisent-ils pour surmonter ces obstacles ? ethnique et du mode d’occupation (c.-à-d. achat ou • Q uelles sont les situations de logement des nouveaux location). Haan examine à quel moment, et dans quelles arrivants ? Leurs conditions de logement sont-elles conditions, le surpeuplement peut être perçu comme une convenables et adéquates au regard de leurs besoins ? réponse involontaire à une contrainte économique et dans • L es nouveaux arrivants au Canada deviennent-ils des quelles conditions le surpeuplement est simplement le sans-abris après leur arrivée ? Le cas échéant, quels reflet d’une préférence culturelle et/ou d’une stratégie facteurs y contribuent et quelles sont les interventions économique pour obtenir des résultats préférentiels dans en matière de politiques et de programmes ? les marchés immobiliers canadiens. • Q uels sont les politiques et les programmes en place Ce qui complique la politique et la recherche sur le pour aider l’intégration des nouveaux arrivants logement et le sans-abrisme au Canada, ce sont les aux marchés de l’habitation ? Des changements sont- multiples autorités compétentes en la matière. Wayland, ils nécessaires ? dans un résumé d’un rapport plus vaste, présente un • C omment les nouveaux arrivants influencent-ils les aperçu utile des politiques et services qui existent actuel- marchés de l’habitation et les quartiers canadiens ? lement pour aider les immigrants et les réfugiés à obtenir Comme de nombreux articles de ce numéro le un logement. De plus, elle propose un certain nombre de laissent entendre, l’habitation joue un rôle beaucoup plus changements aux politiques et aux programmes qui leur central dans l’intégration qu’il ne l’est couramment permettraient d’obtenir des situations de logement plus reconnu. Pour la majorité des gens, le logement est la plus favorables. À cet égard, une meilleure coordination entre grande dépense du mois et, si elle est disproportionnée, la politique de logement, l’établissement des immigrants elle peut faire obstacle à d’autres dépenses importantes. et des réfugiés et la politique et les programmes Le logement peut également rendre nécessaires des d’intégration est une suggestion importante. Pour sa part, activités (c.-à-d. un emploi secondaire) qui peuvent Newbold suggère que nous examinions également les liens inhiber l’intégration à long terme — perfectionnement entre le logement, le sans-abrisme et la santé. Le déclin de 4 introDuCtion : iMMiGrAtion, LoGeMent et sAns-AbrisMe la santé à l’arrivée, des conditions de vie et des quartiers l’habitation. Sherrell complète ce portrait en examinant insatisfaisants et le soutien social limité pointent tous, les situations de logement des réfugiés pris en charge par selon Newbold, vers des risques accrus de sans-abrisme. le gouvernement et des demandeurs d’asile dans deux Dans son article, Gaetz porte son attention sur l’accès villes canadiennes, Vancouver et Winnipeg. Tout en accru à la recherche sur le sans-abrisme. À cette fin, il reconnaissant l’importance du statut juridique et du décrit la bibliothèque et le centre d’information Web contexte provincial (p. ex. les taux d’aide sociale, les taux appelé The Homeless Hub (www.homelesshub.ca). Il s’agit d’inoccupation des logements locatifs, etc.), les conclu- d’un dépôt national d’information et d’un carrefour de sions de Sherrell soulignent également l’importance réseautage conçu pour mettre en lien les responsables des d’autres facteurs — qui peuvent être courants chez politiques, entre autres, et la recherche sur le sans- certains groupes de réfugiés comme la taille et la compo- abrisme provenant de partout au pays. sition de la famille, l’alphabétisme et la santé — au regard Dans un résumé d’un rapport plus important, des situations de logement. Dans son article sur les Paradis et divers collaborateurs présentent les résultats de réfugiés africains à Vancouver, Francis fournit un aperçu leur étude au cours de laquelle ont été suivies 91 familles important de la façon dont ces facteurs peuvent exposer sans abri dirigées par des femmes à Toronto. En parlant certains groupes à un risque élevé de sans abrisme, en des expériences des familles de personnes nées au particulier lorsqu’ils sont combinés à d’autres facteurs Canada, d’immigrantes et de réfugiées, l’étude suggère comme les frais de garde, les augmentations de loyer et les que puisque « [l]’itinérance n’est ni inévitable ni conflits avec les voisins et les propriétaires. Les voix des naturelle », des interventions en matière de politique migrants sans papiers et des personnes dont la situation publique sont nécessaires dans un certain nombre de en matière d’immigration est illégale n’ont, dans une domaines, y compris le soutien du revenu, le logement et grande mesure, pas été entendues. L’article de Priya offre les soins aux enfants, et ce, peu importe le statut un aperçu des caractéristiques et des expériences de sans- d’immigration. Preston et divers collaborateurs suggèrent abrisme des migrants sans statut ou sans papiers à également des interventions en matière de politique dans Vancouver et à Toronto. Basées sur l’analyse d’entrevues leur article portant sur les risques associés au sans- menées auprès de 34 migrants, les conclusions de Priya abrisme dans la région de York près de Toronto. Les laissent entrevoir une tendance au désavantage qui auteurs suggèrent que, loin des refuges et des possibilités pourrait être renversée, premièrement, en améliorant de dormir à la dure, un bon nombre d’immigrants l’accès aux étapes initiales du système d’octroi de l’asile, à propriétaires de la région de York risque de sombrer dans l’appui de la justice fondamentale ; deuxièmement, en le sans-abrisme en raison de leurs revenus insuffisants améliorant l’accès aux services de soins de santé, de relativement aux coûts inhérents à leur domicile. Les logement et d’urgence de base à l’appui de la sécurité services et le soutien appropriés comme les refuges, les publique, de la dignité humaine et de l’intérêt supérieur conseillers en logement ou des logements subventionnés à de l’enfant ; et troisièmement, en examinant les innova- proximité sont également importants à cet égard. Dans tions en ce qui a trait à la régularisation et aux leur étude sur le sans-abrisme à Ottawa, Klodawsky et programmes de retour afin de régler les situations divers collaborateurs suggèrent que le sexe et la situation d’illégalité prolongée. Quant à Simich, il décrit dans son de famille sont les deux facteurs qui influencent le plus article la signification fonctionnelle et psychologique de ce la capacité d’une personne à trouver un logement qu’est le « foyer », et l’incidence du manque de soutien stable après des épisodes de sans abrisme, peu importe le social associé au concept du foyer sur la santé mentale et pays d’origine. la réinstallation des réfugiés. En utilisant des exemples De nombreux articles du présent numéro concluent d’études sur des communautés de réfugiés en Ontario que les réfugiés et les demandeurs d’asile éprouvent et en Alberta, l’auteur laisse entendre que la façon dont généralement les plus grandes difficultés pour se trouver les réfugiés évoquent des expériences vécues dans leur un logement et leur capacité financière est plus suscep- foyer d’origine révèle d’importantes lacunes sociales et tible de représenter un obstacle pour eux. En sondant psychologiques dans leur expérience en matière d’éta- cette question, Murdie fournit un aperçu des situations de blissement et d’intégration. logement des réfugiés. Dans son article, il présente la Comparativement à Toronto et Vancouver, dans combinaison de faibles revenus et des coûts de logement l’ensemble, Montréal a des coûts de logement moindre élevés comme la cause du « manque de logements abor- tant pour la location que pour l’achat. Dans l’article de dables qui représente un problème sérieux ». Il présente Rose, nous apprenons que puisque la majorité des immi- également un certain nombre de solutions possibles qui grants récents à Montréal se trouvent sur le marché pourraient aider à atténuer ce qu’il appelle l’entrée locatif privé, c’est de ce côté que nous devrions chercher précaire des réfugiés sur les marchés canadiens de les signes de l’évolution des expériences des immigrants et 5 CArLos teiXerA et bArrY HALLiDAY des réfugiés en matière de logement. Paré offre une autre le logement subventionné avec des plans personnalisés de perspective, à savoir que certaines difficultés des immi- renforcement des capacités élaborés en collaboration avec grants dans le marché locatif privé les portent à devenir chaque locataire. Pour Gurnett, un logement stable et propriétaires comme moyen de trouver un logement sécuritaire est la base idéale à partir de laquelle les adéquat. Pour d’autres, le logement social est la solution problèmes d’établissement plus complexes peuvent être pour répondre à leurs besoins en matière de logement. abordés. Dans son article, Gajardo traite de certaines des Cette réalité a donné lieu à une augmentation impression- façons dont les fournisseurs de services en matière de nante de la diversité ethnique et culturelle dans les logement peuvent interagir de manière plus efficace avec logements sociaux de nombreuses villes du Canada. En se les nouveaux arrivants en fournissant des « services penchant sur ce phénomène à Montréal, Germain et adaptés à la culture » et elle offre un certain nombre de Leloup ont constaté que les habitants des logements suggestions pour relever les défis des politiques et des sociaux avaient des familles plus nombreuses que la programmes visant à obtenir de meilleurs résultats pour moyenne montréalaise et que les ménages monoparentaux cette population. y sont surreprésentés. Les nouveaux arrivants constituent oBservaTIons fInales près de 70 % des habitants et même si 87 % de ceux-ci sont arrivés avant 1995, ils constituent 90 % des personnes sur Les articles du présent numéro révèlent les divers les listes d’attente. Fait intéressant, Germain et Leloup ont facteurs qui influencent les situations de logement et les constaté que les relations interethniques des jeunes de ces expériences des immigrants et des réfugiés sur les projets de logements sociaux sont positives ; même si des marchés urbains du Canada. Ces facteurs sont : les coûts ; tensions intergénérationnelles ont été constatées au sein les faibles taux d’inoccupation ; le manque de connais- de certains groupes. sance au sujet du fonctionnement du marché de En présentant la réponse de la ville de Montréal à ces l’habitation ; la compétence dans les langues officielles ; les défis, entre autres, l’article de Bohémier suggère que les difficultés à accéder à l’information sur les logements projets et les initiatives au sein de la stratégie de disponibles et le racisme et la discrimination de la part des développement social de la ville de Montréal peuvent propriétaires, des représentants des organisations privées contribuer à l’intégration des nouveaux arrivants habitant et publiques et des agents immobiliers. Comme nous le dans les logements sociaux de Montréal. Un de ces constatons dans ce numéro, les nouveaux arrivants projets, Habiter la mixité, a évolué au cours de la dernière connaissent une grande variété de situations de logement, décennie pour comporter trois éléments principaux : le y compris le sans-abrisme chronique et épisodique ; le soutien aux familles, l’harmonie interethnique chez les recours aux maisons de transition et/ou aux logements aînés et l’encouragement de la participation communau- subventionnés ; les logements sociaux ; le surpeuplement ; taire chez les jeunes. Dans son article, Bérubé aborde l’accession à la propriété, mais à un haut niveau de risque également l’intégration sociale des immigrants et des financier et l’obtention d’un logement dans un quartier réfugiés dans les habitations à loyer modique, mais elle qui ne répond peut-être pas adéquatement à leurs besoins. porte en particulier son attention sur le quartier Sainte- Toutefois, même si de nombreux articles soulignent la Marie, à Montréal. En passant en revue toute une gamme pénurie de logements abordables, un nombre remarquable d’arrangements pour habitations à loyer modique, du de nouveaux arrivants semblent accéder à la propriété logement social au marché locatif privé, Bérubé constate relativement rapidement après leur arrivée au Canada. que les points de vue des immigrants et des réfugiés sur le Bon nombre d’articles présentent des recommanda- logement sont inséparables de la qualité des relations tions visant à améliorer les situations de logement pour humaines dans leur quartier que leur logement rend favoriser l’intégration générale à l’intention des politiques possible. Même si l’article de Carter porte également sur et des programmes. En voici quelques exemples : l’intégration sociale chez les habitants d’habitations à • Fournir de l’information supplémentaire sur le logement loyer modique, il présente une autre facette de cette pour les immigrants et les nouveaux arrivants, y compris question ; celle de la concurrence entre les Autochtones et au sujet de leurs droits et de leurs responsabilités en tant les réfugiés pour les habitations à loyer modique dans le que locataires et propriétaires. centre de Winnipeg. Carter fait valoir que cette concur- • Cliniques de logement mobiles pour rejoindre les immi- rence, combinée à de faibles taux d’inoccupation, crée un grants et les réfugiés qui pourraient ne pas avoir accès milieu où les propriétaires ont une plus grande liberté aux ressources existantes. pour s’adonner à des pratiques discriminatoires. • Un supplément de revenu pour le logement, en particu- En s’inspirant de ses expériences dans le secteur de lier pour les réfugiés. l’établissement à Edmonton, Gurnett présente le Trinity • L’élaboration de stratégies de développement social et Manor, un modèle de logement subventionné qui combine communautaire au sein du logement social — tant pour 6 introDuCtion : iMMiGrAtion, LoGeMent et sAns-AbrisMe aider les immigrants et les réfugiés dans leurs efforts des réfugiés, le racisme et la discrimination ainsi que d’intégration, mais aussi pour favoriser l’inclusion l’inclusion sociale, entre autres. Comme le coût semble sociale de tous les habitants. être le principal obstacle pour de nombreuses personnes • Une coordination améliorée entre les services de dans la quête d’un logement adéquat, nous pouvons nous logement, d’établissement et d’intégration. demander si les efforts pour améliorer la reconnaissance • Disposer davantage de maisons de transition pour des titres de compétences étrangers se traduiront par des soutenir les arrivées récentes au Canada. revenus plus élevés et, en conséquence, de meilleures situ- • Construire davantage de logements abordables. ations de logement. Les explications possibles du succès Compte tenu des répercussions importantes de relatif de nombreux immigrants et réfugiés dans le l’immigration sur les marchés de l’habitation dans les marché canadien de l’habitation méritent également villes canadiennes — sans parler de l’importance de réflexion. Leur succès devrait il être perçu comme un l’immigration comme moteur de la croissance économique indice positif que les nouveaux arrivants réussissent au tant au niveau local que national — d’autres recherches sont Canada ou cachent-ils des arrangements financiers nécessaires au sujet des expériences des nouveaux arrivants précaires qui pourraient mener à de hauts risques de sans- en matière d’habitation afin de mieux comprendre : abrisme ? Dans le même ordre d’idées, est-ce que la valeur • Pourquoi certains groupes d’immigrants et de réfugiés accordée par la société à l’accession à la propriété pousse sont-ils plus aptes que d’autres à trouver des logements les immigrants et les réfugiés à la poursuite de ce but aux appropriés dans des quartiers adéquats ? dépens de conditions de logement satisfaisantes en ce qui • Quels facteurs facilitent ou font obstacle à ce concerne le domicile et le quartier ? Pour aller droit au phénomène ? but, à quel point le logement joue t il un rôle central au • Quelle signification a l’accession à la propriété chez les regard de l’intégration des nouveaux arrivants ? Comme nouveaux arrivants au Canada ? Est-ce un indicateur les précieuses et importantes conclusions du présent d’une intégration réussie et/ou de statut social ? numéro le laissent entendre, les réponses à ces questions • Pour ceux qui ne cherchent pas à accéder à la propriété, définiront le paysage urbain du Canada pour les décennies y a-t-il des obligations financières concurrentes qui à venir et demandent non seulement un examen plus fournissent des explications importantes ; c.-à-d. épargner approfondi, mais aussi une intervention énergique. pour l’éducation des enfants, envois d’argent, etc. ? • Pourquoi les grands centres urbains du Canada continuent-ils d’être les destinations préférées pour note l’établissement plutôt que les plus petites villes et les 1 L’accès progressif au marché de l’habitation se caractérise par régions rurales ? l’amélioration, au fil du temps, des conditions d’habitation • Quelles sont les répercussions du transnationalisme d’une personne que l’on mesure par des indicateurs comme un sur les nouveaux arrivants dans les marchés canadiens logement abordable, convenable et adéquat qui répond aux de l’habitation ? besoins d’une personne. • Quels sont les effets des choix et des comportements résidentiels des nouveaux arrivants sur les communautés municipales et la planification des infrastructures ? En plus de ces questions, de plus amples recherches doivent être effectuées concernant les ménages vulnérables (ceux allouant 30 % ou plus de leurs revenus au logement), car dans une large mesure, ils ne suivent pas le parcours normal d’un accès progressif au marché de l’habitation pour les immigrants et les réfugiés dans les villes canadiennes. De plus, le lien entre le logement abordable et l’immigration semble être une inquiétude croissante dans les villes canadiennes de taille moyenne. Ainsi, il y a un besoin impérieux de plus amples recher- ches sur le rôle des immigrants dans ces marchés plus petits puisque ce sujet a été, en majeure partie, absent de « l’écran radar » de la majorité des chercheurs canadiens jusqu’à tout récemment. Il existe aussi un certain nombre de recoupements avec d’autres questions comme la situation économique 7 les nouveaux arrIvanTs sur le marCHé CanadIen de l’HaBITaTIon dan Hiebert (University of British Columbia) Le Canada a l’un des systèmes d’immigration les plus Les conditions économiques générales des immi- vastes (par habitant) au monde. Une grande majorité des grants ont été largement documentées. En général, le nouveaux arrivants s’installent dans peu d’endroits, soit consensus est que la réussite des nouveaux arrivants principalement à Montréal, à Toronto et à Vancouver. (terme définissant habituellement les personnes arrivées Ces villes affichent de faibles taux d’inoccupation au Canada depuis cinq ans ou moins) s’est considérable- des logements et, particulièrement à Toronto et à ment détériorée au cours de la dernière génération Vancouver, des coûts de propriétés et des loyers élevés. (Frenette et Morrison, 2003 ; Picot et Hou, 2003 ; Reitz, Comment les immigrants se débrouillent-ils sur le marché 2007). Les auteurs sont arrivés à la conclusion que les de l’habitation canadien ? Peuvent-ils trouver des loge- employeurs canadiens accordent peu d’importance aux ments convenables ? Quels coûts doivent-ils assumer titres de compétence et à l’expérience de travail à rela ti vement à leurs ressources financières ? Quel est l’étranger, et que les salaires de base sont bien en deçà de l’impact de l’arrivée des immigrants sur le marché de ce à quoi on s’attendrait compte tenu du capital humain l’habitation canadien ? relativement élevé associé à la plupart des immigrants. En Les études précédentes sur les immigrants ont révélé conséquence, la proportion de nouveaux arrivants consi- qu’il existe une caractéristique récurrente chez la majorité dérés comme vivant sous le seuil de faible revenu (SFR) d’entre eux : un accès progressif au marché de l’habitation. établi par Statistique Canada a augmenté dans chaque Autrement dit, le processus d’intégration au Canada est recensement depuis 1981 (Frenette et Morrison, 2003 ; lié à l’augmentation des salaires, à l’amélioration des Picot et Hou, 2003 ; voir Picot et coll., 2007). conditions d’habitation et à la croissance du taux En consultant la documentation existante sur le d’accession à la propriété au fil du temps (Murdie et coll. salaire et le logement, on se demande si l’ère de l’accession 2006). Après une dizaine d’années au Canada, les immi- progressive à de meilleures conditions de logement ne grants rattrapent les Canadiens de naissance en ce qui a touche pas à sa fin, conclusion que l’on peut tirer de la trait à l’accession à la propriété et, chez les immigrants qui récente étude de Haan (2005). Les contraintes grandis- sont au Canada depuis plus longtemps encore, le taux santes sur les revenus initiaux des immigrants nuisent d’accession à la propriété surpasse celui des Canadiens de peut-être à leur capacité à améliorer leurs conditions naissance. Ainsi, l’arrivée des immigrants a un impact de logement, du moins au début du processus important sur le marché urbain de l’habitation au Canada d’établissement. L’Enquête longitudinale auprès des et peut en fait influencer le prix des propriétés, ne immigrants du Canada (ELIC) est une source de données serait-ce qu’à Toronto et à Vancouver (Carter, 2005). idéale pour évaluer une telle affirmation (voir l’annexe). L’amélioration des conditions de logement est une étape sTruCTure des ménages favorable à la réussite de l’intégration, car elle procure des avantages psychologiques et un sentiment d’appartenance Une forte majorité des ménages de nouveaux envers le pays (Murdie et Tiexiera, 2003 ; Engeland et arrivants étaient des familles nucléaires au moment de Lewis, 2005). leur première entrevue : environ la moitié étaient des Toutefois, il faut préciser que les immigrants ne couples avec enfants et 20 %, des couples sans enfants ou peuvent pas tous accéder à la propriété et conserver des des familles monoparentales (tableau 1). Les 30 % restant conditions de logement convenables au fil du temps. étaient composés de ménages d’une seule personne (9 %) Certains n’ont d’autre choix que de vivre entassés ou de et de ménages composés d’au moins une personne sans dépenser une grande proportion de leur revenu pour se lien avec la famille (6 %) ou de plus d’une famille loger (Murdie, 2003), alors que d’autres deviennent même économique (15 %). Ces deux dernières catégories sans-abri (Hiebert et coll., 2005) ou sont victimes de atteignent des proportions frappantes et renferment discrimination sur le marché de l’habitation. probablement des personnes en situation financière difficile ou, dans de nombreux cas, des gens s’étant réunis 8
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