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Les enfants de Cadmos: le paysage religieux de la Phénicie hellénistique PDF

607 Pages·2014·12.209 MB·French
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DE L’ARCHÉOLOGIE À L’HISTOIRE Corinne Bonnet Les enfants de Cadmos Le paysage religieux de la Phénicie hellénistique ÉDITIONS DE BOCCARD Les enfants de Cadmos Le paysage religieux de la Phénicie hellénistique D E L ’ A R C H É O L O G I E À L ’ H I S T O I R E Corinne Bonnet Les enfants de Cadmos Le paysage religieux de la Phénicie hellénistique ÉDITIONS DE BOCCARD 11, rue de Médicis - Paris VIe 2014 Ouvrage publié avec le soutien de l’Institut universitaire de France Tous droits réservés pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants cause, est illicite et constitue une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal. © Éditions de Boccard 2014 ISBN broché 978-2-7018-0371-5 ISBN relié 978-2-7018-0382-1 ISSN 1157-3872 Pour Benoît, pour Bernadette, et en souvenir de Dominique Chevallier, enfants adoptifs de Cadmos et d’Elissa Avant-propos En 1971, Dominique Chevallier publie sa thèse intitulée « La société du Mont Liban à l’époque de la révolution industrielle en Europe »1. Il y cite en exergue un passage des Souvenirs d’Alexis de Tocqueville2 : Je suis tenté de croire que ce qu’on appelle les institutions nécessaires ne sont souvent que les institutions auxquelles on est accoutumé, et qu’en matière de constitution sociale, le champ du possible est bien plus vaste que les hommes qui vivent dans chaque société ne se l’imaginent. Il précise sa pensée dans l’avertissement rédigé pour l’édition de 19823 : Le Liban appartient au monde de la culture arabe et de la civilisation islamique. Il est aussi une des composantes de l’univers chrétien et de l’ensemble francophone. Institué État en 1920, il se justifi e, comme tous les pays du Proche-Orient contemporain, par la recherche d’une très ancienne identité. Dans la prospérité des marchands, dans le symbole biblique du cèdre sur le drapeau, ou dans la cruauté de la guerre civile commencée en 1975, les Libanais participent aux mythes et aux réalités des peuples qui ont fondé, de la Méditerranée à la Mésopotamie, la civilisation sur la famille patriarcale, l’agriculture, la ville, l’échange et Dieu. J’ai montré ici à travers quels heurts, et quelles ambiguïtés dans leur expli- cation, ce pays s’est rassemblé à l’époque où il fut pénétré par l’âge moderne et où la société multiconfessionelle, qui s’était constituée en un isolat de contact, y réagit avec ses multiples facettes pour accueillir la nouveauté tout en conservant sa propre culture. Elle n’a cessé, en eff et, d’inventer sa personnalité grâce aux irradiations fécondantes qu’attiraient sur elle ses relations avec des horizons humains infi niment plus étendus que le roc où elle était accrochée entre la mer et la steppe. Comment ne pas être frappée par la proximité entre cette ample analyse et le questionnement qui innerve notre livre? Hier la Phéni- cie, aujourd’hui le Liban ; de part et d’autre une rencontre de cultures 1 Réédition en 1982 (Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner). 2 A. de Tocqueville, Souvenirs, dans Œuvres complètes, XII, Paris 1968, p. 97. 3 Cf. p. IX-X pour les citations qui suivent. 10 Les enfants de Cadmos et des transformations qui dilatent le champ des possibles, suscitent la créativité culturelle et soulèvent des questions d’échelles. « Faut-il alors opposer ‘spécifi cité’ et ‘universalisme’ ? », poursuit judicieuse- ment Dominique Chevallier. « Insister sur la spécifi cité ne revient pas à mettre en question l’universalisme, mais le niveau auquel se situe l’identité réelle de la nature humaine à travers ses variétés sociales ». La conjugaison du singulier et du pluriel, l’entrelacement des identités et le mariage entre spécifi que et « universel » (celui de la koinè hellé- nistique) sont pareillement au cœur des pages qui suivent. Il s’agit en somme, pour la Phénicie antique comme pour le Liban contem- porain, de scruter les enjeux liés au dialogue entre divers langages au sens large, entre des réalités et des concepts mis en demeure, par le fl ux de l’histoire, de s’ajuster les uns aux autres. Dominique Chevallier l’exprime en ces termes : Les changements de notre (= les Européens) vocabulaire, au XIXe siècle, ont exprimé les transformations européennes ; ils ont donc aussi repré- senté le mouvement de tout un ordre de compréhensions, et ils ont agi au niveau de l’observation et de la réfl exion. Ils ont ainsi contribué à trans- mettre un message à ceux pour qui les moyens de l’Occident devenaient inévitables, et qui l’ont reçu pour chercher à saisir la nouveauté du monde et s’y fi xer une conduite, même s’il contenait une vision déformante de leur propre organisation sociale. En intitulant le copieux épilogue de son livre « L’inévitable Occident et l’Orient résistant »4, Dominique Chevallier prend le risque de fi ger, presque malgré lui, en recourant à des catégories excessivement « euro- péennes », un cadre historique auquel il n’a cessé de restituer fl uidité, complexité, plasticité, ce qu’il résume in fi ne par une formule d’Aragon : « le brillant dépoli des perturbations de la liberté »5. Liberté ou servi- tude, ou plus exactement les deux : les relations du Proche-Orient avec l’autre rive de la Méditerranée sont, dans la longue durée, sources de mutations profondément ambivalentes. S’en emparer et tenter d’en accroître l’intelligibilité est une tâche importante. Une bienveillante Tychè a fait que c’est au milieu de paysages que Dominique Chevallier aimait sans doute autant que ceux de la montagne libanaise, entourée des personnes qui lui étaient chères et 4 Ibidem, p. 273-296. 5 Ibidem, p. 296. Il renvoie à A. Breton, Le Manifeste du surréalisme, Paris 1924. La citation complète est : « Un peu à gauche, dans mon fi rmament deviné, j’aperçois – mais sans doute n’est-ce qu’une vapeur de sang et de meurtre – le brillant dépoli des perturbations de la liberté ». Le dernier ouvrage publié par D. Chevallier, en 2008, peu avant son décès, s’intitulait d’ailleurs Vapeurs de sang.

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