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Les cheveux Signe et signifiant PDF

103 Pages·2013·1.697 MB·French
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Les cheveux Signe et signifiant Springer Paris Berlin Heidelberg New York Hong Kong Londres Milan Tokyo Gérard Tilles Françoise Gründ Les cheveux Signe et signifiant Gérard Tilles Bibliothèque Henri-Feulard, hôpital Saint-Louis 1, avenue Claude- Vellefaux 75475 Paris Cedex 10 Françoise Gründ La Rignière 35320 Tresboeuf ISBN : 978- 2- 8178- 0316- 6 Springer Paris Berlin Heidelberg New York © Springer- Verlag France, 2013 Springer est membre du groupe Springer Science + Business Media Cet ouvrage est soumis au copyright. Tous droits réservés, notamment la reproduction et la représentation, la traduction, la réimpression, l’exposé, la reproduction des illustrations et des tableaux, la transmission par voie d’enregistrement sonore ou visuel, la reproduction par microfilm ou tout autre moyen ainsi que la conservation des banques de données. La loi fran- çaise sur le copyright du 9 septembre 19655dans la version en vigueur n’autorise une reproduc- tion intégrale ou partielle que dans certains cas, et en principe moyennant le paiement des droits. Toute représentation, reproduction, contrefaçon ou conservation dans une banque de données par quelque procédé que ce soit est sanctionnée par la loi pénale sur le copyright. L’utilisation dans cet ouvrage de désignations, dénominations commerciales, marques de fabrique, etc. même sans spécification ne signifie pas que ces termes soient libres de la législation sur les marques de fabrique et la protection des marques et qu’ils puissent être utilisés par chacun. La maison d’édition décline toute responsabilité quant à l’exactitude des indications de dosage et des modes d’emplois. Dans chaque cas il incombe à l’usager de vérifier les informations données par comparaison à la littérature existante. Maquette de couverture : Jean- François Montmarché Mise en page : Nord Compo, Villeneuve d’Ascq Illustrations de couverture : – de la 4e : coll. bibliothèque interuniversitaire de santé, Paris – de droite : Fotolia, Girl with creative hairstyle © Anton Maltsev 40311490 – du milieu : coll. bibliothèque Henri-Feulard, hôpital Saint-Louis, Paris – de gauche : Fotolia, Cancer patient undergoing chemotherapy-looking sideways © Eireann 42468006 Remerciements Cet ouvrage est pour moi l’occasion de remercier à nouveau l’équipe de la biblio- thèque Henri-Feulard (hôpital Saint-louis), Françoise Durand, Sylvie Dorison, qui a facilité les recherches documentaires. Je remercie également Mr Guy Cobolet qui a permis la reproduction des gravures issues du fonds de la bibliothèque interuni- versitaire de Santé. Gérard Tilles Sommaire Remerciements . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 Introduction. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 I. Les malades du cheveu-Histoires d’exclusion. . . . . . . . . . 13 1. La métamorphose des pliques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 Plica polonica, une étrange « maladie » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 Plica polonica ou plica hysterica . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Le nouveau visage des pliques : cosmétique et valorisation sociale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 2. Les enfants malades de la teigne De l’abandon médical à l’obsession hygiéniste . . . . . . . . . . . . . 31 Les enfants teigneux abandonnés aux guérisseurs . . . . . . . . . . . 31 Entre abandon médical et obsession hygiéniste : premières interventions médicales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36 L’école, lieu d’apprentissage de l’hygiène et d’observation sanitaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41 Une école pour enfants teigneux : progrès sanitaire ou modèle d’exclusion ? . . . . . . . . . . . . . . . . . 44 Les enfants malades des teignes, victimes d’expérimentations hasardeuses . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51 3. Les enfants malades de la pelade : « dans le doute, excluons » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55 4. É valuer la qualité de vie des malades du cheveu. . . . . . . . . . . . 61 Premiers constats d’exclusion sociale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61 Perdre ses cheveux : une maladie de la communication . . . . . . 63 8 Les cheveux Mesurer la qualité de vie des malades du cheveu : précautions méthodologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65 Alopécie androgénique et perturbations psychologiques . . . . . 67 Chute de cheveux et malades du cancer : un modèle particulier d’étude de qualité de vie . . . . . . . . . . . . . 70 II. D es cheveux sur la tête : importance, valorisation, aliénation, chez différents peuples . . . . . . 73 1. La chevelure, marqueur d’identité individuelle et sociale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 La problématique identitaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75 Un marqueur social . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 Troubles de l’identité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79 2. « La belle qui peigne ses cheveux d’or… » . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 La valeur matérielle des cheveux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 Valeur artistique de la chevelure . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85 L’usage des perruques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87 3. Fantasmes et pouvoirs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 Pouvoir érotique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 Virilité et puissance politique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Magie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 100 Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Les cheveux et le langage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Des matières innombrables, pour le soin des cheveux . . . . . . . 108 Panoplie d’ustensiles pour les cheveux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 Coiffures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 Introduction Suffirait-i l d’arpenter les villes et d’observer le crâne des passants pour tirer nombre de réflexions sur la richesse ou la précarité du pays, son ouverture ou son enfermement, la liberté de ses habitants, leur sens esthétique, leurs désirs et leurs frustrations ? Il semble bien que la chevelure, ce toit du corps, fournisse, dans bien des cas, des indications privilégiées1. Paris, Rome, Amsterdam, Berlin, New York ou Melbourne, cités changeantes et animées, voient défiler des têtes d’une grande variété, à la manière de théâtres de marionnettes géantes. Les chevelures colorées des hommes comme des femmes, la nature de leurs toisons, leurs textures lisses, bouclées, frisées, crépues, leur abondance, leur disposition sur la tête et autour du visage sont autant d’informations sur l’origine, la condition, l’état de santé, de milliers d’individus qui se côtoient, s’ignorent et quelquefois se mêlent. Les cheveux, à la coupe plus ou moins longue, de certains hommes voisinent avec les queues de cheval, les crânes rasés, avec les mèches supérieures, teintes et rabattues sur le haut du front. Les boucles courtes des femmes côtoient les longues crinières des jeunes filles et les toisons méticuleusement défrisées des Africaines et des Caribéennes. La cité européenne donne ainsi un aperçu immédiat de sa diversité. La ville japonaise, avec ses quartiers à la mode, s’approche de cette complexité. Les adolescents, s’opposant à leurs parents, choisissent les coupes et les couleurs les plus insolites. Et les tignasses vertes, jaune citron ou mauves, forment des visions inattendues, faites, presque toujours, pour afficher la rébellion. En Inde, en Chine, en Colombie ou au Mexique, les individus semblent plus uniformisés, leurs cheveux et leurs arrangements capillaires se répartissant en quelques modèles presque constants. Dans une certaine mesure, les villes africaines montrent, elles aussi, une certaine conformité, les individus répondant à des habitudes anciennes ou à des normes nouvelles : cheveux crépus ou lissés à l’européenne, crâne rasé des hommes, à l’imitation des sportifs. À l’automne 2010, la cinémathèque française de Paris proposait une exposition, Brune/Blonde, orientée vers les fonctions érotiques de la chevelure, surtout féminine, dans la culture occidentale, au travers de peintures, de photographies et de films. L’événement culturel qui mettait l’accent sur une partie du corps humain et ses fonctions relationnelles, prenait en compte une préoccupation majeure du passé comme du présent : le paraître, souligné par un de ses atouts essentiels. La cheve- lure, ainsi mise au premier plan, révélait de multiples caractéristiques, dont certaines 1. Dans un ouvrage récent, M.F. Auzépy et J. Cornette montrent bien la valeur « signe », sociale ou politique, du poil ou du cheveu. Histoire du poil sous la direction de Marie-F rance Auzépy et Joël Cornette (2011), Belin, Paris. 10 Les cheveux peuvent apparaître insolites, étranges voire inquiétantes. Une réflexion sur ce que signifie ou représente la chevelure ou les cheveux (en soulignant la différence), dans diverses cultures, ne manquera pas d’apporter points de vue et interrogations, sur des comportements, induits par les déterminants et modifications multiples de cet élément corporel. Partout, les cheveux, plus encore que les vêtements, sont destinés à attirer le regard. La vue, mais aussi le toucher ou l’odorat et parfois l’ouïe vont se trouver activés, la plupart du temps par une démarche volontaire de l’individu ou d’un groupe de population. L’histoire, l’anthropologie et, plus récemment, la psychanalyse fournissent de multiples informations sur les comportements induits et l’attention apportée à la chevelure. Il ressort de ces observations que, quels que soient les pays et les cultures, elle reste un signe social essentiel. À côté des significations multiples qui s’attachent aux modifications volontaires de la chevelure, la vie en société peut être fortement altérée par les changements d’appa- rence, conséquences non de choix esthétiques mais de maladies du cheveu. Il ne s’agit plus dans ces circonstances de valorisation, d’affirmation de soi, d’embellis- sement ou d’exclusion volontaire. L’histoire de la dermatologie fournit des modèles de stigmatisation et d’exclusion sociale dont les malades du cheveu furent victimes. Parmi ces modèles, trois, particulièrement signifiants, sont décrits et analysés dans cet ouvrage : l’un mal connu, les pliques, les autres moins ignorés : les teignes et la pelade qui leur fut longtemps rattachée. Étranges altérations des cheveux, les pliques furent considérées comme d’authen- tiques maladies jusque dans la seconde moitié du xixe siècle. Des médecins, parcourant l’Europe dans les armées de l’Empire, décrivirent ces pliques comme une spécificité polonaise au point de dénommer la « maladie » plica polonica. Quelques décennies plus tard, d’autres auteurs dénationalisèrent les pliques et les rattachèrent à une pathologie mentale. Après avoir été qualifiées « polonica », elles devinrent « hysterica » jusqu’à ce que, dans les années 1850, des raisonne- ments écartant préjugés et interprétations abusives amenèrent à ne plus consi- dérer les pliques comme une maladie mais comme la conséquence d’un simple manque d’hygiène. On aurait pu croire terminée cette histoire si, depuis quelques décennies, des observations sporadiques ne s’efforçaient de ressusciter les pliques- maladies dans des contextes culturels, on le verra, particuliers. Enfin, par un revire- ment inattendu de l’histoire, les pliques, longtemps stigmates de relégation sociale, sont devenues un ornement (dreadlocks), marque de l’estime de soi, de l’attention portée à une hygiène soigneuse des cheveux, bien éloignée de ce qui en faisait la définition originelle. Ainsi, alors que l’histoire médicale des pliques apparaît surtout comme une supercherie à laquelle adhérèrent de nombreux médecins, du point de vue social cette histoire se révèle riche de significations associant exclu- sion, superstition, xénophobie et récemment valorisation. Comparée à celle des pliques, l’histoire médicale des teignes est dense. Elles furent les premières maladies cutanées – du cuir chevelu et du cheveu – au cours desquelles il fut possible d’identifier une cause externe, visible au microscope. Dès lors, la découverte de l’origine mycosique des teignes ramena les enfants teigneux – auparavant abandonnés aux guérisseurs – sous le regard médical. Traiter ces enfants devint l’affaire des médecins. La vie sociale des petits malades restait toutefois hypothéquée par leur maladie contagieuse et affichante. Les premières Introduction 11 années de la IIIeRépublique furent contemporaines d’une évolution détermi- nante. L’instruction obligatoire pour tous interdisait de laisser quiconque à l’écart de ce progrès social. L’exclusion scolaire des enfants teigneux n’était plus accep- table. Dans le même temps, les découvertes des pasteuriens en montrant que des microbes étaient la cause de maladies soulignaient l’importance de l’hygiène. Les écoles furent utilisées comme des bases avancées pour assurer aux enfants un corps sain autant qu’un esprit sain. Le malade contagieux était décrit comme le propa- gateur d’agents de destruction massive qu’il importait de mettre à l’écart. Dans ce climat, les enfants malades de la teigne, auparavant privés d’éducation et de socialisation, furent l’objet à la fois d’une volonté d’intégration socio- éducative et d’une forme d’isolement dans des écoles d’un genre nouveau, conjuguant éduca- tion et soins. À l’aube du xxe siècle, des médecins se spécialisaient en mycologie, discipline nouvelle, laissant penser que des savoirs particuliers étaient requis pour soigner les teignes. L’utilisation hasardeuse des rayons X jusque dans les années 1950 en accentuant la complexité du traitement contribua à dramatiser les teignes, maladies pourtant bénignes2. Aujourd’hui, les pliques ont disparu et leurs versions modernes, les dreadlocks, ne se portent plus comme un stigmate d’exclusion mais au contraire une affirmation de soi. Les teignes bénéficient d’un traitement efficace, court et sans danger qui en assure la guérison. L’exclusion scolaire, autrefois la règle, n’est plus prononcée. Qu’il s’agisse des pliques ou des teignes, les médecins ne restaient pas indifférents aux conditions de vie que ces maladies imposaient à ceux qui en étaient atteints, enfants comme adultes. Il n’était toutefois pas question d’apprécier – encore moins d’évaluer au sens actuel du terme – le retentissement social des maladies du cheveu. Aujourd’hui, l’attention pour les relations sociales des maladies du cheveu s’est déplacée vers deux autres tableaux caractérisés par la perte de tout ou partie de la chevelure : l’alopécie androgénique et la pelade dont l’histoire sociale a longtemps eu des liens de parenté étroits avec les teignes. À côté de ces maladies qui font le quoti- dien de la pratique des dermatologues, une autre situation met en évidence les liens sociaux du cheveu malade ou absent dans un contexte médical lourd : les alopécies induites par les chimiothérapies anticancéreuses responsables, dans ce contexte très particulier, de lourdes conséquences psychosociales sur la vie des malades. Depuis quelques années les maladies de la peau et des cheveux constituent un terrain d’étude privilégiée pour les mesures de qualité de vie. Ces mesures, inter- prétées avec précaution, apportent d’utiles précisions sur la nécessité de ne pas sous- estimer l’éventuel retentissement psychologique des maladies du cheveu. La plupart des travaux soulignent, on le verra, à quel point les alopécies véhiculent des éléments de communication négative. Au terme de cet ouvrage rédigé dans une approche complémentaire par une ethnologue et un dermatologue, les lecteurs auront trouvé matière à enrichir leur réflexion sur la place de la chevelure et la signification de ses changements. 2. Tilles G (2008) Teignes et teigneux. Histoire médicale et sociale. Springer, Paris.

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