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Les 100.000 familles / plaidoyer pour l’entreprise familiale PDF

106 Pages·2015·0.66 MB·French
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Ce livre est dédié aux miens : Aleth, Paul, Rémi, Laure, Victor, Aude, Anaïs, Léopold, Louisa, Emmanuel, Ségolène, Aurélie, Olivier, Elise, Gabrielle, Antoine, Vincent, Raphaëlle, Pierre, Adèle, Alice, Théophile, Camille, Romain, Hedwige, François, Emilie, Alejandro, Luis, Mélisandre, Thibaud, Auguste, Hadrien, Bérénice et tous ceux à venir ! Un grand merci à François Roche pour son aide précieuse, à Aleth pour sa relecture attentive et à Olivier Nora pour sa confiance. Préface La défense et illustration de l’entreprise familiale que nous propose Cyrille Chevrillon est d’abord un formidable antidote à la morosité ambiante et au consensus confortable et dangereux qui s’instaure peu à peu sur le déclin de l’économie française. Comme François Mitterrand disait jadis avec fatalisme que l’on avait tout essayé contre le chômage, se développe l’idée d’une France condamnée à perdre son industrie, mise à mal par la mondialisation et les évolutions technologiques. A ces tenants du pessimisme économique, l’auteur oppose les exemples concrets d’entreprises anciennes et innovantes, implantées dans leurs territoires et exportant sur toute la planète, capables de recruter et de faire grandir des talents en leur sein. La première des leçons de l’ouvrage est bien dans ces histoires d’hommes et de sociétés faites de détermination et d’optimisme, mais aussi de valeurs personnelles et familiales qui sont chaque fois aux fondements de ces succès durables. Mais le propos de Cyrille Chevrillon est plus ambitieux qu’une simple revue de beaux exemples et c’est là tout son intérêt. Sa conviction est que l’entreprise familiale est adaptée aux transformations actuelles de l’économie mondiale, mais aussi qu’elle correspond parfaitement aux besoins et aux caractéristiques de la France et de l’Europe. Elle devrait donc être au cœur de la stratégie économique de notre pays alors que les pouvoirs publics tendent à la négliger, quand ils ne contribuent pas à sa destruction ou à son dépérissement. Le constat est sévère et peut-être même excessif. Reconnaissons cependant qu’entre les champions nationaux portant haut les couleurs du pays à l’international et le vivier des PME, les administrations et les politiques ont souvent du mal à appréhender le rôle et la spécificité de ces entreprises familiales, qui jouent poutant un rôle clef dans notre tissu économique. On reste ainsi frappé des conséquences dévastatrices des règles mises en place au début des années 80 en matière de transmission d’entreprises. Elles ont heureusement depuis été corrigées, mais combien de trajectoires fructueuses interrompues ou de difficultés financières créées inutilement. Cette méconnaissance a une histoire, que retrace Cyrille Chevrillon. Elle est d’abord l’héritage de la faible considération de l’Ancien Régime pour le commerce et l’industrie. Plus près de nous, elle se nourrit d’une vision conflictuelle de la société opposant patronat et ouvriers, d’une passion française pour l’égalité et d’une méfiance vis-à-vis de la réussite individuelle. C’est aussi cela que nous devons corriger si nous voulons que les 4 600 ETI françaises contribuent demain davantage à la croissance et à l’emploi dans notre pays. Cyrille Chevrillon nous livre à cet égard un véritable plan de bataille, détaillant aussi bien la stratégie d’ensemble que les mesures techniques nécessaires. A défaut de pouvoir discuter chacune d’entre elles, je voudrais évoquer trois pistes qui se nourrissent notamment de mon expérience au sein de la Commission européenne. La première est un changement d’état d’esprit. C’est à la fois le plus simple et le plus compliqué. Combien de fois ai-je pu observer en Allemagne et en Italie la considération dont bénéficient les entreprises familiales… La place et le rôle de ces entreprises sont parfaitement identifiés par les pouvoirs publics locaux et les administrations régionales. Le soutien et la promotion de ces fers de lance de l’activité économique et de l’emploi font quasiment consensus. Et les résultats sont là : 13 000 ETI en Allemagne et 10 000 en Italie. Ne caricaturons pas les choses. En France aussi, dans bien des cas sur le terrain, élus et services de l’Etat et des territoires savent la valeur de ces sociétés et travaillent en bonne intelligence avec elles. Mais nous pouvons et nous devons faire mieux. La réforme territoriale doit être l’occasion d’une réflexion en profondeur sur ce thème. Je suis convaincu que c’est par l’action locale que nous ferons changer les mentalités et les pratiques. Deuxième priorité, favoriser les approches à long terme et en particulier rendre possibles des financements dans ce cadre. Cyrille Chevrillon a des pages éclairantes sur ce point. Il faut du temps pour construire une croissance solide, s’engager dans des projets de moyen terme ou conquérir de nouveaux marchés. Et, bien souvent, les entreprises familiales ont du mal à trouver les partenaires financiers pour les suivre dans ces démarches. C’est aussi ce constat qui m’a conduit, en 2013, à ouvrir un vaste débat sur le financement de long terme en Europe. La consultation que nous avons lancée a fait apparaître de façon frappante l’ampleur des besoins et les difficultés des entreprises dans ce domaine. La voie a été ouverte, mais il faudra aller plus loin et innover si nous voulons sortir de la dictature du court terme qui continue à dominer le secteur financier. Enfin, une troisième priorité : celle de la stabilité fiscale et réglementaire. C’était une des recommandations du remarquable rapport de Louis Gallois en 2012. Elle n’a, hélas, guère été suivie d’effet. Contrairement aux apparences, ce n’est pas une priorité si aisée. Il y a de bonnes raisons pour vouloir simplifier ou moderniser les règles. Bien souvent, la fiscalité reste un des principaux leviers à la disposition des pouvoirs publics pour orienter l’activité économique. Mais le bilan est cruel : celui de normes toujours plus complexes et mouvantes. On le voit à travers sa réflexion sur les entreprises familiales, c’est un débat plus vaste qu’ouvre Cyrille Chevrillon, celui des voies et moyens du développement économique français pour les années à venir. Avec son expérience concrète, sa réflexion approfondie et son absence d’a priori idéologique, il apporte sur le sujet un éclairage et des propositions qui feront date. Michel Barnier, Ancien ministre, vice-président de la Commission européenne (2012-2014) 1 « Go West, young man… » Je suis issu d’une famille très nombreuse où, pour exercer ses talents, il valait mieux écrire, jouer la comédie, composer de la musique ou servir l’Etat. On y trouve des académiciens, des auteurs de théâtre, des écrivains, des philosophes, des historiens, des journalistes, des hauts fonctionnaires, des pilotes de chasse, mais pas le moindre entrepreneur ou commerçant. L’idée de monnayer son travail au-delà de la stricte nécessité paraissait incongrue. Je suis le premier à avoir sauté le pas. Je n’avais pas de talents particuliers, il a donc fallu que je travaille ! J’ai pensé un moment présenter l’ENA, mais un court stage au Bureau C1 du ministère de l’Economie et des Finances m’a vite convaincu que je m’ennuierais au-delà du raisonnable et que l’Administration se lasserait encore plus vite de mon excès de franchise, de mon manque de diplomatie et de mon impatience. Comme beaucoup de ceux qui n’ont pas de vocation affirmée, je me suis tourné vers la banque d’affaires et j’ai passé plus de dix ans dans l’univers financier américain à New York, Londres et Paris. A l’instar de tout bon Américain de 35 ans, j’ai voulu créer ma propre entreprise. En France, en 1991, c’était une révolution. Je l’ai fait en association avec les capitaux d’une famille amie. Cela fait donc vingt-cinq ans que nous investissons dans l’industrie, la distribution, l’agriculture, le matériel médical, l’assurance, les nouvelles technologies. Nous avons permis à de nombreuses start-up de voir le jour et de se développer, à des entreprises déjà existantes de trouver les moyens d’un second souffle. Parallèlement, avec mon collègue, le professeur Oliver Gottschalg1, nous donnons depuis près de dix ans un cours de stratégie et de finance à HEC qui s’intéresse au private equity2 et à la détention des entreprises par les fonds d’investissement. Ce cours, très populaire, nous valut en 2012 la plus haute distinction du CEMS (organisme regroupant les principales universités de management en Europe), qui récompense, dans chaque matière, les cours les mieux notés par les étudiants eux-mêmes. Depuis quelques années, je suis préoccupé, comme beaucoup d’autres, par la destruction accélérée de notre appareil productif, et par la montée inexorable du chômage en France, ce qui n’est pas le cas chez nos principaux voisins européens et notamment l’Allemagne et la Suisse. En partant de mes travaux sur les entreprises détenues par les fonds de private equity, j’ai essayé de comprendre ce qui nous distinguait de nos voisins. La première constatation que j’ai faite, est que le combat des entreprises moyennes, ces fameuses entreprises de taille intermédiaire ou ETI, ne mobilisait pas grand monde. La seconde est que les sociétés françaises se vendent plus qu’ailleurs et que, dans beaucoup de cas, les acheteurs sont des entreprises étrangères ou des fonds de private equity. La France est d’ailleurs l’un des principaux terrains de chasse de ces fonds, alors qu’en Allemagne ou en Suisse, les entreprises se retrouvent très rarement sur le marché et sont généralement préemptés par des familles locales. En creusant la nature de l’actionnariat des entreprises chez nos voisins, je me suis rendu compte que la clé de leur succès résidait dans un actionnariat familial fort, ancré dans sa région d’origine et dévoué corps et âme à son entreprise. « Nos entreprises familiales, c’est notre trésor le plus précieux », me confiait un ami allemand. En France, lorsque l’on dresse la liste des bastions de résistance à notre déclin industriel, les entreprises créées et détenues par une famille viennent en tête. En travaillant sur le sujet à la fois en France et en Europe, en analysant les principales formes d’actionnariat des entreprises, en examinant les filières industrielles et en menant une série d’interviews auprès de patrons ou d’actionnaires d’ETI, j’ai acquis la conviction que l’entreprise familiale et patrimoniale, lorsqu’elle sait à la fois cultiver ses racines et se projeter dans l’avenir, prendre le meilleur de chaque monde – les valeurs familiales d’un côté, des techniques du private equity et des grandes entreprises mondialisées de l’autre –, est le plus puissant vecteur du développement économique de notre pays et qu’il faut chercher à l’encourager par tous les moyens. J’ai conscience que c’est un combat difficile. Les Français aiment la famille mais ont toujours entretenu des relations ambiguës avec l’entreprise. La faute à notre tradition étatique, à une sorte de haine des riches, malheureusement cultivée par certaines de nos élites politiques aujourd’hui encore, et à un sentiment diffus que ce qui est utile à la France ce sont les grandes aventures (coloniales, technologiques, étatiques), dans lesquelles l’entreprise patrimoniale et familiale, presque forcément de taille plus modeste, a toujours eu des difficultés à trouver sa place. Quelle erreur ! En réalité, la grande majorité des entreprises françaises (entre 60 et 70 % selon diverses études) sont des entreprises familiales3. Elles produisent 60 % de la richesse nationale. Elles devraient donc être notre priorité numéro un. L’Etat devrait tout faire pour les préserver, les encourager, favoriser leur développement. Pourtant, dans la France d’aujourd’hui, les salariés ont davantage de droits que dans la majorité des pays développés, les syndicats ont aussi des droits, l’Etat a tous les droits, mais l’entreprise n’a que des devoirs. Elle n’apparaît ni dans la Constitution ni dans le débat politique, si l’on excepte les récentes incantations à « l’amour » des entreprises, qui accouchent la plupart du temps de mesures complexes comme le CICE, dont les effets réels restent à démontrer. Les pages qui sont consacrées à l’entreprise dans le Code civil, le code pénal ou le code fiscal visent presque uniquement à la contrôler, à la brider, comme si elle était dangereuse. Quant aux patrons, lorsqu’ils perdent leur job, ils n’ont même pas droit au chômage, même s’ils ont cotisé pendant des années en tant que salariés. Selon quelle logique accéder à la plus haute fonction d’une entreprise devrait vous mettre à l’écart de la solidarité nationale ? Comment expliquer ce paradoxe ? Si les Français conservent cette méfiance vis-à-vis de l’entreprise, c’est que dans l’inconscient collectif elle est encore le symbole de la lutte des classes. Cette représentation est régulièrement entretenue par les médias, la télévision, le cinéma, qui renvoient encore trop souvent de l’entreprise l’image d’un univers violent, injuste, livré à la cupidité de quelques-uns, où les forts écrasent les faibles. La notion d’entreprise comme aventure collective, source d’épanouissement, de réalisation personnelle, lieu où s’expriment la solidarité, le travail en équipe, la création de richesses matérielles et intellectuelles, l’inventivité, l’action, la découverte, est rarement mise en avant. Ces dernières décennies, l’entreprise familiale n’a pas intéressé grand monde en France. Elle fut souvent associée au passé, décrite comme un lieu d’affrontements et d’appétits égoïstes, identifiée à la seule industrie du luxe, aux dynasties arrogantes (le fameux mythe des 200 familles). La France s’en est remise aux grandes entreprises, aux grands projets, souvent impulsés par l’Etat. Grands et « petits » patrons, champions nationaux et PME/PMI forment encore comme deux mondes séparés, les premiers portant les rêves de grandeur de la France, les seconds considérés comme utiles certes, dignes parfois d’être « aidés », mais jouant tout de même en deuxième division, souvent loin de Paris, de ses sièges sociaux rutilants et des palais de la République. Pendant des décennies, l’Etat a considéré que, sur le plan fiscal, transmettre une entreprise à la génération suivante était un acte de même nature que léguer une maison ou un appartement. Yvon Gattaz qui, le premier, a défendu l’entreprise patrimoniale et familiale en France, se souvient encore de l’une de ses rencontres avec François Mitterrand, en 1983, lorsque le gouvernement avait décidé de doubler d’un coup l’impôt sur les successions, qui passait de 20 à 40 % pour les transmissions les plus importantes. Impossible d’obtenir un assouplissement de cette mesure pour les entreprises, qui rendait brutalement irréalisable la transmission d’un grand nombre d’entre elles. Un non-sens économique qui a coûté cher à notre pays. Entre 1983 et 2001, presque aucune transmission d’entreprise patrimoniale et familiale de taille importante n’a été enregistrée4. Au cours de ces vingt années, d’excellentes entreprises françaises de taille intermédiaire se sont vendues essentiellement à des capitaux étrangers. Résultat : la France compte aujourd’hui environ 4 600 ETI, contre 13 000 en Allemagne et plus de 10 000 en Italie… A cette myopie fiscale et économique des gouvernements de toute tendance politique qui se sont succédé en France ces vingt ou trente dernières années, s’est ajoutée la financiarisation de l’économie, qui a introduit sur le marché des cessions d’entreprises des acteurs nouveaux, des fonds d’investissement et

Description:
Le mythe des « 200 familles » qui s’enrichiraient sur le dos de la collectivité a fait beaucoup de mal à la France. Ce sont aujourd’hui 100.000 familles qui possèdent plus de 80% des entreprises hexagonales et produisent 60% de la richesse nationale. Vision de long terme, solidarité, pére
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