Marcel DÉAT [1894-1955] Agrégé de philosophie, Homme politique français, socialiste, puis néo-socialiste et collaborationniste dans le Gouvernement Vichy. (1939) NOTIONS DE PHILOSOPHIE SOCIOLOGIE Un document produit en version numérique par Thierry Rogel, bénévole, Professeur agrégé de sciences économiques et sociales au lycée Descartes de Tours en France Courriel: [email protected] Page Web dans la section BÉNÉVOLES. Page Web dans la sections : AUTEURS CONTEMPORAINS. Dans le cadre de: "Les classiques des sciences sociales" Une bibliothèque numérique fondée et dirigée par Jean-Marie Tremblay, professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi Site web: http://classiques.uqac.ca/ Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.ca/ Marcel Déat, Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. (1939) 2 Politique d'utilisation de la bibliothèque des Classiques Toute reproduction et rediffusion de nos fichiers est interdite, même avec la mention de leur provenance, sans l’autorisation for- melle, écrite, du fondateur des Classiques des sciences sociales, Jean-Marie Tremblay, sociologue. Les fichiers des Classiques des sciences sociales ne peuvent sans autorisation formelle: - être hébergés (en fichier ou page web, en totalité ou en partie) sur un serveur autre que celui des Classiques. - servir de base de travail à un autre fichier modifié ensuite par tout autre moyen (couleur, police, mise en page, extraits, support, etc...), Les fichiers (.html, .doc, .pdf, .rtf, .jpg, .gif) disponibles sur le site Les Classiques des sciences sociales sont la propriété des Classi- ques des sciences sociales, un organisme à but non lucratif com- posé exclusivement de bénévoles. Ils sont disponibles pour une utilisation intellectuelle et personnel- le et, en aucun cas, commerciale. Toute utilisation à des fins com- merciales des fichiers sur ce site est strictement interdite et toute rediffusion est également strictement interdite. L'accès à notre travail est libre et gratuit à tous les utilisa- teurs. C'est notre mission. Jean-Marie Tremblay, sociologue Fondateur et Président-directeur général, LES CLASSIQUES DES SCIENCES SOCIALES. Marcel Déat, Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. (1939) 3 Cette édition électronique a été réalisée par Thierry Rogel, bénévole, Profes- seur agrégé de sciences économiques et sociales au lycée Descartes de Tours en France, à partir du livre de : Marcel DÉAT [1894-1955] Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. Paris : Librairie Félix Alcan, 2e édition, 1939. Collection : Nouvel- le encyclopédie philosophique. Polices de caractères utilisée : Pour le texte: Times New Roman, 14 points. Pour les notes de bas de page : Times New Roman, 12 points. Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Microsoft Word 2008 pour Macintosh. Mise en page sur papier format : LETTRE US, 8.5’’ x 11’’. Édition numérique réalisée le 20 mai 2013, revue le 26 mais 2013 à Chicoutimi, Ville de Saguenay, Québec. Marcel Déat, Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. (1939) 4 REMARQUE Ce livre est du domaine public au Canada parce qu’une œuvre pas- se au domaine public 50 ans après la mort de l’auteur(e). Cette œuvre n’est pas dans le domaine public dans les pays où il faut attendre 70 ans après la mort de l’auteur(e). Respectez la loi des droits d’auteur de votre pays. Marcel Déat, Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. (1939) 5 Marcel DÉAT [1894-1955] Agrégé de philosophie, Homme politique français, socialiste, puis néo-socialiste et collaborationniste dans le Gouvernement Vichy. Notions de philosophie. SOCIOLOGIE Paris : Librairie Félix Alcan, 2e édition, 1939. Collection : Nouvel- le encyclopédie philosophique. Marcel Déat, Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. (1939) 6 Table des matières Avant-propos [vii] Chapitre I. La naissance de la sociologie [1] 1. Les précurseurs [1] 2. Les fondateurs [5] 3. Les réalisateurs [10] Chapitre II. La science sociale [27] 1. L’objet [27] 2. La méthode [33] 3. Le programme de travail [42] Chapitre III. Les sociologues au travail [45] 1. Morphologie sociale [45] 2. Origines de la civilisation [48] 3. Sociologie domestique [51] 4. Sociologie politique [53] 5. Sociologie juridique [56] 6. Sociologie morale [59] 7. Sociologie religieuse [64] 8. Sociologie économique [69] 9. Sociologie esthétique et linguistique [71] Chapitre IV. Les problèmes en suspens [78] 1. Sociologie et philosophie [78] 2. Le problème de la connaissance [81] 3. Le problème de l’action [81] Conclusions [95] Marcel Déat, Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. (1939) 7 [vii] Notions de philosophie. SOCIOLOGIE AVANT-PROPOS Retour à la table des matières Ce petit livre a pour but de mettre sous les yeux des élèves de philosophie, des étudiants et du public, un tableau suffisamment exact et complet de ce qu'est à l'heure actuelle la sociologie. Pour cela le plan à suivre était tout indiqué : comment est née la sociologie, ce qu'elle est en tant que science, quels résultats sont dès maintenant ac- quis, enfin quels problèmes restent posés. En somme, d'où vient la sociologie, où elle en est, ou elle va. Nous avons quelque peu insisté sur la formation et le dévelop- pement de la méthode, puisque aussi bien les candidats au baccalau- réat de Philosophie ont surtout à se placer à ce point de vue. Cela n'enlève pas leur intérêt à ces questions. Le peu de place dont nous disposons ne nous a pas permis d'entrer dans plus de détails concrets en ce qui concerne les travaux sociologiques. Du moins croyons- nous avoir indiqué l'essentiel et orienté la curiosité du lecteur. Il nous a paru bon enfin de nous arrêter quelque peu sur les difficultés non encore résolues, justement parce qu'elles sont d'ordre philoso- phique, et que les élèves retrouvent à chaque instant les thèses socio- logiques, tant en psychologie qu'en morale. Les indications qu'ils Marcel Déat, Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. (1939) 8 pourront puiser ici gagneront à ne pas être trop séparées de l'ensem- ble du cours. [viii| Ces Notions de Sociologie ne font pas double emploi avec d'assez nombreux manuels dont l’inscription de la sociologie au programme des Écoles normales primaires a provoqué l'apparition. Les auteurs y considèrent en effet la sociologie moins en elle-même que dans ses rapports avec l'éducation morale. Non seulement d'ail- leurs ce court volume ne prétend pas remplacer les autres, mais il est une invitation au travail personnel, à la lecture d'ouvrages plus étendus et plus spéciaux. À ce titre, nous recommandons de compléter les indications bibliographiques données chemin faisant par celles contenues dans le Guide de l'étudiant en sociologie que nous avons composé en collaboration avec notre excellent maître et ami, M. Cé- lestin Bouglé. M.D. Marcel Déat, Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. (1939) 9 [1] Notions de philosophie. SOCIOLOGIE Chapitre I LA NAISSANCE DE LA SOCIOLOGIE § 1. - LES PRÉCURSEURS Retour à la table des matières La réflexion sur la réalité sociale, au sens large, date de loin, mais la sociologie, comme science positive, est d'hier. Cela tient à ce que rien n'est plus intéressant pour l'homme que l'homme lui-même et le milieu où il vit, rien aussi de plus difficile à considérer d'une vue exempte de passions et de préoccupations pratiques. C'est pourquoi il convient de citer d'abord la lignée des réforma- teurs sociaux issus de Platon. Celui-ci, ayant conçu l'âme humaine comme tripartite (désir, coeur, raison), ramène la morale à trois vertus principales (tempérance, courage, sagesse), et sa République à trois castes (artisans, guerriers, magistrats ou philosophes). Il aboutit à un communisme d'État. Ainsi l'utopie naît du souci métaphysique. À pei- ne si, dans les Lois, se dessine un acheminement progressif vers les considérations de fait. Marcel Déat, Notions de philosophie. SOCIOLOGIE. (1939) 10 Aristote parait d'abord beaucoup plus près du réel. Il rassemble des documents sur les diverses constitutions politiques. Il écrit la formule fameuse : « L'homme est un animal politique », c'est-à-dire [2] socia- ble et qui, en forçant un peu le sens des mots, pourrait servir d'épigra- phe à la sociologie contemporaine. Sans aller jusqu'à dire qu'en pro- clamant pour l'homme la nécessité de la vie sociale, sous peine de ne plus être l'homme, Aristote a devancé les thèses de Durkheim, il y a tout de même chez lui un empirisme salutaire et un certain naturalis- me, mais pénétré de finalité et systématique jusque dans ses compro- mis : au lieu d'une perfection ascétique, il s'agit de réaliser le bon- heur ; à part cela, sa Politique est encore d'un disciple de Platon. Le christianisme ajoute peu de chose aux vues des deux grands philosophes. Saint Augustin (354-430), avec son De civilate Dei, an- nonce pourtant à certains égards le Discours sur l'Histoire universelle de Bossuet. Il ne faut pas sous-estimer ce commencement de systéma- tisation : la théologie de l'histoire prépare la philosophie de l'histoire. Citons pour mémoire les écrivains d'inspiration foncièrement pla- tonicienne : Thomas Morus (1478-1535) et son Utopie au nom généri- que ; Campanella (1568-1639) et sa Cité du Soleil. Citons aussi Féne- lon et son rêve d'une Salente vertueuse (Télémaque, 1699), puis toute la série des théoriciens sociaux du XVIIIe siècle : Mably, Morelly et son Code de la Nature, où l'influence de Locke rejoint celle de Platon, Brissot, le curé Meslier, l'anglais Godwin, l'abbé de Saint-Pierre, en- fin Babeuf, qui paie de sa vie sa passion égalitaire. À partir de la Renaissance, la réflexion se leste peu à peu de ré- alisme. Cela est sensible d'abord chez les politiques, comme Machia- vel (1469-1527), puis chez les juristes, comme Jean Bodin, Allhusius, Grotius, Pufendorff, qui, dès le XVIe et le XVIIe siècles [3] élaborent, concurremment avec les théologiens protestants, comme Melanchlon, la théorie du droit naturel. Et l'on ne saurait passer sous silence l'in- fluence d'un Rabelais, d'un Montaigne, ni même la rhétorique d'un La Boétie. Parallèlement, les philosophes anglais surtout se tournent vers l'empirisme. Bacon, le chef du choeur, déclare expressément que la méthode expérimentale doit s'étendre à la morale et à la politique. Hobbes, dans son De Cive et son Leviathan, pousse l'empirisme dans le sens d'un déterminisme matérialiste, et construit une théorie de l'ab-