François Guizot (1787-1874) PROFESSEUR À LA SORBONNE, DÉPUTÉ ET MINISTRE (1838) Histoire générale de la civilisation en Europe depuis la chute de l’empire romain jusqu’à la Révolution française précédée d’un discours sur l’histoire de Belgique par le Baron de Reiffenberg lu à l’Académie de Bruxelles le 4 février 1836. Un document produit en version numérique par Gustave Swaelens, bénévole, Journaliste belge à la retraite, Suisse Courriel: [email protected] Dans le cadre de la collection: "Les classiques des sciences sociales" Site web: http://www.uqac.ca/Classiques_des_sciences_sociales/ Une collection développée en collaboration avec la Bibliothèque Paul-Émile-Boulet de l'Université du Québec à Chicoutimi Site web: http://bibliotheque.uqac.ca/ François Guizot, Histoire générale de la civilisation en Europe... (1838) 2 Cette édition électronique a été réalisée par Gustave Swaelens, bénévole, Journaliste belge à la retraite, Suisse. Courriel: [email protected] à partir de : FRANÇOIS GUIZOT [1787-1874], (professeur à la Sorbonne, député et ministre) Histoire générale de la civilisation en Europe depuis la chute de l’empire romain jusqu’à la Révolution française. (1838) précédée d’un discours sur l’histoire de Belgique par le Baron de Reiffenberg lu à l’Académie de Bruxelles le 4 février 1836. Bruxelles : Lacrosse, Libraire-Éditeur, 1838, 387 pp. Polices de caractères utilisée : Pour le texte: Times New Roman 14 points. Pour les citations : Times New Roman 12 points. Pour les notes de bas de page : Times New Roman 12 points. Édition électronique réalisée avec le traitement de textes Microsoft Word 2004 pour Macintosh. Mise en page sur papier format : LETTRE (US letter), 8.5’’ x 11’’) Édition complétée le 29 novembre 2005 à Chicoutimi, Ville de Sa- guenay, province de Québec, Canada. François Guizot, Histoire générale de la civilisation en Europe... (1838) 3 Table des matières Orthographe modernisé, Jean-Marie Tremblay Avertissement à l’édition numérique Avertissement de l’éditeur, 1838 Discours sur l’Histoire de Belgique par le Baron Reiffenberg, 1836 Histoire générale de la civilisation en Europe Leçon I Histoire de la civilisation européenne Leçon II Unité de la civilisation ancienne Leçon III Tous les divers systèmes prétendent à la légitimité Leçon IV Alliance nécessaire des faits et des doctrines Leçon V La religion est un principe d'association Leçon VI Séparation des gouvernants et des gouvernés dans l'Eglise Leçon VII Tableau comparatif de l'état des Communes au XIIe et au XVIIIe siècle Leçon VIII Coup-d'oeil sur l'histoire générale de la civilisation eu- ropéenne Leçon IX Rôle important de la royauté dans l'histoire de l'Europe, dans l'histoire du monde Leçon X Tentatives pour concilier et faire vivre et agir en com- mun, dans une même société, sous un même pouvoir central, les divers éléments sociaux de l'Europe mo- derne Leçon XI Caractère particulier du 15e siècle Leçon XII Difficulté de démêler les faits généraux dans l'histoire moderne Leçon XIII Caractère général de la révolution d'Angleterre Leçon XIV Différence et ressemblance entre la marche de la civili- sation de l'Angleterre et celle du continent François Guizot, Histoire générale de la civilisation en Europe... (1838) 4 FRANÇOIS GUIZOT [1787-1874], (professeur à la Sorbonne, député et ministre) Histoire générale de la civilisation en Europe depuis la chute de l’empire romain jusqu’à la Révolution française. précédée d’un discours sur l’histoire de Belgique par le Baron de Reiffenberg lu à l’Académie de Bruxelles le 4 février 1836. Bruxel- les : Lacrosse, Libraire-Éditeur, 1838, 387 pp. François Guizot, Histoire générale de la civilisation en Europe... (1838) 5 Orthographe modernisé Par Jean-Marie Tremblay, sociologue Pour faciliter la lecture du texte, nous avons modernisé certains mots. La liste apparaît ci-dessous : Retour à la table des matières Orthographe original Orthographe modernisé Saint-siége Saint-siège Privilége Privilège Diadême Diadème Poëte Poète Assujétie Assujettie Sacrilége Sacrilège Patriarchale Patriarcale Coërcitif Coercitif Collége Collège Avénement Avènement François Guizot, Histoire générale de la civilisation en Europe... (1838) 6 Avertissement à l’édition numérique Retour à la table des matières Ce texte est constitué par une série de conférences données en 1836 à l'Académie de Bruxelles sur le thème de la civilisation euro- péenne, par l'homme d'Etat et historien français, François Guizot (1787-1874). Il est précédé de considérations méthodologiques sur l'histoire de la Belgique, par le Baron de Reiffenberg. This text reproduces a series of lectures on the history of civilisa- tion in Europe, given in 1836 to the Académie de Bruxelles by the French historian and statesman, François Guizot (1787-1874). It is preceeded by a lecture by Baron de Reiffenberg on the methodology of the history of Belgium. François Guizot, Histoire générale de la civilisation en Europe... (1838) 7 Avertissement de l'éditeur. 1838 Retour à la table des matières Depuis longtemps nos presses ont été spécialement consacrées aux ouvrages historiques. En 1822, abandonnés à nos propres forces, nous avions commencé une collection de chroniques nationales qui devait être très volumineuse; Jacques Du Clercq, et Van der Vynckt avaient paru, lorsque le gouvernement comprit qu'à lui seul appartenait de mener à fin une si vaste entreprise. En renonçant à un projet qui nous était cher et qui nous avait coûté d'assez grands sacrifices, nous conti- nuâmes néanmoins de marcher dans la voie que nous nous étions tra- cée. Laissant à nos confrères la littérature facile, leur abandonnant vo- lontiers le roman et le drame, nous nous appliquâmes à reproduire les oeuvres plus sévères des Barante, des Augustin Thierry, des Mignet, des Ségur, etc. Lorsque nous avions voulu mettre au jour les principaux mémoires inédits relatifs à la Belgique, nous avions invoqué le secours d'un sa- vant qui consacre toute sa vie à l'étude de son pays. Il se rendit à notre appel avec empressement, sans aucune vue de spéculation ni d'intérêt personnel; car, personne n'osera le nier, il n'a jamais cultivé les lettres que pour elles seules. C'est encore à lui que nous avons emprunté le discours qui précède ce volume et qui rattache, en quelque sorte, l'ou- vrage de M. Guizot à la Belgique. N'était-il pas d'ailleurs naturel d'as- socier le disciple au maître? Dans les deux écrivains ce sont, en effet, les mêmes principes et souvent une manière pareille. François Guizot, Histoire générale de la civilisation en Europe... (1838) 8 M. Guizot avait entrepris de retracer le cours de la civilisation eu- ropéenne, depuis la chute de l'Empire romain et l'invasion des Barba- res jusqu'à notre propre temps. Il a tour à tour passé en revue les prin- cipaux éléments de la société moderne, savoir: l'aristocratie féodale, l'église, les communes et la royauté. Il a observé leur développement successif ou parallèle, et les métamorphoses qu'ils ont subies à travers les siècles. Il a recherché quel avait été, dans chacun de ces éléments, le contre-coup des grands événements qui ont changé la face du monde, tels que les croisades, la révolution religieuse du seizième siè- cle, la révolution d'Angleterre au dix-septième. Il a décrit avec un soin particulier cette fusion secrète, cette transformation intérieure qui, dis- solvant peu à peu tous les éléments du moyen âge longtemps en guerre, a enfin partagé les sociétés modernes en deux grandes forces, les peuples et les gouvernements. Le tableau du règne de Louis XIV et de sa lutte prolongée contre Guillaume III, celui du dix-huitième siè- cle en France, toujours le centre et le foyer de la civilisation euro- péenne, ont surtout frappé les esprits. Ce n'est pas en quelques lignes que nous pouvons faire apprécier le mérite de ces leçons; le prodi- gieux empressement du public à les entendre et à les lire nous en dis- pense pleinement. * * * François Guizot, Histoire générale de la civilisation en Europe... (1838) 9 Discours sur l'histoire de Belgique par le Baron Reiffenberg Ce discours a été lu à l'Académie de Bruxelles le 4 février 1836 Retour à la table des matières On peut avancer, sans crainte d'être accusé d'erreur, qu'aujourd'hui la littérature se réduit à l'histoire et au drame, au drame en récit dans un livre, au drame en action sur les planches d'un théâtre; encore pour captiver l'intérêt, pour attirer la foule, est-il obligé d'adopter une cou- leur historique; de sorte qu'à tout prendre l'histoire domine presque seule sur ce que naguères on appelait encore le Parnasse. Doit-on s'en étonner? à une époque positive comme la nôtre les fic- tions ne sauraient plaire qu'en se calquant le plus possible sur la réali- té. D'ailleurs l'histoire ne connaît plus de privilèges. Jadis on n'y ins- crivait que les personnages éminents; pour y être admis, il fallait un grand nom ou un diadème: on y montait comme dans les carrosses du roi, un certificat de d'Hozier à la main. Maintenant le peuple a re- conquis sa place dans l'histoire; il est reconnu que c'est lui surtout qui François Guizot, Histoire générale de la civilisation en Europe... (1838) 10 la fait, et chacun, conversant avec le passé, y trouve ce charme qui est cause, suivant l'auteur des Maximes, que deux amants ne se lassent jamais d'être ensemble, attendu qu'ils ne parlent que d'eux-mêmes. Les uns, se bornant à satisfaire leur curiosité, cherchent des détails piquants, des situations intéressantes, des rapprochements singuliers; les autres, plus graves, demandent aux temps qui ne sont plus, la règle du présent, la prévision de l'avenir. Tous remuent la poussière des siè- cles. Voyez ces jeunes écrivains: comme ils s'empressent, comme ils disputent de zèle et d'activité! Ils fouillent, ils creusent, ils minent. Les abîmes les plus profonds, ils s'y engloutissent avec joie; le fardeau le plus lourd, ils le réclament; la fatigue la plus rude, ils l'ambitionnent. Heureuse intrépidité! louable émulation! Néanmoins en applaudissant à ces efforts, je ne puis me défendre d'un vif regret, ni dissiper une crainte sérieuse. C'est que les études historiques ne prennent une di- rection trop matérielle et exclusivement mécanique. Sans doute il est indispensable de puiser aux sources: désormais les erreurs convenues, les croyances illégitimes ne doivent plus avoir cours. Mais parce qu'il est profitable de recueillir d'antiques docu- ments, parce qu'on a su gré à des hommes patients et laborieux d'avoir rassemblé, éclairci, commenté des diplômes, des chartes, des chroni- ques, et ressuscité les premiers essais de la poésie moderne, est-ce là l'unique carrière à parcourir? ces travaux ont-ils le droit d'absorber toute l'activité de l'entendement et d'être considérés comme la plus haute occupation de l'esprit? Non, certes, et si une pareille infatuation venait à triompher, on en déplorerait bientôt les funestes conséquen- ces. D'abord les facultés les plus énergiques de l'esprit humain seraient condamnées au sommeil et à l'immobilité. Trompées par des succès faciles, de fraîches et vigoureuses imaginations laisseraient passer le temps de l'inspiration et de la verve; la puissance créatrice cèderait le pas à l'industrie subalterne de l'investigateur, l'accessoire l'emporterait sur le principal, le maçon sur l'architecte, le tailleur de pierres sur le statuaire.