POCHES ODILE JACOB LE GÈNE ÉGOÏSTE RICHARD DAWKINS LE GÈNE ÉGOÏSTE Traduit de l'anglais par lAura Ovion Traduction autorisée de The Selftsh Gene © OXFORD UNIVERSITY PRESS, 197 6 © RICHARD DAWKINS, 1989 pour la seconde édition Pour la traduction française : © ARMAND COLIN ÉDITEUR, 1990 © ÛDILE JACOB, 1996, MARS 2003 15, RUE SOUFFLOT, 75005 PARIS ISSN : 1621-0654 ISBN: 978-2-7381-1243-9 Le Code de la propriété intellectuelle n'autorisant, aux termes de l'article L. 122-5, 2° et 3o a, d'une part, que les " copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective ,. et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustra tion, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droits ou ayants cause est illicite " (art. L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. Préface à l'édition de 1976 D faudrait p~e lire ce livre comme s'il s'agissait de science fiction. n est destiné à faire appel à l'imagination du lecteur. Cependant, il ne s'agit pas de science-fiction, mais de science tout court. Que ce soit ou non un cliché, l'expression « la réalité dépasse la fiction • résume exactement ce que je ressens lorsque l'on parle de la vie réelle. Nous sommes des machines à survie - des robots programmés à l'aveugle pour préserver les molécules égoïstes connues sous le nom de gènes. ll s'agit d'une vérité qui me remplit encore d'étonnement. Bien que je la connaisse depuis des années, je n'arrive toujours pas à m'y habituer complètement. L'une de mes ambitions est de parvenir à en étonner d'autres. Trois lecteurs imaginaires regardaient par-dessus mon épaule lorsque j'écrivais ce livre et c'est à eux que je le dédie à présent. D'abord, le profane, pour lequel j'ai presque totalement évité le jar gon technique-et là où il m'a fallu utiliser des mots spécialisés, j'en ai donné une définition. Je me demande à présent pourquoi nous ne supprimons pas également la plus grande partie de notre jargon des revues spécialisées. rai fait l'hypothèse que le profane n'avait pas de connaissances particulières du domaine, mais je n'ai pas supposé qu'il était stupide. N'importe qui peut vulgariser la science en la simplifiant trop. Je me suis efforcé par contre de vul gariser des idées plus subtiles et plus compliquées en les tradui sant en des termes non mathématiques, sans que pour autant elles 8 LE G:IDŒ. tGOISTB perdent leur essence. Je ne sais pas à quel point j'y suis parvenu, ni à quel point j'ai réalisé une autre de mes ambitions: essayer de rendre ce livre aussi amusant et passionnant que le sujet dont il traite le mérite. Cela fait longtemps que je pense que la biologie devrait sembler aussi excitante qu'un roman d'aventures plein de mystères, car c'est exactement ce qu'elle est. Je n'ose pas penser que j'ai réussi à faire passer plus qu'une fraction minuscule de l'excitation que cette matière peut provoquer. Le spécialiste était mon deuxième lecteur imaginaire. n s'est révélé un critique acerbe, ayant le souffle coupé devant certaines de mes analogies et figures de style. Ses expressions favorites sont «à l'exception de», «par contre», et «pouah!». Je l'ai écouté attentivement et j'ai même réécrit complètement un chapitre dans le sens qu'il exigeait, mais à la fin il a fallu que j'écrive cette his toire à ma manière. Le spécialiste ne sera pas encore satisfait de la façon dont j'ai expliqué les choses. Pourtant, mon plus grand espoir est que même lui y trouve quelque chose de nouveau; une nouvelle manière d'envisager des idées communes, peut-être; et même, pourquoi pas? un nouveau point de départ pour ses propres idées. S'il s'agit d'une aspiration trop élevée, puis-je au moins espérer que ce livre lui fasse passer un moment agréable lorsqu'il prendra le train? Le troisième lecteur que j'avais en tête était l'étudiant, qui fait en quelque sorte la transition entre le profane et le spécialiste. S'il ne s'est pas encore fait une idée du domaine dans lequel il veut se spé cialiser, j'espère l'avoir encouragé à considérer la zoologie d'un n autre œil. y a une autre raison d'étudier la zoologie que sa pos sible c utilité » et l'amour des animaux. Cette raison est que nous, animaux, sommes les machines les plus compliquées et les mieux conçues qui existent dans l'univers connu. Dit de cette façon, il est . difficile de voir pourquoi les gens étudient d'autres matières! Pour l'étudiant qui s'est déjà engagé en zoologie, j'espère que mon livre n lui sera utile. lui faudra reprendre les articles originaux et les livres techniques sur lesquels s'appuie mon exposé. S'il trouve que les sources originales sont difficiles à digérer, peut-être mon inter prétation non mathématique pourra-t-elle l'aider comme une introduction ou une pièce complémentaire. PRÉPAŒ À L'~DmON DE 1976 9 Essayer de s'adresser à trois types différents de lecteurs présente des écueils évidents. Tout ce que je peux dire, c'est que j'en ai été très conscient, mais le défi que cela représentait l'a emporté sur ces inconvénients. Je suis éthologue et ce livre traite du comportement animal. Ce que je dois à la tradition éthologique dans le cadre de laquelle je fis mes études sera évident. En particulier, Niko Tinbergen ne se rend pas compte de l'influence qu'il a exercée sur moi durant les douze années pendant lesquelles j'ai travaillé avec lui à Oxford. L'expression« machine à survie •, bien que n'étant pas la sienne, aurait pu l'être. Mais l'éthologie a récemment pris un « coup de jeune • avec l'invasion d'idées fraîches provenant de sources qui ne sont pas habituellement considérées comme éthologiques. Ce livre est largement fondé sur ces nouvelles idées. Leurs auteurs sont cités aux endroits appropriés dans le texte; les plus grands sont G. C. Williams, J. Maynard Smith, W. D. Hamilton et R. L. Trivers. Différentes personnes ont suggéré des titres pour ce livre et je les ai utilisés avec reconnaissance comme titres de chapitres: « Spirales immortelles », John Krebs; « La machine génique », Desmond Morris;« La parenté génétique •, Tim Clutton-Brock et Jean Dawkins, et je présente en plus toutes mes excuses à Stephen Potter. Les lecteurs imaginaires peuvent servir de cibles pour des vœux pieux ou des aspirations, mais ils sont moins pratiques que les lec teurs et critiques bien réels. Je suis un maniaque de la relecture et Marian Dawkins a été mise à rude épreuve lorsqu'il lui a fallu lire et relire de nombreux brouillons de chaque page. Sa connaissance considérable en matière de littérature biologique et sa compréhen sion des questions théoriques, en même temps que ses encourage ments et son soutien moral sans faille, m'ont été essentiels. John n Krebs lut également le livre quand il n'était qu'un brouillon. en sait plus que moi sur le sujet et s'est montré généreux en conseils et suggestions. Glenys Thomson et Walter Bodmer ont critiqué gentiment et fermement ma façon d'exposer les sujets sur la géné tique. J'ai peur que ma nouvelle version ne les ait pas plus satis faits; toutefois, j'espère qu'ils l'auront trouvée un petit peu meil-