Jamais republié dans son intégralité depuis 1853, mais constamment édité dans des versions amputées en France et dans le monde, Le Coureur des bois a influencé en profondeur l’imaginaire européen de l’Amérique au XIXe siècle. Aujourd’hui tombé dans l’oubli, Gabriel Ferry jouit à l’époque d’une réputation encore plus grande que celle de Gustave Aimard, l’autre grande référence du récit de l’Ouest à la française. Il compose dans ce Coureur des bois une fresque romanesque riche en coups de théâtre et en poursuites échevelées, utilisant les paysages mexicains encore méconnus pour en faire le décor d’une sorte d’opéra grandiloquent de l’Amérique sauvage, avec enfants perdus, conspirations, drames personnels sur fond de foules bariolées, luttes sans merci des chercheurs d’or contre les Indiens et voyage le long du fleuve Colorado… Dans la grande tradition du roman-feuilleton, il nous fait ainsi découvrir un Mexique inconnu, parce qu’il l’associe à la tradition du romantisme espagnol, loin des relectures américaines qui s’imposeront par la suite, et son Coureur des bois n’est ainsi pas un « cow-boy », mais un sang-mêlé, mi Canadien, mi-indien, qui fait le lien entre la « vieille » Europe et les « sauvages »…