1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 LE CAPITAL DU MÊME AUTEUR AUX ÉDITIONS LES BELLES LETTRES -Lettre à Luc Ferry sur la liberté des universités, 2004 -Édition des Sophismes économiques de Frédéric Bastiat, précédée d'une introduction intitulée« Frédéric Bastiat et les fondements économiques de l'analyse économique», 2005 -Édition du Parti libéral, son programme et son avenir (1863) et de La Liberté d'enseignement et les projets de M Jules Ferry (1880) d'Édouard Laboulaye, précédée d'une introduction intitulée « Libé ralisme et république», 2007 - Édition préfacée des Pamphlets de Frédéric Bastiat, 2009 À PARAÎTRE - Le Capital II Le Mythe du capitalisme - Le Capital III Théologie du capital - Le Capital IV Être et capital :pour une philosophie de l'avoir MICHEL LETER LE CAPITAL 1 L'invention du capitalisme PARIS LES BELLES LETTRES 2015 www.lesbelleslettres.com Retrouvez Les Belles Lettres sur Facebook et Twitter. Tous droits de traduction, de reproduction et d'adaptation réservés pour tous les pays. © 2015, Société d'édition Les Belles Lettres, 95, boulevard Raspail, 75006 Paris. ISBN: 978-2-213-44521-2 ANTHROPOLOGIE DU CAPITAL L'HOMME SANS CAPITAL Imaginer l'homme sans capital, c'est le concevoir sans projet, c'est le priver de destin. L'homme sans qualités de Musil n'était pas aussi démuni, au moins possédait-il quelques talents. Contre les doctrinaires, qui soutiennent que la richesse est fatale et que le travail est un droit, le médecin de Madame de Pompadour, François Quesnay, enseignait que << nul travail ne peut être effectué sans des avances préalables 1 >>. Ces avances ne se bornent pas à la sphère économique. Elles ont trait à la constitution de l'homme. De même que<< l'enfant a reçu la nourriture de ses parents avant de la chercher2 >>,l'homme doit grandir avant de prétendre participer à la croissance de l'humanité. Si les hommes renonçaient à former le capital et donc campaient dans ce socialisme sauvage qui consiste à ne recueillir que les bénéfices de leur travail présent, on se 1. Maximes de Quesnay citées par Dupont de Nemours in Œuvres oe, économiques et philosophiques de Quesnay, Paris, Jules Peelman & 1888, p. 803. 2. Ibid. 10 ANTHROPOLOGIE DU CAPITAL dispenserait de semer, on renoncerait à bâtir, on négligerait d'éduquer. En consommant toute production sur pied, en croquant cette ombre de richesse qu'est le revenu, on n'offrirait plus rien, on· manquerait de tout et toute demande serait vaine. En somme,<< le capital, c'est l'homme>>, comme le résu mera avec bonheurY ves Guyot avant d'ajouter<< augmenté de tous les agents naturels qu'il a soumis à son usage3 >>. Il faut qu'une parabole nous le rappelle, le capital est ce talent qui n'est rien si l'homme n'est pas libre de le cultiver. Comme l'illustre avec éclat l'acte d'habeas corpus de 1679, le premier capital de l'homme n'est autre que son propre corps. Aussi, l'esclavage qui donne pour capital la possession du corps d'autrui est étranger à l'esprit du capital. Cette évidence est cependant trop flagrante pour dissuader les doctrinaires d'aller chercher dans l'esclavage les racines du capitalisme. Tout homme, pourvu qu'il ne soit pas dépossédé de lui-même, est donc capitalien. Il ne lui manque que la liberté d'exercer ses facultés pour devenir capitaliste ... mais qui veut être libre dans un monde où le principal soin des oligarques est d'entretenir le mythe de l'homme sans capital ? << L'homme pré-capitaliste, nous assure l'universitaire antisémite Werner Sombart- qui restera dans les annales pour avoir élevé le capitalisme à la dignité d'objet scientifique-, c'est l'homme naturel, 3.Y. Guyot,<< La Tyrannie socialiste>> (1893) in La 'ljrrannie collectiviste, préfacée par P. Nataf, Les Belles Lettres, 2005, p. 48. On songe naturellement ici au mot fameux de Buffon<< le style c'est l'homme>>. Dans son opus majus, La Science économique (1881), Yves Guyot s'était limité à une définition strictement économique du capital. La prise en compte de la dimension anthropologique du capital vient sans doute du fait qu'Yves Guyot, romancier à ses heures, est sans doute un des rares économistes à avoir mesuré la portée de l'analyse littéraire esquissée par Bastiat dans son article<< Métaphores>> des Sophismes économiques.
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