Description:Il était parvenu à deux reprises à passer ses grosses mains tavelées de taches hépatiques sur le bas des reins de Lise. La première fois, elle en avait ressenti un dégoût disproportionné et, si elle ne s’était pas contrôlée, elle lui aurait cassé sur la tête la carafe d’eau qu’elle tenait à la main. La fois suivante, elle lui avait décoché un coup de coude dans les côtes qui avait dû être douloureux, car le vieux maquereau n’avait pu s’empêcher de grimacer en exhibant ses trois dents en or.Malika, la petite Maghrébine collègue de travail de Lise, avait raconté que Vauquelin lui avait proposé sa chevalière en échange d’une fellation.— S’il apprenait une chose pareille, mon mari le tuerait, avait haleté Malika en tremblant de tous ses membres.Après un tel incident, elle qui se recoiffait de son foulard islamique dès qu’elle mettait le pied hors des Myriadines, elle ne devait pas être loin de penser qu’elle travaillait dans une succursale de l’enfer. Cela ne l’empêchait pas d’accomplir sa tâche à la perfection et de se montrer très agréable en toute circonstance. Lise appréciait sa compagnie, tout comme celle de Joséphine Pajon. Heureusement qu’il y avait ces deux-là pour répandre un peu de lumière dans cet établissement lugubre.Leufroy Nox – comment pouvait-on porter un nom de baptême pareil associé à un patronyme si peu ordinaire ? – était probablement d’une trempe égale à celle de Vauquelin, mais il se montrait beaucoup plus réservé, économisant autant ses gestes que ses paroles. Il n’en était pas moins inquiétant lui aussi, surtout quand on savait qu’il avait présidé à la destinée d’une secte qui s’était retrouvée soupçonnée d’avoir pratiqué des sacrifices humains.« Ce ne sont que des ragots, chuchotait une petite voix à l’oreille de Lise lorsqu’elle se mettait à penser à ce genre de choses. Bob Vauquelin n’a sûrement jamais atteint dans le banditisme l’envergure qu’on lui prête et l’énigmatique Nox n’est sans doute qu’un curé manqué qui n’a jamais fait de mal à une mouche. »