L’Art de l’Inde

257 Pages·2012·94.226 MB·French

by  Vincent Arthur Smith

Vincent Arthur Smith
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Vincent A. Smith
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ISBN : 978-1-78160-299-7
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Sommaire
L’Inde et son art 7
La Période Maurya 25
L’Antiquité 31
Architecture 31
Sculpture 39
Les Périodes Kushan, Satavahna tardive et Ikshvaku 63
Mathura 63
Amaravati 72
La Période Gupta 79
La Période médiévale dans l’Inde du Nord 91
Architecture : les temples-grottes et les temples 91
Sculpture : objets médiévaux et modernes 104
Peinture : les premières écoles (grottes d’Ajanta) 117
La Période médiévale dans l’Inde du Sud 149
Architecture 149
Sculpture et bronzes 158
Les Influences étrangères : les périodes pré-médiévale et médiévale 169
La Période islamique 179
Les Styles indo-islamiques en architecture 179
Arts décoratifs et arts mineurs indo-islamiques 195
Pièces, pierres précieuses et cachets 195
Calligraphie et reliefs décoratifs 196
Claires-voies 200
Marqueterie et mosaïque 203
Carreaux 204
Les Styles indo-islamiques en peinture 211
La Peinture gujarati 211
La Peinture moghole 212
La Peinture Rajput 236
La Période moderne : la peinture 239
Chronologie 246
Glossaire 248
Bibliographie 250
Liste des illustrations 252
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L’Inde et son art
L’
art ne peut pas être confiné, pour le moins tant que les créative et l’appréciation amicale furent la pierre angulaire d’une
sciences humaines sur lesquelles notre culture est basée critique plus précise que la logique de l’archéologie et d’autres
ont une signification. De nos jours, l’éloignement ne sciences, avec lesquelles chaque discussion mène toujours au-delà de
devrait plus être un obstacle pour l’apprécier, mais plutôt une la thématique de l’art.Il n’est ni nécessaire ni souhaitable d’introduire
incitation supplémentaire,alors que nos explorations se limitent pour l’analyse d’une œuvre d’art avec une profusion de mots, ou de faire
la plupart à notre créneau horaire.Il est regrettable que dans l’imagi- une dissertation, qui détourne d’une vraie compréhension de l’art
naire de beaucoup de gens, l’Orient évoque un certain romantisme visuel vers la littérature, l’histoire ou la métaphysique, et ne peut pas
qui les attire, bien que vague. Celui-ci accentue le fait que cela ne être considérée comme une critique solide. Quelles que soient les
relève que de l’exceptionnel, et a pour conséquence que seule la raisons,il est toujours regrettable de renoncer à une critique artistique.
curiosité se substitue à l’admiration.
Paul Gauguin (1848-1903) écrivit en 1897 :«[...] Ayez toujours devant
La peinture et la sculpture modernes offrent un progrès certain et un vous les Persans, Cambodgiens et un peu les Égyptiens. » On se
enseignement logique. Ainsi, beaucoup d’artistes d’écoles plus demande ce qu’il aurait bien pu dire s’il avait connu les fresques
récentes pourraient être qualifiés d’ « académiciens ». Ce processus d’Ajanta avec leurs traits superbes incroyablement maîtrisés, et leur
est comparable à celui des méthodes scientifiques modernes : l’art rendu plastique délicat.L’exposition de sculptures indiennes datant du
moderne est,en effet,le résultat de recherches esthétiques et métho- Moyen Âge tardif au musée du Trocadéro,à Paris,peut être considérée
diques. Des tableaux de Manet, en passant par Cézanne, jusqu’aux comme un premier pas que fit l’Occident envers l’art indien.
artistes actuels, l’histoire ne peut se raconter que dans le cadre d’une
aventure intellectuelle et d’une découverte esthétique. Le 28 février 1910,on pouvait lire dans le Timesau-dessus des signatures
de treize excellents artistes et critiques,la déclaration suivante:
La vision personnelle des créateurs de l’art moderne a eu pour effet
d’élargir nos intérêts esthétiques et de réévaluer les choses ignorées «Nous,les artistes,critiques et étudiants d’art,signataires
ou sous-estimées pendant longtemps : la peinture et la sculpture ci-dessous, [...] pensons que ce qu’il y a de mieux dans
chinoise, la sculpture gothique, la sculpture grecque archaïque, la l’art indien est l’expression noble et juste de l’émotion
sculpture africaine, la finesse des tapisseries ou la puissance des religieuse d’un peuple ainsi que son plus sincère ressenti
dessins primitifs, sans oublier, et non le moindre, l’art indien sous du divin. Nous reconnaissons dans la représentation
toutes ses facettes. En considérant toutes ces richesses autrefois si sacrée de Bouddha l’une des inspirations artistiques les
souvent refusées et méprisées, les dogmes des générations passées plus grandes du monde. Nous comprenons que l’exis-
avec leur suffisance, leur intolérance et leur ignorance, semblent se tence d’une tradition artistique puissante,fleurissante et
complaire dans leurs contraintes et l’appauvrissement de leur vie. indépendante, représente pour le peuple indien une
valeur inestimable et que tous ceux qui estiment la
Ce mouvement est si essentiel et si justifié que j’ai choisi d’aborder l’art culture dans cette région et l’admirent, devraient la
indien sous un angle artistique plutôt qu’archéologique.C’est pourquoi sauvegarder avec respect et amour.Opposés aux stéréo-
je me suis appuyé sur les témoignages des artistes vivants dont la vision types de certaines formes d’art traditionnelles, nous
Maha-Janaka jataka: trois domestiques de la reine réagissent à l’information
inattendue disant que le roi prévoit de renoncer à ses biens matériels et de les
laisser à sa maîtresse, fin du VIesiècle après J.-C., fin de la période Gupta.
Détail d’une fresque.
Grottes d’Ajanta (grotte no I), près d’Aurangabad, Maharashtra.
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pensons que le chemin vers le vrai progrès passe par le en ce qui concerne la fabrication de bijoux,la broderie perlée typique
développement naturel de l’art national du passé histo- des villages ainsi que l’émail de Jaipur (Rajasthan). Le penchant de
rique. Nous sommes convaincus que nous exprimons Birdwood pour tout cet artisanat aux couleurs vives d’une grande
l’opinion d’une majorité d’Européens qualifiés et nous finesse et pour cette vie complexe et incertaine, s’exprime magnifi-
voudrions assurer nos collègues indiens, qu’ils soient quement sous sa plume dans de nombreux passages. Les arts de
professionnels ou étudiants, de notre admiration et l’Inde antique et médiévale restèrent cependant en dehors de son
de notre soutien envers leur école nationale des arts étude et sa critique n’est pas très pertinente et reste très subjective.
qui continue de faire preuve de vitalité et de liberté à
interpréter la vie et la philosophie indienne,tant qu’elle Dans son exposé devant la Royal Society of Arts,il affirma,en parlant
reste fidèle à elle-même.Nous ne méprisons rien de ce d’un certain bouddha assis javanais,que son «[...] portrait absurde,figé
qui provient de sources étrangères et nous croyons que dans sa pose immémoriale, n’[était] rien de plus qu’une image en
le caractère unique sera jalousement préservé,qui est la bronze peu inspirée,louchant vaguement vers son nez,ses genoux,ses
conséquence naturelle de l’histoire et des conditions de pouces et ses orteils. Un pudding serait une représentation tout aussi
vie de ce pays,ancré dans leurs conceptions antiques et valable du symbole de la pureté passionnée et du calme de l’âme.»
profondément religieuses,symbolisant la fierté de l’Inde
et du monde oriental dans son ensemble.» Cette observation se dirige cependant davantage contre le verbiage
des critiques, pour qui le contenu idéal d’un objet compte beaucoup
Cette déclaration fut composée lors d’un exposé de Sir George plus que sa forme, qu’une critique contre l’art indien. Dans un guide
Birdwood (1832-1917),chroniqueur des arts industriels indiens,tenu officiel du département de l’Inde du Victoria & Albert Museum à
devant la Royal Society of Arts. En réalité, un tel discours avait déjà Londres, on pouvait lire une critique encore plus acerbe :
été publié trente ans plus tôt, mais l’époque n’était pas encore prête
pour un tel appel. D’aucune manière on peut faire à Birdwood le « Les formes monstrueuses des divinités purâniques
reproche d’avoir manqué de soutien à la culture et à la vie indienne. ne conviennent pas pour incarner une des formes les
Une analyse stylistique de l’artisanat de l’Inde moderne force à plus élevées de l’art :[...] c’est peut-être la raison pour
reconnaître la prépondérance de l’influence islamique et,en particulier, laquelle la peinture et la sculpture ne sont pas
de la culture persane de l’empire de Moghol. reconnues en Inde en tant que beaux-arts.[...] On peut
voir à quel point la sculpture de figures échoua en tant
La poterie est, excepté dans sa forme ménagère quotidienne, d’un que forme d’art véritable, à travers les tentatives de la
style purement islamique. Les tissus, avant tout le brocart, sont représenter comme échelle de valeur naturelle,et c’est
principalement décorés de dessins persans même si l’imagination et uniquement parce que la sculpture animalière ou
la pureté des couleurs sont d’influence indienne. Certaines autres humaine en pierre et ivoire est d’une très grande
sortes de tissus, comme le phulkaris brodé (une technique de précision qu’elle suscite autant d’admiration.»
broderie utilisée dans le Punjab indien et en Afghanistan) du nord-
ouest et les tissus en batik noué et tissé (technique des ligatures et Il est important de souligner que l’objet dont il est question est la
technique des réserves ou tulis) sont en revanche purement indiens. gravure indienne moderne sur ivoire. Le professeur Richard
La tradition indienne a pu être entièrement maintenue uniquement Westmacott, décrit l’art indien dans son Manuel de la sculpture, en un
Vessantara jataka: scène de pavillon au palace du prince Vessantara et de sa
Bodhisattva Avalokitesvara (bodhisattva de la compassion), femme la princesse Madri, Ve-VIesiècle après J.-C., fin de la période Gupta.
fin du VIesiècle après J.-C., fin de la période Gupta. Détail d’une fresque.
Détail d’une fresque. Grottes d’Ajanta (grotte no XVII), près d’Aurangabad, Maharashtra.
Grottes d’Ajanta (grotte no I), près d’Aurangabad, Maharashtra. (p. 10-11)
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