L’ARCHITECTURE GOTHIQUE AU SERVICE DE LA LITURGIE Rencontres M édiévales Européennes Volume 3 Ce volume est le troisième d’une collection intitulée Rencontres médiévales européennes, publiée par l’association Rencontres médiévales européennes dont le conseil scientifique est ainsi constitué : M. Jean-Pierre Babelon , membre de l’Institut Mme Monique Cazeaux , Conservateur honoraire à la Bibliothèque natio nale de France Mme Annie Cazenave , Ingénieur de recherche au C.N.R.S. M. Philippe Contamine , membre de l’Institut M. Olivier Cullin , Professeur à l’Université de Tours M. Alain Erlande -Brandenburg , Conservateur général du Patrimoine, Directeur du Musée national de la Renaissance Mme Françoise Gasparri , Directeur de recherche au C.N.R.S. M. Edouard Jeauneau , Professeur à l’Institut Pontifical de Toronto M. Jean Jolivet , Directeur d’études honoraire à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes M. Jean Leclant , Secrétaire perpétuel de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres M. Michel Lemoine , Ingénieur honoraire au C.N.R.S. M. Alain Michel , membre de l’Institut M. Edmond Pognon , Conservateur en chef honoraire à la Bibliothèque nationale de France M. Dominique Poirel , Ingénieur de recherche au C.N.R.S., attaché à 1T.R.H.T. M. Emmanuel Poulle , membre de l’Institut Mme Anne Prache , Professeur émérite à Paris IV - Sorbonne M. Pierre Riche , Professeur émérite à Paris X - Nanterre M. Jacques Verger , Professeur à l’Université Paris IV - Sorbonne, corres pondant de l’Institut de France, Académie des Inscriptions et Belles-Lettres M. Michel Zink , membre de l’Institut Fondation Singer-Polignac présidée par M. Édouard Bonnefous Chancelier honoraire de l’Institut de France ancien Ministre d’Etat L’architecture gothique au service Colloque organisé à la Fondation Singer-Polignac le jeudi 24 octobre 2002 par Rencontres médiévales européennes, association présidée par Monique Cazeaux avec Alain Erlande -Brandenburg , Françoise Gasparri , le P. Anselme Davril , Arnold Angenendt , Alain Michel , Dominique Poirel , Anne-Marie Deschamps sous la présidence de Pierre Riche Actes édités par Agnès Bos et Xavier D ectot BREPOLS 2003 © 2003 BREPOLS & PUBLISHERS - Turnhout, Belgium All rights reserved. No part of this publication may be reproduced, stored in a retrieval system, or transmitted, in any form or by any means, electronic, mechanical, photocopying, recording, or otherwise, without the prior permission of the publisher. D/2003/0095/89 ISBN 2-503-51426-X Transferred to digital printing 2010 Remerciements Toute ma reconnaissance va à la Fondation Singer-Polignac et à son Président, M. le Chancelier Edouard Bonnefous, sans qui ce collo que n’aurait pas vu le jour. Tous mes remerciements aussi à Mmes Marie-Odile Andrade et Danielle Lemoine qui ont veillé avec précision et efficacité sur les préparatifs et le déroulement du colloque. Je n’oublie pas le dévouement du personnel technique. Monsieur Pierre Riché a présidé nos travaux avec une rigueur et une érudition dont je lui suis reconnaissante. Merci aussi aux musiciens qui ont permis que notre colloque se termine par un concert que les auditeurs ne sont pas près d’oublier. Monique C azeaux Président de Rencontres médiévales européennes. Sommaire SÉANCE DE LA MATINÉE Sous la présidence de Pierre Riché Professeur émérite à l’Université de Paris X Monique Cazeaux, Conservateur honoraire à la Bibliothèque nationale de France Introduction p. 9 Alain Erlande-Brandenburg, Conservateur général du Patrimoine La sanctuarisation de P abside p. 17 Françoise Gasparri, Directeur de recherche au C.N.R.S. Le renouveau de Rome p. 43 P. Anselme Davril, Abbaye de Saint-Benoît de Fleury Le déroulement de la liturgie monastique au xif siècle p. 67 SÉANCE DE L’APRÈS-MIDI Sous la présidence de Pierre Riché Professeur émérite à l’Université de Paris X Arnold Angenendt, professeur à l’Université de Münster L'offrande de la messe dans les couvents du xif siècle p. 85 Alain Michel, membre de l’Institut La parole liturgique p. 103 Dominique Poirel, ingénieur de recherche à l’Institut de Recherche et d’Histoire des Textes (C.N.R.S.) L'ange gothique p. 115 Anne-Marie Deschamps, directrice de l’ensemble Venance Fortunat L'architecture gothique et l'espace sonore p. 145 Table des abbrévlations Arch, nat Archives nationales (France) BB Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny, A. Bernard et A. Bruel (éd.), 6 vols., Paris 1876-1903, rééd. Francfort-sur-le-Main, Í974 Bibi. nat. de Fr. Bibliothèque nationale de France CCCM Corpus Christianorum, Continuatio Mediævalis CCM Corpus consuetudinum monasticarum CCSL Corpus Christianorum, Series Latina MGH Monumenta Germaniae Historica MGH SS Monumenta Germaniae Historica, Scriptores series PL Patrologiae cursus completus omnium SS. Patrum, doctorum scriptorumque ecclesiasticorum sive Latinorum, sive Graecorum, abbé Jacques-Paul Migne (éd.) Introduction Nous avons toujours à Rencontres médiévales européennes le souci de la continuité de nos travaux. Le colloque sur Suger et le mani feste gothique amenait tout naturellement à poser des questions. L’architecture nouvelle voulue par Suger avait une signification spi rituelle, en liaison avec l’Ecole de Saint Victor, comme nous l’avons montré. Que chercher de plus ? Tout simplement le pourquoi et le com ment des choses. Dans l’avant-propos à l’édition des Ordines romani parue à Louvain en 1948, Mgr Michel Andrieu avait déclaré : « On a beaucoup écrit et savamment sur l’architecture de nos cathédrales et de nos vieilles églises, mais l’on s’est rarement demandé ce qui avait pu se passer à l’intérieur de ces édifices et pourquoi nos ancêtres les avaient bâtis à si grand frais. On n’a considéré que le cadre de pierre, comme si, ayant lui-même sa raison d’être, il était toujours demeuré vide ». Depuis, qu’a-t-on fait? Il y a eu, entre autres, les travaux de Louis Bouyer, Vandenbroucke, André Vauchez, Jacques Paul, Cyril Vogel, Carol Heitz, qui ont tous conscience de l’importance de la liturgie. En ce qui concerne ces toutes dernières années, le cardinal Rat zinger, pour qui la liturgie est primordiale parce qu’elle dépend directement de la théologie, renvoie à la lecture du catéchisme de l’Eglise catholique. On y apprend que le sacrosanctum concilium de Vatican II reconnaît que : « la célébration de la liturgie doit corres pondre au génie et à la culture des différents peuples ». Ce qui est particulièrement intéressant pour nous. Le Moyen Age nous donne l’exemple d’une multitude de liturgies diverses et variées. Il a fallu donc définir le cadre de nos études, c’est-à-dire et l’époque et les lieux. Nous avons choisi le xne siècle, lorsque la liturgie commence à se stabiliser, et le Nord de la France où fleurit le nouvel art. Le gothique est fait pour abriter une liturgie qui prend une forme stable. Monique Cazeaux Vous allez savoir ce que signifiait le culte des reliques dont l’importance a été considérable. Il convient de mettre l’accent sur l’aspect religieux de ce problème qui a été souvent occulté au profit des recherches sur les aspects mercantiles. Il était du devoir d’un abbé d’offrir des autels en grand nombre et de les pourvoir en re liques. D’où la nécessité d’agrandir l’espace sacré. Une place toute particulière a été réservée aux anges. On a un peu tendance à les oublier ceux-là, de nos jours, et pourtant... Saint Basile nous a enseigné que « chaque fidèle a, à ses côtés, un ange comme protecteur et pasteur pour le conduire à la vie ». Nous sau rons le rôle important qu’ils jouent dans la liturgie. Beaucoup de questions se sont posées comme la place des autels, l’ouverture du chœur aux laïcs, le rôle dévolu au jubé et à quelles époques, l’importance de la procession de l’offertoire, toutes choses nécessitant une disposition particulière de l’édifice. Mais ce n’est pas évident de trouver les textes précis dont on a besoin pour étayer des hypothèses. La rigueur scientifique n’était pas tellement en usage dans les siècles passés. Il y a ainsi une mine de renseignements donnés par Jean-Baptiste Thiers au xvue siècle dans ses Dissertations ecclésiastiques. Mais l’ennui est que Thiers mélange allègrement les siècles et l’on serait heureux d’avoir des précisions de dates concernant des indications de liturgie. «Autre fois », dit-il, ce qui est complètement insuffisant aux yeux d’un cher cheur scientifique du xxie siècle. C’est dommage, car la lecture des dissertations est passionnante. Ainsi l’auteur fait allusion à toutes les cérémonies qui se prati quaient « autrefois » sur les jubés : lectures des lettres de paix et de communion, les actes des martyrs. « On chante l’évangile au jubé », écrit-il, « afin que tous les fidèles, qui assistent à la messe, le puis sent entendre, ce qu’ils ne peuvent pas faire commodément lorsqu’on le chante dans le chœur proche de l’autel ». Mais où et quand trouve-t-on le jubé ? Thiers dit que dans les églises monastiques, il y en avait aux vme, ixe, xe et xie siècles, là où les moines pouvaient rassembler les laïcs, pour y lire les leçons des matines, l’épître et l’évangile aux messes des principales fêtes de l’année. Cela sans indication de lieux et avec des réflexions toutes personnelles de la part de l’auteur : 10