UNIVERSITE PARIS IV – SORBONNE ECOLE DOCTORALE IV Civilisations, Cultures, Littératures et Sociétés |__|__|__|__|__|__|__|__|__|__| (N° d’enregistrement attribué par la bibliothèque) THESE pour obtenir le grade de DOCTEUR DE L’UNIVERSITE PARIS IV Discipline : Etudes anglophones présentée et soutenue publiquement par Myrtille SAUNIER le 31 janvier 2009 Titre : La représentation du substrat dialectal et étranger dans la littérature française et anglo-américaine, et sa traduction. Directeur de thèse : Michel VIEL JURY M. Pascal AQUIEN, Professeur à l’Université Paris IV M. Jacques DURAND, Professeur à l’Université Toulouse II Mme Claudie GOURG, Professeure à l’Université des Antilles et de la Guyane M. Michel VIEL, Professeur à l’Université Paris IV Quelque mille mercis à… Monsieur Michel Viel, directeur de cette thèse, qui fit preuve de patience et de grande confiance. Madame Claudie Gourg et Messieurs Jacques Durand et Pascal Aquien, qui firent le déplacement pour assister à la présentation de ce travail. Eric Cardinali, Jérôme Cuenot, Elyane Dauphin, Michel Gagnon, Marie-France Girod, Florent Goursaud, Nathalie Hubert, Paul Jimenes, Arthur de Keyzer, Nathalie Lionnet, Tom McMurtry, Marie-France Pulnin, Damien Ramage, Louise Roussel, Jean-Pierre Saunier, Marie-Claire Saunier, Bérénice Vincent – qui surent me donner de leur temps et répondre à mes interrogations. Table des Matières Introduction p. 9 I) Identifier l’effet de la transcription sur le lecteur p. 13 I-1) Souci de réalisme : Barbey d’Aurevilly, Crane, Steinbeck, Synge p. 13 I-2) La transcription socioculturelle : quand le milieu social ou les origines délient les langues p. 21 I-2-a) Le milieu social : Shaw, Forster, Kipling, Queneau, Molière, Maupassant, Lawrence, Hardy, Dickens, Sillitoe p. 22 I-2-b) Les origines : Balzac, Maupassant, Crane, Kipling, Corbière, Mitchell, Scott p. 49 I-3) Affirmer son appartenance : la quête d’identité : Harlem Renaissance avec Wright et Hurston ; Black Talk chez d’autres auteurs noirs : Walker, Kempadoo ; ou blancs : Faulkner, Mitchell, Twain, Melville p. 63 I-4) Faire rire p. 91 I-4-a) Amuser le lecteur : éditions jeunesse : J. K. Rowling, Roald Dahl, Goscinny & Uderzo p. 91 I-4-b) Comique et pittoresque : Molière, Dickens, Balzac, Twain p. 116 I-5) Ironie et moquerie : Fitzgerald, Maupassant, Boyle, Weisberger, Berman, Rowling, Salinger, Twain, Orwell p. 133 I-6) Humour et stylistique : Queneau, Molnár p. 154 II) Comment écrire l’oralité ? p. 166 II-1) La Norme p. 166 II-1-a) Norme et prononciation p. 166 II-1-b) Norme et bon usage : incorrigible écriture p. 172 II-1-b-i) Une vision manichéenne de l’écriture p. 173 • Le choix du littéraire comme norme de l’écriture p. 177 • Ecrit versus parlé p. 179 II-1-b-ii) Réformer l’orthographe p. 184 • Causes : Pourquoi la réforme ? – difficulté, illogisme, étymologie et histoire de la langue p. 186 • Outils : Comment réformer ? – propositions anglaise et française d’une ortho- graphe nouvelle : New Spelling, NuEnglish, Cut Spelling, Saaspel, Nooalf, Soundspel, Réforme de 1990 (Académie française), Ortograf, et Néo-français quenien p. 195 II-1-b-iii) Les limites d’une telle entreprise p. 202 • Contre-arguments : déficience, complexification, paradoxe de la création d’un nouveau système, changement radical, bilinguisme, étymologie, homographes, p. 203 allomorphes, accent régional • Plaisir et transgression : souci stylistico-ludique et non-systématisation – p. 218 Dubuffet, Molnár II-1-c) Norme et narrateur, la place du sociolecte dans la narration : Huck Finn (Twain), Celie p. 221 (Alice Walker), le narrateur (de Zazie) II-2) En quoi ces langages sont-ils reconnaissables ? p. 225 II-2-a) Existe-t-il des caractéristiques de forme intrinsèques à chaque type sociolectal ?: comparaison des transcriptions d’un même sociolecte par différents auteurs p. 226 II-2-b) Existe-t-il des traits communs à toutes les transcriptions ? p. 229 II-3) Authenticité de la représentation littéraire : les rapports du sociolecte à sa réalité extratextuelle p. 233 II-4) Comment se construit l’accent ? Existe-t-il une méthode systématique ? p. 244 II-4-a) Contractions, mots élidés, et prononciations stigmatisantes p. 252 II-4-a-i) Contractions courantes témoignant d’une prononciation relâchée p. 252 II-4-a-ii) Contractions typiques d’un certain parler p. 254 II-4-a-iii) Prononciations stigmatisantes p. 257 II-4-b) Création de graphies surprenantes à la lecture imitant la prononciation p. 258 II-4-b-i) Echange de lettres p. 258 II-4-b-ii) Inversion de deux sonorités p. 261 II-4-b-iii) Matérialisation d’un son particulier p. 263 II-4-b-iv) Création de nouveaux mots p. 276 II-4-b-v) Eye dialect p. 284 II-4-b-vi) Naturalisation des mots d’origine étrangère p. 285 II-4-b-vii) Amalgame syntaxique p. 286 II-4-c) Indices grammaticaux et morphosyntaxiques divers, témoignant d’un usage vernaculaire de la langue p. 288 II-4-c-i) Verbes irréguliers et irrégularités de conjugaison p. 288 II-4-c-ii) Double passé composé p. 295 II-4-c-iii) Double négation p. 296 II-4-c-iv) Conjonctions excédentaires p. 297 II-4-c-v) Dislocation syntaxique p. 298 II-4-c-vi) Liaisons et terminaisons stigmatisantes p. 300 II-4-d) Intrusion stylistique dans les modifications de surface p. 304 II-4-d-i) La répétition dans le récit p. 304 II-4-d-ii) La question rhétorique p. 315 II-4-d-iii) Le vernaculaire comme outil dramatique p. 318 II-4-d-iv) Créations poétiques involontaires : le néologisme savant p. 331 III) Comment traduire ? p. 334 III-1) Paramètres situationnels intra- et paratextuels p. 334 III-1-a) Indices intratextuels p. 334 III-1-a-i) Le Commentaire et la Note du Traducteur p. 334 III-1-a-ii) L’œuvre du traducteur ? – les deux exemples de Claire Laury et William- Little Hughes p. 344 III-1-b) Place du sociolecte dans la topologie dialogale de l’œuvre – l’exemple de Huck Finn : à qui répond Jim ? p. 363 III-1-b-i) Identité de la voix traduite p. 363 III-1-b-ii) Voix du narrateur p. 366 III-1-b-iii) Titres de civilité p. 370 III-1-b-iv) Le massa et son nègre p. 373 III-1-b-v) Pap Finn & Miss Watson p. 378 III-1-c) Paratextes p. 380 III-2) Incohérences p. 384 III-3) L’équivalence régionale p. 394 III-4) Une méthode s’impose-t-elle en réponse à la traduction sociolectale ? p. 432 III-4-a) Agir au niveau morphologique, en utilisant les méthodes déjà présentes dans le texte source p. 436 III-4-a-i) Elisions p. 436 • e muet p. 436 • Elision d’autres lettres p. 437 • Elision de r p. 441 III-4-a-ii) Substitution de lettres ou sonorités p. 445 III-4-a-iii) Matérialisation d’un son particulier p. 452 III-4-a-iv) Création de graphies surprenantes p. 455 III-4-b) Agir sur le registre de langue, en jouant des niveaux lexical et morphosyntaxique p. 457 III-4-b-i) Adapter le vocabulaire au milieu social du locuteur p. 457 III-4-b-ii) Préférer les pronoms on ou ils à nous p. 461 III-4-b-iii) Introduire des constructions incorrectes p. 463 III-4-b-iv) Introduire des tournures ou connexions typiques de l’oral p. 468 III-4-b-v) Introduire certaines liaisons ou prononciations stigmatisantes p. 471 III-4-b-vi) Introduire des vocables étrangers p. 477 III-4-c) Agir au niveau grammatical p. 480 III-4-c-i) Supprimer ne dans la négation p. 481 III-4-c-ii) Agir sur les pronoms relatifs anglais p. 481 III-4-c-iii) Elider le sujet p. 482 III-4-c-iv) Utiliser un auxiliaire pour un autre p. 483 III-4-c-v) Malmener la conjugaison p. 485 Conclusion p. 495 Bibliographie p. 501 Annexe 1 p. 517 Annexe 2 p. 524 Introduction On trouve « chez les primitifs l’idée que la langue est une habitude, une coutume analogue à celle du costume ou de l’armement » (Saussure, 1968, p. 261). Or n’est-ce pas encore aujourd’hui le cas, n’endossons-nous pas chaque matin le code linguistique dont nous sommes le résultat ? Plus qu’une habitude toutefois, les locuteurs que nos textes donnent à lire, c’est pour eux l’accoutrement de la truculence, l’arme revendicatrice, que la langue incarnera. Car lorsque l’écrit se met à bruisser, et que ce bruissement devient politique, la langue se fait vivante alors même qu’on l’avait seulement couchée sur le papier. La représentation du substrat dialectal ou étranger bouleverse ainsi les « exigences séculaires de l’écriture » (Glissant, 1994, p. 26), pour littéralement inscrire les langues socio- lectales au rang de parlers littéraires. Il nous faut ici préciser le sens de certains mots que nous aurons à employer au cours de notre étude, et qui dans un premier temps, tenteront de clairement définir son objet. Commençons par ce qu’il n’est pas. Et revenons sur l’acception de dialecte : Ce qu’il faut, en tout cas, bien noter, c’est qu’appliqué à l’Italie, à l’Allemagne et à d’autres pays d’Europe, le terme de dialecte implique dans l’usage courant un jugement de valeur. Certes, ce jugement est moins sévère que celui que suppose l’emploi de « patois ». Mais, quels que soient les sentiments qu’un Allemand ou un Italien éprouve pour son dialecte, il ne penserait pas à le placer au même rang que la langue nationale. [Martinet, 1980, pp. 154-155] Poursuivons. Il existe, du mot « dialecte », un emploi tout différent, celui qui en est fait aux Etats-Unis par exemple où le terme désigne toute forme locale de l’anglais sans qu’il soit question d’opposer aux dialectes une forme de langue plus recommandable. Tout Américain parle un dialecte, celui de Boston, celui de New York, celui de Chicago, ou, s’il a beaucoup voyagé, quelque dialecte hybride, sans avoir le sentiment qu’il parle jamais autre chose que l’anglais d’Amé- rique sous une forme parfaitement acceptable. [Martinet, 1980, p. 146] Nous avons choisi au cœur de notre commentaire de marquer la distinction sémantique en utilisant le terme français « dialecte » d’une part, et d’autre, en anglais et italique dans le texte, « dialect », puisque la signification qui s’y rattache concerne essentiellement les lan- gues anglo-saxonnes. Reprenons : Le terme « dialecte » est employé, le plus souvent, en référence à des variétés linguistiques comportant une localisation géographique particulière. Mais rien n’empêche de l’utiliser aussi 9 pour désigner le comportement linguistique divergent de certaines classes sociales. [Martinet, 1980, p. 158] Outre la classe sociale à proprement parler, c’est le groupe d’appartenance qui avant tout nous semblait pertinent, d’où la fréquente dénomination de « sociolecte », ou celle plus rare de « parlure », en référence aux parlers de nos protagonistes. La parlure permet de caractériser le parler d’une classe sociale (langue propre à un groupe). Par extension, le terme désigne les particularités d’expression d’un personnage. [Etudes littéraires, réf. du 21 mai 2007] Le sociolecte désigne une variété linguistique qui dépend du contexte social (l’âge, le sexe, le niveau d’instruction, entre autres choses). Ainsi, on constate que les jeunes ne parlent pas comme leurs grands-parents, et qu’il existe, par exemple des variétés linguistiques qu’on n’entend pas parmi les gens instruits. [Lessard, réf. du 21 mai 2007] A toutes ces définitions, ajoutons encore celle-ci : un « accent » serait quelque chose d’assez marginal qui se surajoute à l’articulation normale des sons du langage et qu’il serait un peu ridicule et presque indécent d’essayer d’imiter lorsqu’on apprend une langue autre que la sienne. [Martinet, 1980, p. 11] La distinction est avérée, toutefois : Where distinctions are limited to phonology, the term accent is often used instead of dialect. [Wikipedia, réf. du 10 juillet 2007] In linguistics, an accent is a pronunciation characteristic of a particular group of people relative to another group. Accent should not be confused with dialect (q.v.), which is a variety of language differing in vocabulary and syntax as well as pronunciation. Dialects are usually spoken by a group united by geography or class. [Wikipedia, réf. du 9 juillet 2007] La question ne se posera qu’en situation patoisante (puisque la notion d’accent étranger n’introduit pas de difficulté), et ce que l’on aurait tendance à nommer « accent » ne sera en réalité que la première impression, ou la seule saisie phonologique du sociolecte. Ceci posé, il nous fallait encore faire la différence entre des textes qui sont exclusivement en dialecte et les textes qui ont une coloration dialectale plus ou moins prononcée. [Besson, 1998, p. 116] Notre choix nécessitait de porter sur les textes donnant à lire dans leur graphie une prononciation donnée. Si premièrement les manifestations phonomorphologiques devaient efficacement circonscrire un corpus inexhaustible, d’autres phénomènes interdépendants se sont révélés incontournables, tels que les transformations lexicale, morphosyntaxique et 10
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