Le droit fiscal à l’épreuve de la mondialisation: la règlementation des prix de transfert au Sénégal El Hadji Dialigue Ba To cite this version: El Hadji Dialigue Ba. Le droit fiscal à l’épreuve de la mondialisation: la règlementation des prix de transfert au Sénégal. Droit. Université Paris-Est, 2011. Français. NNT: 2011PEST0041. tel- 00681037 HAL Id: tel-00681037 https://theses.hal.science/tel-00681037 Submitted on 20 Mar 2012 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. THÈSE pour obtenir le grade de DOCTEUR EN DROIT LE DROIT FISCAL À L’ÉPREUVE DE LA MONDIALISATION : LA RÉGLEMENTATION DES P RIX DE TRANSFERT AU SÉNÉGAL présentée et soutenue publiquement par : M. El Hadji Dialigué BA le 7 juillet 2011 _______ Jury : M. Jean-Luc ALBERT Professeur à l’Université Jean Moulin-Lyon III, Rapporteur, M. Jacques BUISSON Professeur à l’Université René Descartes-Paris V, M. Thierry LAMBERT Professeur à l’Université Paul Cézanne-Aix-Marseille III, Rapporteur, M. Alexandre MAITROT DE LA MOTTE Professeur à l’Université Paris-Est Créteil, Directeur de thèse, M. Jean-François TALLON Professeur associé à l’Université Paris-Est Créteil. REMERCIEMENTS Au Professeur Alexandre MAITROT DE LA MOTTE, pour avoir accepté de bon cœur d’encadrer ce travail et de l’avoir dirigé de mains de maître ; À Maître Mamadou BA, pour sa savante relecture et ses conseils précieux ; À Messieurs Amadou BA, Directeur général des Impôts et des Domaines et El Hadji Ibrahima DIOP, Directeur de la Législation, des Etudes et du Contentieux, pour leur compréhension, leur soutien et leurs encouragements ; À mon Ami(r) Ousmane SONKO, qui, pour m’avoir ôté une grosse épine du pied, m’a permis d’avoir la tranquillité d’esprit nécessaire à la conduite de mes recherches. i i À mes parents, frères et sœurs, À Fatima et Maître BA Junior. i ii SOMMAIRE Introduction ............................................................................................................................................................................. 4 Première partie- L’entreprise face à la mondialisation : l’enjeu de la détermination des prix de transfert ......... 33 Titre I- L’environnement économique des prix de transfert : l’entreprise face à la complexité ............................. 35 Chapitre I- Le cadre structurel des prix de transfert : l’espace intégré ............................................................. 37 Section I- L’espace géographique : l’internationalisation de l’activité du groupe ........................................ 38 Section II- L’espace économique : l’internalisation des activités du groupe .................................................. 63 Chapitre II- Le cadre opérationnel des prix de transfert : le commerce intégré .............................................. 92 Section I- L’analyse économique des prix de transfert : l’objet des transactions contrôlées ........................ 93 Section II- L’analyse financière des prix de transfert : l’avantage injustifié ................................................. 117 Titre II- L’environnement juridique des prix de transfert : l’entreprise en quête de sécurité .............................. 143 Chapitre I- La détermination des prix de transfert : la légalité présumée .................................................... 145 Section I- La quête du juste prix de transfert : le prix de pleine concurrence .............................................. 146 Section II- La fixation d’un prix de transfert juste : les méthodes préconisées ............................................ 173 Chapitre II- La justification des prix de transfert : la légimité prouvée ......................................................... 198 Section I- La justification matérielle des prix de transfert : la comparabilité ............................................... 199 Section II- La justification formelle des prix de transfert : la documentation .............................................. 224 Deuxième partie- L’administration face à la mondialisation : le défi du contrôle des prix de transfert ............ 260 Titre I- L’efficacité limitée du contrôle répressif des prix de transfert : l’administration face à la perplexité.. 262 Chapitre I- Le contrôle unilatéral répressif des prix de transfert : l’administration cloisonnée................ 264 Section I- Le cadre juridique du contrôle unilatéral des prix de transfert: les outils juridiques ............... 265 Section II- Le cadre administratif du contrôle unilatéral des prix de transfert : les outils techniques ..... 289 Chapitre II- Le contrôle concerté répressif des prix de transfert : la coopération fiscale ............................ 311 Section I- La concertation à l’occasion du contrôle : l’assistance administrative ........................................ 312 Section II- La concertation postérieurement au contrôle : l’élimination de la double imposition ............ 333 Titre II- Pour un contrôle adapté aux prix de transfert : l’administration en quête de flexibilité ...................... 361 Chapitre I- Pour un contrôle préventif des prix de transfert : la concertation fiscale .................................. 363 Section I- Les régimes fiscaux de protection : la facilitation fiscale ............................................................... 365 Section II- Les accords préalables sur les prix : la contractualisation fiscale ............................................... 377 Chapitre II- Plaidoyer pour l’institution d’un ordre fiscal global : la mondialisation fiscale ................... 403 Section I- Les raisons militant en faveur d’un ordre fiscal mondial : les fondements théoriques............. 404 Section II- La consécration de l’ordre fiscal mondial : la mise en œuvre pratique...................................... 417 Conclusion générale........................................................................................................................................................... 448 Table des matières .............................................................................................................................................................. 493 1 LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS AJDA Actualité juridique - Droit administratif al. alinéa art. article Ass. Assemblée plénière AUSC Acte uniforme de l’OHADA sur les sociétés commerciales et le groupement d’intérêt économique BF Bulletin fiscal, éditions Francis Lefebvre Bull. Bulletin des arrêts de la cour de c/ contre CA Cour d’appel CAA Cour administrative d’appel CE Conseil d’État CEDH Cour européenne des droits de l’homme CERDI Centre d’études et de recherches pour le développement international CGI Code général des impôts chron. chronique civ. civil CJCE Cour de justice des communautés européennes CNUCED Commission des Nations unies pour le commerce et le développement économique com. commercial comm. commentaires CPJI Cour permanente de justice internationale CREDILA Centre de recherche et d’études du droit, des institutions et de la législation en Afrique CS Cour suprême DGFiP Direction générale des Finances publiques (France) DGI Direction générale des Impôts (France) DGID Direction générale des Impôts et des Domaines (Sénégal) Dir. sous la direction Droit fiscal Revue française de droit fiscal Droit sénégalais Revue de l’Association sénégalaise de droit pénal E. Entreprises Ed. Edition EDCE Etudes et documents du Conseil d’État EDJA Editions du droit et de la jurisprudence africains FMI Fonds monétaire international GAJA Les grands arrêts de la jurisprudence administrative de LONG (M.) et al., 15e édition, 2005. Gaz. Pal. La Gazette du Palais 2 Ibid. ibidem : au même endroit (indiqué dans la citation précédente) Idem le même (que la citation précédente) JCP, G. Juris-classeur périodique – édition générale JORS Journal officiel de la République du Sénégal LFP Livre des procédures fiscales LGDJ Librairie générale de droit et de jurisprudence n° numéro obs. observations OCDE Organisation de coopération et de développement économique OHADA Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique ONU Organisation des Nations unies op. cit. opus citatum (ouvrage cité) OPOCE Office des publications officielles des Communautés européennes p. page Penant Revue trimestrielle de droit africain pp. pages PUF Presse universitaire de France RDP Revue de droit public et de la science politique rec. recueil req. requête Rev. soc. Revue des sociétés RFC Revue française de comptabilité RFFP Revue française de finances publiques RIDE Revue internationale de droit économique RJF Revue de jurisprudence fiscale, éditions Francis Lefebvre RSLF Revue de science et de législation fiscale RTD Revue trimestrielle de droit s. suivantes sect. section du contentieux du Conseil d’État SDN Société des Nations spéc. spécialement TA Tribunal administratif 3 INTRODUCTION Même si c’est maintenant que le marché est devenu réellement global, la mondialisation n’est pas pour autant un phénomène récent1. D’une façon générale, la mondialisation implique une compression du temps et de l’espace et favorise la croissance de réseaux économiques, politiques, sociaux ou culturels entre les gouvernements, les sociétés et les individus. Sur le plan économique2, la mondialisation encore appelée globalisation3 désigne un processus ancien du capitalisme, celui des « économies-mondes » qui s’est accéléré depuis quelques décennies4. La mondialisation est un ensemble de processus qui conduisent à une diminution des obstacles aux échanges5. Elle se traduit par « le développement ou plus précisément l’accélération du développement de l’activité économique qui 1 J. M. KEYNES, Les conséquences économiques de la paix, Paris, Gallimard, 2002 (1ère éd. 1929), pp. 25-26. L’auteur y décrit par exemple, l’état de la mondialisation avant la Première guerre mondiale. 2 M. LEROY, « Introduction », in Mondialisation et fiscalité. La globalisation fiscale, Paris, L’Harmattan, 2006, p. 10. Selon l’auteur, la mondialisation est un terme polysémique dont la portée varie selon la discipline. C’est ainsi que sur le plan politique, la globalisation pose la question du rôle de l’État et notamment de l’État-nation dont la capacité d’action, la marge de manœuvre serait de plus en plus réduite dans une économie mondialisée. Sur le plan culturel, la globalisation concerne les réseaux de communication et s’appuie sur les technologies de l’information et de la communication qui favorisent une culture globale. 3 Le dictionnaire Robert a accepté le terme « mondialisation » en 1953 alors que le dictionnaire américain Webster n’a accepté le mot « globalization » qu’en 1961. Encore marginal dans les années 1960-70, ce n’est que dans les années 1990 que le terme entre massivement dans les publications des sciences sociales. La globalisation est une notion tirée de l’anglais « globalization » qui se veut plus précise, plus scientifique que le terme de mondialisation (U. BECK, What is Globalization?, Polity Press Cambridge, 2000). Pourtant l’expression mondialisation entendue comme un phénomène inexorable, sorte de loi d’airain, est souvent préférée dans la littérature d’expression française. Voir sur ce point : M. LEROY, « Introduction », op. cit., p. 8 ; F. OST, « Mondialisation, globalisation, universalisation : s’arracher, encore et toujours de l’état de l’état de nature », in C.-A. MORAND (Dir.), Le droit saisi par la mondialisation, Bruylant-Editions de l’Université de Bruxelles- Helbing&Lichtenhahn Verlag, Coll. de droit international, 2001, pp. 63-80. 4 Selon certains auteurs, les relations politiques, économiques et sociales sont mondiales depuis environ 500 ans après la découverte « officielle » de l’Amérique par Christophe Colomb. Depuis lors, on sait que la terre est une entité finie où l’imagination de stratégies mondiales est permise. Le développement des technologies et la création de nouveaux modes de transport permettent ensuite une plus grande circulation autour du globe. 5 B. BADIE et M.-C. SMOUTS, Le retournement du monde, Sociologie de la scène internationale, PFNSP et Dalloz, 3e éd., 1999, p. 66. 4 traverse les frontières politiques nationales et régionales » 6. Elle se manifeste par l’augmentation des biens et services corporels et incorporels qui font l’objet d’échanges. Les deux principales caractéristiques de la mondialisation économique sont l’intensification des échanges internationaux et l’apparition d’une sphère financière globale, auxquelles sont associés les phénomènes d’intégration des marchés, de déréglementation, de délocalisation, d’interdépendance, de concurrence et de dumping7. La mondialisation économique se traduit par l’accroissement du volume des investissements directs étrangers. Les marchés locaux de toute la planète font l’objet d’une déréglementation et d’une libéralisation8. Par la délocalisation, les entreprises sont amenées de plus en plus à établir des maillons de leur processus de production dans d’autres pays où elles peuvent profiter d’avantages au chapitre des coûts ou, dans certains cas, d’un traitement réglementaire ou fiscal préférentiel9. Toutefois, même si elle contribue à l’accélération de la production des biens et services au niveau international, la mondialisation n’a pas les mêmes effets partout. La grande majorité des transactions économiques et financières se produit à l’intérieur et entre trois grandes régions : l’Amérique du nord, l’Europe l’Asie du sud-est. En 2004, selon la Banque mondiale10, l’Amérique du nord représente 34% du produit intérieur brut de la planète, contre 25% pour l’Union européenne et 21% pour l’Asie du sud-est, alors que l’Afrique représente seulement 3% des transactions commerciales internationales. Située à la croisée de l’État, de l’économie et de la société, la fiscalité est donc nécessairement impactée par la mondialisation11. La fiscalité, symbole par excellence de la souveraineté de l’État, est, pour ainsi dire, soumise à rude épreuve par la mondialisation. Celle-ci entraîne une remise en cause de la 6 C. OMAN, « Les défis politiques de la globalisation régionalisation », Cahiers de politique économique, n° 11, Centre de développement de l’OCDE, p. 9. 7 M. LEROY, « Introduction », op. cit., p. 8. 8 S. PAQUIN, Économie politique internationale, Paris, Montchrestien, Coll. Clefs Politique, 2005, p. 21. 9 Rapport du Conseil économique des Nations unies du 19 mars 2003, Distr. et Social Général, NU/CES/2003/13. 10 Rapport sur le développement dans le monde, Washington, 2004 ; Perspectives économiques mondiales, 2004. 11 G. TIXIER, « La mondialisation et le droit fiscal français », in E. LOQUIN et C. KESSEDJIAN (Dir.), La mondialisation du droit, Dijon, Litec, 2000, pp. 11-42 ; X. OBERSON, « L’impact de la mondialisation sur le droit fiscal suisse », in C.-A. MORAND, Le droit saisi par la mondialisation, op. cit., pp. 429-446. 5 souveraineté12, quand bien même l’État ne soit pas devenu totalement impuissant et complètement asservi à l’économie mondialisée13. En réalité, les transformations récentes de l’État ont provoqué une triple crise14. D’abord une crise de la souveraineté, car l’État n’occupe plus un rôle monopolistique sur la scène internationale15. Ensuite une crise des territoires, car les frontières étatiques sont de plus en plus perméables. Enfin une crise de l’autorité, car l’État n’arrive pas à créer un ordre normatif international qui fasse consensus16. Néanmoins, la souveraineté de l’État demeure un principe fondamental du droit international. La notion de souveraineté comporte des aspects à la fois interne et externe : d’un côté, elle implique l’autonomie de l’État, particulièrement son droit à ne pas reconnaître une autorité qui le transcenderait, de l’autre, qu’il soit reconnu par les autres États précisément en tant qu’acteur autonome17. La souveraineté symbolise la compétence exclusive, c’est-à-dire le pouvoir absolu de l’État de décider sur son territoire18. À ce titre, le pouvoir fiscal est l’une des plus importantes prérogatives étatiques : « un État ne peut vivre librement que s’il peut imposer librement ! »19. Il se manifeste par la territorialité presque absolue de l’impôt et de la loi fiscale : tandis que l’État peut exercer un pouvoir fiscal absolu à l’intérieur de son territoire, il ne peut exercer aucun pouvoir à l’extérieur de son territoire. 12 A. ACHARYA, « Mondialisation et souveraineté : une réévaluation de leur lien », Revue internationale de politique comparée, Vol. 8, n° 3, 2001, pp. 383-395. 13 M. DELMAS-MARTY, « Les processus de mondialisation du droit », in C.-A. MORAND, Le droit saisi par la mondialisation, op. cit., pp. 63-80. 14 Voir sur ce point : J. HABERMAS, Après l’État-nation. Une nouvelle constellation politique, Paris, Fayard, 1998, p. 77. L’auteur considère que l’impuissance des États serait le « premier résultat de la mondialisation ». 15 J. VERHOEVEN, « Souveraineté et mondialisation : libres propos », in E. LOQUIN et C. KESSEDJIAN (Dir.), La mondialisation du droit, op. cit., pp. 43-57. 16 J. CHEVALLIER, « Mondialisation du droit ou droit de la mondialisation ? », E. LOQUIN et C. KESSEDJIAN (Dir.), La mondialisation du droit, op. cit., pp. 43-57. 17 L. PANITCH, “Rethinking the Role of the State”, in J. H. MITTLEMAN, (ed.), Globalization : Critical Reflections, The International Political Economy Yearbook, vol. 9, Boulder, Lynner Rienner, 1996, pp. 84-85. 18 M. CHRETIEN, A la recherche du droit commun fiscal international. Etudes de droit positif à partir de la jurisprudence des Cours internationales, Paris, Recueil Sirey, 2955, p. 18. 19 Idem, p. 63. 6
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