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La place des animaux dans la relation mortelles-divinités: le cas d'Artémis et de Déméter PDF

431 Pages·2017·4.95 MB·French
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La place des animaux dans la relation mortelles-divinités: le cas d’Artémis et de Déméter Annabelle Amory To cite this version: Annabelle Amory. La place des animaux dans la relation mortelles-divinités: le cas d’Artémis et de Déméter. Archéologie et Préhistoire. Université Charles de Gaulle - Lille III, 2017. Français. ￿NNT: 2017LIL30032￿. ￿tel-01767692￿ HAL Id: tel-01767692 https://theses.hal.science/tel-01767692 Submitted on 16 Apr 2018 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. UNIVERSITE DE LILLE SHS École doctorale SHS 473 - Lille - Nord de France HALMA - UMR 8164 (CNRS, Univ. Lille, MCC) Thèse en vue de l’obtention du grade de docteur Discipline : Archéologie grecque Présentée et soutenue publiquement le 20 octobre 2017 par ANNABELLE AMORY La place des animaux dans la relation mortelles-divinités : le cas d’Artémis et de Déméter VOLUME I Membres du jury Christophe CHANDEZON, Professeur, Université Paul-Valéry, Montpellier 3 Sandrine HUBER, Professeur, Université de Lorraine, Nancy (rapporteur) Stéphanie HUYSECOM-HAXHI, Chargée de recherche CNRS, HALMA UMR 8164 Anne JACQUEMIN, Professeur, Université de Strasbourg (rapporteur) Arthur MULLER, Professeur, Université de Lille / IUF (directeur de recherche) UNIVERSITE DE LILLE SHS École doctorale SHS 473 - Lille - Nord de France HALMA - UMR 8164 (CNRS, Univ. Lille, MCC) Thèse en vue de l’obtention du grade de docteur Discipline : Archéologie grecque Présentée et soutenue publiquement le 20 octobre 2017 par ANNABELLE AMORY La place des animaux dans la relation mortelles - divinités : le cas d’Artémis et de Déméter VOLUME I - TEXTE AVANT-PROPOS Au commencement, il y a cet exposé mené en troisième année de licence, au semestre 5. On m’a confié une mission un peu originale, celle de faire la chasse au lion dans les rues d’Amiens. Pendant plusieurs semaines, j’ai parcouru la ville, le nez en l’air, et les bibliothèques, le nez dans les livres. Je suis partie de rien ou, plutôt, d’une simple constatation de mon professeur de l’époque : il y avait beaucoup de lions à Amiens. Cela avait-il une quelconque signification ? Était-ce uniquement décoratif ? Finalement, j’ai réussi l’objectif de donner un sens à la présence léonine dans la ville picarde. De là est née ma passion pour l’iconographie. Arrivée à Lille, Marion Muller-Dufeu m’a proposé une seconde mission que j’étais tout encline à accepter : enquêter sur la représentation du chien dans le monde grec. Pendant mon master, j’ai donc dépouillé tous les catalogues d’œuvres possibles, constituant un corpus énorme reprenant l’intégralité des images existantes de chien dans l’art grec. Ce qui est passionnant dans cette recherche, c’est qu’elle combine plusieurs domaines et plusieurs sources pour comprendre au mieux l’état d’esprit dans lequel ces représentations ont été exécutées : quelle était la vision du chien à l’époque ? Quel symbole incarnait-il dans ces différentes situations ? Pour parvenir à mes fins, j’ai du étudier des ouvrages aussi bien philosophiques, scientifiques, archéozoologiques, que religieux. Ce mélange et cette interconnexion entre les disciplines sont les moteurs de cette étude et ce qui a fait que le sujet m’a tellement passionnée. Tellement, que j’ai décidé de poursuivre en débutant une thèse, pour cet amour de la recherche. C’est tout naturellement qu’Arthur Muller, dans cette continuité, m’a proposé un sujet tout aussi pluridisciplinaire mais recoupant également plusieurs thèmes : les déesses, les femmes et les animaux. Et c’est tout naturellement que j’ai accepté. Cette problématique s’intéressait plus particulièrement aux pratiques religieuses, un domaine qui me touche particulièrement quelque soit la civilisation étudiée. Je me suis donc lancée, sans filet, pendant six ans dans cette aventure qui n’a pas été sans embûches. La plus grande des difficultés a été de concilier emploi et thèse pendant toute la durée de la recherche, notamment lorsque je cumulais trois jobs, atteignais les 35 heures hebdomadaire ou étais remerciée sans raison valable et qu’il me fallait dans l’urgence trouver un autre emploi. La fréquentation des Restos du cœur lillois m’a également permis, le temps de deux hivers, de pouvoir manger dans un premier temps et ralentir sur le travail rémunéré ensuite. Durant quatre années, j’ai aussi pu, grâce à la confiance de l’Université Lille 3 et la bonne humeur de Loic Cuntrera, enseigner aux licences 1 et 3, ainsi que dans le cadre du SEAD. Je remercie également le laboratoire Halma ainsi que l’école doctorale SHS pour leur soutien, aussi bien moral que financier, et la mise en place de dossiers de mobilité internationale. Sans ces aides, il m’aurait été bien impossible de me rendre à Athènes pour pouvoir pallier à la seconde difficulté : le manque de ressources documentaires des bibliothèques de l’Université Lille 3. Mes séjours à l’École française d’Athènes, que je remercie chaudement, ont été riches sur plusieurs plans, que ce soit par le biais de bourses d’étude, de séminaires de formation doctorale ou par mes propres moyens. La lecture des ouvrages présents dans la bibliothèque m’a permis d’avancer considérablement, dans un laps de temps réduit, sur mes recherches. Ma présence à Athènes s’est également traduite par les visites inlassables des musées, des sites archéologiques, des villes alentours mais aussi de la capitale en elle-même, qui même sans qu’elle s’en rende compte, m’a beaucoup aidée en tant que doctorante et en tant que personne. Mes nombreux déplacements en Grèce, en France et en Belgique m’ont conduite à la rencontre de chercheurs qui ont eu une influence malgré eux sur mes recherches. Je tiens à remercier chaleureusement Jacky Kozlowski et Stéphanie Haxhi-Huysecom pour leurs conseils, leur honnêteté et leur soutien, ainsi que Christina Mitsopoulou pour nos échanges virtuels à propos de ses recherches en cours. J’aimerai exprimer ma reconnaissance à Sandrine Huber, qui m’a dirigée pour mon master à l’époque où elle était à Lille, et m’a soutenue ensuite dans mes recherches mais également dans mes projets plus personnels. Cela m’aide à me rappeler qu’en 3 LA PLACE DES ANIMAUX DANS LA RELATION MORTELLES-DIVINITES : LE CAS D’ARTEMIS ET DEMETER dehors de la thèse, nous sommes avant tout des personnes. J’en profite pour adresser toute ma gratitude à Adrien Bossard, un temps directeur du Musée archéologique de l’Oise, nouvellement au Musée Guimet de Paris, pour m’avoir permis de m’exprimer à de nombreuses reprises dans l’enceinte de son musée et de publier mon premier article scientifique. Marion Muller-Dufeu a également toute ma reconnaissance, que ce soit pour sa grande maîtrise du grec ancien ou sa chaleur humaine dispensée autour d’une tasse de thé. De nombreuses amitiés sont nées du doctorat, notamment dans l’enceinte de l’École française d’Athènes, institution que je ne remercierai jamais assez. Je voudrais adresser à ce propos ma gratitude à Marine, mon hébergeur attitré lors mes séjours parisiens à la Sorbonne, Adeline et Élise, mes lyonnaises préférées, Alexandra, dont les conseils sont toujours précieux et Pauline, qui, même si nous ne partageons pas la même civilisation antique, m’a accompagnée jusqu’aux Météores. Pour avoir partagé avec moi une voiture le temps de plusieurs journées, j’adresse un message à Lou et Anaïs, accompagné de cette image inoubliable du soleil se couchant sur Corinthe. Enfin, je termine avec Matiline, qui n’a rien à voir avec le domaine de l’archéologie mais qui a rejoint récemment le cercle des doctorants non financés, après m’avoir demandé maints conseils. Même si la thèse a pris ces six dernières années une grande part dans ma vie et certaines personnes étaient là pour me rappeler que j’avais également une vie privée et d’autres passions, ainsi que quelques projets un peu fous. En premier lieu, je ne saurais commencer cette liste par une autre personne que Jonathan, ma plus belle amitié, mais aussi Maxime, mon aide psychologique la plus infaillible, toujours présent, toujours optimiste, et Christophe, mon ex-compagnon qui m’a suivie jusqu’à mi-parcours mais me soutient encore. Ensuite, il y a mes belles amitiés lilloises, qui ont supporté durant toutes ces années mes lamentations doctorales sans trop les comprendre : Julie, Adèle, Louise et Maureen en tête, ainsi que tous les autres. Merci également à mes relecteurs volontaires, qui n’ont pas forcément compris toutes les notions qu’ils étaient en train de corriger. Enfin, tout récemment, s’est invitée dans ma vie une nouvelle personne que je n’attendais plus et qui, malgré le début de notre relation, m’offre tout le temps, la douceur, la sérénité et l’énergie dont j’ai besoin pour terminer ma thèse sereinement : Manuel. Je tiens également à remercier ma famille, pour leur intérêt à propos de mes recherches, et en particulier mes parents et ma sœur, même s’ils ne comprennent toujours pas clairement ce que je fais. Ils me laissent juste faire ce que j’ai décidé, me soutiennent de leur mieux et je les remercie pour ça. Même s’il est trop jeune pour saisir toute la difficulté de la thèse, je souhaite adresser mes remerciements à mon neveu, qui est né alors que j’étais à Athènes et qui m’accompagne toujours à l’aéroport lors de mes déplacements. Aussi, je pose ici quelques lignes amicales à mon chat, qui partage mon studio et mon quotidien depuis le début de l’aventure, qui a du supporter mes absences répétées et qui ne doit son nom qu’à mon amour de la Grèce antique : Sappho. Enfin, je souhaiterai remercier en tout dernier lieu Arthur Muller, mon directeur de recherche. Il a su croire en moi au moment où je n’en étais pas capable. Il a su diriger et gérer justement mes recherches, tout en prenant en compte mes passions dévorantes et la difficulté d’une thèse non financée. Il a fait de ce doctorat une aventure scientifique, archéologique, passionnante, humaine et inoubliable. 4 INTRODUCTION 1. PRESENTATION GENERALE 1.1. Dévotion et offrande en Grèce antique 1.1.1. Divinité, dédicant et offrande La religion grecque repose en grande partie sur la pratique d’actes rituels au sein d’un sanctuaire : la mise à mort et la consommation d’un animal sacrifié et le dépôt d’offrandes votives. Les lieux de culte se situent au centre ou à la périphérie de la cité, sur l’acropole, l’agora, mais également sur les pentes des montagnes ou autour des marais1. Séparé de l’espace profane, le territoire sacré, appelé téménos, appartient généralement à un seul dieu, même si des associations divines existent2. Le sanctuaire est ainsi dédié à une divinité dont le nom est souvent accompagné d’une épiclèse, qui précise la personnalité qu’elle revêt localement3. W. Burkert donne quatre critères permettant de distinguer un dieu des autres : le culte local avec son programme rituel et son atmosphère, le nom de la divinité, les mythes associés et enfin l’iconographie4. Ainsi, un Zeus Philios n’aura pas le même pouvoir qu’un Zeus Meilichios : le premier garantit la convivialité d’un repas tandis que le second est lié au monde souterrain5. Ainsi, puisque les sphères d’activité des divinités changent suivant le culte, les offrandes retrouvées dans les sanctuaires, ainsi que les animaux sacrifiés, diffèrent elles-aussi. Le dédicant, suivant la nature de sa demande, se tourne vers un dieu avec une épiclèse spécifique et lui offre un objet particulier, dont la fonction est symbolique. Trois éléments sont donc à prendre en compte dans le geste d’offrande : le fidèle (genre, statut social, demande ou intention), l’offrande (matière, représentation) et la divinité (genre, épiclèse). L’offrande votive instaure une relation entre l’individu et le dieu puisque le fidèle, confronté à une situation, fait un souhait et dépose un don, pour lequel il attend une contrepartie6. Les raisons de cet acte sont multiples et peuvent concerner aussi bien l’individu que la communauté : une maladie, un danger mais aussi une famine, une épidémie ou une guerre7. Le geste de l’offrande n’est pas pour autant un contrat, puisque la divinité n’est pas tenue de réaliser la demande8. 1 BURKERT 2011, p. 125 2 BURKERT 2011, p. 240-242 3 BURKERT 2011, p. 173 4 BURKERT 2011, p. 172 5 BURKERT 2011, p. 173 6 BURKERT 2011, p. 103 7 BRULOTTE 1994, p. 10, BURKERT 2011, p. 103 8 PATERA 2012, p. 57 5 LA PLACE DES ANIMAUX DANS LA RELATION MORTELLES-DIVINITES : LE CAS D’ARTEMIS ET DEMETER 1.1.2. Les différents types d’offrandes Le fidèle cherche à déposer son don au plus près du dieu, généralement dans son temple et près de sa statue, ou encore proche de l’autel9. Contrairement aux sacrifices d’animaux, l’offrande est faite pour durer dans le temps mais, à cause du surnombre, sera mise au rebut plus tard dans une fosse à l’intérieur même du téménos10. En effet, une fois offert, l’objet appartient définitivement à la divinité11. Les ex-votos en métal, par exemple, sont exposés un certain temps dans le sanctuaire avant d’être soit enfouis, soit refondus pour réaliser de nouvelles offrandes à la divinité12. Plusieurs termes désignent l’offrande dans l’Antiquité : δῶρον peut suggérer un cadeau à une divinité mais c’est ἄγαλμα qui est utilisé plus communément. Ảνάθημα suggère quant à lui que l’objet était placé dans un endroit du sanctuaire où il pouvait être vu : pendu à une structure ou un arbre, placé sur une base ou une colonne13. En effet, plusieurs lieux peuvent accueillir des offrandes : certaines ont des trous de suspension pour être accrochées aux colonnes et aux murs, comme les pinakes, et d’autres sont déposées sur des étagères ou dans des niches14. Il existe également des tables d’offrandes, destinées à recevoir spécifiquement les objets, et des banquettes, premièrement utilisées lors des banquets, mais pouvant également servir au dépôt d’objets15. L’offrande peut quant à elle recouvrir plusieurs formes, plus ou moins coûteuses : le sacrifice d’un animal, le don de terres, d’esclaves, de troupeaux16, de cheveux17 mais surtout d’un objet. Tout bien matériel peut être accepté par la divinité comme offrande18 : jouets, poupées, instruments de musique, vêtements, miroirs, peaux et cornes d’animaux, lances, boucliers19, céramiques, pesons20 mais également bijoux. D’autres types d’objets sont plus courants comme les sculptures et les reliefs, ainsi que les figurines en bronze, ivoire, os, or ou en terre cuite. 1.1.3. Le cas des figurines en terre cuite Les figurines en terre cuite se retrouvent dans trois grands contextes : funéraire (elles accompagnent le défunt dans sa tombe), domestique (elles ornent les étagères à partir de l’époque hellénistique) et religieux21. Elles s’opposent à la grande plastique en raison de leur taille mais aussi de leur présence, au sein des sanctuaires, plus nombreuse22. Il y a plusieurs avantages à offrir une figurine en argile : elle est une miniaturisation d’un sujet, facilement manipulable23, et ne coûte pas cher à l’achat, du fait de son matériau (la terre). Les objets sont fabriqués soit de façon unique (modelés, tournés24), soit en série (moulés25). Cette dernière technique a permis de répondre au besoin croissant de figurines en terre cuite, suite à 9 BRULOTTE 1994, p. 282, PATERA 2012, p. 109 10 KOZLOWSKI 2003, p. 110, KOZLOWSKI 2005, p. 466 11 JOST 1992, p. 92, PATERA 2012, p. 83 12 PATERA 2012, p. 91 13 BRULOTTE 1994, p.6, 261-263 14 PATERA 2012, p. 110-111 15 BRULOTTE 1994, p. 275, 290, PATERA 2012, p. 113-127 16 BURKERT 2011, p. 103 17 MAFFRE, TICHIT 2011, p. 161 18 Voir ROUSE 1902, chapitres VI, VIII, XIII. 19 BRULOTTE 1994, p. 12 20 MAFFRE, TICHIT 2011, p. 161 21 MULLER 2003, p. 11 22 MULLER 2003, p. 11 23 POPLIN 2003, p. 9 24 MULLER 2003, p. 12-13 25 MULLER 2003, p. 14 6 INTRODUCTION l’augmentation de la piété populaire : en effet, le recours au moulage demande une main d’œuvre peu qualifiée et permet de faire des figurines rapidement et en grand nombre26. Le répertoire de ces statuettes est majoritairement anthropomorphique mais un nombre non négligeable de représentations animales se retrouve dans les sanctuaires, notamment aux époques hautes27. Longtemps négligées par les chercheurs modernes28, les figurines en terre cuite sont pourtant les témoins d’une pratique rituelle dont l’interprétation exacte reste difficile29. 1.2. La place des animaux dans la relation mortelles-divinités : délimitation du sujet Cette question concerne deux entités qui interagissent constamment dans la religion : la divinité et le dédicant, mais analyse leur rapport via l’animal. Deux déesses ont été choisies pour comprendre ce lien : Artémis et Déméter. Divinité ancienne, Artémis est présente sur les tablettes en linéaire B et a un des cultes les plus répandus en Grèce antique30. Homère l’appelle la Pόtnia Théron, lui conférant une personnalité inquiétante et sauvage31 en adéquation avec son rôle principal : déesse de la chasse et des chasseurs32. D’apparence jeune33, elle est une vierge inviolée et inviolable, à l’image de la nature sauvage qu’elle représente34. Artémis a de multiples facettes, souvent antagonistes : elle est à la fois cruelle et bienveillante, puisqu’elle prend soin des animaux sauvages, surtout les jeunes35, mais les reçoit également en sacrifice36. Tournée vers l’extérieur, elle est la déesse des confins et des frontières37 mais s’occupe également de la vie civique38. Homère la considère comme une jeune fille immature39. Enfin, elle revêt parfois une personnalité agraire, sous l’épiclèse Apanchoménè, et, à ce titre, se voit offrir des statuettes suspendues aux arbres40. Fille de Cronos et de Rhéa, Déméter, de son côté, est surtout connue pour ses cultes à Mystères41 et la fête des Thesmophories. Un Thesmophorion est en effet présent dans chaque cité42 et chaque cité nouvellement fondée se devait d’avoir le sien43, ce qui atteste son fort caractère civique44. Cependant, Déméter est aussi présente dans la ville que dans la campagne45. C’est une divinité agraire, liée à la vie végétale, comme le montrent ses différentes épiclèses (Chloé, la « Verdoyante », Karpophoros, la « Porteuse de fruits », Malophoros, la 26 MULLER 2003, p. 14 27 MULLER 2003, p. 11 28 KOZLOWSKI 2003, p. 105 29 KOZLOWSKI 2003, p. 116 30 BURKERT 2011, p. 209 31 BURKERT 2011, p. 209 32 JOST 1992, p. 33, BURKERT 2011, p. 210 33 JOST 1992, p. 18 34 BURKERT 2011, p. 210 35 BURKERT 2011, p. 209 36 LAFOND 1991, p. 425, SOLIMA 2011, p. 229 37 JOST 1992, p. 34, 38 Son culte est présent sur l’acropole et l’agora, LAFOND 1991, p. 431 39 BURKERT 2011, p. 210 40 JOST 1992, p. 27 41 BESCHI 1988, p. 844 42 KOZLOWSKI 2005, p. 445 43 KOZLOWSKI 2005, p. 445 44 S. Karatas note que la plupart des sanctuaires de Déméter sont situés sur une pente de l’acropole, à l’intérieur même de la cité, KARATAS 2012, p. 46 45 ALCOCK, OSBORNE 1994, p. 201. Pausanias répertorie un sanctuaire de Déméter dans 51 cités en Grèce : 21 dans la ville, 18 dans les villages alentours, 24 dans les campagnes profondes, ALCOCK, OSBORNE 1994, p. 205. 7 LA PLACE DES ANIMAUX DANS LA RELATION MORTELLES-DIVINITES : LE CAS D’ARTEMIS ET DEMETER « Porteuse de pommes », Anésidora, « Qui fait germer ses dons »)46, mais également ses attributs, dont l’épi47. Indissociable de sa fille Korè48, elle forme avec Hadès et elle un culte à Éleusis autour de la naissance, la mort et la renaissance, lié au cycle végétal49. Enfin, puisqu’elle a enseigné l’agriculture aux hommes50, elle est la divinité de la nature maîtrisée et de la civilisation. Ả première vue, Artémis et Déméter sont deux divinités opposées mais de nombreux aspects les rassemblent. Ce sont des déesses anciennes du panthéon grec, que les tablettes mycéniennes désignent comme Pόtnia51. Elles sont chacune en charge du corps civique, et plus particulièrement des femmes à différents moments de leur vie : Artémis s’occupe des jeunes filles avant leur mariage, lorsqu’elles sont παρθένοι, puis quand elles accouchent, passant de νύμφες à γυναῖκες52. Déméter, à son tour, va veiller sur elles dans leur rôle de mère et d’épouse. Les déesses se succèdent ainsi auprès des femmes, mais se rencontrent aussi et partagent les mêmes champs d’action. Enfin, les deux divinités ont été choisies parce qu’elles reçoivent le plus d’offrandes de figurines en terre cuite parmi le panthéon53, représentant principalement des femmes54. L’enquête s’est donc tout naturellement focalisée sur la relation entre les dédicantes, mortelles fréquentant les sanctuaires, et les déesses Artémis et Déméter, étudiée à travers le prisme de l’animal. Plusieurs sources sont utilisées pour mener à bien cette recherche : littéraires, iconographiques, archéologiques et archéozoologiques55. Si Artémis a un rapport évident avec le monde animal en tant que déesse de la nature sauvage, Déméter semble quant à elle en être, a priori, bien éloignée. L’ensemble du règne animal est pris en compte dans cette étude, que ce soit du point de vue de l’espèce (mammifères, insectes, oiseaux,…), ou de son rapport à l’homme (domestique, sauvage, imaginaire). La recherche exclut cependant certaines créatures hybrides qui tiennent plus de l’homme que de l’animal, comme le centaure et le satyre. Compte tenu de l’abondance des informations, seuls les sanctuaires d’Artémis et de Déméter situés en Grèce centrale, en Asie Mineure, dans la mer Égée, ainsi qu’en Crète et dans l’île de Rhodes ont été pris en compte, suivant le découpage de l’Inventory of Archaic and Classical Poleis56 (pl. 119). Cependant, certains objets hors de cette limite géographique, retrouvés en Grande Grèce notamment, sont incorporés dans l’étude, uniquement à but iconographique57. En effet, des artefacts, comme un vase ou une figurine, peuvent étayer une hypothèse, sans forcément provenir d’un des sanctuaires étudiés dans le corpus. De plus, une limite temporelle a également été mise en place : l’enquête se borne principalement aux époques archaïque, classique et hellénistique, même si des exemples mycénien, géométrique et romain peuvent apparaître. 46 BESCHI 1988, p. 846 47 DES PLACES 1969, p. 48, BESCHI 1988, p. 846, BURKERT 2011, p. 222 48 BURKERT 2011, p. 223 49 KARATAS 2012, p. 67 50 Déméter apprend l’agriculture à Triptolème, fils de Céléos, roi d’Éleusis, Apd. I 5.2. 51 Athéna porte aussi ce titre, DIETRICH 1973, p. 181. 52 JOST 1992, p. 34 53 MAFFRE, TICHIT 2011, p. 149, HUYSECOM-HAXHI, MULLER 2015b, p. 427 54 HUYSECOM-HAXHI, MULLER 2015b, p. 438 55 Voir plus loin, § 1.4. 56 IACPoleis 2004. L’île de Thasos est par exemple considérée comme faisant partie de la mer Égée. 57 Voir plus loin, § 1.4. 8

Description:
abroad, or from public or private research centers. La place des animaux dans la relation mortelles-divinités: le cas d'Artémis et de Mollusques (25 espèces identifiées, 88 % âge du bronze, 22 % époque MNC 625).
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