Bernard Werber L'Empire des anges Que pensent les anges de nous ? Que peuvent-ils faire pour nous aider ? Qu'attendent-ils de l'humanité en général ? Lorsque Michael Pinson (stupidement tué dans un acci- dent d'avion percutant un immeuble) a passé avec succès l'épreuve de la « pesée des âmes », il a accédé au royaume des anges. Mais passé le premier émerveillement, il découvre l'ampleur de la tâche. Le voilà chargé de trois mortels, qu'il devra désormais gui- der et aider tout au long de leur vie. Ses moyens d'action : les rêves, les signes, les médiums, les intuitions, les chats. Cependant, il est obligé de respecter le libre arbitre des hommes. Il s'aperçoit que ceux-ci essaient de réduire leur malheur au lieu de construire leur bonheur. Que faire pour leur montrer la voie ? Et puis comment s'occuper intelligemment au Paradis, un endroit bien sympathique mais sans cinéma, sans musique, sans restaurant ? Après Les Thanatonautes, Bernard Werber nous donne une fois de plus à réfléchir sur notre statut d'être humain, en mélangeant sagesse ancienne, philosophie moderne et humour. En suivant l'initiation d'un ange, on découvre une perspective étonnante à notre état de simple mortel. Un livre étonnant, foisonnant d'idées. Un roman léger qui porte à réfléchir. Valérie Colin-Simard, Psychologies. Ce livre vous est proposé par Tari & Lenwë A propos de nos e-books : Nos e-books sont imprimables en double-page A4, en conservant donc la mise en page du livre original. L'impression d'extraits est bien évidemment tout aussi possible. Nos e-books sont en mode texte, c'est-à-dire que vous pouvez lancer des recherches de mots à partir de l'outîl intégré d'Acrobat Reader, ou même de logiciels spécifiques comme Copernic Desktop Search et Google Desktop Search par exemple. Après quelques réglages, vous pourrez même lancer des recherches dans tous les e-books simultanément ! 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La Révolution des fourmis est venu clore cette trilogie. Bernard Werber a même été mis au programme de certaines classes de français, philosophie et... mathématiques. Il est également l'auteur des Thanatonautes, du Livre du Voyage, du Père de nos pères, et de L'Ultime Secret. Pour Véronique © Éditions Albin Michel S.A., 2000. « Les trois voies de la sagesse sont : L'humour, Le paradoxe, Le changement. » Dan Millman, champion du monde de trampoline. 1. LES COULISSES DU PARADIS 1. JE MEURS « Un jour, on meurt. » Source : individu interrogé dans la rue au hasard d'un micro-trottoir. Donc je meurs. C'est arrivé vite et fort. À l'improviste. Il y a eu un grand bruit. Je me suis retourné. J'ai vu l'avant d'un Boeing 747 (probable- ment égaré suite à une grève des aiguilleurs du ciel) qui surgissait dans ma baie vitrée, fracassait les murs, traversait mon salon, anéantissait mes meubles, pulvé- risait mes bibelots, s'avançait vers moi dans sa course folle. On a beau être aventurier, on a beau se sentir explo- rateur, pionnier des mondes nouveaux, on finit un jour par être confronté à des problèmes qui nous surpassent. En tout cas un avion qui défonce mon salon, c'est un problème qui me surpasse. Tout s'est passé au ralenti. Dans un vacarme halluci- nant, alors que le décor se désagrégeait en mille mor- ceaux autour de moi, et que d'énormes volutes de poussière, de gravats s'élevaient, j'ai entrevu les visages des pilotes. Il y avait un grand maigre et un petit chauve. Ils étaient surpris. Ce devait être la pre- mière fois qu'ils amenaient des passagers directement dans des maisons. Le grand maigre avait le visage révulsé d'horreur alors que l'autre donnait tous les 13 Qui n'avait ja-ja-jamais navigué, signes d'une grande panique. Je ne les entendais pas Qui n'avait ja-ja-jamais navigué... » bien à cause du grondement, mais celui qui avait la bouche ouverte devait hurler fort. C'est quoi après, les paroles ? J'ai reculé, mais un avion en plein élan, un Zut, la mémoire se met en grève elle aussi. Ferme- Boeing 747 qui plus est, ça ne s'arrête pas d'un coup. ture de la bibliothèque. Geste dérisoire, j'ai mis mes mains devant mon visage, j'ai fait une grimace de contrition et j'ai fermé fort les Mon cerveau s'est arrêté, je le sens bien, mais je... yeux. J'espérais encore à cet instant que cette irruption je continue de penser. Descartes avait tort. On peut ne soit qu'un cauchemar. « ne plus être » et « penser encore ». Je fais même plus que penser, j'ai une parfaite conscience de ce qu'il se Là, j'ai attendu. Pas longtemps. Peut-être un dixième passe. De tout ce qu'il se passe. Je n'ai jamais été aussi de seconde, mais il m'a paru très long. Puis il y a eu conscient. le choc. Une immense gifle m'a poussé, puis plaqué contre le mur avant de me broyer. Après, tout est Je sens qu'il va survenir quelque chose d'important. devenu silencieux et sombre. C'est le genre de choses J'attends. Ça y est. J'ai l'impression... J'ai l'impression qui surprend toujours. Pas seulement les erreurs d'ai- que... quelque chose sort de moi ! Une vapeur se guillages aériens des Boeing, mais aussi sa propre fin. dégage. Une vapeur qui prend la forme de mon enve- loppe de chair. Comme un décalque transparent de Je ne veux pas mourir aujourd'hui. Je suis encore moi ! trop jeune. Est-ce cela mon « âme » ? Cet « autre moi » dia- Plus d'images, plus de sons, plus de sensations phane se détache lentement de mon corps par le haut externes. Tsss... Mauvais signes... Le système nerveux de mon crâne. J'ai peur et je suis excité en même dispose d'encore un peu de jus. Mon corps est peut- temps. Puis je bascule. être « récupérable ». Avec de la chance, des secours arriveront à temps, feront redémarrer le cœur, colmate- L'« autre moi » observe mon ancien corps. Il y a des ront par-ci par-là les membres cassés. Je resterai long- petits morceaux partout. Bon, il faut se faire une rai- temps au lit et tout redeviendra progressivement son, à moins de trouver un très bon chirurgien pas- comme avant. Mon entourage dira que c'est un miracle sionné de puzzles... il n'est plus récupérable. que je m'en sois sorti. Bon sang, quelle sensation ! Je vole. Je monte. Allez, j'attends les secours. Ils vont venir. Mais Un fil d'argent me relie encore à mon ancienne qu'est-ce qu'ils fabriquent ? J'y suis. À cette heure-ci chair, comme un cordon ombilical. Je poursuis mon il doit y avoir des embouteillages partout. vol et ce film argenté s'étire. Je sais qu'il ne faut pas se laisser aller. La mort c'est un laisser-aller de trop. Il faut faire marcher mon « Il était un petit navire cerveau. Il faut penser. Penser à quoi ? Qui n'avait ja-ja-jamais navigué. » Tiens, à une chanson de mon enfance. C'est moi, le petit navire. Mon corps flotte. Je vole. Je m'éloigne de mon ancien moi. Je distingue un peu « Il était un petit navire, mieux le Boeing 747. L'avion est ratatiné. J'ai une vue Il était un petit navire, 15 14 d'ensemble sur mon ancien immeuble. Il ressemble à Au moment où je quitte la « vie », je me rends un mille-feuille : les étages se sont écroulés les uns sur compte que j'ai toujours considéré la mort comme les autres. quelque chose qui n'arrive qu'aux autres. Une légende. Je plane au-dessus des toits. Je suis dans le ciel. En tout cas une épreuve qui aurait pu m'être épargnée. Mais qu'est-ce que je fais là ? On meurt tous un jour. Et pour moi ce jour c'est aujourd'hui. «Je suis professeur à la faculté d'anthropologie de Paris et je crois pouvoir répondre à votre question. On «Je crois qu'après la mort, il n'y a rien. Rien de peut dire que la civilisation humaine est apparue dès rien. Je crois qu'on atteint l'immortalité en faisant des que certains primates ont commencé à ne plus jeter enfants, qui eux-mêmes engendreront d'autres enfants, leurs défunts aux ordures et à les couvrir au contraire et ainsi de suite... Ce sont eux qui transmettent dans le de coquillages et de fleurs. Les premières sépultures temps notre petit flambeau. » ornementées ont été découvertes à proximité de la Source : individu interrogé dans la rue au hasard d'un micro- mer Morte. Elles ont été datées au Carbone 14 à trottoir. 120 000 ans. Cela signifie que, en ces temps reculés, des gens croyaient qu 'à la mort succédait un phéno- mène "magique". On peut remarquer aussi qu'est apparu simultanément l'art non figuratif afin de tenter de décrire cette "magie ". 2. LE GRAND SAUT Plus tard, les premières œuvres fantastiques ont été celles d'artistes s'efforçant d'imaginer "l'après- mort". Probablement d'ailleurs pour tenter de se ras- Je sais que je n'ai plus le choix. La Terre n'est plus surer eux-mêmes... » qu'une poussière au loin. Les fragments de mon ancien corps abandonné là-bas ont été maintenant retrouvés Source : individu interrogé dans la rue au hasard d'un micro- trottoir. par les pompiers. Étonnant, il me semble entendre leurs voix. « Quel Quelque chose m'attire là-haut. Une fabuleuse accident ! Un avion qui percute un immeuble ça n'ar- lumière. Maintenant je vais enfin savoir. Qu'y a-t-il rive pas tous les jours. Comment va-t-on faire pour après la vie ? Qu'y a-t-il au-dessus du monde visible ? retrouver les corps dans ce magma de béton ? » Vol au-dessus de ma ville. Bon, ce n'est plus mon problème. Vol au-dessus de ma planète. Mais la fabuleuse lumière m'aspire. Je me dirige Je sors de la zone terrestre. Mon cordon d'argent vers le centre de ma galaxie. Enfin, je le vois. Le conti- s'étire davantage encore puis finit par céder. nent des morts est le trou noir situé au milieu de la Maintenant plus aucun demi-tour n'est possible. Voie lactée. C'en est vraiment fini de ma vie dans la peau de Il ressemble à une bonde de lavabo, un vortex qui Michael Pinson, charmant monsieur au demeurant, fait tout tourbillonner en spirale autour de lui. Je m'ap- mais qui a eu le tort de mourir. proche. On croirait une fleur palpitante, une gigan- 16 17 tesque orchidée formée de poudre de lumière de brouillard ignorant tout du vol aux instruments. tournoyante. Skieurs hors piste qui n'ont pas vu la crevasse. Para- Ce trou noir aspire tout : les systèmes solaires, les chutistes dont la toile s'est transformée en torche. étoiles, les planètes, les météorites. Et il m'emporte Dresseurs de fauves pas assez attentifs. Motards qui se aussi. figuraient avoir le temps de doubler le camion. Je me souviens des cartes du continent des morts. Ce sont les défunts du jour. Je les salue. Les Sept Ciels. J'accoste au... Premier Ciel. C'est un Plus près, m'effleurant presque, je reconnais des sil- territoire conique bleu. On y pénètre à travers une houettes beaucoup plus familières. Rose, ma femme ! écume d'étoiles. Amandine, mon ancienne maîtresse ! Je me souviens. « Chaque année des millions d'êtres humains nais- Elles étaient dans la pièce d'à côté au moment où le sent sur Terre. Ils transforment des tonnes de viandes, Boeing 747 s'est abattu sur notre immeuble des Buttes- de fruits et de légumes en tonnes d'excréments. Ils Chaumont. Et c'est avec elles que j'ai connu la grande s'agitent, ils se reproduisent puis ils meurent. Ça n 'a aventure des « thanatonautes ». rien d'extraordinaire mais là réside le sens de notre Thanatonautes, de thanatos : la mort, et nautês : existence : Naître. Manger. S'agiter. Se reproduire. navigateur. Crever. Le terme avait été forgé par mon ami Raoul Razor- Entre-temps on a l'impression d'être important bak. Une fois que nous avons eu le mot, nous avons parce qu 'on fait du bruit avec notre bouche, des mou- eu la science. Et une fois que nous avons eu la science, vements avec nos jambes et nos bras. Moi je dis : nous nous avons eu les pionniers. Nous avons bâti des tha- sommes peu de chose et nous sommes amenés à deve- natodromes, nous avons lancé la thanatonautique. nir pourriture puis poussière. » Repousser la « Terra incognita de l'après-vie », tel Source : individu interrogé dans la rue au hasard d'un micro- était notre objectif. Nous l'avons atteint. Nous avons trottoir. soulevé le rideau du dernier grand mystère, celui de la signification de la mort des humains. Toutes les reli- Au seuil du continent des morts, je distingue mainte- gions l'avaient évoqué, toutes les mythologies nant des présences. À côté de moi, d'autres morts, telle l'avaient décrit en métaphores plus ou moins précises, une migration complète de papillons monarques, fon- nous étions les premiers à en parler comme de la cent vers la lumière. découverte d'un continent « normal ». Des victimes de la route. Des condamnés à mort Nous redoutions de ne pas pouvoir mener notre exécutés. Des prisonniers torturés. Des malades incu- aventure à son terme. Que ce Boeing 747 se soit rables. Un passant malchanceux qui a reçu un pot de comme par hasard abattu sur notre immeuble est la fleurs sur la tête. Un randonneur mal informé qui a preuve que nous avons fini par gêner en « haut lieu ». confondu une vipère et une couleuvre. Un bricoleur qui Et là je revois ce que nous avons découvert... mais s'est éraflé avec un clou rouillé sans être vacciné en aller simple. Car, nos cordons étant brisés, je sais contre le tétanos. bien que cette fois-ci tout retour dans nos peaux Certains ont cherché les problèmes. Pilotes amateurs anciennes est inconcevable. Nous nous enfonçons dans 18 19