IIlSTORIENS compagnons d'Alexandre COLLECTION D'ÉTUDES ANCIENNES publiée sou1 le patronnage de l' ASSOCIA. T/0.Y GUIi.LA.V.HE BUlJÈ Paul PÉDECH HISTORIENS compagnons d'Alexandre Callisthène - Onésicrite Néarque - Ptolémée - Aristobule Ouvrage publié avec le concours du CNRS PARIS SOCitTJ! D'i;:DITION « LES BELLES LETTRES • 95, 95 BOULEVARD RASPAIL, 1984 La lol du 11 man 1957 n'autorlsànt, aux termes des alln6u 2 et 3 de l'article 41, d'une part, que lea • copies ou reproductlona strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destln6el à une utilisation collective • et, d'autre part, que les analyus et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, • toute représentation ou reproduction intégrale, ou partielle, falte aans le consentement de l'auteur ou de aes ayants-droit •r ou ayants-cause, est llllclte • (Alinéa 1 de l'article 40). Cette représentation ou reproduction par, quelque proeécl6 eue ce soit, comtltueralt donc une contrefaçon sanètloule par les articles 425 et suivants du Code Pénal. 0 Sod6t6 d'8dltlon CLES BELLES LETrRES ., Paris, 1984 LS.B.N. : 2-251-32622-7 LS.S.N. : 0184-7112 A ma chère Yvonne et à nos enfants et au souvenir de Claudine PRÉFACE Ce livre est le développement de confumces que j'ai données aux Universités de Li~ge, de Louvain et d'Erlan gen. Je limitais mon exposé à quatre historiens qui avaient participé à l'expédition d'Alexandre et dont le témoignage, entre tous précieux, était malheureusement perdu et ne subsistait que chez des auteurs secondaires ou dans de pauvres fragments : c'étaient Callisthùte, Onésicrite, Plolémée et Aristobule. D'autres historiens avaient suivi Alexandre en Asie. La tradition nomme Anaximène de Lampsaque, qui semble avoir écrit en rhéteur et en panégyriste ; Charù de Mytilme, qui fut chambellan et huissier du roi et a laissé une œuvre étendue ( au moins dix livres), pleine de détails intimes relatifs à la vie de cour et largement utilisée par Plutarque dans sa Vie d'Alexandre ,· M édios de Larisa, qui appartenait au corps des hétaïres et a vécu dans l'entourage du roi ; son œuvre, sur laquelle on ne possède rien de précis, peut avoir été, suppose-t.on, un livre de souvenirs militaires, agrémenté de détails géographiques et ethnographiques. On peut faire la m~me supposition au sujet de Kyrsilos de Pharsale et de Polyclite de Larisa qui, eux aussi, participùent à l'expédition. Mais aucun de ces historiens n'a eu la notoriété ni le talent ni l'originalité des quatre que j'ai nommés plus haut. Callisthme était un écrivain de métier et un histo rien déjd confirmé, nourri au surplus de la poésie homé rique et des poMes cycliques, lorsqu'il fut promu histo- 8 HISTORIENS D'ALEXANDRE riog raphe officiel d'Alexandre. Onésicrite alliait en lui, curieusement, une culture philosophique et l'expérience de la navigation; en outre, il était doué d'une imagina tion débordanteq ui lui a fait écrire le premier « roman d'Alexandre », où beaucoup de fiction s'est mêlé à un peu d'histoire. Au contraire, Ptolémée et Aristobule ont laissé des œuvres dont le caractère de sobriété et l'impression de véracité ont séduit Arrien au point qu'il les a prises comme sources de son Anabase d'Alexandre. A ces quatre auteurs j'ai jugé utile d'adjoindreN éarque, bien connu grdceà l'Inde d'A rrien et aux extraits de Stra bon; quoiqu'il n'ait racontéq u'un épisode de l'entreprise d'Alexandre, la croisière sur l'océan Indien, il n'a pas moins dégagép ar ce récit, un aspect essentield e la grande conquête asiatique : la découverted 'un monde nouveau. Ces cinq auteurs avaient des tempéraments et des rdles différents. Il en est résulté, dans leur ouvrages, une extrlme diversité, perceptible même à travers les fragments, et ce n'est pas le moindre intérêt que présente leur étude. Ces différences se révèlent principalement à deux points de vue : l'interprétation de la conqulte et l'image d'Alexandre. Bien que la continuité narrative nous manque, à la réserve de Néarque et de Ptolémée, colligése t abrégésp ar Arrien, on s'aperçoitq ue l'aventure qu'ils avaient vécue avait un sens différent pour chacun et que la personne et l'action d'Alexandre leur appa raissaient marquées pour chacun d'un caractèrep ropre. Aux yeux de l'historien moderne cette variété de traits traduit bien le sens complexe de la conquête et la riche nature du conquérant. Le petit nombre des fragments ne permet pas d'obtenir une image complète de certaines de ces œuvres. On peut néanmoins, en les scrutant à nouveau, projeter sur elles des lumières éclairant les intentions et la méthode de chaque auteur. On peut aussi les situer les unes par rapport aux autres. Celle de Callisthène est la premiùe • PREFACE 9 en date : ses fonctions d'historiographe l'obligeaient d la rédiger au fur et à mesure des événements jusqu'au jour où sa fin tragique l'a interrompue. Onésicrite a publié la sienne peu après la mort d'Alexandre : stimulé par l'exemple d' Hérodote et de Ctésias, il était pressé de mettre en circulation le récit de ses aventures extra ordinaires, réelles ou imaginées. Néarque l'a suivi de près: car son récit rabaisse quelque peu le rdle avanta geux qu'Onésicrite avait voulu s'attribuer dans la croi sière océanique. Plus tard, à la fin du IV8 siècle, Ptolémée a composé un récit essentiellement militaire, qu' Arrien a résumé. Enfin Aristobule ne s'est décidé à écrire qu'd l'dge de quatre-vingt quatre ans, d une date qu'on peut fixer entre 286 et 281. Selon toute vraisemblance, l'inten tion de ces deux derniers était de faire une mise au point, appuyée sur leur expérience personnelle, pour redresser l'histoire d'Alexandre, passablement amplifiée et déformée par un courant historico-littéraire, dont Clitarque et la tradition que nous appelons la Vulgate étaient les repré sentants. Au-delà des fragments nommément attribués à ces auteurs, il existe ici et là, chez les écrivains anciens, Plutarque, Strabon et d'autres, des vestiges qui portent leur marque et qu'ils ont visiblement inspirés. On enrichit leur image en les utilisant. Ce livre veut apporter de nouveaux aperçus, fondés sur l'étude de la personnalité de chaque historien et du contexte historique et littéraire dans lequel il a vécu. Mais il ne rend pas inutiles les travaux remarquables qui leur ont été déjà consacrés. L. Pearson a étudié, d'une façon complète « les histoires perdues d'Alexandre le Grand », incluant sous ce titre non seulement les historiens compagnons d'Alexandre, mais encore les auteurs de souvenirs, de bavardages, les propagandistes, les rhéteurs, les « archéologues », et Clitarque, qui ont abordé, de différents points de vue, l'histoire du conqué- 10 HISTORIENS D1 ALEXANDRE rani. Son ouvrage e,st clair, bien informé, judicieux dans l'examen de,s fragments, habile dans se,sj ugements ; il offre un panorama séduisant de toute la littérature J consacrée à Alexandre, de son vivant ( Callisthêne et dans la période qui a suivi sa mort. Auprês de lui il faut placer le commentaire que F. Jacoby a joint à son édition des fragments des historiens d'Alexandre. Il contient un aperçu sommaire de la personnalité et de l' œuvre de chaque écrivain, suivi de notes érudites, rela tives aux fragments, mais non à tous. Naturellement il n'en ressort qu'une vue morcelée, et pour ainsi dire brisée, de chaque ouvrage. Néanmoins, cet appareil savant offre des rapprochements utiles et des perspectives sugges tives dans ce domaine qu'il faut bien reconnattre ingrat. On consultera toujours ces deux travaux avec profit. Je ne fermerai pas cette pré( ace sans remercier la Société d' Édition « Les Belles Lettres », qui continue fièrement la tradition des grands éditeurs humanistes du XV Je et du XIX 8 siècle et qui a bien voulu accueillir mon ouvrage dans sa Collection d'Études Anciennes.