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Histoire de L'Europe PDF

644 Pages·1992·20.131 MB·English, French
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s nt Histoire Poi de l’Europe Sous la direction de r Jean Carpentier et Frangois Lebrun Préface de René Rémond Histoire Histoire de l’Europe . Aux mémes éditions Histoire de France, 1987 sous la direction de Jean Carpentier et Franqois Lebrun en collaboration avec Élisabeth Carpentier, Jean-Marie Mayeur etAlain Tranoy Préface de Jacques Le Goff et coll. « Points Histoire », 1989 sous la direction de J. Carpentier et F. Lebrun en collaboration avec J.-P. Arrignon, J.-J. Becker, D. Borne, E. Carpentier, J.-P. Pautreau et A. Tranoy Histoire de l’Europe PRÉFACE DE RENÉ RÉMOND Édition mise á jour en 1992 Éditions du Seuil Jean Carpentier Inspecteur général de l’Éducation nationale Franqois Lebrun Professeur émérite d’histoire moderne á l’université de Haute-Bretagne-Rennes II Jean-Pierre Arrignon Professeur d’histoire du Moyen Age á l’uni- versité de Poitiers Jean-Jacques Becker Professeur d’histoire contemporaine á l’uni­ versité de París X-Nanterre Dominique Borne Inspecteur général de l’Éducation nationale Élisabeth Carpentier Professeur d’histoire du Moyen Age á l’uni­ versité de Poitiers Jean-Pierre Pautreau Chargé de recherches au CNRS. Université de Rennes I Alain Tranoy Professeur d’histoire ancienne á l’univer- sité de Poitiers Jean Carpentier a rédigé l’introduction. Jean-Pierre Pautreau a rédigé les chapitres 1 et 2, Alain Tranoy les chapitres 3 á 6, Élisabeth Carpentier et Jean-Pierre Arrignon les chapitres 7 á 12, Fran^ois Lebrun les chapitres 13 á 17 avec la collaboration de Jean-Pierre Arrignon, Dominique Borne les chapitres 18 á 23 et Jean-Jacques Becker les chapitres 24 a 29. en couverture : Détail d’une carte portugaise de l’Atlantique (vers 1550) attribuée á Jorge Reinel París, B.N. isbn 2-02-014607-X (isbn 2-02-012494-7, lre publication) © Éditions du Senil, octobre 1990 La loi du 11 mars 1957 interdit les copies ou reproductions destinées i une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite par quelque procede que ce soit, sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants cause, est ilíicite et constitue une contrefa?on sanctionnée par les árdeles 425 et suivants du Code penal. Préface Voici un livre qui assurément vient á son heure: quelle conjoncture historique concevoir plus propice á la publication d’une Histoire de l’Eu- rope que celle oü se rapprochent ses deux moitiés, longtemps disjointes ? II apporte des réponses aux questions que l’actualité pose aux Européens sur leur identité et l’avenir de leur continent. Arrivant á point nommé, ce livre obéit aussi á une nécessité indépendante des circonstances: il nous explique notre temps. Parce que le passé pése encore sur notre présent, nous ne sommes réellement contemporains de notre temps que si nous savons reconnaitre dans les événements d’aujourd’hui les efiets á long terme d’une histoire souvent tres ancienne. C’est presque á chaqué page du livre que sont découvertes des continuités oubliées et rappelés des faits, si éloignés de notre actualité qu’on les croyait sans postérité, qui éclairent soudain d’un jour neuf notre propre temps et le rendent intelli- gible. Tel le partage entre les deux mouvanees, grecque et latine, de l’em- pire de Rome, qui est la matrice de l’histoire de l’Europe et qui explique aujourd’hui encore telle différence. Qui sait si les évolutions divergentes, au sortir de l’emprisonnement par le communisme, de la Pologne, de la Hongrie et de la Tchécoslova- quie d’une part, de la Bulgarie et deja Roumanie d’autre part, ne trouvent pas leur explication demiére dans la división millénaire entre les pays de la tradition latine qui ont échappé á la domination turque et ceux qui, aprés s’étre séparés de l’Occident, ont été pendant des siécles incorporas á l’empire ottoman ? Comprendrait-on l’impuissance de la Grande-Bretagne á régler la question irlandaise, qui est comme une plaie au flanc de la communauté européenne, si l’on ignore la guerre de reli­ gión qui oppose depuis quatre cents ans «l’Ile des saints » á l’Angleterre protestante ? Pour rester dans l’archipel britannique et méme si sa pré- somption méconnait le caractére résolument novateur de la déclaration fran?aise des droits de l’homme et du citoyen, Mme Thatcher n’a pas tout á fait tort de revendiquer pour son pays un certain droit d’ainesse : dés 1215, la Magna Carta arrachée á Jean sans Terre par les barons énon?ait des garanties pour les personnes, et cette antériorité explique que la Grande-Bretagne ait été la mere du parlementarisme. Autre 8 Préface exemple: la défiance séculaire des Tchéques pour la latinité remonte au supplice de Jeán Hus et a été confirmée par la défaite de la noblesse de Bohéme á la Montagne-Blanche: l’identité de la patrie tchéque s’est constituée contre l’Autriche et la Contre-Réforme catholique. C’était une gageure de faire teñir en quelque cinq cents pages toute l’histoire de ce continent: l’Europe n’est-elle pas habitée par l’homme depuis deux millions d’années; quatre mille ans avant l’ére chrétienne, la quasi-totalité du continent était déjá gagnée á l’agriculture et vivait au rythme des travaux des champs. L’usage ancien de l’écriture nous permet de remonter loin dans cette histoire, á la différence des continents réduits á une tradition órale qui ne saurait étre aussi ancienne. De sur- croit, cette histoire est éclatée entre vingt empires et cent peuples. Pari tenu : ce livre est une merveille de synthése qui ne sacrifie jamais l’exac- titude ni la nuance á la clarté et á la fermeté du dessein. J’ai particuliére- ment admiré que, pour une fois, cette histoire ne cede point á la facilité habituelle de se raconter du point de vue de la partie occidentale de l’Europe: l’histoire, moins connue, de sa partie oriéntale, de Byzance á la Russie d’aujourd’hui, se voit restituer sa place qui est grande tant pour la civilisation que pour les rapports de forcé. J’ai apprécié également que l’ouvrage fasse la part belle aux progrés de nos connaissances sur notre passé le plus ancien: le lecteur qui a fait ses études avant 1950 décou- vrira avec surprise l’étendue de ces progrés; pour la préhistoire et plus encore la proto-histoire: des peuples dont le nom méme était inconnu, des civilisations disparues ont été exhumés. A relire á grandes enjambées cette histoire tourmentée, quelques réflexions s’imposent. S’il est un continent dont le peuple n’est ni auto- chtone ni homogéne, c’est bien l’Europe: quelle incroyable diversité de races et de peuples! Les envahisseurs se succédent par vagues qui déferlent de l’Asie généralement, se bousculent les uns les autres et par- courent l’Europe entiére avant de se fixer: les déplacements forcés, qui ont suivi la demiére guerre mondiale, de 10 ou 15 millions d’hommes n’ont fait que renouer avec les grandes migrations qui ont peuplé notre continent, en attendant peut-étre d’autres grands mouvements en prove- nance de l’autre rive de la Méditerranée. Ce récit, parce que attentif á la diversité des situations historiques, fait justice des interprétations téléologiques comme de toute tentative pour découvrir une signification cachée aux événements qui ont jalonné la suite des siécles. Loin de se dérouler de fa?on linéaire, cette histoire fait altemer les périodes constructives et celles auxquelles conviendrait fort l’appellation qui désigne un chapitre de l’histoire russe: le temps des troubles. Cette histoire est autant celle des crises récurrentes que des réussites accomplies. Plus d’une fois se sont produites des cassures dont on pouvait se demander si l’Europe s’en reléverait: aprés la dislocation de l’empire romain, qui entraíne la disparition de l’État et interrompt la transmission réguliére de l’héritage culturel de l’Antiquité, aprés la peste noire au 14' siécle et la cassure de la Chrétienté au 16', l’épreuve de la Seconde Guerre mondiale dont l’Europe sort épuisée. Préface 9 Mais l’Europe a-t-elle jamais existé ? Ses limites ont constamment varié: elle s’est tantót dilatée et tantót rétractée. Ainsi, la Russie a été longtemps écartelée entre l’appel de l’Asie et l’attirance vers l’Europe. Aujourd’hui, l’Europe comme entité coincide approximativement avec l’Europe géographique: la référence de Gorbatchev á la «maison commune » n’exprime-t-elle pas la volonté de la Russie de faire partie integrante de l’unité européenne ? S’il est une évidence qui s’impose au terme de ce survol de quelques millénaires, c’est bien qu’il n’y eut jamais une seule Europe : il y eut de tout temps et il y a encore plusieurs Europes. Les lignes de partage entre elles ont beaucoup varié. Tantót séparant le Nord du Midi: les peuples celtes et germains du monde latín, ou, beaucoup plus tard, l’Europe de la Réforme de celle demeurée dans l’obédience de Rome. Tantót divisant le continent suivant une frontiére courant du nord au sud: dissociant un Orient héritier de la culture grecque, et marqué par la slavisation, d’un Occident influencé par la rencontre entre la culture latine et l’apport ger- manique. Et tout récemment le rideau de fer séparant hermétiquement l’Europe des démocraties pluralistes de l’Europe communiste. Mais la división fut plus souvent tripartite que binaire: ainsi, dans le premier millénaire de notre ere, Latins, Germains et Slaves; depuis le 16' siécle, une Europe catholique, une Europe de la Gentre-Réforme et une Europe orthodoxe; et, dans l’entre-deux-guerres, une Europe de la révolution sociale autour de Moscou, une Europe de la contre-révolution fasciste et une Europe des démocraties parlementaires. A l’intérieur de cet espace, les centres de gravité ont été en constant déplacement: il n’est guére de peuples qui n’aient, un temps, exercé leur imperium sur un territoire excédant largement leurs propres limites natu- relles et historiques; tour á tour l’Espagne, la France, l’Autriche, l’Angle- terre, l’Allemagne, mais aussi le Danemark, la Suéde, la Russie, d’autres encore, ont disposé de la prépondérance. Dans cette división du continent entre plusieurs ensembles séparés, opposés, inégalement déve- loppés, la primauté n’a pas toujours été détenue par la méme partie de l’Europe : contrairement á ce qu’une visión trop courte de l’histoire ferait croire, il n’y a pas eu, de tout temps, une Europe promise á la prospérité et une autre condamnée á la pauvreté: au premier millénaire de notre ere, c’est l’Europe oriéntale qui est l’héritiére du passé prestigieux de Rome, la plus cultivée et la plus développée; alors que l’Europe de l’Ouest, oú l’histoire des derniers siécles nous induit á situer le siége des économies les plus avancées, des États les plus puissant&et des civilisa- tions les plus rayonnantes, s’attardait dans une barbarie rustique. Ensuite le rapport s’inversera. L’histoire de ce continent, le plus petit de tous, intéresse aussi l’his- toire la plus universelle. Car c’est lui qui a eu l’impact le plus détermi- nant sur les autres continents, soit qu’il ait essaimé en suscitant de nou- velles Europes, soit qu’il ait imposé aux autres peuples, avec sa domination, ses cadres de pensée et ses modes d’organisation politique et économique. On bute á ce point sur une des questions les plus essen- 10 Préface tielles et aussi Jes plus troublantes de l’histoire de l’homme sur la terre: d’oü vient que ce soient les Européens'qui ont conquis le monde ? Pour- quoi cette antériorité de l’Europé ? Bref, d’ou ont-ils tiré cette supério- rité ? Judicieusement, les auteurs de cette Histoire ont écarté la tentation de chercher la réponse dans un déterminisme des lieux ou des climats. L’aptitude á inventer est un élément de solution : cette capacité, l’Europé la tenait de la Science grecque et aussi du christianisme qui, en désen- chantant l’univers, frayait la voie á la recherche d’explications ration- nelles. Ainsi, l’Europé n’a pas eu le monopole des inventions: la Chine, avant elle, avait inventé la boussole, le papier, la poudre. Reste que, depuis le 16' siécle, l’Europé a pris une avance décisive qui n’a cessé de s’accentuer jusqu’á notre siécle. C’est, du reste, une des le?ons de cette histoire que les écarts se creusent plus souvent qu’ils ne se comblent, avec d’éclatantes exceptions qui montrent que ríen n’est jamais défini- tivement joué, ni dans un sens ni dans l’autre; ainsi l’Espagne ou la Corée du Sud. Un fácteur s’impose á l’attention par la fréquence des références: le nombre des hommes. C’est une condition sans laquelle rien n’est conce- vable. La poussée démographique a été la cié de l’essor de l’Europé occi- dentale entre le 10e et le 13e siécle. A l’inverse, les périodes de repli ou d’effacement corresponden! á des phases de régression démographique. Quel théme de méditation! Quel sujet d’inquiétude! L’Europé est aujourd’hui un monde creux entouré de mondes pleins, comme elle fut elle-méme jadis un monde surabondant dominant des mondes vides. L’interrogation sur l’avenir de notre continent n’est pas séparable d’une interrogation sur sa démographie. Par comparaison, se dégage la singularité profonde de l’entreprise uni- ficatrice dans laquelle est engagée aujourd’hui l’Europé de l’Ouest: toutes les tentatives antérieures avaient été conduites par une nation qui . aspirait á l’hégémonie et imposait par la contrainte une unité arbitraire. L’absolue nouveauté de la construction contemporaine est de se faire empiriquement, graduellement, á partir de la diversité des nations, par la libre négociation entre États, sur la base de l’égalité entre tous les parte- naires, avec l’approbation des parlements et l’adhésion des opinions publiques par le suffrage de tous. Ce demier chapitre d’une histoire plu- rimillénaire n’est ni le moins étonnant ni le moins gros de conséquences. René Rémond

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