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Histoire de La Bastille: Depuis sa fondation (1374) jusqu'à sa destruction (1789) - Tome 3 PDF

462 Pages·2012·90.152 MB·French
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Preview Histoire de La Bastille: Depuis sa fondation (1374) jusqu'à sa destruction (1789) - Tome 3

Histoire de La Bastille Depuis sa fonDation (1374) jusqu’à sa Destruction (1789) ses prisonniers, ses gouverneurs, ses archives Détails Des tortures et supplices usités envers les prisonniers révélations sur le régime intérieur De la Bastille aventures Dramatiques, luguBres, scanDaleuses évasions, archives De la police suivi De : N otes complémeNtaires sur les persoNNages cités et sur certaiNs faits historiques évoqués daNs ce tome t ome troisième Auguste MAQUET a j f. a , j é a p uguste ean rnoulD ules DouarD lBoise Du ujol clauDe france éDitions - angers Achetez ce livre en cliquant sur le lien ci-dessous : Cet ouvrage a été réalisé par la compilation des éditions de 1844 (Administration de librairie — Paris), 1868 (Bunel — Paris) et 1890 (éditeur inconnu). Les notes complémentaires ont été ajoutées par James Ballyhoo pour Claude France Éditions. La Bastille sous Louis XIV prisonniers : Gourville. — Le surintendant Fouquet. — Pélisson. Élic Blanchard. — Edmond Coquier. — M. de la Bazinière. — I.as Tourra. — Robert Hoyan. — L’Épine. — Villefranche. — Marguerite Carita, dame la Roche-Tudesquin. — Pren- court. — Louis de Rohan. — Affinius Van-den-Enden. — Le chevalier des Préaux. — La marquise de Vilars. — François Seldon. — Exiti. — Bussy Rabutin. — Prési- dent Duguay. — Le duc de Luxembourg. — Bonnard. — Lesage. — Guibourg. — Vigoureux. — Davot. — La Voisin. — La demoiselle de Lagrange. — Le curé Nail. — Madame de Vivonne. — Le comte de Faissac. — Boulanger. — Rémy. — Mar- solier. — Laidane. — Ayedone. — Les Trovalo. — Marie Motar. — Étienne Debray. — Jacques Dechaux. — Jeanne Chanfrais. — Catherine Pélissier. — Berthon. — Vaillant. — Le père de Ham. — Le duc de la Force. — Bernier. — Cardel. — Fon- taine, — Pavillois. — Blisson. — Bouay. — Constantin de Renneville. — Les dames Mallet. — Jean Cardel. — Dubois. — Le Masque de fer. — Moreau. — Madame Guyon. — Odriscole. — Vinache. — Le Maître de Sacy. — Le comte Dubuquoit. — Le duc de Fronsac. — La Motte. — Le prince de !a Riceia. — Delfino. — Graingalet. — Papasodero. — Do Bar. — L’Arménien. — Farie de Garlin. — Dicq. — Guy. — Sandras de Coutilz. — Mollard. — Marie de Brédeville. — Rellevaux. — Mansard. — Inconnus. gouverneurs : Louvière. — Boisemeaux de Montlesun. — Saint-Mars. — Du Jonca, lieutenant. — Bernaville. L e règne de Louis XIV est un de ceux qui ont fourni le plus de prison- niers à la Bastille. C’est le roi qui établit d’une manière fixe et régulière les prisons d’État et les captivités arbitraires. L’appréciation de cette époque, les règlements des prisons, les lettres de cachet appartiennent à ce volume, dans lequel va être déroulé tout ce règne. Nous n’avons à traiter que l’en- fance de la Bastille sous son nouvel aspect, et c’est pour cela que nous avons choisi les prisonniers les plus importants du commencement de ce règne, à une époque où rien n’était encore entièrement réglé. Comme nous l’avons dit, dans le volume précédent, Mazarin était revenu à la cour et s’était mis de nouveau à la tête des affaires du royaume. Ce fut lui qui d’abord, à l’exemple de Richelieu, fit emprisonner à la Bastille quelques personnes de peu d’importance. L’abbé Fouquet, frère du surintendant, était spécialement chargé de cette besogne. Il expédiait les lettres de cachet et faisait un rapport au cardinal toutes les semaines sur les prisonniers. Il leur faisait souffrir mille tracasseries, mille ca- prices, car la réputation de méchanceté de cet abbé était devenue proverbiale. Du reste, les prisonniers étaient si obscurs, que nous n’avons pu retrouver les noms des trois quarts, et que nous avons acquis la conviction qu’il ne leur était rien survenu qui mérite d’être rapporté. Nous n’avons à nous occuper que d’un seul, Gourville, dont 6 Histoire de la Bastille la captivité, si elle ne fut ni longue ni trop sévère, fut du moins basée sur un de ces motifs aussi vagues que légers qui prouvent combien était utile l’article de la sûreté publique, et combien il était oublié. Gourville, valet de chambre de M. de Larochefoucault, s’était élevé par son seul mérite à un rang difficile à conquérir à cette époque. Il était devenu un des traitants des princes, et plus tard, du cardinal Mazarin et du surintendant Fouquet. Il a laissé des Mémoires curieux et pleins de faits dans lesquels, selon notre habitude, nous pui- serons le récit de sa captivité. « En ce temps, dit-il, M. le cardinal se trouvoit souvent fatigué des demandes que faisoit M. le prince de Conti pour lui et quelquefois pour ses amis, qui étoient appuyées par madame la princesse de Conti. Un de ces messieurs de la cabale contre moi, qui étoit auprès de Son Altesse et qui ne m’aimoit pas, étoit venu à Paris, et M. le cardinal s’en étoit plaint devant lui ; il lui dit que c’étoit par mes conseils et que j’avois beaucoup empiété sur l’esprit de madame la princesse de Conti ; que si son éminence me faisoit mettre à la Bastille et faisoit venir M. le prince de Conti, elle verrait qu’il ne lui feroit pas la moindre peine. « M. le cardinal, au commencement d’avril 1656, donna ordre à M. de Bachélerie, gouverneur de la Bastille, de m’y mener. Il vint le lendemain pour cela à mon appar- tement, accompagné de quelques gens, et ayant trouvé un laquais à la porte de ma chambre, il lui demanda si j’étois là et ce que je faisois ; ce laquais lui répondit que j’étois avec mon maître à danser. M’ayant trouvé que je répétois une courante, il me dit en riant qu’il falloit remettre la danse à un autre jour, qu’il avoit ordre de M. le car- dinal de me mener à la Bastille ; il m’y conduisit dans son carrosse, et comme il n’y avoit aucunes personnes de considération, il me mit dans une chambre au premier, qui étoit la plus commode de toutes. J’y fus enfermé avec mon valet pendant huit jours sans voir personne, que celui qui m’apportoit à manger ; mais M. le gouverneur m’étant venu voir, me dit que le surintendant l’avoit prié de me faire les petits plaisirs qui pourroient dépendre de lui, que je pouvois communiquer avec les autres prison- niers, mais qu’il ne falloit pas qu’aucun de mes amis demandât à me voir. « Cela me fit un grand plaisir, m’étant déjà ennuyé au-delà de tout ce qu’on peut s’imaginer. Peu de temps après, un jour maigre, ayant fait venir un brochet fort rai- sonnable, je priai M. le gouverneur d’en vouloir bien manger sa part, ce qu’il m’ac- corda. Nous passâmes une partie de l’après-diner à jouer au trictrac, et j’en fus dans la suite traité avec beaucoup d’amitié. J’avois la liberté d’écrire et de recevoir des lettres, et quelquefois une personne de mes amis venoit demander à voir d’autres pri- sonniers, qui étoient proches de ma chambre ; ainsi j’avois l’occasion de lui pouvoir parler, mais cela n’empèchoit pas que je m’ennuyasse extrêmement, surtout depuis les neuf heures du soir, que l’on fermoit ma porte, jusqu’à huit heures du matin. Je m’avisai pour m’amuser de me faire apporter des fèves que je fis mettre dans des papiers séparés par nombre ; je me promenois dans ma chambre, qui avoit onze pas entre les encoignures des fenêtres, et chaque tour que je faisois, mon valet tiroit une fève du papier et la mettoit sur la table ; comme le nombre étoit fixe, quand j’avois achevé, j’avois fait deux mille pas. La BastiLLe sous Louis XiV 7 « Je fis venir des livres, mais en voulant lire, mon esprit étoit aussitôt aux moyens que je pourrois trouver pour me tirer de là. De sorte que je n’avois presque aucune application à ce que je lisois, et mes amis ne voyoient point de jour à m’en tirer. « Cependant, y ayant entre autres six prisonniers raisonnables, je pensai que si j’avois les clefs de leur chambre et de la mienne, je pourrois faire cacher mon valet au soir, avant qu’on fermât ma porte, et lui donner la clef pour l’ouvrir ; qu’ensuite nous irions faire sortir les autres et que nous pourrions descendre dans le fossé pas un endroit que j’avois remarqué et remonter par l’autre. Pour y parvenir, étant tous six logés dans deux degrés, je trouvai moyen de gagner celui qui avoit soin d’ouvrir nos portes ; je pris les mesures de chaque clef avec de la cire, et je les envoyai dans une boîte à Larochefoucault, pour en faire faire de pareilles par un serrurier habile qui y demeurait. Mais vers le mois de septembre, sachant que M. l’abbé Fouquet étoit fort employé par M. le cardinal pour faire mettre des gens à la Bastille, et qu’il en faisoit beau- coup sortir, je tournai mes pensées de ce côté-là. À ce propos, je me souviens d’un procureur, homme d’esprit et grand railleur, qu’il y avoit fait mettre. Comme nous nous promenions un jour ensemble, il entra un homme dans la cour, qui, y trouvant un lévrier, en fut surpris et demanda pourquoi il était là. Le procureur répondit avec son air goguenard. Monsieur, dit-il, c’est qu’il a mordu le chien de M. l’abbé Fouquet. « Je fis proposer à mes amis de parler à monsieur le surintendant et de voir mon- sieur son frère, si, en parlant de temps en temps à monsieur le cardinal comme il avoit coutume des autres prisonniers, il ne pourroit pas trouver moyen de me faire sortir. Cela réussit si bien que monsieur le cardinal, devant partir deux ou trois jours après pour aller à La Fère, M. l’abbé Fouquet lui porta la liste de tous les prisonniers de la Bastille, comme il faisoit de temps en temps ; il ordonna la sortie de trois dont je fus un. Ayant reçu l’ordre, je sortis aussitôt. » Telle fut la captivité de Gourville, qui, tout en étant moins cruelle que bien d’autres que nous avons vues, ne laissa pas d’être fort pénible et devint surtout un exemple effrayant d’arbitraire. On a vu, du reste, que le récit de Gourville confirme tout ce que nous avons avancé sur le cardinal et l’abbé Fouquet. La Bastille ne fut jamais vide sous son administration. Le cardinal même, voulant user de toutes les ressources que lui présentait cette prison, songea à y nommer une de ses créatures, et fit tom- ber son choix sur M. Boisemeaux de Montlesun, son capitaine des gardes ; mais la Bachélerie, placé là par Louis XIV, et qui d’ailleurs trouvait le poste lucratif, refusait constamment sa démission et faisait agir ses amis. Alors on rendit la place de gouver- neur de la Bastille vénale, comme toutes les autres places. On stipula une indemnité de quatre-vingt-dix mille livres pour acheter la démission de la Bachélerie, et Boi- semeaux entra en fonctions en 1658.Il récupéra largement ses quatre-vingt-dix mille livres en pressurant les prisonniers. Le cardinal Mazarin mourut en 1661. Deux jours avant sa mort, il avait composé lui-même, avec le roi, le nouveau ministère. Le chancelier Séguier était à la justice, Le Tellier à la guerre, Brienne aux affaires étrangères, et Fouquet aux finances. Le cardinal avait donné au roi quelques préventions sur ce dernier et lui avait dit au contraire de Colbert : « Je vous dois tout, sire, mais je crois m’acquitter en quelque sorte envers vous en vous le laissant. » Ces paroles avaient frappé Louis XIV, qui, 8 Histoire de la Bastille tout en approuvant le choix de ses nouveaux ministres, avait répondu à M. Harlay de Chanvallon, président de l’assemblée du clergé, qui était venu lui demander à qui désormais il devrait s’adresser pour les affaires : « À moi. » Et pourtant le surintendant Fouquet, soit qu’il ignorât cette réponse, soit qu’il n’y vit que la présomption d’un jeune homme, avait conçu le projet de dominer le roi et de remplacer Mazarin. Procureur général du parlement de Paris depuis 1650, il avait acheté cette charge au plus fort de la Fronde, afin d’en user comme d’un marchepied qui devait le mener plus haut. Il avait rendu des services réels à la reine mère et au cardinal, et avait sur- tout contribué à conclure la paix par l’ascendant qu’il avait pris sur sa compagnie. Il en avait été récompensé par la charge de surintendant des finances, qu’il avait conser- vée depuis. « Nicolas Fouquet, dit Choisi dans ses mémoires, avait beaucoup de facilité aux affaires et encore plus de négligence. Savant dans le droit et même dans les belles- lettres, sa conversation était légère, ses manières assez nobles ; il écrivait bien. Il vivait au jour la journée ; nulle mesure, se fiant aux promesses de quelques partisans qui, pour se rendre nécessaires, lui faisaient filer les traités, et tant qu’il fut surinten- dant il ne vit jamais deux millions ensemble. Il se chargeait de tout et prétendait être premier ministre sans perdre un moment de ses plaisirs. « Il faisait semblant de travailler seul dans son cabinet à Saint-Mandé, et pendant que toute la cour, prévenue de sa future grandeur, était dans son antichambre, louant à haute voix le grand homme, il descendait, par un petit escalier dérobé, dans son jardin, où ses nymphes, que je nommerais bien si je le voulais, et même les mieux cachées, lui venaient tenir compagnie au poids de l’or. Il crut être le maître après la mort du cardinal Mazarin, ne sachant tout ce que ce cardinal mourant avait dit au roi sur son chapelet. Il se flattait d’amuser un jeune homme par des bagatelles, et ne lui proposait que des parties de plaisir, se voulant même donner le soin de ses nouvelles amours. Il était persuadé que les rois étaient assez riches pourvu que les peuples fussent dans l’abondance, maxime bonne en elle-même, qu’il outra en répandant à pleines mains l’argent du roi et lui laissant manger ses revenus deux ou trois ans par avance. Ses vues particulières lui faisaient négliger le bien de l’État. Il donnait pour quatre millions de pensions à ses amis de cour qu’il croyait ses créatures, et était d’assez bonne foi pour compter sur eux. » Tel est le portait le plus fidèle, assure-t-on, qu’a tracé de lui son contemporain. Avec ce caractère et cette confiance, Fouquet ignora longtemps l’ennemi puissant qu’il avait auprès Louis XIV. C’était Colbert, alors simple conseiller d’État, mais dès ce jour adonné à l’étude des finances et voulant à tout prix la place de ministre de ce département que possédait son rival. Le roi demandait chaque jour à Fouquet des états de situation ; chaque jour il lui en remettait, et le lendemain Louis XIV détruisait par des objections les chiffres qui lui étaient présentés. C’était Colbert qui, consulté par le roi, dictait ses observations. Fouquet apprit enfin tout ce ma- nège. Dès ce jour il se tint sur ses gardes et accepta la lutte. Les deux rivaux s’atta- quèrent ; mais l’un, Fouquet, agit ouvertement, avec franchise ; l’autre, Colbert, sourdement, avec hypocrisie. La BastiLLe sous Louis XiV 9 Un matin, vers le milieu du mois d’août de l’année 1661, Fouquet, infatigable dans le travail, avait passé la nuit à dicter à un de ses secrétaires des dépêches importantes et pressées. Le jour parut, et succombant malgré lui à la fatigue, le secrétaire s’endor- mit. Fouquet, en souriant, s’approcha de lui, retira la plume de ses mains, et continua la dépêche commencée, après avoir entouré son secrétaire d’un paravent afin qu’il dormît plus à l’aise. Mais à peine commençait-il à en tracer quelques lignes, que la porte s’ouvrit, et Pélisson, son premier commis, son homme de confiance, et celui qui faisait surtout marcher les affaires de l’État, parut devant lui, un paquet de lettres à la main. Il venait prendre ses ordres et avoir avec lui une de ces causeries familières qui commençaient ordinairement leurs journées. – Eh quoi ! Monseigneur, lui dit Pélisson en voyant les bougies qui brûlaient en- core, vous avez passé la nuit au travail ? Mais vous vous tuez. – Je me reposerai aujourd’hui à Saint-Mandé. – Ce repos de Saint-Mandé vous est peut-être plus funeste que les travaux pareils à ceux de celte nuit. – Allons, allez vous recommencer, monsieur le moraliste ? Vous me connaissez bien, pourtant. Je suis dévoué, avant tout, au roi, dont je suis le ministre. Je veux faire marcher de front, ses affaires et les miennes. – C’est-à-dire vos plaisirs. – C’est ce que j’appelle mes affaires. Or je crois de ma conscience de ne pas donner plus aux unes qu’aux autres. Aujourd’hui je donne ma journée à un charmant rendez- vous ; voilà pourquoi j’ai donné ma nuit aux affaires du roi. Tenez, voyez ces notes et faites exécuter ce travail, si vous n’y avez pas d’objection à faire. Voyons ces lettres. Il prit sa correspondance des mains de Pélisson et décacheta et parcourut les lettres avec une incroyable rapidité. – Ninon de Lenclos a besoin d’argent, s’écria-t-il en jetant une lettre à Pélisson. Pauvre femme ! Son habitude n’est pas de demander ; vous lui enverrez deux mille pistoles. – Oui, monseigneur, dit Pélisson. Ce rapport, reprit-il en examinant à son tour les papiers qu’il avait, ne me parait pas exact. – Vous le rectifierez. Tenez, une lettre de notre amie, mademoiselle de Scudéry, qui me dit que vous abusez de la permission d’être laid. – Et elle d’avoir de l’esprit. – Quatre pages de la marquise de Sévigné. Je lirai cela à Saint-Mandé... Ah ! Made- moiselle de Menneville, il était temps ; écoutez : « Je compatis à la douleur que vous me témoignez d’être allé au voyage de Bretagne, sans que nous ayons pu nous voir en particulier ; mais je m’en console aisément lorsque je songe que semblables visites peuvent nuire à votre santé, et je crains même que vous étant emporté avec trop de violence la dernière fois que je vous vis à Mi-voie, cela ne contribue à votre mala- die. »1 – Vous voyez, monseigneur, que je ne suis pas le seul à moraliser. Ce dossier est parfaitement en règle. 1 Toutes les lettres relatées ont été produites au procès de Fouquet. 10 Histoire de la Bastille – Voyez dès lors ceci, c’est la chose importante. Ce rapport que j’ai remis au roi il me l’a rendu hier, et j’ai mis en marge les objections qu’il m’a faites. – Elles sont sérieuses ; on reconnaît là l’habileté et le sophisme de M. de Colbert. – Colbert ! dit Fouquet avec colère ; oh ! je triompherai de lui... Et partant d’un éclat de rire il lut encore tout haut la lettre suivante de sa belle-sœur : « Ne m’obligez point, je vous prie, à dire un vilain mot de l’homme que vous m’avez donné. Pour moi, il suffit que vous ayez vaincu mes scrupules ; pour moi, je tourne encore les choses d’un autre biais pour me satisfaire : car je m’imagine qu’il ne m’est rien parce que je ne l’ai jamais aimé ; de sorte que je vous promets d’agir dorénavant avec vous comme je ferais avec un cousin au sixième degré ; mais je vous conjure de le mitonner un peu. Il est jaloux et trompé comme mille. » – Ceci est fort plaisant, dit Pélisson ; mais ce qui l’est moins c’est cette note du roi à laquelle je ne sais que répondre. – Bah !... Une heure de conférence ensemble et nous trouverons le moyen. – Il n’en est qu’un. – Lequel ? – Celui que je vous ai souvent conseillé ; avouer au roi que le cardinal Mazarin a épuisé les finances, le lui prouver ; lui dire la position critique dans laquelle elles se trouvent, les ressources que vous vous créez au jour le jour, et obtenir son aveu. – Jamais ! Aller inquiéter le roi, le faire descendre de ses plaisirs et de ses rêves de jeune homme à ces froids calculs de gabelle et d’impôts, l’occuper sérieusement de ses affaires, dont le poids doit retomber sur moi seul... Je vous le répète, jamais ! C’est à moi, son ministre, à trouver des ressources, à travailler nuit et jour pour son service, à user ma vie, mon repos, mon bonheur pour la gloire et la prospérité de son royaume ; c’est à lui de régner heureux et tranquille. D’abord que résulterait-il de tout cela ? Que le roi consulterait Colbert sur la situation que je lui révélerais ; que Colbert la rendrait plus effrayante ; qu’il présenterait ses plans à son tour ; que je lui donnerais des armes pour me battre et qu’il me perdrait peut-être. Non, laissons le roi aux plaisirs, aux amours, aux fêtes, et parlons plutôt de celle que je lui prépare à mon château de Vaux, et au sein de laquelle la faveur la plus haute m’attend. Molière a fini sa comédie des Fâcheux. – Et moi, j’ai fini mon prologue. Mais je vois avec peine, monseigneur, que vous allez négliger encore tout ceci. M. de Colbert a l’oreille du roi. Il est d’autant plus dangereux pour vous qu’il agit dans l’ombre, que vous ne pouvez le saisir, et qu’un jour peut-être... – Tenez, dit Fouquet, qui ne l’écoutait déjà plus, voyez cette lettre de l’abbé Bele- bat. « J’ai trouvé aujourd’hui votre fait. Je sais une fille belle, jolie et de bon lieu, et j’espère que vous l’aurez pour trois cents pistoles. » Vous en enverrez quatre cents à l’abbé : trois cents pour la donzelle et cent pour lui ; et vous ferez dire que je n’en veux pas. Je suis tout à elle maintenant, et je n’aspire plus à de nouvelles conquêtes. – Prenez garde, monseigneur ; j’entends déjà du monde dans votre antichambre, et si l’on vous entendait... – Vous avez raison. Il faut être prudent. En effet, il arrivait déjà beaucoup de monde chez le surintendant, car l’heure de l’audience avait sonné. Ce fut d’abord son maître d’hôtel, chargé de payer des

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