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Guillaume Rivet à André Rivet PDF

181 Pages·2007·1.18 MB·French
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Correspondance de Guillaume Rivet à son frère André Années 1642-1651 Présentée et annotée par Jean Luc Tulot -=- 1642 est marquée le 22 juin par l’arrestation du duc de Bouillon à la suite de sa participation au complot de Saint-Mars contre Richelieu. Il sauvera sa tête en remettant sa principauté Sedan au Roi de France. Guillaume Rivet, comme tous les protestants pouvait craindre pour l’avenir de l’Eglise et de l’Académie de Sedan d’autant que leur plus ferme soutien la duchesse douairière de Bouillon, Elisabeth de Nassau, était morte le 3 septembre. Ces alarmes ne furent pas réalisées le pouvoir respectant les droits de l’Eglise et de l’Académie de Sedan. Les duels étaient une plaie de l’époque dans la noblesse. Si au début de l’année la mort de Frédéric de La Trémoille, comte de Laval, des suites d’un duel à Venise débarrassera les La Trémoille d’un personnage brouillon, la blessure que reçut le prince de Talmont Henri-Charles de La Trémoille lors d’un duel avec le prince de Radziwill faillit compromettre l’avenir de sa maison et son attachement au protestantisme. Parmi ces sombres présages, se produisit un événement heureux pour Guillaume Rivet : il maria au mois de juin sa fille aînée, Marie, à un marchand de La Rochelle Jacques Thomas. 5 janvier 1642 - Taillebourg Monsieur mon très-honoré frère, J’espère que vous aurez receu celle qui est jointe à la description écrit de l’abouchement du jésuite Audebert & de moy1, à laquelle fermée j’adjoutay un petit mémoire de la réception du paquet commis à Monsieur le marquis de La Caze qu’on m’apporta quelques heures après la fermeture de celle qui portoit déclaration du manque qu’il a excusé sur ce que sa male tarda à venir après luy, protestant du désir qu’il auroit de vous servir. En suite de quoy je luy ay représanté ce que vous promettez de faire pour luy en cas qu’il retourne en Hollande & que Dieu vous y conserve. J’ay leu avec singulier contentement & profit ce petit traitté contre les comédies & la rédergation très pertinente de l’impertinent & hardy apalogique pour icelles. Comme aussi la lettre apologétique contre l’évesque de Grasse2 ; en laquelle vous le prenez dextrement par ses paroles & luy faittes cognoistre qu’il fera bien mieux de recognoistre la vérité que de se perdre à vous pour défendre la superstition & idolâtrie découverte par vostre diligence & industrie. J’ay envoyé le traitté & la suitte à ce théologal qui l’avoit demandé. C’est un homme du monde prudent & doux qui lisant sans escrie voit beaucoup, & rien cependant sur le chemin battu qui mène à perdition. Il a jadis presché à Rome en la charge de S. Jean de Latran, en une solennité pour le Roy ne nous espargnant pas ; & maintenant il ronge son os. 1 Cette lettre de Guillaume Rivet à son frère où il fait mention de sa rencontre avec le jésuite Etienne Audebert n’est pas conservée dans la codex 287. André Rivet en fait état dans sa lettre du 6 janvier 1642 à Claude Sarrau. Hans BOTS et Pierre LEROY, Correspondance intégrale (1641-1650) d’André Rivet et de Claude Sarrau, op. cit., tome I, p. 34. 2 Antoine Godeau (1605-1672), évêque de Grasse et de Vence, ancien familier de la marquise de Rambouillet, fut une des figures les plus représentatives de la réforme catholique. 1 J’attendray l’apologie de Monsieur du Moulin, médecin3, avec le livre de son antagoniste, regrettant fort que la nouvelle de Monsieur Vincent pour Monsieur son père ne se trouve pas véritable ; car il me disoit sa convalescence le 5e de novembre ; & vous escrirez le contraire du 9e décembre. Ce que vous m’en mandez revenant bien a ce qu’en disoyent ici les gens de Monsieur de Buillon entre lesquels y avoit un Monsieur de Montault qui tesmoignoit vous honorer fort & disoit vouloir retourner en Hollande ; où j’apprends qu’il a reçeu une défaveur à cause du seigneur qu’il a servi. Pour retournerà Monsieur du Moulin, il est d’ordinaire en mes /2/ prières à Dieu ; à ce qu’il le délivre ou le mettant encore en estat de combattre, en luy donnant la gloire des vainqueurs. J’ay esté bien ayze de voir vostre jugement touchant le livre de Monsieur Amyraut, duquel je n’estois pas éloigné. Il me fait mal qu’en la response à ses horribles reproches contre Dieu en cas qu’il ne sa porte pas és voyes de ces présomptueux & n’ait ses pensées respondantes aux leurs, on entreprenne de le purger tout simplement par un doux raisonnment tedant à les contenter. Et me semble qu’il fait tousjours par préalable s’opposer à l’audace détestable de ces vers de terre tirant en cause & question leur créateur. D’ailleur j’ay bien considéré ce que vous dittes de l’emplastre mis près de la playe. Peut- estre qu’il estoit bien mis dessous ; mais ces gens l’ont b[] de son bien, & gagnent sur la jeunesse. Je ne sçay si le Synode prochain tenant près d’eux ne les choyera point encore plus en conséquence de pis. Je n’ay point parler d’assignation d’iceluy depuis que j’y suis, comme je croy vous avoir mandé. La lettre fort bonne de mon nepveu qui est en Angleterre m’a fort contenté, combien que les nouvelles fussent vieilles. Car son style & tout l’air de son discours tesmoignent du profit qu’il fait en cet employ dans lequel il a eu moyen de paroistre en l’absence de l’Ambassadeur. Et ce n’est pas peu de chose qu’il escrive souvent à Monsieur vostre jeune prince à son gré, sans doubte luy parlant de ses amours. Dieu vueille que ce prince ayant son contentement luy y trouve (comme je l’atten certainement) [un] avancement. Je loueray Dieu aussi apprenant que mon nepveu de Mondevis soit père d’un beau fils ; comme je fay dès à présent sur ce que ayant beaucoup de beaux dons, il devient aussi frugi pater familias. Luy & ma niepce sa femme ne sont point obmis en mes requestes à Dieu. J’ay mandé à mon jeune fils la bénédiction que vous luy donnez en suitte du tesmoignage de Monsieur des Roches. Et ay envoyé à Monsieur d’Agonnay sa lettre, ne sçachant pourtant s’il est en sa maison, car j’oy parler de quelque pensée qu’il a de mariage de considération & pour l’avancement & accommodement des siens. Monsieur Ferreau vous remercie très-humblement du soin que vous avez eu de son fils. Et quant à Madame Thévenot, je croy qu’elle aura son esprit à repos ayant /3/ veu l’extrait de la clause qui la concerne en vos lettre que je luy ay envoyé. Il me reste à vous dire que grâce à Dieu ma femme & mes filles & moy sommes en bonne santé, & prions Dieu pour la continuation de la vostre & de Madamoiselle ma sœur, vous embrassant tous deux cordialement avec mes nepveux ; & souhaittons l’heureux retour de Madamoiselle du Moulin. Derechef, je vous salue de l’affection, Monsieur mon très-honoré frère, Vostre très-humble & très affectionné frère & serviteur Guill. Rivet De Taillebourg, le Ve de l’an 1642. Que Dieu vous doint prospère & heureux. Je vous remercie des nouvelles d’Ecosse & Zélande ; & vous prie me faire part de ce que vous aurez de certain. 3 Louis du Moulin (1605-1680), troisième fils de Pierre du Moulin et de sa première épouse Marie Colignon. Il avait fait ses études de médecine à Leyde. Il fit carrière en Angleterre et occupa la chaire d’histoire à Oxford pendant le protectorat de Cromwell. Il en fut démis lors de la Restauration. Si Louis du Moulin manifestait une orthodoxie rigoureuse en théologie, il faisait preuve d’une recherche originale dans le domaine de l’ecclésiologie. Ce qui lui valut bien des difficultés. Selon le jugement d’Elisabeth Labrousse, il était un théologien amateur forcené, outrancier et gaffeur. 2 Doresnoravant nostre communication sera plus seure puisque Monsieur de La Barre-Morel4, vostre allié, se veut charger des les diriger & que il est cogneu de celuy qui tient le bureau de la messagerie de Saintes. Je ne sçay comment le Sr. Peltrerau marchand de Saintes qui me promettoit d’avancer le port, manque à cela, dont vint ce déchirement de lettre. Je ne faudray de le payer dès Saintes par avance. Quant aux lettres qui vont, & on ne manquera là pour celles qui viennent ainsi que j’en ay tousjours usés. B. U. Leyde, BPL 287/II/1 2 février 1642 - Taillebourg Monsieur mon très-honoré frère, J’ay leu avec grand contentement vostre lettre du VIe de janvier par laquelle j’ay appris la continuation de vostre vigueur parmi tant d’affaires ; & qu’outre les labeurs ordinaires de la nécessité au lieu que vous tenez, vous travaillez tousjours pour le public, tant en la révision de vos œuvres précédentes qu’en ouvrages nouveaux. Entre lesquels outre cette instruction du prince Chrestien par vous premièrement prattiquée pourra venir ce que vous n’avez pas voulu promettre ; accoustumé que vous estes de donner sans y estre obligé. Le jugement favorable que vous faittes de mon comportement en ce pourparlé avec le Jésuite Audebert dont je vous ay envoyé la relation, me fortifie & accourage car ayant tenu cett’affaire pour très important, & qui requéroit de la dextérité pour la manier convenablement & éviter les estrêmes, je me défiois de moy mesme. Aussi ce que vous observez touchant le dessein en icelle ; & les différents ressorts qui jouent ce qu’on doibt éviter & ce qui se peut espérer contre l’intention de ceux qui travaillent à ce mystère d’iniquité est très considérable. Dieu soit loué qu’en Ecosse les Eglises ont paix & l’estat ensemble à la confusion des novateurs. Cela affermie l’Angleterre ; & les deux royaumes unis pourront empescher que l’Irlande ne se perde. Dieu leur donnant de s’y porter vigoureusement. Pour quoy obtenir, il convient l’invoquer assiduellement, & à ce qu’il destourne les machinations de ceux esquels reste du vieil levain. La France est grandement aux prises avec l’Hespagnol, & tient on que le Roy s’achemine à Narbonne en faveur de la Catalogne ; où aussi comme on dit, pour conclure une paix avec les deux frères princes de Savoye. Ce qui donneroit moyen d’unir les forces de ce royaume contre le grand ennemi de cet estat & du vostre. Le prince Thomas qui doibt espérer beaucoup de bien en France comme principal héritier, par la princesse sa femme, de feu Monsieur le comte5, & subjet de penser à cet accord. Quant aux biens ecclésiastiques que possédoit le prince défunt, il en a esté disposé, hormis de l’abbaye de S. Michel en l’Erm, & ce qui en dépendoit en l’isle de Ré, qu’on dit revenir bien à quarante mille livres de revenu. Et c’est de cela & quelques autres revenus qu’on tient pour assuré qui sera establi un episcopat avec chapitre de chanoines à La Rochelle où aussi est desja cette cour souveraine des Salins du Ponant qui oste tout le lustre au Présidial. Mais la ville se rend plus fréquentée & populeuse, où toutesfois n’est /2/ reçeu aucun de nostre religion pour s’y habituer. Mais il reste grâces à Dieu, un grand nombre des anciens domiciliés qui multiplient fort, & la marchandise leur est un employ non infructueux6. 4 Gabriel Morel (1587-1664), sieur de La Barre, un gentilhomme huguenot angevin, était le chargé d’affaires de Marguerite de Rohan à Paris. Par son premier mariage en 1623 avec Anne Gouret, fille de Guillaume Gouret, sieur d'Onglepied et de Jeanne du Plessis, il était apparenté à André Rivet : Isabeau Gouret, la soeur de Guillaume Gouret, épouse de François Oyseau, sieur de Trevecar, était la mère de la première femme d’André Rivet. 5 Thomas de Savoie (1596-1656), prince de Carignan, était l’époux de Marie-Marguerite de Bourbon (1601-1692)), sœur du comte de Soissons. 6 Quoique moins prospère qu’avant le siège, La Rochelle s’était rapidement rétablie de la défaite. A la suite de la vitalité démographique des huguenots qui avaient survécu au siège et de l’arrivée de catholiques sa population était au début des années 1640 de l’ordre de 18 000 habitants. Et, tant les marchands catholiques que réformés avaient repris leur commerce national et international. Kevin C. ROBBINS, City on the Ocean Sea : La Rochelle, 1530-1650. Urban Society, Religion, and PoliJacques tics on the French Atlantic Frontier, Brill, Leiden, 1997, p. 358. 3 Je vous diray sur cela que je suis en propos d’y colloquer ma fille aisné avec une jeune homme de bonne famille7, marchand droguiste, qui a desja boutique faitte, & depuis quelques années fait de bonnes affaires sans bruit. Monsieur Vincent, avec Messieurs Beauval8, Prieur & Manigault qui me sont fort amis, me le conseillent grandement ; & m’asseurent que le personnage est craignant Dieu & fort bon mesnager ; que tant de ce qu’il a maintenant qu’en la moitié qu’il aura au bien de sa mère, qui a un autre fils procuruer au siège, il aura vaillant 90 000 livres. Et que cela n’est pas tant considérable que ce qu’il pourra faire ayant une compagne qui luy sot en ayde. Ce trafiq estant le plus honorable & lucratif qui soit là. La père s’appeloit Thomas, honorable marchand venu d’Oléron, & la mère est de la famille des Barbot9. Pour luy, je l’ay trouvé bien prudent & de bon sens. J’honore tant ma charge que j’ay fort souhaitté pour mes filles qu’il s’en rencontrast de cette condition. Mais il ne s’en est point présenté ; ceux qui ont tant soit peu de quoy prétendans en plus gos mariage que de 3 000 livres, qui est tout ce que je peux donner de présent à chacune de mes deux filles ; m’estant plus retenu quant à mes fils qui m’ont tant cousté, & que j’enten à fin de compte venir en égalité autant. Les uns & les autres rapportant en précomptant tant leur reçeu. Il est vray aussi qu’en ces temps difficiles, je ne voudroye pas colloquer les filles avec des pasteurs qui n’eussent d’ailleurs de quoy soustenir les charges de la maison. C'est pourquoy j'incline fort à cet’affaire, dont les fers sont au feu assés avant. Vous en apprendrez l’événement à la première occasion. Je n’appréhende que l’infirmité de defluxion. Monsieur Vincent nostre bon ami est le directeur de cet’affaire & a procuré que le jeune homme me vint voir avec ma famille & fust veu & entretenu de moy & des miens. Sans découverture du dessein. Depuis nous avons parlé & agi en absence par escrit. Si nous venons au joindre, ce bon personnage me viendra voir & conduira le tout jusques au passement d’un contrast. La poursuitte contre luy est du tout cessée par un accident après avoir eu un accroche par un autre. L’évesque de Saintes10 se défiant de Monsieur de L’Escale11, président & lieutenant criminel, pource qu’il luy reste encore depuis sa révolte quelque bienveillance & amitié avec Monsieur Vincent, fit qu’on s’addressoit au lieutenant-général & civile & que le collège de Monsieur Reveau12, c. à d. l’autre advocat du Roy qui est de Religion /3/ contraire fust l’instiguant. Il poursuivit tant qu’il pût & nostre frère, recula tant qu’il pût, demendant communication de l’Epistre puis temps pour conférer l’impression à son original. Cependant advant grand débat & désordre pour préséance en procession entre les officiers du présidial & de la Cour des Salins. Et sur ce que les présidiaux usèrent de violence, ils eurent tous un venial au Conseil à Paris, interdits cependant. J’enten tous les officiers Catholiques Romains, hormis Monsieur de L’Escale, que la goutte, par bonheur, tint lors en sa maison. L’évesque voulant poursuivre devant luy fit occuper un substitut du procureur du Roy pour l’advocat absent ; substitué qui s’estoit fait preste et n’exerçoit point sa charge depuis trois ans. Le procureur du Roy s’opposa à ce qu’il occupast, tant pour cette raison, que pour ce que c’est contre l’ordre que luy présent & un advocat du Roy et Monsieur Reveau un substitué occupé ; eux deux offrant de faire ce qui seroit de raison si on leur donnoit les mémoires & informations. Le substitué insistant, ils demeurèrent appointé contraires sur leurs droits. Cela tient de longue et jusques en retour & restablissement des autres. Cependant Rodolphe s’eschappa d’une invective ouverte contre Monsieur Vincent qui prit à grand avantage les injure & calomnies de ce garnement. Et j’açoit que ses adversaires malicieux taschassent de supprimer cet escrit qui esteignoit l’action en justice, puis que celluy-là se rongeroit de 7 Jacques Thomas, fils de Samuel Thomas, procureur au Présidial de La Rochelle et de Marie Barbot. Ses parents s’étaient mariés le 8 juin 1602 au temple de Saint-Yon. 8 Jacques Boucher (1601-1674), sieur de Beauval, était un maître-apothicaire de La Rochelle. Il était marié à la fille de Louis Baudier, un cousin des Rivet. 9 La famille Barbot était une des plus anciennes et des plus importantes famille de La Rochelle. 10 L’évêque de Saintes, Jacques Raoul, seigneur de La Guibourgère, était un Breton du Pays nantais. Conseiller au Parlement de Bretagne (1616), sénéchal de Nantes (1621), maire de Nantes (1621-1623), il était entré dans les ordres après le décès de son épouse Yvonne de Charette. Il avait été nommé en 1631 évêque de Saintes. En 1646, il devint évêque de Maillezais. Ce siège fut supprimé en 1648 et transporté à La Rochelle où il exerça son ministère jusqu'a sa mort le 15 mai 1661. 11 Jean de L’Escale (1579-1663), sieur de Grolleau, était le lieutenant criminel et président du présidial de La Rochelle. En 1623, il était encore protestant. Son abjuration eut probablement lieu pendant le siège de La Rochelle. 12 Georges Reveau, conseiller et avocat du Roi à La Rochelle. 4 la sorte comme de pareille, ils ne sçurent que en faire, que les nostres n’en recouvrissent deux exemplaires qu’ils manifestèrent. Ainsi tout cela fut arresté ; l’autre demeurant depeint de ses vifves couleurs à la honte & dépit de ceux qui s’estoyent tant glorifiés de telle conquestes ; et Monsieur Vincent si bien cogneu, ne pouvant estre endommagé par la saillie de tel homme. Toutefois àn l’advenir il ne publiera pas si librement telles vérités de fait. Et y a raison de s’en retenir, combien que Dieu ait fait tomber tout ceci à tel point. Il y a deux jours que des saulniers, ou asniers charians du sel demeurant à Longré, demis lieue de Bois-Baudran13, m’ont escrit que nostre bon parent & ami Monsieur des Roches14 estoit décédé ; & qu’il fut enterré vendredy y eut huit jours, qui estoit le 24e de janvier. Et j’appris d’un gentilhomme que le samedy auparavant il estoit tombé malade à Chef-Boutonne où il estoit allé pour un arbitrage , & qu’il fallut faire venir là le carroçe de Mademoiselle des Roches pour la porter à sa maison . J’en ay un très grand regret, que j’ay tesmoigné par une lettre consolatoire que j’ay envoyé à la povre vefve déconfortée. Je finis avec le papier par les humbles salutations de ma femme & de mes filles & de moy à vous, Mlle ma très chère sœur & mes nepeus, priant Dieu pour vostre prospérité ; & l’heureux accroissement de la famille de mon nepveu vostre aisné, que Dieu bénit avec ma niepce sa femme. Comme aussi celuy qui est à Londres, duquel j’atten toutes choses bonnes. Je suis, grâce au Seigneur es très bonne disposition depuis la mi-décembre, & sans infirmité aucune, et tousjours, Monsieur mon très-honoré frère, Vostre très-humble & très affectionné frère & serviteur Guill. Rivet De Taillebourg, le 2e febvrier 1642. Je n’oublie point Monsieur du Moulin en mes prières à ce que Dieu le regarde en pitié & le remette en attendant qu’il …15 Madame Thevenot sçait bien ce que vous avez presté à son fils. Et je luy ay mandé qu’il demeurera là l’hyver afin qu’elle ne soit en pène. Monsieur Ferreau n’escrit point pour cet heure. Je recognois qu’il appréhendoit que s’il escrivoit lettre de la teneur que demande son fils, il s’en servist pour avoir son congé & s’en retourner tout de bois ; ce qu’il ne dézire nullement. B. U. Leyde, BPL 287/II/3 24 février 1642 - Taillebourg Monsieur mon très-honoré frère, J’ay reçu vos lettres du 28e janvier & les nouvelles qu’il vous a pleu me départir touchant l’Angleterre et en ay fait part à Monsieur Vincent qui sera fort joyeux de voir que vous vous souvenés si particulièrement de luy ; & prendre meilleurse espérance pour les affaires de la Grande-Bretagne sur le rapport du maistre de navire venu freschement de Greenwisch. Dieu vueille toucher les cœurs des dissentans & les voir tous au secours des affligés d’Irlande. J’ay beaucoup de desplaisir de la division de l’Eglise de Brême ; & trouve bien à deloisir ceux qui meuvent ces débats. Comme je trouve estrange l’employ de Monsieur de La Place16 en des questions dont il n’y a nul débat parmi nous ; ni de péril que celuy que sa curiosité affectée avec és esprit frétilleux & tendus aux nouveautés de leurs disciples. J’appréhende ces gens en tout ce en quoy ils s’ingèrent car c’est tousjours pour arguer les autres de mesme parti & relever leurs raisons par dessus. 13 Le manoir de Boisbaudran est situé dans la paroisse de Saint-Fraigne (Charente). 14 Jacques Le Coq, sieur des Roches de Vendœuvre, maire de Saint-Jean d’Angély en 1620. 15 La fin de la phrase est dissimulée par la reliure du registre. 16 Josué de La Place (1596-1665) professeur à Saumur depuis 1633 après un court pastorat à Nantes était jugé aussi dangereux que ses collègues et ami Louis Cappel et Moïse Amyraut. Dans ses thèses il développait que le pêché originel était un héritage de fait et non une responsabilité personnelle de chaque homme. 5 J’ay remarqué en des thèses de Monsieur Cappel qu’il fait un grand effort pour maintenir après Jean Cameron, que Heb. 2. 1617. epilaubaritai est mis pour antilagsaitai ; & que conclusion Apostati esset inamis Tautologia si epilagisanitai significurat hic non copitulari sed (uti à nonnullis accipuitur) assumera in unionum personatem. En quoy il change les signification à leurs phantaisies & prennent des reprises utiles & assés communes en l’escriture pour des tautologies vaines, le tout pour nous oster ce lieu illustre de l’assomption personnelle. Nous verrons que produira le labeur de Monsieur Amyraut qui a esté entrepris à propos. J’ay veu ces jours passés le fils aisné de Monsieur de Couvrelles qui me dit qu’estant à Paris il y vit Monsieur de La Milletière qui luy dit en propre termes : “ Et bien, Monsieur, eussiez vous creu que ce grand personnage, Monsieur de Saumaize, fust enfin venu à mon advis, comme il fait ! ” Sur quoy, je représentay à ce gentilhomme ce que vous m’aviez escrit d’une préface qu’il vouloit faire à un traitté de primate, en laquelle il laveroit ce personnage. C’est /2/ l’ordinaire de telles gens d’en donner à bon escient. Je ne sçay qu’aura fait notre Audebert pour nos affaires particulières. Nous sommes encores en mesme termes pour le mariage de ma fille aisnée, le jeune homme nous ayant veu depuis comme il alloit à Bayonne pour affaire passée dont il retournera bientost. Ce que je vous touchois de l’infirmité de la fille est tel que j’appréhende une fistule lachrymale au canthus de l’œil gauche, en suitte d’une grande defluxion qui luy couvrit tout l’œil. E tout cas il y aura moyen Dieu aydant de la guérir y estant quelque cicatrice après un caustiq. Le personnage ne s’est pas rebutté ; & dist que nous estions tous sujets à infirmité. Je vous envoye des lettres de Monsieur Ferreau qu’il m’envoya dès que j’eus fermé mon dernier paquet. J’ay aussi escrit à Madame Thévenot selon les termes de vostre dernière. Pareillement aye-je donné advis à Monsieur d’Agonnay de ce que vous escrivez de Monsieur son fils. Ce sera à eux d’y pouvoir. Aussi ay je envoyé une lettre à Monsieur de Montaut avec extrait de ce que vous touchez pour son regard. On dit que Monsieur de Bouillon à la commission de la guerre de l’Italie18. Il y a long temps que Monsieur de La Bergadière m’a prié de vous baiser très-humblement les mains de sa part. Je m’en acquitte à présent. Il dénonce entre-ci & S. Jean. J’attendray des nouvelles de mon nepveu de Montdevis & du succès des couches de ma nièpce sa femme ; me resjouissant de l’estat de se père & priant Dieu qu’ils soyent unis ensemble comme il convient. Je salue très-humblement & affectueusement Madamoiselle ma chère sœur à laquelle je souhaitte toute prospérité & de bonnes nouvelles de Monsieur son frère. Ma femme & mes filles vous saluent & embrassent cordialement tous, comme fait, Monsieur mon très-honoré frère, Vostre très-humble & très affectionné frère & serviteur Guill. Rivet De Taillebourg, le 24e fébvrier 1642. B. U. Leyde, BPL 287/II/5 16 mars 1642 - Taillebourg Monsieur mon très-honoré frère, Ayant respondu à toutes vos précédentes, j’attendois de vos nouvelles pour vous escrire et j’espère bien que demain il y en aura à Saintes ; mais néantmoins ce mal ira d’avance avec les lettres de Madame Thevenot. 17 “ Car assurément ce n’est pas à des anges qu’il vient en aide, mais c’est à la postérité d’Abraham ”. Sur l’influence de Cameron sur Cappel Cf. François LAPLANCHE, L’Ecriture, le Sacré et l’Histoire. Erudits et politiques protestants devant la Bible en France au XVIIe siècle, op. cit., p. 181-298. 18 Pour éloigner le duc de Bouillon de France et de Cinq-Mars, Richelieu lui avait fait donner le commandement de l’armée d’Italie. 6 Le jeune homme qui recerche ma fille aisnée a passé ici retournant de Bayonne & y a séjourné deux jours. Monsieur Vincent me mande qu’il s’est retiré fort contant de nostre réception & de l’entretien de ma fille et sa mère, qui à la succession de son fils aisné, faisoit difficulté d’obliger subsidiairement la moitié de son fonds pour la seureté de dot. S’y est plenement résolue si bien qu’il ne reste que à nous assembler pour contracter. Mais j’ay demandé un délay de quelques semenes, durant lesquelles je fay purger ma fille & l’ay mis à une diette de huittaine pour desécher son cerveau humide. On m’a fait espérer qu’elle se portera bien en suitte & qu’il ne faudra point de remèdes tropiques à cette glande lacrymale. Je vous ay escrit ces jours passés par un jeune homme qui va porter les armes en Hollande ; & vous fay sçavoir que j’ay eu lettres de nostre sœur qui se porte fort bien. Il n’y a que le pauvre Monsieur Servant qu’une meschante quarte afflige fort. Monsieur Le Fevre est à présent receveur des traittes à Briou. Cela nous facilitera la communication ; le messager de Saintes à Poictiers le voyant toutes les semènes ; & un frère de Monsieur du Soul marchand à Saintes, s’estant chargé de faire tenir & recevoir nos lettres. Si ce qu’on dit en ce pays est vray, vous estes en grand faste. Car on assure que le 25e fébvrier le Roy & la Royne de la Grande-Bretagne estoyent à Portmouth ; & qu’elle faisoit voile au premier vent menant Madame sa fille à Monsieur vostre jeune Prince son espoux ; que cependant l’Ambassadeur de Messieurs les Estats s’entremettra de l’accord du Roy & de son Parlement, eux tous ayant agrée qu’il le fist. Autres craignent que ce voyage à Portmouth /2/ ait esté pour s’asseurer de ce port contre le Parlement, comme [on] avoit essayé pour celuy de Hul & appréhendant que la fa[ction] malfaisante qui a retardé le secours d’Islande & peut estre causé le souslèvement, entretienne tousjours la mésintelligence. Mais [il] y a quelque sentiment de la Religion en ceux qui conseillent ce Roi, je m’assure de la comtesse de Barry-More & de toute sa famille manifestant quels instruments sont ces malheureux, fera qu’ils seront ind[…] à permettre qu’on le réprime & qu’on face justice. Dieu leur vueille à tous toucher le cœur & regarder sa povre Eglise de son œil de pitié. Ma femme & mes filles vous saluent très-humblement avec Madamoiselle ma sœur & mes nepveux. Moy pareillement qui jouis grâce au Seigneur de santé plène ; & suis, Monsieur mon très-honoré frère, Vostre très-humble & très affectionné frère & serviteur Guill. Rivet De Taillebourg, le XVIe mars 1642. Monsieur Jaussaud19, conseiller en la chambre de Castres, m’ayant escrit une honneste lettre, par laquelle il me ramentoit vostre condemeurement à Leyden il…, il y a v ans, me prie de vous recommander un sien fils qu’il a en la compagnie de Monsieur de La Capelle20, lieutenant-colonel au régiment de Monsieur de Douchamp21. Il adjouste que le lieutenant de cette compagnie là est un mien nepveu, auquel il désire aussi que j’en escrive, adjoustant que vous avez tesmoigné desjà le cognoistre & obligé ce sien fils. Je croy que ce sera Monsieur La Trosnière22, vostre nepveu d’alliance, qu’il aura entendu désigner. C’est pourquoy, je n’ay rien qu’à joindre ma prière à la requeste de ce digne père, à ce que de vostre chef, il vous plaise rendre à son fils les offices possible & le recommander à Monsieur de La Trosnière, lequel je salue très humblement, luy souhaittant toute prospérité. Monsieur Jaussaud est un très digne personnage fort homme de bien & fort docte, comme vous sçavez sans doubte. B. U. Leyde, BPL 287/II/7 19 Louis de Jaussaud (1580-1665), originaire d’Uzès, conseiller à la chambre de l’Edit de Castres. 20 François de Cardouillacq, sieur de La Capelle, était depuis 1637 lieutenant-colonel dans le régiment de Douchant. Lettre d’André Rivet du 29 juillet 1644 à Saumaise. Hans BOTS et Pierre LEROY, Claude Saumaise et André Rivet. Correspondance échangée entre 1632 et 1648, APA-Holland University press, Amsterdam et Maarssen, 1987, p. 371. 21 Louis Duplessis, seigneur Douchant, le 7 novembre 1637 à la suite du décés d’Hercule de Charnacé lors du siège de Bréda, il fut nommé colonel de son régiment formé en 1634. 22 Daniel Pineau, sieur de La Trosnière, lieutenant d’une compagnie du régiment de Douchant, était le deuxième fils de Mathurin Pineau et d’Anne Oyseau et par ce fait neveu par alliance d’André Rivet. 7 30 mars 1642 – Taillebourg De Taillebourg, le xxxe mars 1642. Monsieur mon très-honoré frère, Vostre dépesche du 24e febvrier a donné à moy & toute ma famille matière de louer Dieu de ce qu’il vous a fait grand-père d’un beau fils23. Nous en avons tous tant plus de joye que nous le désirions fort. Et je suis bien fort ayse qu’il se soit rencontré avoir en premier nom celuy que je porte, lequel m’escheut soubs feu Monsieur de La Jarrville24, parce que Monsieur de Bonvouloir25, son prédecesseur, refusa de le vous approprier nonobstant le choix que nostre père vous fit d’un parrain ainsi nommé. Ma pauvre bru, femme de mon Jean, m’a fait présenter deux de ses enfens conservativement afin qu’à défaut du premier, que Dieu luy avoit retiré, l’autre portast ce mien nom. Si elle en a esté encore privée. Je prie le Seigneur de tout mon cœur que celluy la prospère devant luy. Et vous puisse renouveller en toutes. Vous m’avez confirmé ce dont je doubtois ; du voyage de la Royne d’Angleterre26 et sans doubte cette Gazette nous dira son arrivée en Hollande ce qui servira bien aux affaires d’Angleterre, lesquelles prenoyent desja un bon train quoy qu’on nous publie des manifestes bien bouffis des Irlandois & une victoire grande d’iceux, comme prendre de Londres du 22e febvrier. Nous apprendrons la vérité en la suitte des choses ; & j’en espère quelque certitude par vos prochaines. J’ay fort pensé à ce que vous m’avez escrit du Jésuite Audebert adjoint à sirmond. Et attendray avidement vos Animadversions in annot. Hug. Grot. Lesquelles j’esperay bien dès que vous me mandastés n’avoir pas voulu promettre. Cela fera fort de requeste, & très utile en ce temps ; comme aussi l’adjection du livret de Calvin que j’ay releu depuis peu. J’ay pris jour avec Monsieur Thomas au 8e d’apvril pour passer contract ; & auray ici Monsieur Vincent. Dieu aydant. Ma fille gràce au Seigneur s’est fort bien trouvée de la diette & des purgations & saignées à l’entrée & à la sortie. J’appren que les oppressions & douleurs de Monsieur du Moulin sont très grandes & qu’il les dit incroyables enquérant qu’on prie pour sa délivrance. Il n’y personne aimant la vérité qui ne regrette grandement que cette lumière s’esteigne en sa personne par cet aage qui demeure en ses escrits & en la mémoire des lecteurs. Je prie Dieu qu’il luy envoye ce qui luy est nécessaire, & vueille donner aux siens consolation notamment à Mademoiselle ma très chère sœur laquelle j’honore grandement, me sentant très obligé envers elle pour l’honneur qu’elle me fait de m’aymer si particulièrement, comme vous me tesmoignez & comme je l’ay bien creu de sa bonté. Ma femme & moy avec nos filles vous baisons à tous deux très humblement les mains & prions le Seigneur qu’il bénit mes nepveux de plus en plus. C’est, Monsieur mon très-honoré frère, Vostre très-humble & très affectionné frère & serviteur Guill. Rivet Vous avez ici deux lettres de Monsieur d’Agonnay pour son filz. Excusez, si je puis dénier des lettres de recommandation à des cognoissance. Il m’est venu voir aujourd’huy pour cela…27 B. U. Leyde, BPL 287/II/9 23 Guillaume-Louis, premier fils de Claude Rivet, sieur de Mondevis et de Geertruyt Burgersdijk. Il fut baptisé le 20 février 1642 à Leyde. 24 Antoine Hilleret, sieur de La Jarriette, ministre de Saint-Jean d’Angély de 1580 à 1587. Il fut tué lors de la prise de la ville par le duc de Joyeuse. 25 Jean de Launay, sieur de Bonvouloir, ministre de Saint-Jean d’Angély de 1560 à 1580. 26 Henriette-Marie de France avait mené aux Provinces-Unies sa fille Marie qui l’année précédente avait épousé le jeune prince Guillaume II d’Orange. Elle recherchait également pour son époux le soutien de Frédéric-Henri de Nassau. 27 La fin de la phrase est dissimulée par la reliure du registre. 8 22 avril 1642 - Taillebourg Monsieur mon très-honoré frère, Je me retire d’afaire il y a aujourd’huy huit jours, sur l’espérance que j’avois de recevoir quelques lettre de vostre part un jour ou deux après. Et peut-estre qu’à la prochaine vous me ferez part des nouvelles de vostre Cour & de l’Angleterre, où ne s’et pas trouvé ce qu’on espéroit après le départ de la Reyne, l’ulcère estant trop profond. Ces divisions grandes avec le désordre d’Irlande tiennent nos esprits en suspens & nous obligent de regarder à celuy qui seul peut remédier en touchant les cœurs. Cependant pour venir à nostre particulier, je vous diray que le 8e du courant, je fiançay ma fille aisnée avec Monsieur Thomas, duquel je vous avois escrit ; & ay esté bien ayse d’avoir eu vostre advis devant que je donnasse jour. Monsieur Vincent & Monsieur Beauval (qui est le gendre de nostre feu cousin Loÿs Baudier ; & a eu la fille & la boutique, où il a fait & fait encore grandement bien ses affaires), sont venus ici avec le frère du préparlé, procureur au siège présidial, Monsieur Guibert, advocat fort employé, & un jeune homme de bonne façon nommé Darbot, son cousin germain, la mère aagée de LXX ans ayant donné procuration à son fils aisné. Nostre sœur s’y est aussi trouvée & a passé quelques jours avec nous. Je l’ay trouvé toute rajeunie depuis qu’elle s’est défait de ses filles ; tant peut le repos. Elle vous escrit tesmoignant du desplaisir de ne vous pouvoir envoyer son fils ; et toutesfois acquiesçant quand l’occasion se rencontrera, il vous plaira la prendre pour me faire lire la réplique de Monsieur Loys du Moulin28 & l’escrit contraire, comme aussi ce qui sera au jour de vos labeurs. Ma femme est un peu incommodée après la pène qu’elle a pris à l’occasion de nos fiancés. Pour la fiancée, elle est gaillarde. Dieu merci ; & ne luy découle aucune humeur ni de là où y avoit ulcère, ni des yeux ; d’où tousjours luy découloit de temps en temps, la playe estant fermée. La diette & les purgations antendantes & conséquentes ont heureusement réussi par la grâce du Seigneur. Ma femme & moy en avions des inquiétudes très-grandes. Elle & moy & nos deux filles & mon gendre futur qui est venu faire la S. Cène avec sa promise, vous baisons très humblement les mains & à Madamoiselle ma sœur, prions Dieu pour la prospérité de vous deux, de mes nepveux & de toute famille de l’aisné. Je suis, Monsieur mon très-honoré frère, Vostre très-humble & très affectionné frère & serviteur Guill. Rivet De Taillebourg, le XXe apvril 1642. B. U. Leyde, BPL 287/II/10 19 mai 1642 - Taillebourg29 Monsieur mon très-honoré frère, Depuis la réception de vos lettres du VIJe apvril & de celle de Monsieur de La Rivière, j’ay fait un voyage de douze jours & ay visité toute nostre parenté d’Angoumois & Poictou à l’occasion du Synode que nous avons tenu à Verteuil. J’ay veu là Monsieur de Villars & sa famille ; & avec avons esté assemblés en la maison de Monsieur du Colombier30, marié avec une fille de feu Madame de Chante-Perdrix, sœur de Monsieur de Pierre-Blanche31. J’ay aussi logé chez un marchand nommé Turmel, fils de la sœur du bon-homme Monsieur Pacaud, père de Monsieur de Villars. Monsieur de 28 Louis du Moulin, né en 1606, était le troisième fils de Pierre du Moulin. Il fit des études de médecine à Leyde et les compléta à Cambridge et Oxford. Il obtint en 1648 une chaire d’Histoire de l’Eglise à l’université d’Oxford. 29 Cette lettre a été classée à tort parmi des lettres de 1645. 30 Jean Gaschet, sieur du Colombier et de Beauregard. Il était marié à Jeanne Préveraud, fille de x Préveraud, sieur de Chanteperdry et de x Le Coq. 31 François Le Coq, sieur de Pierre Blanche, auteur de la branche des Le Coq de Villefagnan, était le grand-père de Jacques Le Coq, sieur des Roches de Vendœuvre, maire de Saint-Jean d’Angély en 1620. 9 Roche, fils de feu Monsieur Renault & sa femme, fille de feu Monsieur des Roches, se sont trouvez au presche & avec eux Monsieur de Talonnière-Le Coq, fils de Monsieur Le Coq, médecin32. J’avois passé auparavant par Bois-Baudrant & veu cette famille affligée33. A l’issue du Synode, passant par Villefagnan, chez Monsieur Tixeul34, marié avec une de nos cousines, & vef d’une autre, j’ay esté visiter nostre sœur en sa maison près de Melle ; et de là ay donné à S. Maixent, où j’ay veu presque tous nos proches, hormis nostre cousin de Soignon qu’on me disoit malade en sa maison aux champs. Et comme, m’en retournant vers Melle, je pensois allant chés luy, je rencontray en l’allé de l’host de Poictiers un homme de condition qui me dit l’avoir veu qu’il s’estoit acheminé en ville quoy qu’infirme de la fiebvre. A raison de quoy je priay ce personnage de luy faire rapport de ce que j’allois chez luy sans cet advis qui me fit reprendre le grand chemin de ce pays. Je remarque cela pour vous faire entendre pourquoy je ne l’ay pas entretenu sur ce que luy & Dorinière (que je ne trouve jamais en ville) ont pris la provure de vos bois après avoir esté payés , & se disans avoir fait parti dur ce payement. Ce qui n’a pas bonne grâce. On m’a dit qu’iceluy nostre cousin de Soignon se proposoit d’aller en Portugal avec le marquis de La Boulaye qui l’en avoit prié, espérant d’y estre envoyé en ambassade ; mais que cela est changé. Le bon homme Monsieur de La Blanchardière qui a encore de la vigueur s’enquit fort de vous & me fit promettre de vous baiser les mains de sa part. Ce que firent aussi presques tous les autres. Le principal & nostre cousine Deshaye, sa femme, s’enquirent fort de mon nepveu, vostre aisné, se plaignant qu’il les avoit oublié comme ainsi soit qu’il eust lié une estroitte correspondance avec eux. C’est qu’en effet ils s’attendoyent qu’après avoir tiré de vous ce qu’il pourroit, il retourneroit à eux & à leurs erreurs & idolâtries ; à raison desquelles ils l’aymoyent grandement & en triomphoyent. Mais je leur donnay sujet de quitter ces espérances. Je retournay par Brioust ; & y vit nostre niepce & son mari le Sr. Le Fevre. Ils sont là fort commodément. Mon fils prit au autre chemin à son retour, ayant durant le Synode /2/ donné une prédication à l’Eglise qui en fut fort édifiée. Particulièrement Monsieur Villars me tesmoigna qu’il avoit esté édifié & resjoui, l’ayant ouï. J’atten nostre fiancé désormais pour résoudre du jour des nopces que Dieu vueille bénir. Thévenot n’est point encore venu ; & je m’en estonne, craignant qu’il luy soit [arrivé] mésavoeut. Il y eut une horrible tempeste le 7e aprvril un peu avant jour. J’attendray les livres que vous me promettez ; & me tarde à cause du dézir & de l’esp[…] différé. Je n’ay point reçeu de lettre de vous qui m’exprimast les particularités de l’arrivée de la Royne d’Angleterre, dont La Gazette nous a bien entretenu. Ce que je voudrois sçavoir principalement, c’est si la princesse est avec le prince son mary & en la maison de Son Altesse ; où si la Royne sa mère l’a encore près de soy. C’est une chose estrange de voir comme le Roy d’Angleterre fait profession de s’impatienter pour le secours des protestans en Irlande & propose d’y aller en personne avec troupes qu’il vent faire, & l’ordre qu’il veut mettre pour le gouvernement d’Angleterre en son absence, par le moyen de quoy le vray secours d’Irlande est retardé & empesché selon l’estime. Il y a de profonds mystères en tout ce rencontre, lesquels Dieu descouvrira finalement. Mais je crain bien que les pechés de ces peuples n’attirent du mal. On escrit de Paris que le Capucin de Monsieur du Moulin a esté condamné à estre jetté au feu. Ces bons pères sans doubte, en ont esté fort irrités. Mes si Dieu relevoit l’autheur de ce livret, nous en serions bien consolés. J’ay leu au Synode la relation dont vous avez eu copie ; où on a tesmoigné en estre fort satisfait. Et j’ay loué Dieu de m’estre bien porté & mesme afferm estant là & durant tout le voyage, comme ainsi soit que entre les deux des fiancés & de ce voyage, j’aye eu une médiocre venue 32 François Le Coq, né en 1605, sieur de La Talonnière à Javarzay, fils de Pascal Le Coq (1567-1632), doyen de la faculté de médecine de Poitiers et de Françoise de Saint-Vertunien. Il possédait des biens à Chef-Boutonne, Javarzay et Chenéché. Il s'était marié en 1637 avec Charlotte Millet, fille du secrétaire du Roi Urie Millet et de Jeanne Lestreux. 33 Le manoir de Boisbaudran dans la paroisse de Saint-Fraigne (Charente) appartenait à la branche des Le Coq de Villefagnan. Dans sa lettre du 2 février 1642, Guillaume Rivet a fait état du décès de Jacques Le Coq, sieur des Roches de Vendœuvre. 34 Etienne Tixeul, ministre de Villefagnan. 10

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20 François de Cardouillacq, sieur de La Capelle, était depuis 1637 lieutenant-colonel dans le régiment de Douchant. Lettre d'André Rivet du 29 juillet 1644 qui vient à huit ans, lit et escrit fort bien ; & a appris ses déclinaisons & conjugaisons soubs son oncle de Saujon, qui l'a chés soy
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