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Fonctions et problématiques du portrait dans les romans graphiques Maus PDF

115 Pages·2010·5.44 MB·French
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ÉESI UFR de Poitiers 134 rue de Bordeaux 15 rue de l'Hôtel Dieu 16000 Angoulême 86034 Poitiers cedex Fonctions et problématiques du portrait dans les romans graphiques Maus (A. Spiegelman) et La guerre d'Alan (E. Guibert) Élisa Laget Master recherche arts numériques spécialisation bande dessinée Direction de recherche T. Smolderen, H. Scepi, D. Herody Année universitaire 2007-2008 Table des matières : Remerciements Introduction.................................................................................................................4 Partie I — Le portrait et le roman graphique 1. Bref rappel des fonctions du portrait dans l’histoire de l’art A. Le portrait : brève définition...........................................................................7 B. Les spécificités de la peinture de portrait du Ier au XVIIe siècle....................9 C. La fonction testimoniale du portrait photographique....................................21 D. La description littéraire................................................................................22 2. Roman graphique : l’avènement de la bande dessinée d’auteur A. Les formes du portrait en bande dessinée.................................................29 B.Roman graphique : définition et origine.......................................................32 C.Maus et La guerre d’Alan : deux portraits en roman graphique..................33 Partie II — Structure croisée de Maus et La guerre d’Alan 1. Maus : l’échec de l’élucidation du portrait A. Une structure narrative polyphonique.........................................................37 B.Processus.....................................................................................................44 C.Une structure formelle binaire......................................................................49 2. La guerre d’Alan : l’autobiographie comme portrait univoque A. La voix de l’autobiographie.........................................................................53 B. Processus...................................................................................................62 C. Un langage graphique diversifié.................................................................66 3. Le statut particulier de la photographie A. La photographie qui atteste........................................................................71 B. L’ambiguïté photographique.......................................................................73 C. La photographie redessinée.......................................................................74 1 Partie III — Regard critique versus regard poétique 1. Les fonctions fondamentales A. Transmission et commémoration : la fonction de vicariance......................76 B. L’Histoire et le devoir de mémoire..............................................................78 C. La fonction mimétique et testimoniale........................................................80 2 Les fonctions spécifiques A. Maus : le regard critique d’une relation père / fils.......................................81 B. La guerre d’Alan : poétique d’un regard ou le monde selon Cope.............85 Conclusion................................................................................................................91 Bibliographie.............................................................................................................93 Annexes 2 Remerciements : Cette recherche n’aurait sans doute pas vu le jour sans l’accompagnement de Thierry Smolderen ; sa disponibilité, ses conseils et ses réponses ont été une aide précieuse dans l’élaboration de ce mémoire. Je remercie également Gérald Gorridge pour m’avoir conviée à participer au projet Mat ke en 2007 ; cette expérience est en grande partie à l’origine de la réflexion et du travail que je mène autour du portrait. Je remercie Henri Scepi et Denis Mellier pour leurs orientations et leurs conseils, et Dominique Hérody pour sa relecture attentive. Je remercie également Yves Chaudouët, pour m’avoir encouragée à mener les travaux réalisés à l’Atelier Édition, toujours autour de ce thème, ainsi que Delphine Hudry, pour son soutien logistique et sa bonne humeur. 3 Introduction : La bande dessinée a profondément évolué sur le plan international depuis le début du XXe siècle. Vivant une première heure de gloire aux Etats-Unis pendant les vingt-cinq premières années du siècle (période dite de funnies, durant laquelle les auteurs de bande dessinée étaient de véritables stars, qui jouaient un rôle majeur dans la vente des journaux), elle fut ensuite exposée, toujours aux Etats-Unis, au modèle du cinéma parlant Hollywoodien, durant les années trente (développement d'une bande dessinée réaliste, d'aventure), puis aux restrictions sur le papier durant la seconde guerre mondiale, pour subir finalement la concurrence féroce de la télévision et les vagues de protestations des censeurs au cours des années 50 (des comics furent même brûlés en 1950 en raison de leurs contenus « néfaste et perversif »). La reconnaissance dont jouit le médium actuellement (en particulier en Europe) fait suite à sa réévaluation, au cours des années 60 par un certain nombre d'intellectuels et d'artistes (parmi lesquels on compte le cinéaste Alain Resnais, Fellini, Umberto Eco etc.), et par l'apparition d'une bande dessinée d'auteur au début des années 1990. En quelques décennies, la bande dessinée s’est imposée comme un médium (et un moyen d'expression) particulièrement pertinent dans une société qui a vu l’image saturer de plus en plus l’espace public et médiatique, et le lecteur devenir de plus en plus sophistiqué dans son appréciation des possibilités expressives du dessin, et des ambitions littéraires qu'on pouvait attendre d'un tel médium. Aujourd'hui, la bande dessinée n’est plus vue exclusivement comme le support privilégié des récits d’action, où s'affirment des fantasmes de puissance et de violence, sans doute parce que ceux-ci sont exploités plus « efficacement » au cinéma, dans les dessins animés ou les jeux vidéo, supports plus immersifs et plus « transparents ». En réalité, la bande dessinée vit, depuis les années 60, surtout en France, un glissement de fond, qui a entraîné un glissement de forme. Art Spiegelman remarque dans un entretien qu'en général, l’abandon d’un média entraîne soit sa mort, soit sa transformation en terrain d’expression artistique, donc en art1, phénomène qui est peut-être en train de se développer sous nos yeux. Mais cette apparition d'une bande dessinée d’auteur, porte surtout une affirmation de la voix du créateur dans l’œuvre, un aspect qui, loin d’avoir le privilège de ces dernières 1 Bourmeau., S, 1998. « L’enfance d’un art déjà adulte », entretien avec Art Spiegelman, in Les Inrockuptibles, Paris. p.12-13. 4 années, se retrouvait déjà dans les œuvres qui ont le plus contribué à l’évolution du médium depuis son origine (celle de Töpffer au tout premier plan). Cette même approche se manifeste au coeur des œuvres actuelles les plus importantes, aussi ne faut-il pas s'étonner si des auteurs comme Katchor, Spiegelman ou Chris Ware affichent un intérêt authentique pour ce passé longtemps méconnu. Mais la « réinvention » de la voix de l'auteur a surtout permis d’investir des territoires nouveaux, et notamment celui qui nous questionnera ici : le genre du portrait, tant exploré dans l’histoire de l’art. Deux œuvres remarquables émergeront de ces évolutions : Maus, en 1986, et une vingtaine d’années plus tard La guerre d’Alan. À travers cette étude, nous allons tenter de définir les fonctions spécifiques de ces deux romans graphiques, en les rattachant aux grandes fonctions du portrait dans l’histoire de l’art. Parce que ces auteurs les ont déjà décrits comme tels, et parce qu’ils correspondent aux définitions du genre, nous commencerons donc par inscrire Maus et La guerre d'Alan, dans le genre du portrait. Le lecteur qui a lu ces deux œuvres ne peut être que frappé par ceci : leurs bases, la genèse des récits, sont similaires (ou presque). Cependant les auteurs se distinguent par deux œuvres très différentes, écart dû au regard singulier qu’ils posent sur leur modèle et au déploiement de leur talent spécifique. Mais, au-delà des intentions des créateurs, il semble important d’inscrire ces œuvres dans le temps, dans l’histoire. Plus précisément l’histoire de l’art ; d’une part en relevant quelques-unes des grandes spécificités et fonctions du portrait, des origines du genre dans les premières civilisations, accompagné de mythes et de fonctions propres ; puis à travers les siècles et les disciplines, avec la peinture et l’estampe, la photographie, la littérature. Nous verrons émerger différentes fonctions résultant des divers usages sociaux, politiques, symboliques et artistique du genre du portrait. D’autre part en mettant en contexte le médium bande dessinée au sein de l’histoire de l’art, à travers sa création, ses évolutions, en notant quels furent ses rapports avec le genre qui nous intéresse ici. Nous inscrirons ensuite ces œuvres dans les contextes artistiques et éditoriaux qui les virent naître. Toutefois, ce panorama restera très synthétique, son but étant seulement de dégager quelques fonctions incontournables du genre. Dans un second temps, nous nous pencherons plus spécifiquement sur les récits ; nous verrons comment les structures « croisées » de Maus et La guerre d’Alan se répondent, quelles particularités et thématiques elles font émerger. 5 Puis nous dégagerons des fonctions, dont nous constaterons non la singularité mais la filiation qui les relie à certaines des grandes fonctions du portrait dans l’histoire de l’art, énoncées dans la première partie. 6 Partie I — Le portrait et le roman graphique 1. Bref rappel des fonctions du portrait dans l’histoire de l’art Ce rapide aperçu des différentes fonctions de la peinture de portrait du Ier au XVIIe siècle n’a pas pour but d’être exhaustif ; nous dégagerons quelques-unes des spécificités inhérentes au genre en nous concentrant sur certaines périodes, spécificités que nous retrouverons dans l’analyse d’œuvres de la seconde partie. A. Le portrait : brève définition Étienne Souriau définit le portrait ainsi : Au sens général, représentation d’une personne ; mais la définition du portrait comme concept d’esthétique appelle quelques précisions. Dans les arts plastiques, on n’emploie pas le terme de portrait pour la sculpture, et pourtant la chose y existe, mais on dit tête, buste ou statue ; portrait se dit pour une œuvre en deux dimensions, peinture ou dessin. Le portrait est donc déjà interprétation et transcription, donc choix, pour rendre l’apparence extérieure d’une personne, quel que soit le degré de réalisme. Bien qu’uniquement visuel, le portrait peut rendre très sensible la personnalité intérieure du modèle, par de nombreux indices tels que la pose, l’expression de physionomie, etc .1 L’origine du portrait se retrouve dans les mythes et légendes fondatrices de la culture occidentale ; l’origine de la peinture selon Pline l‘Ancien définit le portrait comme la trace de ce qui va disparaître ou de ce qui n’est plus ; celui de Narcisse nous met en garde contre l’homme rendu esclave de son image.2 Étymologiquement, le mot « portrait » s’est formé de l’ancien français à partir du verbe « pourtraire »: « pour » et « traire » dans le sens de dessiner. 1 Souriau, É., 1990. Dictionnaire d’esthétique, Quadrige / PUF, Paris. pp.1161-1162. 2 Voir Arbaïzar, P., Gato, M.-H., Schaeffer, J.-L., 1997. Exposition virtuelle : Faces à faces ou l’art du portrait, extraits du catalogue d’exposition Portraits, singulier, pluriel, Mazan, BNF, Paris. 7 Norbert Schneider1 remarque que ce terme tarda à se préciser ; au Moyen Âge, il englobe largement « ce qui ressemble à », sans faire la distinction de sujet : Villard de Honnecourt, né au XIIIe siècle, publie le Livre de portraiture où il dessine des « figures d’animaux ». Le graveur Abraham Rosse (1602 – 1676) définit le terme de « portraiture » comme l’addition de peinture et gravure. Il faudra attendre la fin du XVIIe siècle pour qu’André Félibien, ami de Poussin, propose une différenciation : « portrait » pour les humains, « figure » pour les animaux, « représentation » pour les plantes. En effet, l’auteur explique que l’époque féodale marquait une symbiose naturelle entre l’homme et l’animal : les animaux étaient considérés comme « personnes », sujets de droits et pouvaient être jugés. La théorie anthropocentriste moderne redéfinira le portrait dès la fin du Moyen Âge, à la Renaissance, en se limitant aux sujets humains. J.-L. Miraux donne quant à lui la définition du portrait de L’encyclopédie de Diderot et Dalembert : L’effigie est pour tenir place de la chose même. L’image est pour représenter simplement l’idée. La figure est pour en montrer l’attitude et le dessein. Le portrait est uniquement pour la ressemblance. On pend en effigie les criminels fugitifs. On peint des images de nos mystères. On fait des figures équestres de nos rois. On grave les portraits des hommes illustres.2 Nous voyons ainsi que la définition du portrait est étroitement liée aux différentes conceptions de l’individu et de sa représentation au cours des siècles ; celles-ci reflètent les mutations philosophiques, religieuses, idéologiques, sociales et politiques des sociétés qui les engendrent. 1 Schneider, N., 1994. L’art du portrait / Les grandes oeuvres européennes 1420 – 1670, Taschen, Cologne. p.10. 2 MIRAUX, J.-P., 2003, MIRAUX, J.P., 2003, Le portrait littéraire, Hachette Supérieur, coll. « Ancrages », Paris. p.38. 8 B. Les spécificités de la peinture de portrait du Ier au XVIIe siècle a. La fonction commémorative du portrait funéraire L’histoire contemporaine attribue l’apparition du portrait à l’Art Romain du 1er siècle de notre ère : la peinture Romaine s’épanouira durant tout le premier siècle de notre ère, et notamment la peinture de portrait. L’art de la décoration pariétale (parois décorées) typique de la peinture romaine présente notamment le portrait d’un boulanger, Paquius Proculus, posant en compagnie de sa femme ; de nombreuses peintures de visages seront également découvertes sur les murs d’une villa de Stabies, près de Pompéi. Dans le domaine de la sculpture, les bustes de Trajan figureront l’empereur dans toute sa puissance, l’un des rares empereurs ayant admis « des portraits où sont nettement perceptibles [...] les stigmates de l’âge et de la lassitude » ;1 la statuaire romaine figurera le peuple Dace dans la tradition de l’image antique des Barbares. Le masque mortuaire se pratiquait également à l’époque, au sein des grandes familles romaines ; une empreinte du visage du défunt était prise probablement à l’aide de cire puis ce masque était posé dans un coffret. L’auteur émet l’hypothèse que c’est cette « précarité » du matériau - le masque ne se conservait qu’une dizaine d’années – qui favorisa l’émergence de la sculpture sur marbre. Toutefois, le culte des imagines maiorum (portrait des ancêtres) faisait l’objet de véritables représentations : Polybe, historien grec qui vécut à Rome au IIe s. av. J.-C., décrit avec admiration la façon dont les grandes familles romaines honoraient leurs ancêtres. Elles conservaient chez elles leurs portraits en forme de masques, les associant en quelque sorte aux deuils de la gens en les faisant porter, lors des funérailles, par des figurants revêtus du costume d’apparat qui correspondait à celui que chacun avait eu de son vivant, selon son rang.2 C’est en Orient que se pratiquera pour la première fois la représentation numis- matique des souverains, pratique qui sera introduite en Occident par Alexandre le Grand et qui perdure encore de nos jours. La peinture romaine de portrait réapparaîtra au IIe siècle avec les peintures funé- 1 Châtelet, A., Groslier, B.-P., 1995. Histoire de l’art, Larousse, coll. In extenso, Paris. p.272. 2 Ibid. pp.249-250. 9

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Roman graphique : l'avènement de la bande dessinée d'auteur courant qu'on a pu constituer des collections entières de ces “apocryphes du
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