ebook img

Et c’est ainsi qu’Allah est grand PDF

174 Pages·1992·0.86 MB·French
Save to my drive
Quick download
Download
Most books are stored in the elastic cloud where traffic is expensive. For this reason, we have a limit on daily download.

Preview Et c’est ainsi qu’Allah est grand

ALEXANDRE VIALATTE ET C’EST AINSI QU’ALLAH EST GRAND Chroniques choisies par FERNY BESSON Préface de JACQUES PERRET JULLIARD ŒUVRES D’ALEXANDRE VIALATTE DANS PRESSES POCKET : Les bananes de Königsberg Dernières nouvelles de l’homme Antiquité du grand chosier L’éloge du homard et autres insectes utiles Les champignons du Détroit de Behring Badonce et les créatures L’éléphant est irréfutable La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. © Julliard 1979 ISBN 2-266-03012-4 PRÉFACE C’est la première fois que j’écris une préface pour un livre que j’ignore : il est en fabrication. Sachant tout de même le nom de l’auteur, j’en suis à la fois tout ému, ravi et inquiet. Je connais un peu le genre de brouillard dans lequel je me prépare à foncer. Il sera constellé, miroitant, plus clair que le jour, odorant de tous les parfums de l’Arabie occitane et parsemé d’épithètes imprévues ou joyeusement piégées, à l’intention des lecteurs malveillants. On me dit encore qu’il s’agit d’un choix de ses chroniques mais Vialatte en a fait dix mille. On me précise alors que toutes celles qui feront le recueil se terminent par l’envoi suivant : « Et c’est ainsi qu’Allah est grand. » Comme son nom l’indique il s’agit d’une divinité auvergnate. J’ai appris que chacune de ces chroniques-là était portée toutes les semaines par l’auteur lui-même à la gare de Lyon pour le dernier train de Clermont et remise en main propre au chef du wagon postal. Elles s’en iraient ainsi dès l’aurore se répandre en Puy-de-Dôme pour l’instruction des bergers. C’est pourquoi je n’ai pu les lire. Mais j’ai oui dire en effet que dans ces régions la notoriété d’Allah doit beaucoup à Vialatte. Depuis le jour, lointain, où l’une de ses chroniques m’est tombée sous les yeux, non seulement j’admire Alexandre Vialatte mais je l’aime. Pour ce faire, nul besoin d’avoir tout lu, il n’est pas auteur à se démentir. Jusqu’ici, très peu de gens ont pu lire tout Vialatte. Du peu que j’ai lu j’ai assez retenu pour dire que son œuvre est du genre astronomique et familier, si familier qu’il en est intraduisible. Des milliers de chroniques en tourbillons d’étoiles éclatées dans le ciel du XIIIe arrondissement, un ciel dont l’univers francophone aurait bien fait de s’éclairer avant que la nuit noire ne tombât. Desdites étincelles j’ai donc eu la chance d’attraper quelques-unes, par-ci par-là, dans la chaleur humaine de ces lieux publics où le miel des chroniqueurs va trouver le plus anonyme et important de sa clientèle. Il me semblait alors que je découvrais Alphonse Allais, La Fontaine et, par moments, Pascal chez le dentiste ou en chemin de fer. Il m’est arrivé ainsi de céder mon tour chez le coiffeur pour ne pas rater le dernier mot de Vialatte. J’ai donc la prétention d’avoir quelque idée de sa manière. Il est d’ailleurs, pour ainsi dire, tout entier dans chacune de ses chroniques. Il a du génie, ne serait-ce que dans le sens où chacun peut avoir le sien, plus ou moins génial. Mais Vialatte en a plusieurs et d’abord celui de la description, en trois mots ou trois pages, en rafale ou coup par coup. La comparaison, prétendue reine du style, n’existerait pas sans la description. Décrire, c’est le commencement du style, un exercice d’école. Pratiquée minutieusement, la description est d’un huissier ou d’un espion. Sélective et interprétée sans scrupule à l’endroit comme à l’envers, elle sera d’un artiste, autrement dit d’un jongleur, au plus beau sens du mot. Le mot, justement : Alexandre Vialatte est un explorateur de mots. On ferait un dictionnaire merveilleusement pédagogique de tous les mots qu’il nous a présentés dans leurs acceptions, implications et situations diverses, légales ou alexandrines. Autre manière : on secoue le pommier, il en tombe une pomme, pour le principe, après quoi c’est une jonchée de tous les fruits du Cantal et du Congo, fraises Héricard et abricots du Zipangu, nids de pie, peaux de balles et plumes d’ange. Ou encore : un nombre incertain d’objets disparates ou même invisibles erraient dans l’espace, cherchant à se connaître, il les saisit au vol et de main à main les voilà qui vont et viennent, jetés, reçus, relancés, multipliés par métamorphose et manipulés de telle sorte que la chose nous renvoie à l’image et inversement. Si ce n’est là qu’amusette, autant dire que le tourbillon de Descartes est un numéro de cirque. Arrivé là, je me surveille : il paraît qu’écrivant de lui on tomberait facilement dans le piège d’imiter Vialatte, ce qui donne, en général, un bide. Dire que Vialatte a plus d’un tour dans son sac et en rester là est d’un esprit bien léger. Ne parlons même pas de procédé, on le prendrait en mauvaise part, mais plutôt de ressources. Il va de ressource en ressource, l’une sortant de l’autre comme un effet de pyrotechnie, et ses jeux de mots ne sont jamais gratuits. La première phrase allume la mèche. Selon la conjoncture atmosphérique elle flamboie, pétille, tisonne, crépite, et quand elle fume c’est pour faire des ronds et jouer avec. Mais Vialatte n’est pas homme à s’amuser en route sans savoir où il va, pas plus qu’il ne va nulle part sans s’amuser ; il peut encore s’amuser à faire semblant. Il peut enfin se mettre en colère et pour de vrai, j’en suis témoin. La création tout entière suffit à sa curiosité. Heureux lecteur qui va découvrir Vialatte. Il apprendra de lui, en petites phrases limpides et frappantes, que les hommes, les bêtes et les choses n’arrêtent pas d’entretenir à leur insu des quantités de relations insoupçonnées, fraternelles ou hostiles, sentimentales ou intéressées, extravagantes, édifiantes ou simplement bizarres, mais toujours instructives. Heureux lecteur qui découvre Vialatte et son gai savoir. Aussi bien pourra- t-il découvrir, à travers un jeu d’images ou dans le sillage d’un proverbe inventé, le cœur qui bat et parfois même l’âme qui se fend. Et c’est ainsi qu’Alexandre est grand. Mettons qu’en France, aujourd’hui, élus par voie de sondage nous comptions, à la toise et au coup de pouce, deux grands écrivains, égaux en grandeur, ils seraient tous deux comparables. Et le troisième eût été Vialatte, mais il est incomparable ; sans compter que l’écrivain qui fait rire ne peut décemment accéder au pinacle. Bien avant de nous connaître il voulait être marin, moi aussi, et nous en fûmes empêchés. Il ne voyait pas assez loin et je calculais trop mal. Nous n’avions pas eu le choix des motifs. Au point de vue moral et du qu’en-dira-t-on, le sien avait tous les avantages de la force majeure qui attire la commisération. Toujours est-il que le vrai bigleux c’était l’oculiste examinateur. Le candidat Vialatte, éliminé pour vue basse, y voyait le jour, la nuit et dans le brouillard et bien plus loin que tous les amiraux réunis. Mais trop loin justement et beaucoup trop de choses prétendues inutiles à la navigation comme au combat. Je le verrais pourtant bien à Trafalgar, et vainqueur. Il y a des cas où l’imagination fait le bonheur de la tactique. Nous fîmes connaissance dans le noir des années 60. C’est aux frontières du Ve et du XIIIe arrondissement que nos chemins se rencontrèrent, nuitamment. On entendait au loin gémir les sirènes du Stratège et craquer çà et là un petit pain de plastic. Voltigeurs-chroniqueurs à l’aile droite des zouaves, nous cherchions le contact avec l’état-major des cavaliers à plume. Pas de valise, rien de lourd dans les poches mais le cœur en berne et la tête en bouilloire. Il ne s’agirait ce soir-là que d’un chaleureux conciliabule, la récréation des affidés. On se partagerait la poudre, on affûterait les couteaux, mais l’idée de pendre Ubu à sa gidouille ferait son chemin. C’est peu après que Vialatte rédigea contre lui le plus terrible réquisitoire. De nos chemins croisés nous fîmes donc et tout de suite un nœud, celui qu’on appelle un nœud plat, le plus solide, simple et vite fait. Ne pas confondre avec le nœud de vache qui est un nœud plat raté, au premier choc il se dénoue. Les choses ont fait si drôlement qu’on ne s’est jamais revus et que Vialatte est mort. Mais le nœud a tenu. Il tient toujours, avec un bout dans l’éternité. Pour finir, je citerai l’un des plus beaux de ses faux proverbes : « Tout le berger n’est pas dans le mouton. » Je dirai donc, avec son approbation : tout le Vialatte n’est pas dans la préface. Jacques Perret CHRONIQUES DE L’ARCHE DE NOÉ Les chroniques rassemblées dans ce volume ont été publiées pour la première fois dans La Montagne. CHRONIQUE D’OCTOBRE ET DE L’ÉCREVISSE Marrons d’Inde et rentrée des classes. – Il faut se dépêcher d’ignorer. – Tristes souvenirs. – Mariage mouvementé de l’écrevisse. – C’est la grand-mère de l’Australien. – Et du Choctaw. – Raisons pour. – Raisons contre. – Ne pas confondre astacopsis et cambarus. – L’homme ne descend certainement pas de n’importe quelle écrevisse. – Labours d’automne. – Grandeur consécutive d’Allah. Les premiers marrons d’Inde tombent le long du trottoir. Tombent comme des plombs, roulent comme des billes. Autrefois, c’était la rentrée. On les chassait à coups de soulier. Ils avaient une couleur huilée, brune et brillante. On discernait dans le brouillard gris la silhouette du kiosque à musique vide comme l’épave d’un bateau naufragé, comme une salle après le bal, comme le lendemain d’une fête. Les grands marronniers étaient roux et le sol couvert de coques vertes. On récitait « rosa, la rose ». Aujourd’hui, la rentrée a eu lieu depuis longtemps. Les élèves de sixième ont déjà commencé à ne pas apprendre le latin. Des spécialistes nous assurent qu’ils en auront la tête mieux faite. Les connaissances barbouillent l’esprit, retardent le jugement et fatiguent la mémoire. On ne saurait commencer trop jeune à ignorer. Le mois est attristé par des souvenirs affreux, comme la naissance de Ravachol et la mort de Charles le Chauve. Le 1er octobre, en 1438, quatorze Parisiens furent mangés par des loups, et le 29 (en 333) Darius battu par Alexandre : plusieurs corbeaux moururent d’obésité. Le 28 nous rappelle l’incendie de l’Opéra qu’on représente encore à Marseille dans certain théâtre de puces : Je président de la République est figuré par une puce mâle qui a la poitrine barrée d’un cordon rouge : le grand cordon de la Légion d’honneur. * ** Le 15 a lieu le mariage de l’écrevisse française et de l’écrevisse américaine

Description:
Étrange destin que celui d'Alexandre Vialatte… De son vivant, méconnu et célèbre : d'une part vénéré par un seul petit groupe d'initiés, d'autre part adulé par les milliers de lecteurs de "La Montagne" qui dévoraient ses chroniques quotidiennes chez le médecin ou le coiffeur. Aujourd'hu
See more

The list of books you might like

Most books are stored in the elastic cloud where traffic is expensive. For this reason, we have a limit on daily download.