o Boubacar Diallo Écritures, réécritures, all Di enjeux dans le roman guinéen r a c a b u o Les nouveaux enjeux du roman africain semblent apporter des modifications B notoires dans l’esthétique des textes africains francophones. Dans les récits, l’Afrique rencontre l’Occident – oralité et écriture, philosophies occidentale Écritures, réécritures, et africaine s’interpénètrent dans un amalgame textuel éloquent. Ce travail d’inventions et d’interventions auquel l’écriture participe, tant sur le langage que sur le corps du projet romanesque, aboutit à un ensemble hétéroclite qui enjeux dans le roman échappe à la forme classique du roman. Les nouvelles procédures adoptées par les n écrivains montrent qu’ils ne sont pas du tout étrangers aux recherches formelles e é occidentales, sans pour autant délaisser ou négliger l’héritage culturel de l’Afrique. n guinéen i u Aujourd’hui, ils sont habités d’un devoir d’ouverture, d’une soif inextinguible g de « butinage ». Ils ne s’inscrivent pas toujours dans la quête d’un ailleurs, mais n a en sont souvent le produit. Par conséquent, leurs textes sont inéluctablement marqués m du sceau transculturel. o r Ainsi, on assiste, chez la plupart des écrivains guinéens, à un culte du e collage, de la réécriture d’autres textes : une pratique qui transforme leurs textes l s en de véritables palimpsestes. Les récits historiques ou anciens tels les mythes, n a les légendes et autres, tout comme les objets culturels, sont convoqués pour d les décomposer ou recomposer, les réutiliser ou recycler, dans le sens d’une véritable x u « nostalgie postmoderne ». Dans ce jeu du donner et du recevoir, de réécriture, e j le romancier guinéen manie l’art de donner au texte convoqué un nouveau souffle n e en l’insérant dans un nouveau cycle de vie. , s e r u t Le Pr. Boubacar Diallo enseigne les littératures africaines ri c francophones, notamment la littérature guinéenne, à l’université é é de Sonfonia-Conakry, en Guinée. Il est titulaire d’un doctorat d’État r de lettres modernes (UCAD, Sénégal) et est auteur de Réalités s, e et roman guinéen en 4 tomes (L’Harmattan). Il a aussi participé r u à la rédaction de plusieurs livres collectifs dont L’imaginaire t i r linguistique dans les discours littéraires, politiques et médiatiques en Afrique c É (Presses Universitaires de Bordeaux) ; Contre la dictature des urgences. Anticiper l’avenir (Laboratoire de Prospectives et de Science des Mutations, UCAD, Sénégal), etc. ISBN : 978-2-343-03140-8 e 24 Écritures, réécritures, enjeux dans le roman guinéen Boubacar Diallo Écritures, réécritures, enjeux dans le roman guinéen Du même auteur, aux éditions L’Harmattan Réalités et roman guinéen (4 tomes) © L’Harmattan, 2014 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.harmattan.fr [email protected] [email protected] ISBN : 978-2-343-03140-8 EAN : 9782343031408 A ma petite fille Kadiatou WANN INTRODUCTION « Au carrefour de plusieurs cultures, la transculture se manifeste comme un lieu de rencontre entre des réalités et des perceptions hétérogènes où s’entrecroisent, inscrites au cœur des diverses cultures mises en présence, des images appartenant simultanément à plusieurs niveaux de représentation du monde. En même temps qu’un élément est offert, un autre est reçu, de sorte qu’à la fin de l’opération émerge, comme au terme d’une réaction chimique, une réalité nouvelle, indépendante des substrats de base. » (Josias Sémujanga) Les nouveaux enjeux du roman africain semblent apporter des modifi- cations notoires dans l’esthétique des textes africains francophones. Des constellations esthétiques posent désormais la problématique des sources d’inspiration voire d’écriture. Dans les récits, l’Afrique rencontre l’Occident, oralité et écriture, philosophies occidentale et africaine s’interpénètrent dans un amalgame textuel éloquent. Justin Bisanswa rappelle que les formalistes russes avaient déjà analysé, sous le nom de « skaz », ce travail d’inventions et d’interventions auquel l’écriture participe tant sur le langage que le corps du projet romanesque pour aboutir à un ensemble hétéroclite qui échappe à la forme classique du roman. Il pense que : « C’est là l’amorce de l’intertextualité dont Julia Kristeva a indiqué les deux phases du processus, à savoir l’absorption et l’intégration1. » Dans une telle écriture, « chaque intrigue s’inscrit dans une tradition de l’art de raconter, au sein de laquelle conformité et innovation entrent en concurrence.2 » La question n’est plus alors « de réactiver par compréhension l’acte structurant, mais de décrire selon leur objectivité propre les structures issues de l’opération structurante3» A l’instar des artistes du nouveau roman occidental, il semble ici aussi que chaque écrivain « doit créer les propres formes de son propre monde4. » Outre l’intégration et la combinaison incessante des formes scripturale et culturelle, il faut aussi prendre en compte une redéfinition opératoire des lieux. 1 Justin Bisanswa, « Figures et Spectres », Tangence, n° 75, Eté 2004, pp. 1-14. 2 Paul Ricoeur, Entre herméneutique et sémiotique, Presses de l’Université de Limoges, 1990, p. 12. 3 Justin Bisanswa, « Figures et Spectres », Op. cit., p. 3. 4 Alain Robbe-Grillet, Conférence faite à l’Université de Kilee sur le nouveau roman, le 8 février 1960.