ebook img

Du sublime PDF

152 Pages·1993·5.93 MB·French
by  Longin
Save to my drive
Quick download
Download
Most books are stored in the elastic cloud where traffic is expensive. For this reason, we have a limit on daily download.

Preview Du sublime

Dus ublime Traduction, présentation· et notes de Jackie Pigeaud Dus ublime Collection dirigée par Breda Lidia Couverture : Charles Hunt, la Partie de cartes, détail. @ • 199.t Éditions Rivages ,,,· ,e ·J993, Éditions Payot & Rivages pour l'édition de poche .-'�, ' !06, bd Saint-Oennain -75006 Paris Langin Dus ublime Traduction, présentation et notes de Jackie Pigeaud Rivapgoecsh e PetBiitbel iothèque A Camille MARCOUX INTRODUCTION Oui, c'est bien un livre d'or, comme le disait Casaubon. Il suffit d'y pénétrer pour s'en convaincre. C'est le seul livre de rhétorique qui bouleverse d'émo­ tion. Mais est-ce bien de la rhétorique ? Le projet en est plus stimulant. Je sais bien que l'organisation du traité, par les graves lacunes des manuscrits qui l'ont transmis, restera sans doute un problème. Mais à vrai dire, ce n'est pas si grave pour un livre qui fait l'éloge du saut et du péril. Ce n'est qu'un dangej de plus à combattre et qui doit exciter le lecteur En vérité ce livre est impensable ; à première vut un bric-à-brac. C'est un jeu d'érudit, qui en vaut bien un autre, que d'essayer un ordre systématique. Mais l'unité n'est pas là. Elle est plus radicale, dans cette affirmation toujours renouvelée de la vigueur et de la seule valeur de ce que nous appellerions maintenant le génie. Il s'agit selon sa formule même, et toute pudeur refoulée, d'essayer de pr1e• ndre le pas de celui que nous appellerons Longin Si l'on devait donner en un mot le ton de ce traité, je choisirais, dans tous ses sens, celui d'exigence. C'est ce qui donne à l'œuvre cette tension, cette én2ergie, • cette détermination à être, elle aussi, sublime Il faut tout de suite préciser que lorsque Longin 7 parle du sublime, il n'entend pas, sauf à de très rares exceptions, le style sublime, dont la définition relève tout entière de la rhétorique. Boileau l'avait déjà parfaitement vu. « li faut donc sçavoir que par Su­ blime, Longin n'entend pas ce que les Orateurs a3p­ • pellent le stile sublime», écrit-il dans sa préface N'ayons pas peur, avant de commencer même à réfléchir, de respirer. Faisons attention à la qualité toute physique que réclame Langin en cette altitude - puisque le Sublime signifie d'abord cela - en dégageant l'espace et en le débarrassant de tous ses miasmes. L'homme . du sublime est un preux qui exerce des prouesses. Le sublime exige force et même violence, jeunesse, agilité. Jamais idée de la création n'a été aussi proche de la souplesse, de la détente, de la vitalité et de la jeunesse. Création avons-nous dit. Il s'agit évidemment du Langage, prose ou poésie, de littérature comme nous disons. Pour Langin, c'est l'art suprême. Nature et art La question générale est posée d'entrée. Il s'agit de savoir jusqu'à quel degré de hauteur l'on peut pousser nos donnés naturels. Oublions les mots de génie ou de talent qui ne mettent pas en relief la nature. Le problème de fond est celui du rapport de la nature à l'art, c'est-à-dire à la technique, à la mise en œuvre de moyens et de règles. L'art, c'est la rhétorique. Mais ce qui fait la grandeur du Traité, comme nous ne cesserons de le dire, est d'insister sur Je fait que l'art est insuffisant, mais absolumenf nécessaire à la production de l'œuvre. 8 On a l'impression de dire ici des banalités. Ce sont des banalités. C'est déjà une banalité à l'époque de Langin ; ou disons un lieu commun. Mais ce qui n'est pas une banalité, c'est la manière de réfléchir au problème. Quelles que soient les idées de la création poétique, les Anciens sont d'accord pour reconnaître la nécessité d'un donné. Le poète ne saurait rendre compte de l'origine de son être de poète. C'est ce qui fait dire à Platon que la Poésie ne saurait être une technique. Que ce soit dans l'I on ou dans le Phèdre, les Muses ou quelque dieu sont . là pour communiquer à l'élu la nécessaire grâce pour être poète '. Le Problème XXX du pseudo-Aristote l'avait fait descendre de !'Olympe et l'avait attribuée tout simplement à un naturel particulier, à une phy­ 5 siologie singulière, le tempérament mélancolique . Langin n'a pas besoin des dieux et n'a. recours à aucune physiologie. li se contente de prendre acte que dans la création il y a de la nature et de la technique et qu'il faut penser leur nécessaire ren­ contre. Aristote disait dans sa Poétique : « Homère ... semble là aussi avoir vu juste, que ce soit par l'art ou par la nature» (1451 a 24). On pourrait dire que Langin refuse ce dilemme ; c'est par la nature et par l'art que celui qu'il appelle Le Poète est grand. On ne peut rien comprendre, à notre avis, à l'unité de Langin, si l'on ne perçoit pas que c'est cette question, énoncée d'entrée de jeu, qui le contraint continuellement à des retours et à des formules qui surprennent si l'on s'en tient au plan qu'il annonce. li faut penser le rapport de la nature à la technique non pas comme un avant et un après, mais en acte ; et il faut comprendre comment l'un et l'autre peu- 9 vent s'articuler. C'est ce qui distingue Longin d'un simple rhéteur. S'il ne s'était préoccupé que du style sublime, il aurait pu se contenter de réfléchir sur des figures. Mais c'est l'essence du sublime qui l'inté­ resse, conçu comme élan réalisé dans des œuvres. Posant le problème de la création d'un point de vue lui-même sublime, l'auteur rencontre évidemment la question de la frontière, du passage entre l'inné et l'acquis, entre le don et la technique, avatar de • l"opposition entre la physis et le 1101110s, la nature et la norme, le donné biologique et la règle. Il n'a pas bronché ; il l'a affronté. J'entends bien que la Rhétorique ne ra pas ignoré et qu'on peut trouver dans Cicéron et Quintilien les termes du problème•. Mais nulle part l'on ne rencontre cet entêtement à comprendre comment de la nature et de la norme peuvent agir l'une sur l'autre. Longin pense que la frontière entre l'inné et l'ac­ quis n'est pas tout à fait étanche. Tout n'est pas désespéré. On peut éduquer dans l'espoir du su­ blime. Bien entendu. l'on peut songer au problème théorique du sage stoïcien. On naît sage. On ne peut être sage que par naissance. Le sage seul a toutes les qualités•�•-. Mais alors, il n'est plus d'édu­ cation possible. Il fallut trouver une solution, et ce fut la technique parénétique. On pouvait, par des conseils, amener l'âme non point à l'action droite du sage, mais à l'acte convenable et espérer que, par conversion ou, vaudrait-il mieux dire, par grâce, on se réveillât un jour sage. Si le sublime appartient seulement à la grandeur de nature, il n'y a plus rien à faire pour les théoriciens. Car il y a ceux qui désespèrent ; un peu, pour pousser une comparaison 10

See more

The list of books you might like

Most books are stored in the elastic cloud where traffic is expensive. For this reason, we have a limit on daily download.