Université de Pau et des Pays de l’Adour École Doctorale Sciences Sociales et Humanités - ED 481 Laboratoire Société, Environnement, Territoire - UMR 5603 Thèse pour obtenir le grade de Docteur Aménagement Discipline : Présentée et soutenue publiquement par Ludovic Falaix Le 6 juin 2012 Des vagues et des hommes : La glisse au cœur des résistances et contestations face à l’institutionnalisation des territoires du surf en Aquitaine Sous la direction de Vincent Vlès Composition du jury : Philippe Bachimon, Professeur de géographie à l’Université d’Avignon et des Pays du Vaucluse, président Philippe Bourdeau, Professeur de géographie à l’Université Joseph Fourier de Grenoble, rapporteur Jean-Paul Callède, Chargé de recherche au CNRS, HDR en sociologie, GEMASS, MSH, Université de Paris IV, rapporteur Sylvie Clarimont, Maître de Conférences de géographie à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour, examinateur Vincent Vlès, Professeur d’aménagement et d’urbanisme à l’Université de Pau et des Pays de l’Adour, directeur 1 2 REMERCIEMENTS À l’heure de remettre les conclusions de ses investigations scientifiques et de se soumettre à l’évaluation par ses pairs, la règle veut que l’auteur adresse des remerciements. Néanmoins, plutôt que de dresser une longue liste de noms où seuls ceux qui sont cités se reconnaissent, je préfère mettre en avant les raisons qui justifient le fait que les personnes ci-dessous mentionnées soient chaleureusement et sincèrement remerciées. Souscrivant volontiers au respect protocolaire qui consiste à remercier en premier lieu les enseignants- chercheurs, j’adresse donc mes remerciements : - À Vincent Vlès : pour le souci permanent qu’il a manifesté à l’idée que cette recherche aboutisse, dans une posture bienveillante, profondément respectueuse de mon intégrité intellectuelle et de mes références conceptuelles dont certaines sont peut-être éloignées de ses propres champs d’intérêts ; pour son exigence intellectuelle et professionnelle qui appelle à un investissement de chaque instant dont on ne mesure la satisfaction qu’il procure qu’a posteriori ; pour sa loyauté, son intégrité et son soutien indéfectible même lorsque j’étais enclin à dénoncer les injustices du monde universitaire avec force et conviction quitte à susciter diatribes et quolibets et dont il pouvait subir préjudice ; pour sa fermeté auprès des instances universitaires paloises à l’idée que le plagiat de mon DEA soit non seulement dénoncé mais appelle à davantage de vigilance de la part des enseignants-chercheurs ; pour sa chaleur et sa convivialité lorsque durant les temps informels nous échangions sur les choses du quotidien ; pour sa propension à dépasser l’impression laissée à l’issue d’une première rencontre ; pour sa perpétuelle et indéfectible disponibilité ; pour les judicieux et précieux conseils qu’il m’a prodigué durant de longues années tant sur le terrain de la recherche universitaire, de mon activité professionnelle, ou de mes questionnements personnels et qui ont participé, en partie, à construire la relative confiance en moi qu’est la mienne aujourd’hui... Pour toutes ces raisons, Monsieur Vlès, soyez remercié ; - À Sylvie Clarimont : pour sa générosité, son enthousiasme à l’idée d’accompagner un jeune étudiant dont personne ne voulait suivre les travaux au regard de la thématique choisie, alors jugée comme peu digne d’intérêts ; pour sa capacité à faire de l’expertise de mes travaux le seul étalon de la confiance qu’elle souhaitait m’accorder 3 rompant ainsi avec les pratiques locales pour présager du potentiel d’un étudiant ; pour son attention permanente à l’idée de me pousser dans mes retranchements pour obtenir le meilleur de moi-même m’imposant rigueur et discipline dans un gant de velours et dans le profond respect de ma sensibilité et des mes obligations professionnelles ; mais surtout pour l’amitié qu’elle me témoigne depuis qu’elle n’est plus contrainte par une posture tutélaire et dont je suis très honoré. Incontestablement, Madame Clarimont, je vous dois beaucoup dans la mesure où vous avez contribué à conforter ma volonté de poursuivre dans le monde de la recherche en me recommandant de ne jamais baisser les bras, intimement convaincue que vous étiez de ma réussite potentielle ! J’y ai vu le témoignage d’une conviction profonde. Puisse ce travail être à la hauteur de vos espérances… - Aux membres du jury : pour leurs lectures bienveillantes et l’intérêt qu’ils ont manifesté pour ce travail ; À Philippe Bachimon et Philippe Bourdeau d’avoir accepté immédiatement l’idée de compter parmi les membres de ce jury respectivement en qualité de président et de rapporteur ; À Jean-Paul Callède pour sa sollicitude, son écoute, sa confiance et ses conseils prodigués dans une posture bienveillante, au service de mes intérêts. - À Saïda Bourbian : pour sa patience, sa compréhension, sa sollicitude ; pour les sincères encouragements prodigués tout au long de ces années de recherche ; pour ses observations distanciées ; mais surtout pour les rêves qu’elle partage avec moi ; pour les utopies auxquelles elle me donne la force de croire malgré leur caractère chimérique ; pour l’amour et l’affection dont elle me gratifie. Ces nourritures affectives m’ont permis de me sentir vivant dans les moments de doutes, de ne pas me perdre en chemin, de ne pas renoncer à l’heure où les obstacles paraissent trop difficiles à franchir. Ces chemins qui, faute d’amour, de (com-)passion, ne mènent nulle part à en croire un philosophe allemand dont les concepts jalonnent cette recherche. Puisse ces remerciements être la marque de la reconnaissance éternelle qu’est la mienne. Puissions nous continuer à arpenter, par monts et par vaux, le chemin qui nous conduit à rêver nos vies et vivre nos rêves sans jamais renoncer à ce leitmotiv ! 4 - À Virginie et Guillaume Boulay : pour avoir recueilli puis accompagné « le mérou » hors de son bocal afin qu’il navigue sur l’atlantique avec la certitude d’être légitime ici et maintenant ! Il lui arrive encore parfois de tourner en rond mais il sait désormais que les parois du bocal n’ont rien d’étanche et, qu’une fois franchies, d’autres horizons, d’où jaillit la lumière, se dévoilent à la conscience humaine. Cette certitude acquise est une force, un espace refuge où je me ressource. - À mes amis d’enfance : Pierre-Olivier Dubois, Romain Durruti, Arnaud Mounard et Anthony Sellah : pour être là après plus de vingt ans ; pour l’amitié dont ils m’honorent ; pour m’avoir accompagné dans mes joies et mes peines car c’est ainsi que l’on reconnaît ses amis ; pour leur indéfectible sens de l’humour qui appelle à l’autodérision et évite de sombrer dans une forme d’autosuffisance, apanage des vaniteux et des prétentieux qui se pensent parvenus ; pour leurs passions que sont le cyclisme, la voile, le triathlon et les voyages et qu’ils ont su me transmettre, sans condescendance, pour que j’y accède à mon tour ; pour le fait qu’à leurs côtés, j’ai la conviction intime que les amis se comptent sur les doigts d’une main et que chacun est complémentaire de l’autre dans le fonctionnement harmonieux de cet organe. - Aux surfeurs interrogés dont je ne dévoilerai pas les noms pour préserver leurs anonymats : pour leur passion du surf qu’ils ont bien voulu partager avec moi ; pour leurs disponibilités ; pour leurs encouragements affirmant par là même le caractère fondé de cette recherche ; pour l’enthousiasme qu’ils ont toujours manifesté à l’idée de me compter parmi eux m’exhortant à les rejoindre au line-up ; pour bien plus encore car ils se reconnaîtront dans les pages qui suivent à travers la lecture des comptes-rendus d’entretiens ; pour m’avoir permis, le temps d’une soutenance, d’être sous les feux de la rampe alors même que, principaux protagonistes, ce sont eux qui méritent la reconnaissance ! - À Jérôme Lafargue pour son enthousiasme à l’idée de lire ces travaux ; pour son acuité intellectuelle mobilisée afin que cette recherche traduise avant toute chose l’investissement du chercheur, défende un point de vue et puisse me procurer la satisfaction de n’avoir jamais renié mes engagements ; pour son humour et sa capacité à recontextualiser ce travail dans une hiérarchisation des priorités de la vie en vue de me préserver des évaluations, qu’elles soient positives ou négatives, dont il pourrait faire 5 l’objet au sein des instances universitaires ; pour m’avoir conforté dans l’idée que j’étais sur la bonne voie… - Aux membres de ma famille : pour leur soutien, toujours sincère, malgré les doutes qu’ils ont manifesté, ne connaissant pas les enjeux extraprofessionnels induits par cette recherche, à l’idée que cette thèse me soit, un jour, d’une quelconque utilité ; pour ne pas me tenir rigueur, même si je sais qu’il leur en coûte, à l’égard du fait que, comme Jim Morrison, « I prefer a feast of friends to a giant family » ! - Aux plus chers collègues et désormais amis dont j’ai croisé la route dans l’exercice quotidien de mon activité professionnelle c’est-à-dire ceux de la DRDJS et de la ville de Saintes : pour m’avoir accompagné dans l’acquisition d’une culture professionnelle d’agent de la fonction publique qui passe irrémédiablement par la défense des valeurs républicaines et l’abandon de ses intérêts propres au bénéfice de l’intérêt général ; pour leur chaleur humaine et la vie de bureau qu’ils ont su instaurer et qui, aujourd’hui, me font cruellement défaut dans mes nouvelles attributions ! 6 SOMMAIRE Remerciements 3 Sommaire 7 Avant-propos 8 Introduction Générale 11 Première Partie : Géographie de l’intime et spatialisation : Comment les surfeurs habitent-ils la vague 43 Introduction à la première partie : La question de la spatialisation 44 Chapitre 1 : Le surfeur et la vague 52 Chapitre 2 : La relation de l’homme au lieu comme fondement d’une géographie de l’intime 103 Chapitre 3 : L’habiter des surfeur et géographie de l’intime 146 Conclusion de la première partie : Mondialisation et différenciation territoriale 222 Deuxième Partie : Résistances et contestations des surfeurs face à l’institutionnalisation des territoires du surf 226 Introduction à la deuxième partie : La place du surf dans la structuration des territoires touristiques balnéaires en Aquitaine 227 Chapitre 4 : Le surf en Aquitaine : approche historique, sociologique et médiatique 259 Chapitre 5 : L’institutionnalisation des territoires du surf 303 Chapitre 6 : Résistances et contestations de certains surfeurs face à l’institutionnalisation des territoires du surf 406 Conclusion Générale : Perspectives pour la recherche en géographie et en aménagement 468 Bibliographie 490 Table des matières 510 Table des figures 514 Table des photographies 516 Table des annexes 516 Glossaire du surf 517 Annexes 518 7 AVANT-PROPOS Cette question, issue d’une réflexion introspective, ne m’a jamais quittée. Elle consistait à me demander : « pourquoi je surfe ? » alors même que cette activité ne génère aucun gain de productivité, finalité pourtant assignée par nos sociétés actuelles dans le cadre de toute activité humaine. Mais alors, comment répondre à cette question lancinante autrement qu’en mobilisant des réponses toutes faites et qui consistent à convoquer le seul registre émotionnel comme mode de justification ? « Pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l’autre. L’autre est indispensable à mon existence, aussi bien d’ailleurs qu’à la connaissance que j’ai de moi ». Voilà, ce que précise Jean-Paul Sartre dans son ouvrage intitulé « L’existentialisme est un humanisme ». Fort d’un tel éclairage, ne me restait donc plus qu’à « passer par l’autre » pour « obtenir mes propres vérités », pour forger la connaissance que je peux avoir de moi-même et qui ne peut se dévoiler qu’à l’aune des réponses formulées par les autres surfeurs à cette question. C’est ainsi que se construit parfois un objet de recherche pour lequel on consacre une partie de son existence. Le choix d’un objet de recherches n’est donc pas le fruit du hasard. Car si tel était le cas, il me semble que rares sont ceux qui engageraient tant d’efforts, qui seraient prêts à consentir à autant de sacrifices à l’idée d’aboutir d’autant plus que les perspectives de valorisation à des fins d’insertion dans le monde professionnel universitaire se réduisent comme peau de chagrin. Le choix d’un objet de recherches, support à l’écriture d’une thèse de doctorat, ne peut être, par conséquent, que l’expression de la part d’intime de tout un chacun. Il résulte d’un parcours individuel où se mêlent des expériences, des émotions, des passions, des rêves, des envies, des rencontres, des opportunités… Quant à l’analyse de cet objet de recherche qui passe, en sciences sociales, par l’expertise et l’examen des pratiques sociales et spatiales des individus - ces autres comme dirait Sartre -, qui mobilise une partie de notre vie au détriment parfois de ce que l’on pourrait vivre avec ceux qui nous entourent, ne répond-elle pas d’une volonté d’accéder également à la recherche de son propre soi-même, de son propre être intérieur, de son propre ordre enfoui, de sa propre irrationalité, de sa propre subjectivité, de sa propre vérité puisque « pour obtenir une vérité quelconque sur moi, il faut que je passe par l’autre ». 8 « Immigré » sur la côte basque, je découvre, vers le milieu des années quatre-vingt- dix, les joies du surf. Submergé par les sensations nouvelles que me procure cette pratique sportive, celle-ci devient ensuite une passion dévorante, sinon envahissante à tel point que j’y consacre tout mon temps libre sacrifiant même à une quête déraisonnée, à travers l’exploration littorale de différents pays, de vagues vierges et inconnues pour satisfaire mon insatiabilité. Face à un tel abandon pour le surf, je ne peux me résoudre à l’idée de m’en remettre au hasard, à l’irrationnel ou aux seules justifications d’ordre émotionnel pour justifier de cet engouement, de cet engagement sans limites dans une activité devenue passion véritable. Plus encore, cette passion pour le surf, cette rencontre avec les surfeurs forge des intuitions, alimente une « connaissance tacite », pour reprendre la formulation de Thomas Kuhn, qu’il s’agissait d’interroger. Engager cette réflexion sur les productions d’espaces que suppose l’acte de glisse sur la vague, essence de la pratique du surf, m’a alors permis, en analysant le comportement des autres, ces autres qui composent une communauté à laquelle j’ai le sentiment d’appartenir, de mieux me connaître, de découvrir mes vérités d’individu surfeur qui relayent le hasard au rang de réponse inacceptable lorsqu’il s’agit d’interpréter les raisons qui président au fait de s’engager pleinement dans cette soif d’expériences sociales et spatiales qui, au final, sont l’expression de la construction de son être intime. Néanmoins, la quête personnelle induite par cette recherche ne peut se suffire à elle-même. Pire encore, le mythe de Tantale n’est jamais loin. Il rode et l’autosatisfaction immédiate du devoir accompli s’estompe bien vite au regard des questions qui restent en suspend et qui méritent que l’on y réponde. Une fois le point final apposé, on prend conscience, trop vite, des insuffisances, des développements inachevés, des concepts complémentaires qu’il aurait fallu mobiliser pour enrichir le débat et la réflexion, des entretiens qu’il aurait fallu approfondir encore en convoquant la maïeutique comme principe d’accouchement des idées. Plus fondamentalement, pour que cette recherche ait une quelconque utilité qui dépasse le projet nombriliste de trouver quelques réponses a ses propres interrogations ou de conforter scientifiquement quelques intuitions, encore faut-il que les autres, ces autres qui contribuent précisément « à la connaissance que j’ai de moi », puissent eux aussi être 9 en mesure de se découvrir. Aussi, telle était l’ambition, certes prétentieuse, sous-jacente à la rédaction de ces quelques pages. Pourtant, je ne prétends pas avoir répondu de manière satisfaisante à la question qui consiste à savoir pourquoi les surfeurs surfent-ils. Au mieux, peut être ai-je contribué à renforcer quelques pistes de réflexion, non sans le précieux concours et soutien d’heureuses rencontres, quant au fait d’affirmer que les translations des matrices émotionnelles, que cette soif de vivre s’exaltent et trouvent un mode d’expression à travers la création d’espaces éphémères que le surf a la capacité d’engendrer en magnifiant la vague par l’acte de glisse. Ces productions spatiales, de nature extra- terrestre, ont un caractère ontologique et autorisent l’expérimentation d’un ici et maintenant particulièrement sécurisant. Quoiqu’il en soit, cette recherche ne pouvait être qu’un témoignage d’une vérité subjective et instantanée ; vérité partielle et presque obsolète à l’issue de la rédaction de ce travail au regard du caractère mouvant, aléatoire, changeant, homéostatique de l’existence humaine. Le surf n’aura été qu’un prétexte pour concilier deux passions afin que l’une et l’autre s’interfèrent avec la volonté insolente d’une part de parfaire la connaissance de cette pratique sportive et d’autre part de prendre part au débat épistémologique en géographie et en aménagement. La seconde a très vite pris le pas sur la première et plus encore. Tel est le prix à payer d’une recherche doctorale réalisée en marge d’une activité professionnelle exercée à temps complet. Ce travail achevé, l’heure est sans doute venue de me consacrer davantage à mes proches en sachant concilier ces passions. Cette conciliation suppose de ne plus accomplir ces investigations scientifiques sur mes seuls temps libres car c’est devoir renoncer aux propositions de ceux qui m’aiment. Dans ce contexte, pérenniser cette ardente volonté d’interroger « la connaissance tacite » des expériences primitives et perceptives des phénomènes géographiques, au-delà de l’usage des temps de loisirs consacrés à cet exercice, relève de décisions futures qui, désormais, ne m’appartiennent plus... 10
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