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DEs ProjEts Pour miEux APPrEnDrE PDF

25 Pages·2015·0.41 MB·French
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82 n° Sommaire Fév. 2013 l page 2 : Le projet sous (presque) toutes ses coutures l page 12 : Quels effets sur les apprentissages ? l Page 21 : Bibliogra- phie. DEs ProjEts Pour miEux APPrEnDrE ? Par Catherine Reverdy Pa le bee éhde cep- ble d’aéle la va de élève, Chargée d’étude et de la pédagge pa pe e ve cée, recherche au service dep ple décee. Elle e deve- Veille et Analyses de e e paqe qdee da l’e- l’Institut français de egee pfeel e da l’ee- l’Éducation (IFÉ) gee pée, e elle a éé de dans d’autres types de ¿lières de certains pay (pa eeple e Face à ave le ava peel ecadé  le - élèves à la complexité du monde profession- éae de décvee,  a Qébec à nel actuel, tout en les aidant à construire au l’écle pae e da l’eegee fur et à mesure de leur scolarité un projet ecdae). personnel et professionnel. La pédagogie par projet n’est pourtant pas Pourtant cette méthode pédagogique n’ap- nouvelle, puisqu’elle commence à être appli- paraît pas toujours facilement applicable, quée au début du xxe siècle, pour revenir dans notamment au niveau du temps et de l’in- les années 1960 ou 1970 selon les pays et vestissement nécessaires à la réalisation s’imposer discrètement mais sûrement sur le du projet. On lui préfère assez souvent l’ap- terrain scolaire ces trente dernières années. prentissage par la résolution de problèmes, qu’on confond parfois abusivement avec Cet intérêt renouvelé pour la pédagogie par l’approche par projet. Pourquoi est-elle si projet s’appuie sur les possibilités qu’elle délicate à mettre en place ? Apporte-t-elle offre de s’aventurer au-delà des disciplines, une plus-value pour les élèves dans leur de reconversion, appels à projets dans les « Le thème “pédagogie et pro- laboratoires de recherche, etc., à tel point jet” occupe un vaste champ que Proulx pense que « la présence de dont l’exploration ne cesse projets – et leur nombre – est pratique- jamais d’être passionnante […] ment devenue l’étalon de mesure du dy- à l’heure où la notion de pro- namisme des sociétés ou organisations. » jet devient centrale dans tout (Proulx, 2004) discours pédagogique. » (Bru Pour Boutinet (2005), le projet n’existe & Not, 1987) qu’à travers « une matérialisation de l’in- tention, qui en se réalisant cesse d’exister comme telle ». Il envisage une tension in- LE PROJET SOUS hérente à la notion de projet, qui « traduit (PRESQUE) TOUTES SES tout à la fois et dans un même mouvement une certaine reconnaissance de la raison COUTURES opératoire et une certaine impuissance de la raison historique à maîtriser ce qu’elle La notion de projet est très utilisée dans le a mis en œuvre ». Pour lui, le projet est système éducatif et recouvre des réalités « plus qu’un concept, une ¿gure emblé- bien distinctes, comme les projets d’éta- matique de notre modernité ». blissement, les projets d’action éducative, On le voit, l’utilisation extensive du terme les projets personnels des élèves, etc. et sa signi¿cation large en font un objet Chacun a son idée de ce qu’est un projet d’étude complexe, multiforme et pouvant et de quelle manière on peut le conduire. être abordé de différentes manières. Nous L’objectif peut être de préparer concrète- nous limiterons ici aux caractéristiques des ment les élèves à leur futur métier, de les projets abordés dans le cadre scolaire. motiver par une réalisation matérielle, ou d’inciter les enseignants de disciplines dif- Définition du terme « projet » férentes à travailler en équipe, ou encore de développer une approche par compé- Le premier sens du mot « projet » (qui tences. vient du vieux français pourget ou project, du latin projicio, jeter en avant, expulser) Voyons de plus près cette notion et la dans la dé¿nition qu’en donne le Grand manière dont elle s’est imposée dans le Robert indique qu’il s’agit de l’« image monde scolaire, avant de nous intéresser d’une situation, d’un état que l’on pense plus précisément à l’apprentissage par atteindre », introduisant le fait que tout projet, une méthode active apportant son reste à faire. Cette dé¿nition datant du lot d’espérances pour la motivation des xve siècle est précisée par la « manière élèves et l’appréhension du monde com- dont on envisage de traiter, d’appréhender plexe dans lequel nous vivons. un problème », ce qui place le concept de problématique et de plani¿cation au cœur UNE DÉFINITION TRÈS LARGE de notre sujet. L’autre sens du mot, datant DU PROJET du xviie siècle, indique un « travail, [une] ré- daction préparatoire ; [un] premier état », Un projet serait « de l’ordre du paradigme le concept de projet est moins utilisé par valorisant l’activité concrète et organisée ces derniers que par Dewey et Kilpatrick, d’un sujet soucieux de se donner un but et tombe en désuétude jusque dans les l Ce qui n’est pas for- et les moyens adaptés pour l’atteindre » années 1970 l. Dans l’intervalle, les cément partagé par (Champy & Étévé, 2005). projets sont malgré tout utilisés dans d’autres chercheurs, comme par exemple les activités périscolaires (théâtrales, Huber (2005), pour qui Ardoino et Berger (1989) détaillent da- artistiques, sportives, scienti¿ques, etc.) la pédagogie de projet vantage cette notion : « c’est, premiè- mais ne rentrent pas dans la classe (Bru devient une « pédago- rement, une intention philosophique ou & Not, 1987). gie de libération » dans l’Éducation nouvelle. politique, une visée, af¿rmant, de façon toujours, nécessairement, indéterminée, La démocratisation de l’enseignement, des valeurs en quête de réalisation. […] l’ouverture de l’école à la formation des C’est, seulement ensuite, la traduction adultes et la crise économique sont stratégique, opératoire, mesurée, déter- quelques facteurs parmi d’autres d’un minée d’une telle visée. […] le projet est engouement renouvelé pour le projet. Il la pré¿guration la plus exacte possible arrive par exemple en France en 1973 […], donc déterminée et dé¿nie, de ce avec les expérimentations (au niveau de qu’on anticipe », dé¿nition dans laquelle la classe ou de l’établissement) décou- l Dans les établisse- on retrouve l’engagement du sujet, la lant du « 10 % pédagogiques l », et est ments du secondaire, plani¿cation nécessaire et l’aspect maté- devenu depuis indispensable à tous les ce sont 10 % des ho- riel de cette réalisation. échelons du système scolaire, générant raires d’enseignement qui sont destinés à des des amalgames entre les domaines édu- « activités originales en Dans le domaine de l’éducation catif et pédagogique, instituant la créati- relation avec l’ensei- vité (au risque de la tuer) ou négligeant gnement », dans le but Aux États-Unis, c’est au début du le fait que les élèves sont les premiers d’assouplir l’organisa- tion et de permettre un xxe siècle que les projets sont arrivés concernés par le projet (Boutinet, 2005). travail en équipe (voir dans l’enseignement avec Dewey et Sublet, 1987). Kilpatrick. Ce dernier les dé¿nit comme Tentative de classification des des activités intentionnelles dans projets en éducation lesquelles l’apprenant s’implique sans réserve (« wholehearted purposeful Le premier à avoir distingué plusieurs activity »). Proulx (2004) précise que types de projets était Kilpatrick en 1921. Kilpatrick « préconisait une pédagogie Pour lui, il existait quatre types de pro- centrée sur les apprenants, sur leurs jets au sens large : le premier était de buts et sur leurs besoins. De là, il fallait matérialiser une idée sous une forme développer pour eux des activités utiles, concrète (comme écrire une lettre), le orientées vers des buts concrets et deuxième de s’approprier une expé- faisant appel aux habiletés à résoudre rience vécue (comme écouter un mor- des problèmes. La voie des projets […] lui ceau de musique), le troisième de ré- semblait la voie royale pour y parvenir. » soudre un problème et le dernier (« the On retrouve les concepts d’intention, ici learning project ») était d’acquérir des de l’apprenant, et d’action sous forme connaissances à travers une expérience. d’activités proposées aux apprenants. Il donnait donc aux projets un sens beau- Pour ces deux précurseurs, l’élève doit coup plus large qu’aujourd’hui, puisque Pour clarifier les différentes acceptions L’aspect méthodologique s’intéresse à de ce terme en éducation, Boutinet la “démarche” et au “travail d’équipe” et (2005) distingue quatre niveaux de pro- l’aspect opératoire se limite à la “réa- jet qui peuvent utiliser chacun la péda- lisation” et au “résultat concret”. » Il y gogie par projet, mais qui ne doivent a bien présents, comme nous l’avons pas être confondus : vu dans la définition du mot « projet », − le pe édcaf, qui se réfère au l’intention, la planification et le produit mode d’intégration des jeunes dans final dans ces trois aspects du projet le monde des adultes et qui a pour présentés ici. rôle de les rendre autonomes. Ce type de projet dépasse le cadre strict LE PROJET EN TANT de l’école ; QU’APPROCHE PÉDAGOGIQUE − le pe pédaggqe, qui inter- vient dans la relation entre les ensei- gnants et les élèves, dans le cadre Si un certain nombre de théories et de scolaire : c’est celui auquel nous courants pédagogiques européens a nous intéresserons ici ; intégré l’approche par projet, c’est dans − le pe d’éablee, qui vise les pays anglo-saxons que cette orien- à accompagner l’autonomie grandis- tation a été la plus systématiquement sante des établissements scolaires organisée et théorisée. Il faut noter ici par une mise en cohérence de ses l’influence de Dewey aux États-Unis, activités ; en contraste avec le modèle politique − le pe de fa, qui se situe d’éducation de Durkheim plus rigide davantage au niveau de la formation qui caractériserait la France (Meuret, des adultes, vue depuis le stagiaire, 2007). l’organisme de formation ou le for- mateur l . Une méthode active l Pour en savoir plus sur la pédagogie du projet appliquée à la forma- Proulx (2004), reprenant les quatre L’approche par projet comme les autres tion des adultes, on niveaux décrits par Boutinet à travers méthodes dites « actives » prend en peut consulter Vassileff ce qu’il appelle la dimension politique effet sa source au début du xxe siècle (1991, 1999). ou stratégique d’un projet, ajoute que aux États-Unis où Dewey lance la mé- d’autres perspectives peuvent être utili- thode learning by doing, qui consiste sées pour distinguer les projets, comme à apprendre par et dans l’action. Son la durée, le nombre d’acteurs (projets école-laboratoire propose des activi- individuels, d’équipe et de classe) ou la tés concrètes qui doivent répondre au nature de l’activité principale d’appren- désir inné d’apprentissage des élèves tissage en jeu (production, consomma- (Proulx, 2004). Dewey pense que l’édu- tion, résolution de problème). cation se doit d’être pragmatique, et doit apprendre aux élèves à penser et Touchant au plus près à la définition du à s’adapter au monde dans lequel ils projet telle que nous l’avons présentée, vivent (Mayer & Alexander, 2011), en Crindal et al. (2004) retrouvent dans la partant pour cela de leurs intérêts et présentation officielle du projet pluridis- en développant leur autonomie. Il veut Cette philosophie de l’éducation, ainsi en parlant d’« appeage par pro- l « Selon [Decroly], l’enfant est et doit être que celle promue par l’Éducation nouvelle jet » (project-based learning). La tradi- l’agent principal de sa en Europe (dont Decroly l et Freinet l tion française préfère le terme de « pé- formation. […] Il faut sont les principaux protagonistes), a fait dagge par projet », plus rarement ce- donc créer des écoles passer la vision de l’école d’une approche lui d’« enseignement par projet ». Les et des activités de formation qui mettent centrée sur l’enseignant à une appche termes « approche » et « démarche », à l’avant-plan, comme ceée  l’élève et proche de leur vie appliqués aux projets, sont considérés contextes d’appren- quotidienne. Toutes ces méthodes actives par Perrenoud (2002) comme moins tissage, des situations sont plus que de simples techniques invasifs et définitifs que le terme « pé- concrètes de la vie quotidienne » (Proulx, d’enseignement pour leurs défenseurs car dagogie ». A part pour le terme « dé- 2004). elles impliquent de repenser en profondeur marche », on voit que le lien avec le les fondements et l’organisation de l’école, terme « projet » est plutôt fait avec l « Partisan des comme Dewey l’a voulu à son époque. la préposition « par » plutôt qu’avec méthodes actives, L’approche par projet s’inscrit dans « de », soulignant vraisemblablement Freinet prônait une cette démarche puisqu’elle « favoris[e] le processus nécessaire à toute mise pédagogie qui soit concrète et qui se une approche interdisciplinaire centrée en œuvre d’un projet (processus déjà situe à mi-chemin sur l’intérêt des apprenants et parce sous-entendu dans « démarche »). entre l’approche qu’elle privilégi[e] aussi, comme contexte traditionnelle d’apprentissage, des situations concrètes Certains auteurs préfèrent se concentrer dogmatique et le laxisme qui laisserait de la vie courante. » (Proulx, 2004) sur la définition du terme projet et ajouter, l’apprenant à ses comme Mayer et Alexander (2011), que expériences, sans l’acte d’apprendre est centré sur les plus. […] Pour lui, « L’approche par projet n’est projets, qui conduisent les activités c’est l’enseignant qui organise le contexte pas, dans son essence même, des élèves. Pour Boutinet (2005), d’apprentissage, qui une technique ou une façon cette définition n’est pas suffisante, guide l’apprenant dans puisque la pédagogie par projet est sa démarche d’essais- spécifique d’enseigner. Elle « une mise effective en projet », erreurs et qui renforce est plutôt une façon de pen- les comportements insistant sur l’aspect méthodologique, ser l’enseignement en vue appropriés et au-delà de la visée du projet :  souhaités. » (Proulx, d’un apprentissage que l’on pe pédaggqe ’plqe pa 2004) espère meilleur. […] Elle prend fcée e pédagge pa pe, parti pour l’enseignement de ce qui peut être le cas si les élèves ne l’apprentissage dans l’action, font pas le travail d’appropriation du pour l’apprenant comme chef projet ou s’il leur est imposé. de file de sa formation et pour l’enseignant comme sa vigie. Mettant en avant le lien avec l’investiga- tion et le rôle essentiel de l’enseignant, Il faut le dire, l’approche par Blumenfeld et al. (1991) définissent projet est idéologique avant l’apprentissage par projet comme une d’être une mode ou une for- « comprehensive perspective focused mule pédagogique à propre- on teaching by engaging students in ment parler. » (Proulx, 2004) investigation ». Deux points leur pa- raissent essentiels dans cet apprentis- sage : un pblèe ou une question Ce que l’apprentissage par projet Marx et al. (1997) définissent cinq ca- n’est pas ractéristiques de l’enseignement des sciences par le projet (project-based science), pour rendre compte de la L’apprentissage par projet ne doit pas être complexité de cette innovation : « a dri- confondu avec les autres types d’appren- ving question, investigations and arti- tissage fondés sur l’investigation, apparte- facts, collaboration, and technological nant à la famille de l’inquiry-based lear- tools », apportant en plus la collabora- ning, dont la démarche d’investigation tion et les TIC, souvent utilisés en pra- mise en place dans l’enseignement scien- tique mais pas forcément soulignées ti¿que en France depuis quelques années dans les autres définitions. se revendique, et qui a pour ambition de placer les élèves en position de chercheur. C’est une méthode développée surtout en sciences, puisqu’elle s’inspire de la dé- Pour Perrenoud (2002), une marche scienti¿que, déjà utilisée lors des « démarche de projet : séances de travaux pratiques. La généra- - est une entreprise collec- lisation de ce type de démarche vient aus- tive gérée par le groupe- si du constat que les sciences paraissent classe […] ; dif¿ciles d’accès aux élèves et qu’il faut - s’oriente vers une production les motiver davantage, en les impliquant concrète [au sens large] ; dans des situations plus concrètes et en leur faisant « faire de la science avec les - induit un ensemble de tâches mains » (méthode américaine appelée dans lesquelles tous les élèves hands-on). Le rôle de l’enseignant dans peuvent - s’impliquer et jouer cet apprentissage est un rôle de tuteur un rôle actif, qui peut varier en (et de soutien pour les élèves qui en ont fonction de leurs moyens et besoin) pour accompagner les élèves lors intérêts ; des phases de questionnement, de ré- - suscite l’apprentissage de Àexion critique, de recherche de preuves, savoirs et de savoir-faire de de résolution de problèmes et de commu- gestion de projet (décider, pla- nication (Mayer & Alexander, 2011). nifier, coordonner, etc.) ; Une application française de ce type d’ap- - favorise en même temps des prentissage est le programme « La main apprentissages identifiables à la pâte », qui a rendu plus facile l’ensei- (au moins après-coup) figurant gnement des sciences à l’école primaire au programme d’une ou plu- française, et qui s’étend maintenant au sieurs disciplines ». collège avec le programme assez contro- versé d’« enseignement intégré des sciences et des technologies ». Proulx (2004) prend en compte plu- Le plus célèbre type d’apprentissage par sieurs définitions pour pouvoir dire que investigation, très en vogue actuellement « l’apprentissage par projet est donc à tous les niveaux du système scolaire, coûteux en temps), souvent plus centré sur les objectifs d’apprentissage sont ici cen- la discipline étudiée et s’intéressant davan- trés sur la fabrication d’un objet et non sur tage à l’acquisition qu’à l’application des la résolution d’une problématique en vue de connaissances. Savery (2006), dans la la réalisation d’un produit ¿nal. revue Interdisciplinary Journal of Problem- based Learning qui a été créée en 2006 APPRENDRE ET COOPÉRER (signe d’un engouement récent pour cette À TRAVERS LES PROJETS méthode d’apprentissage), précise que l’ap- prentissage par la résolution de problèmes permet aux élèves de conduire en groupe Dans l’apprentissage par projet, les élèves une recherche pour trouver ensemble une et les étudiants apprennent en étant actifs solution à un problème réel complexe et et en gardant un lien avec le monde réel, que l’enseignant joue un rôle de tuteur ce qui leur permet « de nourrir la commu- qui guide le processus d’apprentissage. nication, la coopération, la créativité et la Contrairement à l’apprentissage par projet, réÀexion en profondeur. L’attention aux pro- qui ne permet pas aux élèves de dé¿nir et cessus d’apprentissage, et pas seulement au d’envisager toutes les solutions des pro- contenu, est béné¿que » (Barron & Darling- blèmes qui se présentent au fur et à mesure Hammond, 2010). Quels sont les objectifs de l’avancée du projet, l’apprentissage par poursuivis par les enseignants dans la mise la résolution de problèmes développe ces en place de cette pédagogie ? Que doit-elle compétences utiles dans le monde profes- apporter aux élèves en termes de connais- sionnel (Savery, 2006). sances et de compétences, de motivation et sur le plan du travail entre pairs ? L’apprentissage par étude de cas (ou case- based learning, considéré comme une Des projets pour construire ses ap- forme particulière d’apprentissage par la prentissages résolution de problèmes pour certains au- teurs) consiste à étudier différents exemples Comme le dit Kilpatrick dès 1918 : « With the de problèmes complexes réels (construits child naturally social and with the skillful tea- ou reconstruits par l’enseignant) pour déve- cher to stimulate and guide his purposing, we lopper des compétences comme l’analyse can especially expect that kind of learning critique, faire le lien entre théorie et pratique, we call character building. » Il y a là en ou encore acquérir des connaissances et germe, outre l’importance du rôle de l’ensei- des compétences en contexte pour les ap- gnant sur lequel nous reviendrons, les élé- pliquer à une autre situation d’investigation ments essentiels du socio-constructivisme : (Savery, 2006 ; Mayer & Alexander, 2011). le caractère éminemment social de l’enfant et la construction de son apprentissage, ici Un dernier type d’apprentissage voisin est de sa personnalité. l’apprentissage par la conception (design- based learning), qui consiste à développer l’apprentissage en concevant et réalisant un produit ¿nal (un robot en cours d’électro- « La démarche d’élaboration nique, un bâtiment en cours d’architecture, de projet ne peut pas être un site Internet lors d’un concours, etc.) linéaire, elle témoigne de tous L’apprenant possède des connaissances et Un autre apport de l’apprentissage par des compétences sur lesquelles il va s’ap- projet à la construction des savoirs ré- puyer pour construire son projet. Dans la side dans la mise en relation et l’utili- réalisation même de ce projet, il construit son sation de différentes formes de savoirs savoir au fur et à mesure, en faisant et répa- (abstraite, visuelle, verbale, etc.), ce rant ses erreurs, étapes nécessaires qui ap- qui est généralement admis comme portent autant de nouvelles connaissances étant une opération complexe pour les que l’apprenant peut réutiliser pour pouvoir élèves. Helle et al. (2006) affirment ¿naliser son projet l (Proulx, 2004 ; Helle que l’apprentissage par projet, en fai- l Perrenoud (1998) pré- et al., 2006 ; Perrenoud, 1998). Le caractère sant appel à des savoirs de différentes cise en citant Vygotski que « le projet n’est concret des réalisations intermédiaires faites disciplines et en mêlant théorie et pra- pas une fin en soi, par les élèves permet d’échanger, de criti- tique, peut aider à visualiser les inte- c’est un détour pour quer, de réÀéchir en vue de leur amélioration, ractions entre des concepts difficiles et confronter les élèves en bref, d’apprendre : « the doing and the faciliter ainsi les changements concep- à des obstacles et provoquer des situa- learning are inextricable » (Blumenfeld et al., tuels et la construction de modèles tions d’apprentissage. 1991). mentaux pour mieux appréhender ces […] pour apprendre, il concepts. faut que chacun soit En France, certains chercheurs se sont mobilisé dans sa zone de proche dévelop- intéressés au processus d’acquisition En ce qui concerne les compétences, pement, zone où, par des connaissances des élèves confron- les compétences clés, ou transver- définition, il peut ap- tés aux nouveaux dispositifs utilisant sales, sont les premières auxquelles prendre, mais n’a pas l’apprentissage par projet. Le numéro 39 on pense à propos de l’apprentissage déjà appris, zone où il hésite, va lentement, de la revue Aster, qui fait un premier bi- par projet, puisqu’il s’agit en géné- revient sur ses pas, lan des dispositifs mis en place au lycée ral de développer celles qui ne sont commet des erreurs, professionnel (les PPCP), au collège (les pas strictement disciplinaires ou qui demande de l’aide. » itinéraires de découverte ou IDD, voir à se rapprochent du monde profession- ce propos Baluteau, 2005) et au lycée nel l . Elles sont aussi désignées dans général et technologique (les travaux la littérature comme les compétences l Dans le programme de l’école québécoise personnels encadrés ou TPE), s’inti- du xxie siècle. par exemple, les com- tule : « Nouveaux dispositifs, nouvelles pétences transversales rencontres avec les connaissances ». A sont regroupées en cette occasion, Larcher et Crindal (2004) Dans la définition des compé- quatre ordres : intel- lectuel (dont exploiter utilisent le terme de « ca de tences habituellement adop- l’information, résoudre caace » pour désigner le pro- tée, « l’élève compétent est des problèmes, exercer cessus « dans lequel chaque élève est celui qui est capable de ré- son jugement critique, engagé pour comparer, trier, organiser, mettre en œuvre sa soudre des tâches complexes pensée créatrice), approfondir des énoncés hétérogènes, et inédites qui demandent le méthodologique (se d’origines non contrôlées ». choix et la combinaison de donner des méthodes de travail efficace, procédures apprises (Carette, exploiter les TIC), 2009). » (Rey, 2012) personnel et social (structurer son identité, Les activités des élèves pen- coopérer) et de l’ordre dant la démarche de projet, L’Union européenne définit de la communication. ici dans l’enseignement tech- en 2006 pour l’éducation et On retrouve à peu Par la confrontation à des situations apprentissage, le « construit social des inédites et complexes, les projets peuvent savoirs en TPE s’effectue en dehors de la développer ces compétences. Encore présence du tuteur grâce à un traitement l « Le savoir agir de la faut-il pour cela que le savoir agir l de socio-cognitif de ces savoirs entre les compétence suppose ces compétences puisse s’exercer, c’est- élèves du groupe et d’autres partenaires la capacité à investir à-dire que les élèves soient accompagnés […] Les entretiens avec le tuteur sont […] dans l’action les savoirs précédemment acquis dans cette démarche. Dans une le lieu et le moyen de cette structuration mais aussi la capacité approche par projet institutionnalisée, des connaissances. » Il y a donc deux pro- à abstraire de ses les élèves peuvent choisir et transférer cessus en jeu ici : la construction des sa- actions des savoirs qui les procédures déjà utilisées dans une voirs, faite entre les élèves à partir de leur pourront être réinvestis dans de nouveaux situation antérieure et apprendre ainsi recherche documentaire pour déterminer contextes. » (Rey, à les mobiliser à bon escient, en tenant la problématique de leur projet (point de 2008) compte du contexte différent de chaque départ de tout TPE), et la structuration des projet (Bordalo & Ginestet, 1993 ; Proulx, savoirs, réalisée dans l’interaction entre le 2004). groupe et le ou les enseignants qui les encadrent. L’apprentissage est basé ici Un apprentissage collaboratif et sur la coopération, qui se situe à plusieurs coopératif niveaux, entre pairs et avec l’enseignant. Les projets sont le plus souvent réalisés LES PROMESSES DE en équipe, mais ce n’est pas pour autant L’APPRENTISSAGE PAR PROJET que les élèves apprennent grâce à cette coopération. Il faut déjà qu’il y ait bien coopération, et non seulement collabora- Le projet comme source de tion. La cpéa réside dans « l’ajus- motivation tement des activités en situation en vue d’une action commune ef¿cace » (Marcel Les projets peuvent servir à augmenter la et al., 2007, dans le cas du travail des motivation des élèves dans un but d’ap- enseignants), alors que la cllaba prentissage. L’aspect concret des projets repose sur une communication et un par- est la source première de motivation des tage de l’espace de travail en vue d’un tra- élèves, mais il ne suf¿t certainement pas. vail concerté (Marcel et al., 2007). La dif- L’enseignant doit également prendre en férence est donc le travail réellement par- compte d’autres facteurs dans la constitu- tagé dans la pratique de la coopération. tion de son projet : bien entendu, l’intérêt que les élèves porteront au projet, puis Pour qu’un apprentissage coopératif au l’étendue de leurs compétences et de sens large soit ef¿cace, Slavin (2010) leurs savoirs et en¿n le fait qu’ils doivent préconise que les apprenants aient plei- rester concentrés sur la seule réalisation nement conscience des b cllecf du projet, et non sur une éventuelle com- pv et de leur propre epab- pétition avec les autres élèves, ce qui lé dvdelle : « la réussite du groupe pourrait les dévier de leur objectif premier dépend des apprentissages individuels d’apprentissage (Blumenfeld et al., 1991). de chacun de ses membres ». Il ajoute Lors de la réalisation du projet, l’ensei- que l’apprentissage coopératif augmente gnant doit également pouvoir soutenir les source de motivation, qui est d’autant plus veloppe pour soi, spontanément, parce que forte si l’élève choisit lui-même son projet. cela a du sens. Se reconnaître en projet est En effet, les savoirs scolaires ainsi contex- une façon de formuler un état intérieur de tualisés gagnent en légitimité pour les tension stratégique vers un état désirable. élèves, trouvent un sens que les élèves Il est dif¿cile de construire ce sens tout ont souvent du mal à donner à l’école en seul, sans participer à une “culture du pro- général. D’après Helle et al. (2006), la jet” qui légitime cette forme de rapport au théorie cognitiviste précise que, lorsque monde. » Si les élèves de certains milieux nous apprenons, nous retenons implici- ne baignent pas dans cette culture, alors tement le contexte d’apprentissage : cer- l’école doit leur fournir les moyens de créer tains éléments de notre environnement petit à petit leur projet individuel en les so- peuvent alors servir de déclencheurs pour cialisant dans des projets collectifs. nous permettre de retrouver nos connais- sances. L’intérêt des élèves réside également dans leur appropriation du projet : ils ont Dans le cas du projet technique, les le pouvoir de choisir par exemple la forme élèves adoptent des rôles différents lors de la présentation ¿nale, de faire évoluer du déroulement du projet, passant de leur projet dans une certaine mesure, de concepteur à gestionnaire, en passant déterminer les étapes de travail, etc. Cette par vendeur ou réparateur. Ces différents liberté n’est pas si fréquente en classe et points de vue leur permettent de « dépas- l’enseignant doit veiller à un juste équilibre ser l’opposition arti¿cielle entre l’école et entre les choix des élèves et les objectifs la vie » (Bordalo & Ginestet, 1993). pédagogiques ¿xés en amont du projet (Blumenfeld et al., 1991). Le produit ¿nal, se construisant au fur et à mesure de l’avancée du projet, permet Ce contrôle que les élèves possèdent sur à l’élève de matérialiser en quelque sorte le projet peut les aider à apprendre davan- sa motivation et de pouvoir faire une « ré- tage sur leur manière d’aborder les savoirs troaction régulière et progressive des ef- et les problèmes. En effet le temps consa- forts qu’il consacre à son projet » (Proulx, cré à la réalisation du projet est utile aux 2004). Dit autrement, « The concrete arte- élèves pour construire leurs propres repré- fact can serve as a boundary object […] sentations de l’apprentissage, connaître facilitating continuous task-oriented inte- leurs meilleures façons d’apprendre et de- raction among students and teachers or venir responsables de leur apprentissage among peers. » (Helle et al., 2006) (Bell, 2010). Intérêt des élèves pour le projet Des compétences et connaissances nécessaires avant de se lancer L’intérêt des élèves, outre bien sûr le thème du projet en lui-même, peut être de Les élèves peuvent être découragés et plusieurs ordres. Tout d’abord, ils peuvent frustrés si leurs connaissances et compé- à travers le projet de classe créer, conso- tences ne sont pas à la hauteur du projet et lider et réÀéchir à leur propre projet per- ne leur permettent pas de sélectionner cor- sonnel ou professionnel, qui se fait sur le rectement l’information utile à la réalisation

Description:
lot d'espérances pour la motivation des élèves et réserve (« wholehearted purposeful activity »). sales, sont les premières auxquelles .. performance d'apprentissage peut être de . ration du TPE », ainsi que la « réponse.
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