De l’école enfantine à la première année primaire : la construction des rapports à l’école, au métier d’élève et au savoir conçue comme la naissance d’une posture d’être apprenant héritée ou jouée à l’école Thèse présentée à la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Institut de Psychologie et Education Université de Neuchâtel Pour l’obtention du grade de docteur en sciences humaines Par Suzanne Möri Babando Acceptée sur proposition du jury : Prof. Pierre Marc, directeur de thèse Prof. Jacques Durand, rapporteur Prof. Jean-Luc Gurtner, rapporteur Soutenue le 30 mai 2008 Université de Neuchâtel 2008 Mots clés en français : désir de savoir, fantasme, compulsion de répétition, reproduction sociale, actepouvoir, rapport au savoir, rapport au métier d'élève, rapport à l'école, posture d'être apprenant héritée, posture d'être apprenant jouée, figures d'élève, jeu de la bobine, expérience de séparation, énigme, école enfantine, école primaire, étude longitudinale. Mots clés en anglais : desire of knowing, fantasy, compulsion of repetition, social reproduction, actingpower, relationship to knowing, relationship to schooltrade, relationship to school, posture of learning inherited, posture of learning played, figures of pupil, bobbins playing, experience of separation, enigma, nursery school, primary school, longitudinal study. Résumé : Cette recherche s'intéresse à l'histoire d'une cohorte de jeunes élèves avec l'école, le métier d'élève et le savoir dans une double perspective psychanalytique et sociologique et elle s'inscrit dans la théorie du sujet de Mendel. Elle conçoit l'entrée à l'école comme une confrontation aux expériences de séparation et/ou aux expériences énigmatiques à l'origine de la curiosité sexuelle infantile vécues dans la petite enfance. Cette reviviscence est source d'angoisse contre laquelle l'élève lutte au moyen des archisavoirs qu'il a acquis antérieurement, largement déterminés par la vie fantasmatique, la socialisation identificatoire et l'appropriation d'habitus autour de la Culture. Elle pense que les premiers pas à l'école enfantine puis à l'école primaire peuvent être à l'origine d'un jeu semblable au jeu de la bobine du petit fils de Freud. Tout jeu a deux niveaux de lecture : le niveau fantasmatique d'un sujet qui projette sur le réel la maison familiale sous la poussée des forces pulsionnelles et le niveau intermédiaire d'un acteur susceptible de construire un actepouvoir, une perception du réel tel qu'il est et de soi en tant qu'auteur créateur de savoirs sous la poussée du vouloir de création. A la suite de l'exploration des travaux des équipes de Beillerot et de Charlot sur le rapport au savoir, il est possible de synthétiser leurs différents apports par la formalisation de deux postures d'être apprenant : l'une héritée en lien à une figure d'apprenti sage, d'héritier en conformité à ses appartenances et d'un exécutant; l'autre jouée en lien à une figure d'apprenti sage et d'apprends tissage, d'héritier en conformité à ses appartenances et d'héritier "déviant" et d'un autodidacte. Cette recherche recueille des informations auprès des élèves, de leurs parents et de leurs enseignants sur deux ans en utilisant des entretiens semi-structurés et des questionnaires. Elle montre que les élèves entrent à l'école et qu'ils objectivent des savoirs sur leur métier et sur l'apprendre en s'appuyant sur une posture d'être apprenant héritée. Or certains héritiers au sens de Bourdieu n'objectivent jamais de savoirs clairvoyants précocement ou avec retard. Le rapport à l'école des parents de nombreux élèves en légères difficultés renforce la perception de l'école comme une grande famille, une relation de dépendance à l'autorité et l'affectivité du rapport au savoir sous la domination de la peur d'être abandonné et la peur de faire mal, le désir d'être puissant et le désir de faire plaisir aux parents et à l'enseignante. Il existe une minorité d'élèves qui vivent rapidement une continuité d'être entre l'école et la maison et qui objectivent des savoirs sur le métier d'élève et l'apprendre en avance. Par exemple, dès l'entrée à l'école primaire ils savent le métier de faire et le métier de savoir de l'élève, ils se sentent légèrement inquiets en raison de l'incertitude de l'issue de l'acte de travail. Ils tendent ainsi à construire une posture d'être apprenant jouée en bénéficiant d'un appui parental confiant et d'un surmoi ni trop rigide ni trop sévère qui leur permet d'oser savoir et de se transformer dans un rapport d'être le savoir. Remerciements Mon questionnement singulier n’a abouti à une production intellectuelle concrète que grâce à la collaboration de plusieurs personnes que j’aimerais remercier. Un travail de thèse commence certes par une question, mais aussi par le choix, dit-on, d’un mentor, le mien est le professeur Pierre Marc que je remercie pour sa confiance et son regard bienveillant. Il s’engage et se poursuit, pendant sept ans, à condition du soutien affectif fiable et solide de ses proches, mon mari, Sylvain, et mes fils, Cyril et Benoît. Merci Sylvain pour le relais des tâches éducatives et domestiques. Merci Cyril et Benoît de grandir comme vous le faites en présence, en famille, d’un objet "thèse" qui est resté très longtemps un objet bizarre. Ensuite, un travail de recherche nécessite la récolte de données grâce à la participation d’une cohorte de personnes. Merci aux parents pour la confiance et la fidélité de leur engagement et merci à leurs enfants, jeunes élèves qui ont partagé avec moi un bout de leur histoire naissante avec l’école et le savoir commun pendant deux ans. Comme le possible diffère de la toute-puissance, j’ai eu besoin au moment de l’analyse des données de la coopération généreuse de personnes porteuses de savoirs statistiques : merci au Dr. Alina Matei et à Monsieur Luc Pochon pour l’intérêt qu’ils ont accordé à ma recherche et pour leurs précieuses analyses. Au moment de la mise en forme finale, j’ai eu la chance de pouvoir compter sur l’enthousiasme et l'efficacité de Madame Brigitte Tombez à réaliser le travail de bureautique. Que font des enfants de trois ou quatre ans, sans passé d’élèves, lorsqu’on les invite à jouer l’école ? L’un prend le pouvoir, met les autres en rang, les gronde immédiatement parce qu’ils ne travaillent pas assez et les punit d’une mauvaise note. Perrenoud, 1994, p. 16 Le désir de savoir peut être considéré comme un donné, mais que l’objet du désir devienne le savoir ne va pas de soi. Le désir de savoir doit élire le savoir, du savoir, tel ou tel savoir, ou bien élit d’autres objets comme substituts de savoir. Beillerot, 1996a, p. 71. Le rapport de l’élève au savoir induit que quelque chose de lâche, de non prémédité, de flottant existe entre l’élève et le savoir. Develay, 1996, p. 44
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