UNIVERSITE DE BOURGOGNE UFR Sciences humaines, Ecole doctorale LISIT, Centre Georges Chevrier THÈSE Pour obtenir le grade de Docteur de l’Université de Bourgogne Discipline : Histoire de l’Art par Juliette BERTRON le 28 novembre 2014 De la parodie dans l'art des années 1960 à nos jours Vol. 1/4 Directeur de thèse Monsieur Bertrand TILLIER, Professeur d’histoire de l’art contemporain à l'Université de Bourgogne Jury : Monsieur Itzhak GOLDBERG, Professeur d’histoire de l’art contemporain à l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne Monsieur Martial GUÉDRON, Professeur d’histoire de l’art moderne à l'Université de Strasbourg Monsieur Emmanuel PERNOUD, Professeur d’histoire de l’art contemporain à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne 2 Remerciements Je remercie Bertrand Tillier pour sa disponibilité, pour son soutien et pour l'intelligence avec laquelle il m'a guidée durant ce long travail de recherche. Il a su me laisser une entière liberté tout en étant toujours très présent, généreux et attentif. Je lui en suis plus que reconnaissante. Je remercie les membres du jury, Itzhak Goldberg, professeur à l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne, Martial Guédron, professeur à l'Université de Strasbourg, et Emmanuel Pernoud, professeur à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne, pour avoir accepté de lire, d'examiner et d'éclairer mon travail. Je remercie Catherine Wermester pour son amitié, pour ses encouragements, pour sa confiance et pour m'avoir invitée à la recherche. Je remercie Dimitri Salmon pour son enthousiasme partagé sur la parodie et pour m'avoir ouvert sa riche archive personnelle sur le thème « Anciens et Modernes ». Je remercie Martial Raysse, que j'ai la chance de connaître. Je remercie tous mes amis et en particulier Natacha et Pauline, avec qui j'ai découvert l'histoire de l'art et qui, depuis lors, suivent ma vie de près ; Alice, Mathilde et Maxime pour leur soutien amical et « doctoral ». Je remercie ma grand-mère et ma tante Catherine. Je remercie mes deux sœurs, mes indispensables. Je remercie mes parents. Tout ce que je leur dois ne saurait en aucun cas tenir en quelques lignes. Je remercie Antoine, pour tout. 3 Note Liminaire Ce travail comporte quatre volumes. Les deux premiers volumes sont réservés à notre texte. Le troisième est notre catalogue et contient notre corpus, c'est-à-dire les œuvres parodiques réalisées à partir des années 1960. Le quatrième volume reproduit les figures complémentaires et les références. Les figures complémentaires sont les parodies réalisées avant les années 1960 mentionnées et analysées dans notre travail. Les références sont les œuvres sources des parodies figurant au catalogue. Dans notre texte, l'indication « [cat.] », accompagnée d'un numéro, renvoie à une œuvre du catalogue. L'indication « [fig.] » renvoie quant à elle aux figures complémentaires du quatriième volume. Lorsque les traductions sont de notre fait, le texte original est reproduit en note de bas de page. 4 TABLE DES MATIÈRES Introduction.................................................................................................8 PARTIE 1. .................................................................................................23 La parodie, un état des lieux....................................................................23 Chapitre 1. ..................................................................................................25 Vers une définition...................................................................................... 25 1.1 Une notion dévaluée et confuse................................................................................25 1.2 Histoire et poétique de la parodie en littérature........................................................42 1.3 La définition à l'épreuve des œuvres.........................................................................57 Chapitre 2....................................................................................................78 La parodie avant les années 1960................................................................78 2.1 La parodie dans la seconde moitié du XIXe siècle...................................................78 2.2 Parodie et avant-gardes...........................................................................................103 Chapitre 3. ................................................................................................ 136 La parodie depuis les années 1960............................................................136 3.1 La reproductibilité de l'œuvre d'art.........................................................................136 3.2 L'héritage de l'avant-garde......................................................................................156 PARTIE 2. ............................................................................................... 178 La parodie dans tous ses états................................................................178 Chapitre 4.................................................................................................. 182 Le jeu.........................................................................................................182 4.1 La place du spectateur.............................................................................................182 4.2 Un jeu d'enfants sans conséquence ?......................................................................195 Chapitre 5...................................................................................................211 Le comique................................................................................................211 5.1 Discordance(s)........................................................................................................211 5.2 Destitution...............................................................................................................231 Chapitre 6. ................................................................................................ 255 Le satirique................................................................................................255 6.1 Une peinture d'histoire parodique ..........................................................................256 6.2 Les représentations en question..............................................................................274 5 PARTIE 3. ............................................................................................... 298 Une pratique réflexive.............................................................................298 Chapitre 7. ................................................................................................ 300 L'institution art aux mains des parodistes..................................................300 7.1 Les institutions en cause.........................................................................................301 7.2 Autour de l'art......................................................................................................... 320 Chapitre 8. ................................................................................................ 330 La réflexivité à l'œuvre..............................................................................330 8.1 Dénudation..............................................................................................................330 8.2 De l'art comme artifice............................................................................................349 Chapitre 9. ................................................................................................ 368 La figure de l'artiste...................................................................................368 9.1 Un mythe à rude épreuve........................................................................................368 9.2 De l'autre à soi........................................................................................................ 386 Conclusion................................................................................................405 Bibliographie............................................................................................418 Index......................................................................................................... 451 6 7 Introduction 8 9 En 1964, Martial Raysse réalise Made in Japan – La Grande odalisque [cat. 202], aujourd'hui conservée au Centre Georges Pompidou à Paris. S'emparant de la célèbre toile peinte par Ingres cent-cinquante ans auparavant, il la reproduit par sérigraphie, la découpe, la restructure, la bombarde de couleurs fluorescentes, colle de petits objets à sa surface, la transfigure autant qu'il la dénature tout en la gardant identifiable. Jeune représentant de l'avant-garde française et internationale, Raysse proclame, non sans une certaine provocation, vouloir « un monde neuf, aseptisé, pur, et au niveau des techniques utilisées, de plain-pied avec les découvertes technologiques du monde moderne »1, et ambitionne de se libérer de « l'encombrant héritage culturel »2. Citer le maître de Montauban apparaît paradoxalement comme le moyen le plus sûr et efficace d'affirmer cette modernité absolue et ce détachement de l'histoire. En dépit de ce geste iconoclaste, pied de nez au passé pour mieux être en phase avec son temps, se lit un amour pour l'histoire de l'art, un désir de parcourir et de redécouvrir l'œuvre élue comme source, de la faire sienne. Transformant une œuvre singulière à la grandeur reconnue par tous et faisant preuve d'une forme d'irrévérence humoristique non dénuée d'admiration, la démarche de Martial Raysse emprunte ses traits essentiels à la parodie. Pourtant, ni l'artiste, ni aucun des critiques confrontés à ses œuvres n'utilisent alors ce terme. En 1992, dans le catalogue de l'exposition monographique consacrée à Raysse au musée du Jeu de Paume à Paris, Didier Semin, commentant la série des Made in Japan (1963-1965), parle avec prudence de « pastiches historiques »3, avant de préciser, en note, « encore que ce mot convienne mal »4. Cet exemple révèle d'emblée la difficulté à laquelle sont confrontés les historiens et critiques face à ce type de pratique, aux procédés pourtant si familiers. À la confusion et au flottement terminologique entre une multitude de termes – copie, citation, détournement, appropriation, pastiche, parodie... – s'ajoute une forme de méfiance. C'est que la parodie souffre bien souvent au mieux d'amalgames, au pire d'une dévalorisation la catégorisant comme sous-genre, ou plutôt comme mauvais genre. Produit de « seconde main »5, elle se voit dans bien des cas refuser toute 1 Martial Raysse, cité par Otto Hahn, « Martial Raysse ou la beauté comme invention et délire », Art International, Lugano, vol X/6, 1966, p. 79. 2 Martial Raysse, propos recueillis par Lydie Brown, « Martial Raysse, première partie : ''l'esthétique'' », Zoom, le magazine de l'image, Paris, Société Publicness, n° 8, août 1971, p. 67. 3 Didier Semin, « Martial Raysse, alias Hermès : la voie des images », in Martial Raysse, Rétrospective, Galerie nationale du Jeu de Paume, [exposition Galerie nationale du Jeu de Paume, Paris, 26 nov. 1992-31 janv. 1993 ; Carré d'art, musée d'art contemporain, Nîmes, 23 sept.-5 déc. 1993], Paris, Ed. Réunion des Musées Nationaux, 1992, p. 14. 4 Ibidem. 5 Nous empruntons ici sa formule à Antoine Compagnon, La seconde main ou le travail de citation, 10
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