bien la comprendre pour mieux la combattre Christophe Robert Anne-Claire Vaucher Manuel Domergue Remerciements Un grand merci à Noria Derdek, Patrick Doutreligne, Frédérique Kaba, Bertrand Lapostolet, Sylvie Leroux, Marie Rothhahn et Marc Uhry pour leur collaboration à cet ouvrage, pour leurs relectures et leurs conseils. Nous remercions aussi très chaleureusement René Ballain, Jean-Claude Driant et Didier Vanoni qui accompagnent la Fondation Abbé Pierre depuis de nombreuses années dans la construction de ses analyses sur la crise du logement. Merci enfin à tous les administrateurs, salariés et bénévoles qui au quotidien mènent ce combat contre le mal-logement, à Paris et dans les régions où la Fondation Abbé Pierre est présente. Christophe Robert est délégué général adjoint de la Fondation Abbé Pierre au sein de laquelle il a notamment en charge, depuis 2007, la coordination du rapport annuel sur l’état du mal-logement en France. Docteur en sociologie, il a auparavant exercé pendant dix ans une activité de chercheur dans un bureau d’études à Paris dans les domaines de l’habitat, de la politique de la ville ainsi que sur les thèmes de l’exclusion et du développement culturel. Anne-Claire Vaucher est chargée d’études à la Fondation Abbé Pierre. Elle participe à la rédaction de son Rapport annuel sur l’état du mal-logement en France depuis 2008. Manuel Domergue est directeur des études à la Fondation Abbé Pierre, dont il coordonne le Rapport annuel sur l’état du mal-logement. Il a été journaliste au magazine Alternatives économiques. Des mêmes auteurs – Christophe Robert, avec Didier Vanoni : Logement et cohésion sociale. Le mal-logement au cœur des inégalités (La Découverte, 2007). – Christophe Robert : Éternels Étrangers de l’intérieur, les gens du voyage en France (Desclée de Brouwer, 2007). – Christophe Robert, avec Alain Régnier : Pour un choc de solidarité en faveur des sans-abri et des mal- logés, rapport consacré à la politique d’hébergement et d’accès au logement à la demande du Premier ministre, 2012. – Anne-Claire Vaucher, avec Christophe Robert : « Le mal-logement, un phénomène massif » (in Constructif, n° 32, 2012) et « Le mal-logement en France : mieux connaître pour mieux agir » (in Informations sociales, n° 184, CNAF, 2014). – Manuel Domergue, avec le collectif Jeudi noir : Le Petit Livre noir du logement (La Découverte, 2009). – Manuel Domergue, avec Thomas Deltombe et Jacob Tatsitsa : Kamerun ! Une guerre cachée aux origines de la Françafrique (La Découverte, 2011). Issues de la tradition ou de l’air du temps, mêlant souvent vrai et faux, les idées reçues sont dans toutes les têtes. Les auteurs les prennent pour point de départ et apportent ici un éclairage distancié et approfondi sur ce que l’on sait ou croit savoir. sommaire Introduction ... LES DIFFÉRENTES FACETTES DE LA CRISE DU LOGEMENT « Depuis l’hiver 54, rien n’a changé. » ... « Avec toutes ces personnes à la rue, le problème du logement saute aux yeux. » ... « Le logement, c’est surtout un problème pour les pauvres. » ... « Quand on est propriétaire, on est à l’abri des problèmes de logement. » ... « Le problème des banlieues, c’est les barres HLM. » ... « Le logement, c’est surtout un problème dans les grandes villes chères. » ... « Le logement c’est la même galère dans tous les pays d’Europe. » ... LES CAUSES DE LA CRISE DU LOGEMENT « Il n’y a pas assez de logements. » ... « Les logements sont trop chers. » ... « Il n’y a pas assez de logements sociaux. » ... « Il y a trop de riches dans les HLM. » ... « Les politiques ne font rien pour que ça s’améliore. » ... RÉSOUDRE LA CRISE DU LOGEMENT : VRAIS LEVIERS, FAUSSES BONNES IDÉES « Il suffit de construire… » ... « Il faudrait réquisitionner les logements vacants. » ... « Si on encadre les loyers, les propriétaires ne vont plus louer et la crise va s’aggraver. » ... « Les locataires sont trop protégés. » ... « Factures d’électricité, de gaz trop chères… la solution c’est de rénover tous les bâtiments. » ... « Il faut plus de places d’hébergement pour régler le problème des personnes à la rue. » ... UN LOGEMENT DIGNE POUR CHACUN, UN CHOIX POLITIQUE ! « Si tout le monde avait un toit sur la tête, ce serait déjà bien. » ... « La situation ne s’arrange pas, à quoi servent les associations ? » ... « On ne peut rien faire si les maires ne veulent pas construire. » ... « La politique du logement coûte trop cher à la collectivité. » ... Conclusion ... ANNEXES Pour aller plus loin ... La Fondation Abbé Pierre ... introduction 60 ans et pourtant… 1954… 2014 : depuis soixante ans, le nom de l’abbé Pierre est associé au combat contre le mal-logement. Un combat sans relâche pour tenter de redonner leur dignité et leur place dans la société à ceux qui en sont exclus. Mais comment se fait-il qu’aujourd’hui encore, dans un pays qui affiche fièrement son cinquième rang parmi les pays les plus riches, tant de femmes, d’hommes et parfois même d’enfants vivent encore – ou plutôt survivent – sans logement ? Est-ce parce que rien n’a été fait depuis soixante ans ? Difficile de dire cela au vu des nombreuses lois, des multiples dispositifs déployés ou des plans de construction et de relance successivement mis en œuvre au fil des années et des décennies. Est-ce parce qu’insuffisamment de personnes se préoccupent de la question du logement ou de ceux qui en sont exclus ? Là encore, à regarder de plus près, la multiplicité des acteurs impliqués, qu’ils soient élus, experts, militants, travailleurs sociaux, associations, issus des administrations ou du secteur immobilier, une telle affirmation serait sans doute abusive. La liste des interrogations visant à mieux comprendre les racines de la persistance du mal- logement en France est longue et vient ponctuer les différents chapitres de ce livre consacré aux idées reçues sur le mal-logement. Mais pourquoi avoir choisi de traiter le sujet sous l’angle des idées reçues ? Parce que depuis vingt ans que la Fondation Abbé Pierre mène ce combat contre le mal-logement, elle a pu mesurer à quel point le chemin à parcourir est long et sinueux entre la réalité de ce que vivent les mal-logés et l’idée que la société s’en fait. Chaque année, au travers de son rapport sur l’état du mal-logement en France, la Fondation donne à voir statistiquement mais aussi humainement, les différentes formes de mal-logement et les dégâts sanitaires et sociaux que ce dernier provoque sur les plus vulnérables d’entre nous. Chaque année, ce rapport fait également le point sur l’action de la puissance publique pour répondre (ou non) à ces difficultés, tout en formulant un ensemble de propositions pour tenter d’en sortir. Chaque année, à travers les actions qu’elle développe ou qu’elle finance aux côtés des associations, la Fondation mesure également l’incompréhension qui domine entre ceux qui sont insérés dans la société et ceux qui en sont exclus, entre ceux qui, pour de multiples raisons ont basculé dans la précarité ou le mal-logement, et ceux qui en sont épargnés. Il en va de même pour un certain nombre de responsables politiques qui manifestement ont décroché de la réalité vécue par une partie de nos concitoyens les plus fragiles, et surtout qui ont perdu de vue les processus produisant de telles catastrophes sociales et peuvent difficilement, de ce fait, prendre le bon chemin pour tenter de les résoudre. La persistance d’idées reçues parmi la population ou les responsables politiques a des conséquences très concrètes. Par exemple, croire que le mal- logement ne toucherait qu’une frange marginale de la population empêche de mettre en place des politiques généralistes de régulation des marchés immobiliers. Supposer que les locataires sont déjà bien trop protégés freine des tentatives pour encadrer les loyers ou mieux prévenir les expulsions locatives. Penser qu’il suffirait de construire tous azimuts dissuade de financer des logements aidés réellement accessibles aux plus modestes. À l’inverse, estimer que la France n’a pas besoin de construire davantage et qu’il suffirait de mieux utiliser les logements vacants pourrait contribuer à aggraver la pénurie de logements. Pour sortir du mal-logement, la France a besoin de moyens financiers accrus, d’une meilleure application des lois, d’une gouvernance rénovée… Mais elle a aussi besoin d’y voir plus clair sur la réalité de ce que vivent réellement les personnes mal-logées et d’abandonner un certain nombre de fantasmes et clichés qui faussent le débat. C’est pour toutes ces raisons que la Fondation Abbé Pierre a souhaité apporter sa contribution à la réflexion sous une forme différente : en donnant à voir les débats, les incompréhensions, les raccourcis mais aussi les controverses, les oppositions idéologiques ou de principe qui tournent autour de la question du mal-logement et des réponses à y apporter. Partir des idées reçues pour tenter de décrypter ce qui est en jeu, ce qui se cache derrière ces représentations, et en quoi elles empêchent parfois d’apporter la bonne réponse. Partir des idées reçues pour tenter aussi de sensibiliser et toucher un public plus large que les seuls experts de la question. Parce qu’une chose est certaine : tant que cette question du logement, certes complexe, restera cantonnée à un cercle de « spécialistes », il sera difficile d’entrevoir le bout du tunnel. Car derrière des sigles compliqués, derrière des dispositifs ou des lois difficiles à décrypter, derrière des arbitrages financiers noyés au milieu de multiples autres priorités, il y a souvent des questions de bon sens qui se posent. Il y a des choix politiques et éthiques à faire qui renvoient finalement à des alternatives qui nous concernent tous et doivent nous interpeller : entre résignation ou détermination, aveuglement ou écoute, rejet ou respect, inégalité ou solidarité, logement ou mal-logement… Ce travail sur les idées reçues qui gravitent autour de la question du logement et du mal-logement, cherche à rendre visible la diversité des points de vue tout en exposant celui de la Fondation Abbé Pierre sur la situation de notre pays. Tout le monde ne partagera sans doute pas l’ensemble des analyses produites par la Fondation Abbé Pierre dans cet écrit. Mais lisons-le ensemble, débattons-en, partageons les idées et les alternatives, parce que le pire serait de ne rien dire, de ne rien faire ou de ne pas vouloir voir. Raymond Étienne, président de la Fondation Abbé Pierre
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